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25/07/2019 | FRANCE | N°17LY01515

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 25 juillet 2019, 17LY01515


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association des paralysés de France a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler :

- la décision par laquelle l'inspecteur du travail a implicitement le 18 février 2014, puis explicitement le 28 février 2014, refusé d'autoriser le licenciement de Mme B... D... ;

- la décision du 8 septembre 2014 par laquelle le ministre chargé du travail a annulé les décisions de l'inspecteur du travail et refusé d'autoriser le licenciement de Mme D....

Par un jugement n° 1406701 du 6

février 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association des paralysés de France a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler :

- la décision par laquelle l'inspecteur du travail a implicitement le 18 février 2014, puis explicitement le 28 février 2014, refusé d'autoriser le licenciement de Mme B... D... ;

- la décision du 8 septembre 2014 par laquelle le ministre chargé du travail a annulé les décisions de l'inspecteur du travail et refusé d'autoriser le licenciement de Mme D....

Par un jugement n° 1406701 du 6 février 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 avril et 28 juillet 2017, l'association des paralysés de France, représentée par Me Stagnara, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 6 février 2017 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées de l'inspecteur du travail des 18 et 28 février 2014 ainsi que celle du ministre chargé du travail du 8 septembre 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- si la cour annule la décision du ministre, elle devra également annuler celles de l'inspecteur du travail pour non respect du principe du contradictoire, pour erreur d'appréciation concernant la gravité de ces fautes et pour absence de lien avec les mandats de l'intéressée ;

- la décision du ministre n'a pas été signée par une autorité compétente ;

- la demande de licenciement reposait sur l'impossibilité de poursuivre le contrat qui était bien précisée.

Par un mémoire enregistré le 13 juin 2017, Mme B... D..., représentée par la SCP d'avocats Janot et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'association des paralysés de France en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions tendant à l'annulation des décisions de l'inspecteur du travail ne sont pas recevables ;

- la cour devra confirmer le jugement concernant les conclusions dirigées contre la décision du ministre.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Laval, rapporteur public ;

- les observations de Me Chomel, avocat de l'association des paralysés de France, ainsi que celles de Me Janot, avocat de MmeD... ;

Considérant ce qui suit :

1. L'association des paralysés de France prend en charge le handicap et gère des services ou établissements médico-éducatifs ainsi que des structures de travail adapté dont l'Institut d'éducation motrice (IEM) d'Eybens, qui pour activité l'accueil ou l'accompagnement sans hébergement d'enfants handicapés. L'association a saisi l'inspecteur du travail, le 17 juillet 2013, d'une demande d'autorisation de licenciement, pour motif disciplinaire, de Mme D..., salariée de l'association depuis 1992, employée en qualité d'aide médico-psychologique et exerçant alors les mandats de déléguée syndicale, représentante syndicale au comité d'établissement et conseillère prud'homale. Par une décision implicite née le 19 septembre 2013, l'inspecteur du travail a rejeté sa demande et a confirmé expressément ce refus le 27 septembre 2013. L'association a formé un recours hiérarchique contre ces décisions et par décision du 27 mars 2014, le ministre chargé du travail a annulé ces décisions et refusé l'autorisation de licencier Mme D.... Par une nouvelle décision du 11 avril 2014, le ministre a retiré sa décision du 27 mars 2014 et refusé l'autorisation de licencier l'intéressée. Parallèlement, le 16 décembre 2013, l'association requérante a sollicité de nouveau l'autorisation de licencier Mme D.... Une décision implicite de rejet née le 18 février 2014 a été confirmée par une décision expresse du 28 février 2014 de l'inspecteur du travail. Saisi par l'employeur d'un recours hiérarchique, le ministre chargé du travail a, par décision du 8 septembre 2014, annulé les décisions prises par l'inspecteur du travail et refusé d'autoriser le licenciement de Mme D....

2. L'association des paralysés de France relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle l'inspecteur du travail a implicitement le 18 février 2014, puis explicitement le 28 février 2014, refusé d'autoriser le licenciement de Mme D... et de la décision du 8 septembre 2014 par laquelle le ministre chargé du travail a annulé les décisions de l'inspecteur du travail et refusé d'autoriser son licenciement.

3. En premier lieu, l'association des paralysés de France ne conteste pas l'irrecevabilité prononcée par les premiers juges de ses conclusions dirigées contre les décisions de l'inspecteur du travail.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 7 de la décision du directeur général du travail du 24 mars 2014, publiée au Journal officiel de la République française du 28 mars 2014 : " Délégation est donnée à M. C... A..., directeur adjoint du travail, chef du bureau des recours, du soutien et de l'expertise juridique, à l'effet de signer, dans la limite des attributions du bureau des recours, du soutien et de l'expertise juridique et au nom du ministre chargé du travail, tous actes, décisions ou conventions, à l'exclusion des décrets. " Dès lors, M. A... était compétent pour signer, au nom du ministre, la décision contestée.

5. En dernier lieu, en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle.

6. Aux termes de l'article R. 2421-10 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " La demande d'autorisation de licenciement d'un délégué du personnel, d'un membre du comité d'entreprise ou d'un membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est adressée à l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement qui l'emploie. (...) / La demande énonce les motifs du licenciement envisagé. Elle est transmise par lettre recommandée avec avis de réception. "

7. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'employeur de déterminer, dans sa demande d'autorisation de licenciement, la nature du licenciement envisagé en indiquant si ce licenciement est justifié par un motif économique, par un motif disciplinaire, par l'inaptitude physique du salarié ou par l'impossibilité de maintenir le contrat de travail. L'autorité administrative, saisie de la demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé, est tenue par la qualification du licenciement ainsi donnée par l'employeur dans sa demande et ne peut légalement se fonder, pour autoriser ou refuser ce licenciement, sur un motif différent de celui énoncé dans cette demande.

8. Pour solliciter l'autorisation de licencier Mme D..., l'association des paralysés de France a, dans sa demande du 16 décembre 2013, reproché à l'intéressée d'avoir dépasser le crédit d'heures de délégation qui lui était alloué en sa qualité de déléguée syndicale, sans justifier de circonstances exceptionnelles, d'avoir utilisé ses crédits d'heures syndicales pour couvrir des absences au travail sans lien avec l'exercice de ses mandats et de ne pas s'être présentée à son travail sur le temps non couvert par des heures de délégation syndicale. Eu égard à la teneur de ces griefs, la demande de l'association requérante devait être regardée comme présentée sur le terrain disciplinaire, alors même qu'elle mentionnait la décision du Conseil d'État du 4 juillet 2005, n° 272193, relative à une demande d'autorisation de licenciement fondée sur le constat de l'impossibilité du maintien d'un salarié dans l'entreprise. Par suite, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que le ministre s'est mépris sur la portée de sa demande d'autorisation de licencier Mme D....

9. Il résulte de ce qui précède que l'association des paralysés de France n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, verse une somme à l'association des paralysés de France au titre des frais liés au litige. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'association des paralysés de France le paiement à Mme D... d'une somme de 1 500 euros à ce titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association des paralysés de France est rejetée.

Article 2 : L'association des paralysés de France versera à Mme D... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association des paralysés de France, à Mme B... D... et à la ministre du travail.

Délibéré après l'audience du 4 juillet 2019 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Dèche, premier conseiller,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 juillet 2019.

2

N° 17LY01515


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17LY01515
Date de la décision : 25/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : EQUIPAGE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-07-25;17ly01515 ?
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