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11/07/2019 | FRANCE | N°18LY04700

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 11 juillet 2019, 18LY04700


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B...épouse A...et M. D...A...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 27 avril 2018 par lesquels le préfet de la Drôme a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être éloignés d'office.

Par un jugement n° 1806173-1806174 du 18 décembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les arrêtés du 27 avri

l 2018, a enjoint au préfet de la Drôme de délivrer un titre de séjour aux époux A...et a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B...épouse A...et M. D...A...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 27 avril 2018 par lesquels le préfet de la Drôme a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être éloignés d'office.

Par un jugement n° 1806173-1806174 du 18 décembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les arrêtés du 27 avril 2018, a enjoint au préfet de la Drôme de délivrer un titre de séjour aux époux A...et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre des frais d'instance.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 décembre 2018, le préfet de la Drôme demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 18 décembre 2018 et de rejeter la demande des époux A...formée devant ce tribunal.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal a retenu que les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues et que les autres moyens des demandes n'étaient pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 juin 2019, Mme E...B...épouseA..., représentée par la SelarlC..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre des frais d'instance.

Elle soutient que la requête du préfet n'est pas fondée dès lors que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 juin 2019, M. D... A..., représenté par la SelarlC..., conclut au rejet de la requête.

Il renvoie la cour à ses écritures de première instance, en particulier au moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Gille, président et les observations de Me C... pour les épouxA... ;

1. M. et Mme A..., ressortissants du Kosovo nés en 1971 et 1976, sont entrés au printemps 2015 avec leurs deux enfants en France, où leurs demandes d'asile et de réexamen de leurs demandes d'asile ont été rejetées par des décisions successives de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 14 octobre 2015 et du 30 septembre 2016 confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 26 juillet 2016 et le 21 mars 2017. Par arrêtés du 27 avril 2018, le préfet de la Drôme a rejeté la demande de titre de séjour formée par les intéressés à raison de l'état de santé de MmeA..., leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixé le pays à destination duquel ils pourraient être éloignés d'office. Le préfet de la Drôme relève appel du jugement du 18 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions, lui a enjoint de délivrer un titre de séjour aux intéressés et a mis à la charge de l'Etat une somme 1 200 euros au titre des frais d'instance.

Sur la légalité des arrêtés du préfet de la Drôme du 27 avril 2018 :

En ce qui concerne la situation de Mme B... épouse A... :

2. En vertu du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est, sous réserve d'une menace pour l'ordre public, délivrée de plein droit à " l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. ".

3. Pour annuler les décisions du préfet de la Drôme du 27 avril 2018 prises à l'encontre de MmeA..., le tribunal administratif a fait droit au moyen tiré de ce que, compte tenu de l'état de santé de l'intéressée, le refus de titre de séjour opposé à celle-ci méconnaissait les dispositions citées ci-dessus du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Au soutien de sa demande d'annulation de l'arrêté du 27 avril 2018, Mme A... a fait valoir devant les premiers juges, comme elle le fait devant la cour en produisant de nouvelles pièces, qu'elle souffre d'un trouble dépressif récurrent et d'un syndrome de stress post-traumatique et qu'elle fait à ce titre l'objet d'un suivi psychothérapique et d'un traitement médicamenteux spécifique dont elle ne pourrait bénéficier au Kosovo, pays même où elle a subi les sévices qui sont à l'origine de ses troubles. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu en particulier de la teneur de l'avis rendu le 31 janvier 2018 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au vu duquel la décision attaquée a été prise et faisant état de la possibilité pour l'intéressée de bénéficier effectivement d'un traitement approprié, que l'état de santé de Mme A...ne pourrait faire l'objet d'un suivi approprié au Kosovo. Dans ces conditions, le préfet de la Drôme est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a retenu le moyen tiré de la violation du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par MmeA....

6. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté critiqué, qui fait précisément état des circonstances de fait touchant à la situation administrative, personnelle et familiale de MmeA..., procèderait d'un défaut d'examen de la situation de celle-ci. Alors que le préfet de la Drôme a produit l'avis du 31 janvier 2018 mentionné au point précédent, qui se réfère aux possibilités d'un suivi approprié et effectif de l'état de santé de la requérante, le moyen tiré du vice de procédure que traduirait le défaut de recueil de cet avis doit être écarté. Si Mme A...fait encore valoir son état de santé et le lien entre celui-ci et le Kosovo, ainsi que sa situation personnelle et familiale, les circonstances dont il est fait état ne suffisent pas pour considérer que le préfet de la Drôme a entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de leurs conséquences sur la situation personnelle de Mme A....

En ce qui concerne la situation de M. D... A... :

7. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) ".

8. Pour annuler les décisions du préfet de la Drôme du 27 avril 2018 prises à l'encontre de M. A..., dont la demande de titre de séjour a été formée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le tribunal administratif a considéré, compte tenu de la situation familiale de l'intéressé et plus particulièrement des développements qu'il avait réservés à l'état de santé de MmeA..., que le rejet de la demande de titre de séjour de l'intéressé était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 6 que le préfet de la Drôme est fondé à demander l'annulation sur ce point du jugement entrepris.

9. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A....

10. Au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation des décisions prises à son encontre, M. A... se prévaut de l'état de santé de son épouse et fait valoir sa situation personnelle et familiale en France, où ses deux enfants sont scolarisés. Toutefois, compte tenu de ce qui précède, de la durée et des conditions de séjour en France des intéressés et alors qu'il n'est pas fait état d'autre obstacle à ce que la vie familiale ou la scolarité des enfants se poursuivent au Kosovo, il ne ressort pas des pièces du dossier que le refus de titre de séjour et la mesure d'éloignement en litige portent une atteinte disproportionnée au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts poursuivis. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 27 avril 2018 a été pris en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen selon lequel l'intérêt supérieur des enfants des époux A...aurait été méconnu en violation des stipulations de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut être accueilli. Les circonstances dont M. A...fait état ne suffisent pas davantage pour considérer que l'arrêté critiqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des prévisions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A....

11. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Drôme est fondé à demander, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet de l'ensemble des conclusions des demandes respectives de M. et Mme A...devant le tribunal administratif de Grenoble.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1806173-1806174 du tribunal administratif de Grenoble du 18 décembre 2018 est annulé.

Article 2 : La demande de Mme E...B...épouse A...et la demande de M. D... A... formées devant le tribunal administratif de Grenoble ainsi que leurs conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...B...épouseA..., à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Drôme et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Valence.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2019, à laquelle siégeaient :

M. Antoine Gille, président ;

M. Thierry Besse, premier conseiller ;

Mme Christine Psilakis, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juillet 2019.

2

N° 18LY04700

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY04700
Date de la décision : 11/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. GILLE
Rapporteur ?: M. Antoine GILLE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : ABOUDAHAB

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-07-11;18ly04700 ?
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