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07/05/2019 | FRANCE | N°18LY01090

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 07 mai 2019, 18LY01090


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en droits, majorations et intérêts, mis à sa charge au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1501669 du 23 janvier 2018, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 20 mars 2018, le 27 novembre 2018 et le

15 février 2019, Mme E..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugeme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en droits, majorations et intérêts, mis à sa charge au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1501669 du 23 janvier 2018, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 20 mars 2018, le 27 novembre 2018 et le 15 février 2019, Mme E..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 janvier 2018 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses et de condamner l'Etat au versement des intérêts moratoires dus sur ces sommes, en application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué a omis de répondre au moyen qui n'était pas inopérant tiré de l'inconstitutionnalité de la majoration de 1,25 appliquée aux sommes soumises aux prélèvements sociaux ;

- les rectifications sont la conséquence de la vérification de comptabilité d'une société avec laquelle elle n'a aucun lien n'y ayant jamais été ni salariée, ni associée ;

- elle ne saurait être redressée en raison des irrégularités comptables et fiscales imputables aux sociétés du groupe qui l'employait ;

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;

- l'administration fiscale n'a pas tenu compte de ses observations en sorte qu'elle a été privée d'un débat contradictoire ;

- l'administration fiscale a procédé à un renversement de la charge de la preuve ;

- s'agissant de sommes regardées comme des revenus de capitaux mobiliers, l'administration fiscale n'apporte pas la preuve de l'appréhension des sommes à l'origine des rectifications à l'impôt sur le revenu en méconnaissance de sa doctrine référencée BOI-RPPM-RCM-10-20-10 n° 230 et 240 et BOI-RPPM-RCM-10-20-20-40 n° 360 ;

- le service ne soutient pas avoir mis en oeuvre la procédure de l'article 117 ;

- elle a justifié des dépenses réalisées à l'occasion d'achats effectués pour le compte de tiers en l'occurrence une société du groupe qui l'employait, ce que l'administration ne conteste pas ; s'agissant de dépenses remboursées par son employeur, elle n'a pas disposé librement des fonds ;

- la disponibilité des sommes n'est pas établie ni son enrichissement personnel.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 septembre 2018 et 12 février 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut qu'il n'y a plus lieu de statuer à hauteur des sommes dégrevées en cours d'instance en application de la décision du Conseil constitutionnel QPC n°2016-6010 du 10 février 2017 et au rejet du surplus de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme E... n'est fondé.

Par ordonnance du 31 janvier 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 18 février 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bourrachot, président,

- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Après avoir, dans le cadre d'une vérification de comptabilité, contrôlé la SARL Le Parc de Saint Paulien, l'administration fiscale a imposé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts, entre les mains de Mme E..., des sommes qu'elle a regardées comme des revenus distribués au titre de l'année 2011. Mme E... relève appel du jugement du 23 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales en droits, majorations et intérêts auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2011.

Sur l'étendue du litige :

2. Il résulte de l'instruction que par une décision du 13 septembre 2018, intervenue et notifiée postérieurement à l'introduction de la requête, l'administration fiscale a accordé à Mme E... un dégrèvement à hauteur de 1 137 euros en droits et pénalités des prélèvements sociaux mis à sa charge au titre de l'année 2011. Il n'y a, par suite, plus lieu de statuer sur les conclusions à fin de décharge des prélèvements sociaux à concurrence de cette somme.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

3. Aux termes du c) de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c) Les rémunérations et avantages occultes (...) ".

4. En cas de refus des rectifications par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire des sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve, d'une part, de l'existence et du montant des revenus distribués et, d'autre part, de leur appréhension par ce contribuable. Mme E... n'ayant pas accepté les rectifications notifiées selon la procédure contradictoire, il incombe à l'administration fiscale d'apporter la preuve tant de l'existence et du montant des sommes distribuées que de leur appréhension par l'intéressée.

5. Il résulte de l'instruction que le vérificateur a constaté, lors de la vérification de comptabilité de la SARL Le Parc de Saint Paulien, à l'occasion de la consultation des relevés bancaires de la société, que des versements avaient été effectués au profit de Mme E..., par ailleurs salariée de la SARL Société d'exploitation du domaine de Chatoiseau (SEDCO), pour une somme totale de 84 081,25 euros. Cette somme n'avait fait l'objet d'aucune déclaration de salaires au profit de l'intéressée, mais comme l'indique la proposition de rectification du 2 mai 2014 adressée à la société, seulement d'une inscription en comptabilité au compte de charges 601 " achats de matières premières " et en libellé " fournisseurs payés par KarineE... ". Estimant que les versements opérés par le biais de chèques libellés et encaissés par Mme E... l'avaient été sans contrepartie pour la société émettrice, l'administration les a regardés comme des revenus occultes distribués à cette dernière et imposables entre ses mains sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. L'administration a donc notifié des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvement sociaux à l'appelante au titre de l'année 2011, objet du présent litige.

6. Mme E... a, au cours de la procédure, indiqué que ces versements correspondaient au remboursement ultérieur d'achats qu'elle effectuait pour le compte de la société vérifiée dont elle était alors salariée. Après avoir exercé son droit de communication auprès de l'enseigne Alinéa, auprès de laquelle la plupart des dépenses avaient été effectuées, l'administration fiscale a ramené le montant des revenus regardés comme distribués à la somme de 30 873 euros.

7. Par une attestation du 27 août 2014, M. A... E..., alors gérant de la SARL Le Parc de Saint Paulien a indiqué que Mme E... avait été détachée de la société SEDCO, qui l'employait, auprès de la SARL Le Parc de Saint Paulien, appartenant au même groupe, afin d'effectuer la décoration totale de deux résidences et qu'elle achetait directement pour le compte de la SARL Le Parc de Saint Paulien le mobilier, la facture étant libellée au nom de la société mais acquittée par Mme E... par chèque et donnant lieu à un virement immédiat de la société sur son compte personnel à hauteur du montant facturé. L'administration fiscale fait valoir qu'aucune convention entre les deux sociétés au titre de ce détachement n'a été produite et que la réalité de la perception des sommes par Mme E... n'est pas contestable dans la mesure où le vérificateur a constaté les paiements sur les relevés bancaires de la société et où Mme E... a également produit ses relevés bancaires qui font apparaître les sommes en causes. L'administration en a déduit l'existence d'une présomption de disponibilité des sommes litigieuses et soutient que la contribuable n'aurait pas produit la preuve qui lui incombe, selon elle, en fait et en droit, de ce qu'elle n'avait pas eu la disponibilité des sommes litigieuses en établissant avoir été juridiquement tenue d'acquitter les dépenses au nom de la société avec lequel elle n'avait aucun lien juridique. Admettant que certaines des sommes perçues avaient été utilisées à raison d'achats effectués pour le compte de la SARL Le Parc de Saint Paulien, l'administration a toutefois admis une série de factures et de charges au cours du contrôle et après examen de la réclamation contentieuse de l'intéressée qui ont donné lieu à des dégrèvements.

8. En ce qui concerne le versement du 29 juin 2011, pour un montant de 29 891,97 euros, la requérante a produit sept factures d'un montant total de 29 049,57 euros concernant l'acquisition de mobilier libellées au nom de la société Loséal, qui fait également partie du groupe. Pour expliquer le supplément de remboursement d'un montant de 842,40 euros, Mme E... a porté de manière manuscrite au bas de deux des sept factures qu'il fallait ajouter un meuble TV à 486 euros et une table basse à 356,40 euros suivi de la mention " remboursé par la suite mais initialement inclus dans cette commande ". Dès lors qu'elle a admis, en cours de procédure, l'existence d'un lien de fait entre Mme E... et les sociétés appartenant au même groupe que la société SEDCO, notamment en ramenant le montant des revenus injustifiés à la somme de 30 873 euros, l'administration fiscale, qui supporte la charge de la preuve, ne peut se borner à faire valoir que la contribuable n'a aucun lien avec la société Loséal et que ces factures, présentées lors du contrôle de la SARL Le Parc de Saint Paulien, n'ont pas été prises en compte dans les charges de cette dernière, en l'absence d'élément justifiant le règlement par la SARL Le Parc de Saint Paulien de factures de mobilier libellées au nom de la société Loséal. Dans ces conditions Mme E... établit que l'ensemble des sommes remboursées par la SARL Le Parc de Saint Paulien correspondaient à des acquisitions de mobilier au bénéfice de celle-ci alors même que certains achats avaient été facturés au nom d'une autre société du groupe avec laquelle Mme E... n'avait aucun lien et n'ont pas été admis en charge dans le cadre du contrôle de la SARL Le Parc de Saint Paulien. Ainsi, l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'existence d'une distribution.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme E... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté le surplus de sa demande.

Sur les frais liés au litige :

10. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Mme E... au titre des frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme E... à hauteur de la somme de 1 137 euros.

Article 2 : Mme E... est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales en droits, majorations et intérêts, restant à sa charge au titre de l'année 2011.

Article 3 : Le jugement du 23 janvier 2018 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros à Mme E... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme E... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... E... et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée au directeur du contrôle fiscal de Rhône-Alpes-Bourgogne.

Délibéré après l'audience du 9 avril 2019, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Menasseyre, présidente assesseure,

Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 7 mai 2019.

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N° 18LY01090

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY01090
Date de la décision : 07/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SELARL JURICITE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-05-07;18ly01090 ?
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