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02/05/2019 | FRANCE | N°18LY03394

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre a - formation à 3, 02 mai 2019, 18LY03394


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... F...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 6 février 2018 par laquelle le préfet de l'Yonne a refusé de faire droit à sa demande de regroupement familial au profit de son fils Ferdinand.

Par un jugement n° 1800936 du 29 juin 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 4 septembre 2018 et un mémoire enregistré le 22 février 2019, Mme F..., représenté par Me B..., deman

de à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 29 juin 2018 ;
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... F...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 6 février 2018 par laquelle le préfet de l'Yonne a refusé de faire droit à sa demande de regroupement familial au profit de son fils Ferdinand.

Par un jugement n° 1800936 du 29 juin 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 4 septembre 2018 et un mémoire enregistré le 22 février 2019, Mme F..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 29 juin 2018 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de faire droit à sa demande, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à défaut de réexaminer sa demande dans le délai de quinze jours, le tout sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle n'a pas commis de fraude et la filiation avec son fils Ferdinand est établie ;

- elle a déposé le dossier de demande dès le mois d'août 2017 et non le 1er septembre ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Par un mémoire en défense enregistré le 15 janvier 2019, le préfet de l'Yonne, représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Savouré, premier conseiller,

- et les observations de MeD..., substitut de Me C...représentant l'Etat ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme F..., ressortissante malgache, née le 22 mars 1982, a présenté une demande de regroupement familial qui a été enregistrée le 1er septembre 2017 au profit de son fils Ferdinand, né le 2 septembre 1999, soit la veille de son dix-huitième anniversaire. Par une décision du 6 février 2018, le préfet de l'Yonne a refusé de faire droit à sa demande au motif que celle-ci s'appuyait sur une fraude à l'état civil et ne permettait pas d'établir la filiation de son fils. Mme F... interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision litigieuse :

2. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans. ". Aux termes de l'article R. 411-3 du même code : " L'âge du conjoint et des enfants pouvant bénéficier du regroupement familial est apprécié à la date du dépôt de la demande. "

3. L'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit, en son premier alinéa, que la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. L'article 47 du code civil dispose quant à lui que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".

4. Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

5. A l'appui de sa demande, Mme F...a produit une copie de l'acte d'état civil de son fils. Cet acte mentionne qu'elle est la mère de ce dernier, qui est né sous le nom de E...H...avant de changer de nom suivant un jugement du tribunal de première instance de Manakara du 31 janvier 2013, pour se nommer FerdinandF.... La requérante produit également une copie de ce jugement et l'acte d'état civil portant reconnaissance de maternité en date du 8 février 2013. Ces deux actes d'état civil ont été visés par l'ambassade de la République de Madagascar en France. Le préfet de l'Yonne n'apporte aucun élément susceptible d'établir que ces actes seraient irréguliers, falsifiés ou inexacts. Par suite, en indiquant dans la décision litigieuse que la demande de regroupement familial de Mme F...s'appuierait sur une fraude documentaire, le préfet de l'Yonne a commis une erreur de fait.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme F... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision litigieuse.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".

8. Dès lors qu'il est constant que Mme F...remplit les autres conditions prévues par l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le présent arrêt implique nécessairement, eu égard au motif sur lequel il se fonde, que le préfet de l'Yonne fasse droit à sa demande de regroupent familial. Par suite, il y a lieu d'enjoindre à ce dernier de faire droit à sa demande, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la requête tendant à ce que cette injonction soit assortie d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 1 000 euros à verser à Mme F... au titre des frais exposés à l'occasion du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 29 juin 2018 et la décision du préfet de l'Yonne en date du 6 février 2018 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Yonne de faire droit à la demande de regroupement familial présentée par Mme F...au profit de son fils FerdinandF..., dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à Mme F...la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à MmeA... F... et au ministre de l'intérieur. Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2019 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

MmeG..., première conseillère,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 mai 2019.

2

N° 18LY03394


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre a - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY03394
Date de la décision : 02/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-005 Étrangers. Entrée en France.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : FIUMÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-05-02;18ly03394 ?
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