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23/04/2019 | FRANCE | N°18LY01102

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 23 avril 2019, 18LY01102


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par deux demandes distinctes, la société Ogic et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2015 par lequel le maire de la commune de Tassin-la-Demi-Lune a refusé de délivrer à la société Ogic un permis de construire en vue de l'édification de trois immeubles collectifs sur un terrain situé rue François Mermet.

Par un jugement n° 1509950-1510189 du 23 janvier 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé ce refus de permis de construire et a

enjoint au maire de Tassin-la-Demi-Lune de délivrer le permis de construire sollici...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par deux demandes distinctes, la société Ogic et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2015 par lequel le maire de la commune de Tassin-la-Demi-Lune a refusé de délivrer à la société Ogic un permis de construire en vue de l'édification de trois immeubles collectifs sur un terrain situé rue François Mermet.

Par un jugement n° 1509950-1510189 du 23 janvier 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé ce refus de permis de construire et a enjoint au maire de Tassin-la-Demi-Lune de délivrer le permis de construire sollicité.

Procédure devant la cour

I) Par une requête enregistrée le 22 mars 2018 sous le n° 18LY01102 et un mémoire enregistré le 31 janvier 2019 qui n'a pas été communiqué, la commune de Tassin-la-Demi-Lune, représentée par la SELARL Philippe Petit et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 23 janvier 2018 ;

2°) de rejeter la demande de la société Ogic ;

3°) de mettre à la charge de la société Ogic la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le projet ne compromet pas la préservation de l'espace boisé classé, en méconnaissance de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme et du paragraphe 13.4.1 de l'article 13 UD du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la métropole de Lyon ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le projet garantit l'espace végétalisé à mettre en valeur institué sur le terrain d'assiette, comme l'imposent les dispositions de l'article 13.4.3 de l'article 13 UD du règlement du PLU ;

- l'annulation du refus de permis de construire n'impliquait pas nécessairement qu'il soit enjoint à la commune de délivrer le permis de construire sollicité, en l'absence d'attitude dilatoire ou de blocage de la part de la commune.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 janvier 2019, la société Ogic, représentée par la SELARL cabinet Léga-Cité, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la commune requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les motifs de refus opposés à sa demande sont entachés d'illégalité ;

- les premiers juges étaient fondés à enjoindre à la commune de délivrer le permis de construire sollicité.

II) Par une requête enregistrée le 22 mars 2018 sous le n° 18LY01103 et un mémoire enregistré le 31 janvier 2019 qui n'a pas été communiqué, la commune de Tassin-la-Demi-Lune, représentée par la SELARL Philippe Petit et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 23 janvier 2018 ;

2°) de rejeter la demande de M. B... ;

3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle reprend les moyens soulevés dans l'instance n° 18LY01102.

La requête a été communiquée à M. B..., qui n'a pas produit de mémoire en défense.

La société Ogic a produit un mémoire, enregistré le 2 janvier 2019, identique à celui qu'elle a produit dans l'instance n° 18LY01102.

La clôture de l'instruction a été fixée au 31 janvier 2019 dans les deux instances par deux ordonnances du 8 janvier 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Besse, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public,

- et les observations de Me D... pour la commune de Tassin-la-Demi-Lune, ainsi que celles de Me C... pour la société Ogic ;

Considérant ce qui suit :

1. Les deux requêtes de la commune de Tassin-la-Demi-Lune sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre et de statuer par le même arrêt.

2. Le 30 juin 2015, la société Ogic a déposé une demande de permis de construire en vue de l'édification de trois immeubles collectifs comportant trente logements sur un terrain situé rue François Mermet, appartenant à M. B.... Par arrêté du 25 septembre 2015, le maire de Tassin-la-Demi-Lune a refusé de délivrer le permis de construire. Par jugement du 23 janvier 2018, le tribunal administratif de Lyon, après avoir joint les demandes de la société Ogic et de M. B..., a annulé l'arrêté du 25 septembre 2015 et a enjoint au maire de délivrer à la société Ogic le permis sollicité. La commune de Tassin-la-Demi-Lune relève appel de ce jugement.

Sur la légalité du refus de permis de construire du 25 septembre 2015 :

3. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet, d'une superficie de 5 322 m², est grevé de deux espaces boisés classés qui concernent sa partie sud-est et un cèdre en bordure de la rue située au sud. La plus grande partie du surplus de la parcelle est également identifiée dans le document graphique du plan local d'urbanisme (PLU) en tant qu'espace végétalisé à mettre en valeur. Pour refuser de délivrer le permis sollicité, le maire de Tassin-la-Demi-Lune a estimé que le projet est de nature à porter atteinte à l'espace boisé classé et qu'il méconnaît les dispositions relatives aux espaces végétalisés à mettre en valeur du paragraphe 13.4.3 de l'article 13 du règlement du PLU de la métropole de Lyon applicable en zone UD. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a estimé qu'aucun de ces motifs de refus n'est fondé.

4. Aux termes de l'article L. 130-1 alors en vigueur du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies, des plantations d'alignements. / Le classement interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements. (...) ". Selon le paragraphe 13.4.1 de l'article 13 UD du règlement du PLU de la métropole de Lyon : " Au titre de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme, les espaces boisés classés repérés aux documents graphiques doivent faire l'objet d'une préservation et d'une mise en valeur. ".

5. Il ressort des pièces du dossier que le projet en litige ne prévoit pas l'implantation de constructions ni la réalisation de travaux dans le périmètre des deux espaces boisés classés. Il ne ressort pas des pièces du dossier que, comme l'allègue la commune requérante sans justification probante, la pérennité du cèdre situé en bordure de rue pourrait être menacée par la rampe d'accès au sous-sol projetée, située à 7,4 mètres de son tronc. Par ailleurs, si le projet fait état de la nécessité de remplacer à terme trois marronniers d'Inde en mauvais état, dont les troncs sont situés au demeurant en dehors de l'espace boisé classé, il ressort du dossier de demande que l'abattage de ces arbres n'est pas envisagé dans l'immédiat. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que la plantation de onze nouveaux arbres dans l'espace boisé classé, qui comprend des zones peu densément plantées, serait de nature, en le densifiant excessivement, non à en assurer la pérennité comme le fait valoir la société pétitionnaire, mais à compromettre sa conservation ou sa protection. Ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le motif de refus selon lequel le projet est de nature à porter atteinte aux espaces boisés classés est infondé.

6. Aux termes de l'article 13.4.3 du règlement du PLU : " Les espaces végétalisés à mettre en valeur, localisés aux documents graphiques doivent faire l'objet d'une mise en valeur. A ce titre, les constructions, les aménagements de voirie, les travaux réalisés sur les terrains concernés doivent être conçus pour garantir la mise en valeur de ces ensembles paysagers. Leur destruction partielle est admise dès lors qu'elle est compensée pour partie par des plantations restituant ou améliorant l'ambiance végétale initiale du terrain (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que les trois bâtiments projetés, s'ils sont partiellement situés sur l'emprise d'une ancienne piscine et sur la partie de terrain qui n'est pas identifiée au document graphique comme espace végétalisé à mettre en valeur, empiètent en partie sur cet espace, principalement toutefois sur ses parties auparavant non boisées. Cependant, le projet prévoit la construction de bâtiments de deux étages s'intégrant au coeur des frondaisons, et envisage par ailleurs la plantation de vingt-sept arbres de haute tige ou en cépées, dont seize sur la partie de parcelle couverte par l'espace végétalisé à mettre en valeur, en lieu et place de douze arbres qui doivent être abattus. Dans ces conditions, et en l'absence d'éléments suffisamment probants permettant de mettre en doute la pérennité des plantations envisagées en raison de l'insuffisante épaisseur de terre, pour les trois arbres implantés au-dessus des parties enterrées, ou d'une trop grande proximité des bâtiments ou des espaces en sous-sol, le projet, alors même que neuf des arbres plantés doivent l'être en bordure de terrain, est de nature à restituer l'ambiance végétale initiale du terrain. Par ailleurs, la commune de Tassin la-Demi-Lune ne peut faire valoir, alors que les dispositions du PLU imposent seulement la restitution de l'ambiance végétale du terrain, que l'implantation des arbres envisagée ne serait pas cohérente avec l'environnement du projet. Ainsi, c'est à tort que, pour rejeter la demande de permis de construire, le maire de Tassin-la-Demi-Lune s'est fondé sur le fait que le projet méconnaîtrait les dispositions citées au point 6 de l'article UD 13 du règlement du PLU.

8. Il résulte de ce qui précède que la commune de Tassin-la-Demi-Lune n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du maire de Tasin-la-Demi-Lune du 25 septembre 2015 portant rejet de la demande de permis de construire de la société Ogic.

Sur l'injonction prononcée par les premiers juges :

9. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente se prononce par arrêté sur la demande de permis ou, en cas d'opposition ou de prescriptions, sur la déclaration préalable. (...) ". Aux termes de l'article L. 424-3 du même code, dans sa rédaction issue de l'article 108 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / Cette motivation doit indiquer l'intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d'opposition, notamment l'ensemble des absences de conformité des travaux aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l'article L. 421-6. / Il en est de même lorsqu'elle est assortie de prescriptions, oppose un sursis à statuer ou comporte une dérogation ou une adaptation mineure aux règles d'urbanisme applicables. ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier. ".

10. Dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'un motif que l'administration n'a pas relevé ou qu'un changement dans la situation de droit ou de fait du projet en litige ferait obstacle à la délivrance du permis de construire sollicité, c'est à bon droit que les premiers juges, après avoir censuré les deux motifs de refus opposés à la demande de permis de construire de la société Ogic, ont estimé que l'annulation de l'arrêté du 25 septembre 2015 impliquait nécessairement d'enjoindre au maire de Tassin-la-Demi-Lune de délivrer ce permis.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Ogic et M. B... versent à la commune de Tassin-la-Demi-Lune, qui est partie perdante, la somme que celle-ci demande au titre des frais qu'elle a exposés. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des mêmes dispositions et mettre à la charge de la commune de Tassin-la-Demi-Lune le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société Ogic.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de la commune de Tassin-la-Demi-Lune sont rejetées.

Article 2 : La commune de Tassin-la-Demi-Lune versera à la société Ogic la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Tassin-la-Demi-Lune, à la société Ogic et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 26 mars 2019 à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre,

M. Antoine Gille, président-assesseur,

M. Thierry Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 avril 2019.

2

N° 18LY01102, 18LY01103

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY01102
Date de la décision : 23/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : URBAN CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-04-23;18ly01102 ?
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