Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007 et 2008 ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1507188 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a constaté un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin de décharge à hauteur de 4 714 euros au titre des années 2007 et 2008, correspondant aux dégrèvements prononcés le 22 novembre 2017 par l'administration fiscale, et a rejeté le surplus de sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 26 février 2018, M. D..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 21 décembre 2017 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la proposition de rectification est insuffisamment motivée en méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;
- la proposition de rectification de l'EURL est également insuffisamment motivée ne lui permettant pas de critiquer utilement la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires ;
- l'administration fiscale n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'existence et du montant des distributions, ni de son appréhension de ces revenus, l'article 109-1 1° du code général des impôts excluant la présomption de distribution des bénéfices non imposables à l'impôt sur les sociétés par suite de l'annulation des rectifications d'impôt sur les sociétés adressées à l'EURL Ben Autos ;
- l'administration fiscale ne pouvait légalement rejeter la comptabilité présentée par l'EURL ;
- les rectifications en matière d'impôt sur les sociétés n'ont pas tenu compte des variations de stocks ;
- la présomption de distributions de l'article 109-1 1° du code général des impôts ne s'applique qu'aux bénéfices qui ne sont pas demeurés investis dans l'entreprise ; l'administration fiscale ne démontre pas le désinvestissement des sommes litigieuses, alors que les stocks sous-évalués démontrent que les bénéfices considérés ont été maintenus dans l'entreprise ;
- les rectifications sont entachées d'une erreur de rattachement à l'année d'imposition ;
- les conditions d'application des majorations et pénalités ne sont pas établies.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juillet 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Le ministre expose qu'aucun des moyens soulevés par M. D... n'est fondé.
Les parties ont été informées, conformément aux articles R. 611-18 et R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la date à partir de laquelle une clôture immédiate de l'instruction était susceptible d'intervenir et la clôture immédiate de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 15 novembre 2018.
Un mémoire présenté par M. D... a été enregistré le 15 novembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bourrachot, président,
- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. A la suite de la vérification de comptabilité portant sur la période du 1er juillet 2006 au 30 juin 2008 de l'EURL Ben Autos qui exerce une activité d'achat et de revente de véhicules d'occasion, et dont M. D... est gérant et unique associé, l'administration fiscale a notifié à ce dernier des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement des dispositions du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, et de contributions sociales au titre des années 2007 et 2008, assorties de majorations. M. D... relève appel du jugement du 21 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions à fin de décharge à hauteur de 4 714 euros au titre des années 2007 et 2008, correspondant aux dégrèvements prononcés le 22 novembre 2017 par l'administration fiscale, a rejeté le surplus de sa demande.
Sur la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) ".Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. / (...) " .
3. Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées. Hormis le cas où elle se réfère à un document qu'elle joint à la proposition de rectification ou à la réponse aux observations du contribuable, l'administration peut satisfaire à cette obligation en se bornant à se référer aux motifs retenus dans une proposition de rectification, ou une réponse à ses observations, consécutive à un précédent contrôle et qui lui a été régulièrement notifiée, à la condition qu'elle identifie précisément la proposition ou la réponse en cause et que celle-ci soit elle-même suffisamment motivée.
4. En l'espèce, il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 17 décembre 2009 adressée à M. et Mme D... mentionne les impositions concernées, les années d'imposition, le montant des rectifications opérées et les motifs de droit et de fait. Elle fait également mention de la proposition de rectification datée du même jour adressée à l'EURL Ben Autos qui lui est annexée et dont les 86 feuillets sont suffisamment motivés au regard des exigences rappelées ci-dessus.
Sur le bien-fondé :
5. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. ".
6. Il résulte de ces dispositions que ne peuvent être regardées comme des revenus distribués en application du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts des sommes qui ne correspondent pas à un rehaussement des bénéfices de la société.
7. Il en résulte également que, lorsque l'impôt sur les sociétés initialement assigné a fait l'objet d'un dégrèvement, quel qu'en soit le motif, l'administration ne peut légalement se fonder sur les dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts pour imposer les sommes dégrevées entre les mains du contribuable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
8. Il résulte de l'instruction que les rectifications correspondant aux sommes regardées comme distribuées par l'EURL Ben Autos à la suite des rehaussements assignés à celle-ci en matière d'impôt sur les sociétés ont été annulées par une décision du directeur départemental des finances publiques du 6 mai 2015, à raison de l'irrégularité de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet l'EURL. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que l'administration ne pouvait légalement se fonder sur les dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts pour imposer M. D... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers à raison de ces sommes. A cet égard, l'administration fiscale ne peut utilement invoquer le principe d'indépendance des procédures d'imposition.
9. M. D... est par suite fondé à soutenir que le dégrèvement de l'intégralité des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels l'EURL Ben Autos a été assujettie à l'issue du contrôle doit entraîner la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et des contributions sociales correspondantes, ainsi que des pénalités mises à sa charge au titre des années 2007 et 2008 au titre des distributions de l'EURL Ben Autos qualifiées " d'occultes " par l'administration.
10. Il résulte de ce qui précède que M. D..., qui n'articule aucun autre moyen contre la rectification de ses autres revenus de capitaux mobiliers déclarés au titre de l'année 2008 est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus de sa demande au titre des distributions de l'EURL Ben Autos qualifiées " d'occultes " par l'administration.
Sur les frais liés à l'instance :
11. Il ya lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. D... d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : M. D... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des pénalités restant à sa charge au titre de l'année 2007.
Article 2 : Les bases d'imposition de M. D... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année 2008 sont réduites d'une somme de 52 653 euros après application du coefficient du coefficient multiplicateur de 1,25 prévu au 7 de l'article 158 du code général des impôts.
Article 3 : M. D... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des pénalités restant à sa charge au titre de l'année 2008 et correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 2.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 21 décembre 2017 est réformé en ce qu'il a contraire au présent arrêt.
Article 5 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros à M. D... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée au directeur du contrôle fiscal de Rhône-Alpes-Bourgogne.
Délibéré après l'audience du 26 mars 2019, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Menasseyre, présidente-assesseure,
Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique le 23 avril 2019.
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N° 18LY00780
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