La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/04/2019 | FRANCE | N°18LY02337

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 11 avril 2019, 18LY02337


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... B...et M. E...A...ont respectivement demandé au tribunal administratif de Grenoble, par deux demandes enregistrées le 27 février 2018, d'annuler les arrêtés du 21 novembre 2017 par lesquels le préfet l'Isère a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Puis, par arrêté du 23 mars 2018, le préfet de l'Isère a assigné à résidence les intéressés.

Par deux jugements n° 1

801145 et n° 1801147 du 30 mars 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... B...et M. E...A...ont respectivement demandé au tribunal administratif de Grenoble, par deux demandes enregistrées le 27 février 2018, d'annuler les arrêtés du 21 novembre 2017 par lesquels le préfet l'Isère a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Puis, par arrêté du 23 mars 2018, le préfet de l'Isère a assigné à résidence les intéressés.

Par deux jugements n° 1801145 et n° 1801147 du 30 mars 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble, qui a renvoyé au tribunal, statuant en formation collégiale, les conclusions des deux demandes dirigées contre les refus titre de séjour, a rejeté les conclusions des demandes Mme B...et M. A...dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Procédure devant la cour

I - Par une requête, enregistrée sous le n° 18LY02337 le 25 juin 2018, M. E... A..., représenté par Me Cans, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1801147 du 30 mars 2018 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", sous astreinte journalière de 100 euros et, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter du prononcé de l'arrêt tout en le munissant d'une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que la décision l'obligeant à quitter le territoire :

- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant;

- est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- est illégale à raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour censurée le 17 mai 2018 par le tribunal administratif de Grenoble.

II - Par une requête, enregistrée sous le n° 18LY02339 le 25 juin 2018, Mme D... B..., représentée par Me Cans, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1801145 du 30 mars 2018 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", sous astreinte journalière de 100 euros et, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter du prononcé de l'arrêt tout en la munissant d'une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que la décision l'obligeant à quitter le territoire :

- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la Convention européenne des droits de l'enfant;

- est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- est illégale à raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour censurée le 17 mai 2018 par le tribunal administratif de Grenoble.

Les requêtes ont été communiquées le 26 juillet 2018 au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Souteyrand, président-assesseur ;

- et les observations de Me Cans, représentant Mme B...et M. A...;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B...et M.A..., ressortissants russes nés en 1977, sont entrés le 11 mars 2014 en France avec leur fille mineure, sous couvert de visas long séjour mention "visiteur " valables du 1er mars 2014 au 1er mars 2015. M.A..., qui a ensuite obtenu son renouvellement jusqu'au 8 mars 2017, a sollicité le 21 mars 2017 la délivrance d'un titre de séjour qualité de travailleur temporaire, puis, le 23 août suivant d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " et sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. MmeB..., dont le titre de séjour en qualité de visiteur a été renouvelé jusqu'au 8 mars 2016, a sollicité, le 27 septembre 2017, un titre de séjour mention " vie privée et familiale ". Par deux arrêtés du 21 novembre 2017, le préfet de l'Isère a refusé de faire droit à leurs demandes, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils seront éloignés. Mme B...et M. A...relèvent appel des jugements du 30 mars 2018 par lesquels le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes d'annulation des décisions les obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination.

2. Les requêtes susvisées n° 18LY02337 et n° 18LY02339 présentées respectivement pour Mme B...et M.A..., qui sont mariés, présentent à juger des questions semblables. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. - 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

4. Il ressort du point 1. que M. A...et Mme B...et leur fille mineure, résidaient en France depuis moins de quatre ans à la date du 21 novembre 2017 des décisions de refus de titre de séjour en litige, alors qu'ils ont vécu jusqu'à l'âge de 37 ans en Russie, pays dont ils ont tous trois la nationalité, et dans lequel ils n'établissent ni que leur cellule familiale ne pourrait pas se reconstituer, ni que leur fille âgée de 11 ans, excellente élève, ne pourrait poursuivre sa scolarité. La seule circonstance que M. A...et Mme B...suivent des cours de français, font preuve d'une volonté d'intégration par le réseau associatif et par le travail, notamment en cherchant à développer une activité d'apiculteurs, ne permet pas d'établir que les décisions en litige ont porté une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale au regard des motifs pour lesquels elles ont été prises. Par conséquent elles ne méconnaissent pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.

5. En deuxième lieu, aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

6. Les décisions en litige n'ont eu ni pour objet ni pour effet de séparer M. A...et Mme B...de leur fille mineure, ni d'empêcher celle-ci de pourvoir à son éducation tandis qu'aucune stipulation de la convention internationale des droits de l'enfant n'impose la scolarisation des enfants en France, exclusivement. En outre, la réalité des risques de discrimination qui pourraient peser sur leur fille en cas de retour en Russie ne ressort pas des pièces produites. En conséquence, le refus de titre de séjour ne méconnaît pas l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

7. En dernier lieu, par un arrêt n° 18LY02360 de ce jour, la cour a fait droit à la requête du préfet de l'Isère à fin d'annulation du jugement n° 1801145-1801147 du 17 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble avait annulé les décisions du 21 novembre 2017 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé un titre de séjour à Mme B...et M. A...et lui a enjoint de leur délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a rejeté leurs demandes. Par conséquent, Mme B...et M. A...ne peuvent utilement se prévaloir de ce jugement à l'appui de leurs présentes requêtes.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...et M. A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes d'annulation des décisions susvisées du préfet de l'Isère du 27 novembre 2017. Par voie de conséquence, doivent être rejetées leurs conclusions aux fins d'injonction et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de Mme B...et de M. A...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B..., à M. E... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère

Délibéré après l'audience du 21 mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

M. Souteyrand, président-assesseur,

MmeC..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 11 avril 2019.

1

2

N° 18LY02337-18LY02339


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY02337
Date de la décision : 11/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: M. Eric SOUTEYRAND
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : CANS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-04-11;18ly02337 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award