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28/02/2019 | FRANCE | N°18LY03813

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre a - formation à 3, 28 février 2019, 18LY03813


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D...A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

* d'une part, d'annuler l'arrêté du 3 mai 2018 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;

* d'autre part, d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1800894 du 20 septe

mbre 2018, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D...A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

* d'une part, d'annuler l'arrêté du 3 mai 2018 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;

* d'autre part, d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1800894 du 20 septembre 2018, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme du 3 mai 2018 et enjoint au préfet de délivrer à M. A... B... un certificat de résidence d'une durée d'un an portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 18 octobre 2018, le préfet du Puy-de-Dôme demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1800894 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 20 septembre 2018 ;

2°) de rejeter la demande de M. A... B... devant le tribunal administratif.

Il soutient que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le refus de titre de séjour était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ce refus sur la situation personnelle de M. A... B..., dès lors que ce dernier, célibataire, est entièrement à la charge de sa famille, qu'il a été entendu à plusieurs reprises par les services de police pour le recel d'un bien provenant d'un vol ou la conduite d'un véhicule sans permis de conduire et sans assurance, et alors qu'il a fait l'objet d'une précédente obligation de quitter le territoire français en 2013, dont la légalité avait été confirmée par le tribunal administratif de Clermont-Ferrand et qu'il n'a pas exécuté, se maintenant en situation irrégulière durant près de trois ans avant de déposer une nouvelle demande de titre de séjour.

Par un mémoire, enregistré le 23 janvier 2019, présenté pour M. A... B..., il conclut :

- au rejet de la requête ;

- à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'un an mention" vie privée et familiale" ou un certificat de résidence algérien d'un an, sous astreinte de 20 € par jour de retard à compter d'un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;

- à la mise à la charge de l'État le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991

Il soutient que les moyens soulevés par le préfet ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Seillet, président ;

- et les observations de Me Chautard, avocat de M. A... B... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant algérien né le 12 août 1994 à Arzew (Algérie), est entré en France de façon régulière, le 7 décembre 2010, sous couvert d'un visa de type C délivré par les autorités consulaires espagnoles à Oran. Il a déposé une première demande de délivrance d'un certificat de résidence, le 19 octobre 2012. Cette demande a été rejetée par un arrêté du 15 avril 2013, assorti d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, qu'il a contesté par une demande rejetée par un jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 2 juillet 2013. S'étant maintenu irrégulièrement sur le territoire français en dépit de cette mesure d'éloignement, M. A... B... a déposé, le 30 juin 2016, auprès de la préfecture du Puy-de-Dôme une nouvelle demande de certificat de résidence algérien d'un an portant la mention " vie privée familiale ". Le 3 mai 2018, le préfet du Puy-de-Dôme a pris à son encontre un arrêté portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Le préfet du Puy-de-Dôme interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé ces décisions et lui a enjoint de délivrer à M. A... B... un certificat de résidence d'une durée d'un an portant la mention " vie privée et familiale ".

2. Il ressort des pièces du dossier qu'ainsi qu'il a été dit au point 1, M. A... B... s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français en dépit d'une décision d'obligation de quitter le territoire français du 15 avril 2013 dont il avait contesté en vain la légalité devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand. Il en ressort également qu'à la date de la décision de refus de titre en litige, l'intéressé, alors âgé de 23 ans, célibataire sans charge de famille, n'exerçait aucune activité professionnelle après avoir obtenu un certificat d'aptitude professionnelle en 2014, et ne démontrait ainsi aucune insertion professionnelle particulière. Dès lors, et alors même qu'il réside chez sa tante maternelle et son oncle, lesquels justifiaient, lorsque M. A... B... était mineur, d'un jugement de kafala de juillet 2011 et d'une délégation d'autorité parentale à l'égard de l'intéressé prononcée par un juge aux affaires familiales le 27 juin 2012, c'est à tort que les premiers juges se sont fondés, pour annuler la décision de refus de titre du 3 mai 2018 en litige et, par voie de conséquence, les décisions du même jour du préfet du Puy-de-Dôme portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, sur le motif tiré d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle.

3. Il appartient, toutefois, à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... B....

4. En premier lieu, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales ". En ce qui concerne les ressortissants algériens, les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles ils peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France.

5. L'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, créé par l'article 32 de la loi du 24 juillet 2006, puis modifié par les articles 40 et 50 de la loi du 20 novembre 2007, dispose que : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ". Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre d'une activité salariée, soit au titre de la vie familiale. Dès lors que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, ces conditions sont régies de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, M. A... B..., ressortissant algérien, ne peut utilement invoquer les dispositions de cet article à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 ne peut qu'être écarté.

6. En deuxième lieu, si un étranger peut, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision préfectorale refusant de régulariser sa situation par la délivrance d'un titre de séjour, soutenir que, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, la décision du préfet serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, il ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu, dans le cadre de la politique du Gouvernement en matière d'immigration, adresser aux préfets, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation de chaque cas particulier, pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation. Par suite, M. A... B... ne peut utilement se prévaloir des énonciations de la circulaire du 28 novembre 2012 et notamment de celles relatives à l'examen des demandes d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants étrangers en situation irrégulière.

7. En dernier lieu, pour les motifs énoncés au point 2, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Puy-de-Dôme est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé les décisions du 3 mai 2018 contestées. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de M. A... B... aux fins d'injonction et tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1800894 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 20 septembre 2018 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de M. A... B... sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. D... A... B....

Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2019 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

M. Souteyrand, président-assesseur,

MmeC..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 28 février 2019.

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N° 18LY03813


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre a - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY03813
Date de la décision : 28/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : KHANIFAR

Origine de la décision
Date de l'import : 05/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-02-28;18ly03813 ?
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