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28/02/2019 | FRANCE | N°17LY01424

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre a - formation à 3, 28 février 2019, 17LY01424


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Monovar SP a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1407052 du 10 février 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 31 mars 2017 et le 9 octobre 2017, la SARL Monovar SP, représenté

e par la SAS Cabinet JC fiscalité, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal admi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Monovar SP a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1407052 du 10 février 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 31 mars 2017 et le 9 octobre 2017, la SARL Monovar SP, représentée par la SAS Cabinet JC fiscalité, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 10 février 2017 ;

2°) de la décharger de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SARL Monovar SP soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, les rappels litigieux portent sur la re-facturation de travaux de rénovation immobilière, à l'exclusion des prestations administratives qui ont été soumises à un taux normal de taxe sur la valeur ajoutée ;

- contrairement à ce que prévoyait la convention signée entre elle et la société Maseri, elle a agi comme un intermédiaire opaque au sens du V de l'article 256 du code général des impôts et était fondée à appliquer le taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée dés lors que toutes les conditions prévues à l'article 279-0 bis du code général des impôts étaient remplies ;

- l'article 279-0 bis du code général des impôts trouve à s'appliquer pour le représentant du propriétaire ;

- à supposer qu'elle puisse être qualifiée d'intermédiaire transparent, les montants qu'elle devait réclamer à la société Maseri, correspondant au montant TTC des travaux réglés aux diverses entreprises de bâtiment, n'avaient pas à être soumis au taux normal de taxe sur la valeur ajoutée ; seules les prestations administratives, facturées pour un montant global TTC de 7 200 euros, devraient être soumises au taux normal, ce qui correspondrait à un rappel de 804,57 euros ;

- le trésor n'a subi aucune perte du fait de cette comptabilisation et la société Maseri, client final, a supporté un taux de taxe sur la valeur ajoutée de 5,5 % sur les travaux ;

- elle est bien fondée à invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le paragraphe 184 de l'instruction référencée 3 C-7-06 du 8 décembre 2006 et la réponse ministérielle à M. B..., député (AN, 22 novembre 2005, page 10816 n° 74979).

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 septembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Le ministre de l'action et des comptes publics soutient que :

- la SARL Monovar est chargée d'accompagner et de conseiller le maitre d'ouvrage dans le déroulement du chantier en assurant des prestations à caractère administratif, technique et financier, prestations qui ne sont pas au nombre de celles visées à l'article 279-0 bis du code général des impôts ;

- elle a agi avec les entreprises chargées de réaliser les travaux comme un intermédiaire transparent ;

- les moyens soulevés par la SARL Monovar SP ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 22 juin 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 7 septembre 2018, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de MmeC..., première conseillère,

- les conclusions de Mme Bourion, rapporteure publique,

- et les observations de MeA..., représentant la SARL Monovar SP ;

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Monovar SP a notamment pour activité le courtage et le coaching en travaux ainsi que le courtage en conception de travaux. A la suite d'un contrôle sur pièces portant sur l'année 2009 et d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2010 et 2011, l'administration fiscale a appliqué un taux de 19,6 % de taxe sur la valeur ajoutée, au lieu du taux réduit de 5,5 % appliqué, à trois factures adressées par la SARL Monovar à la SCI Maseri. Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les pénalités correspondantes ont été mis en recouvrement le 26 novembre 2013. La SARL Monovar SP relève appel du jugement du 10 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande de décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 et des pénalités correspondantes.

2. Il appartient au juge de l'impôt d'apprécier, au vu de l'instruction, si des opérations entrent dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée et, si c'est le cas, si les recettes réalisées par le contribuable entrent dans le champ d'application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée ou dans celui du taux normal de cette taxe, eu égard aux conditions dans lesquelles sont effectuées ses opérations.

3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que les factures litigieuses comprenaient, outre le règlement d'" avances travaux " pour le compte de la SCI Maseri, des acomptes d'honoraires de la SARL Monovar SP et que la SARL Monovar SP a appliqué un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée de 5,5 % sur le total hors taxes de ces deux montants. Ainsi, contrairement à ce que soutient la SARL Monovar SP, le litige porte à la fois sur la refacturation de travaux et sur la facturation par la SARL Monovar SP de ses propres honoraires, qui correspondent notamment à des prestations de nature administratives, commerciales, juridiques et financières. Elle n'est par suite pas fondée à soutenir que ses prestations administratives auraient été, dés le départ, taxées au taux normal.

4. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. (...) / IV. 1° Les opérations autres que celles qui sont définies au II, notamment (...), les travaux immobiliers (...) sont considérés comme des prestations de services. / V. L'assujetti, agissant en son nom propre mais pour le compte d'autrui, qui s'entremet dans (...) une prestation de services, est réputé avoir personnellement (...) reçu et fourni les services considérés. ". Aux termes de l'article 266 du code général des impôts : " 1. La base d'imposition est constituée : / (...) b. Pour les opérations ci-après, par le montant total de la transaction : / Opérations réalisées par un intermédiaire mentionné au V de l'article 256 et au III de l'article 256 bis ; ".

5. D'autre part, aux termes de l'article 279-0 bis du même code, dans la rédaction issue de la loi de finances pour 2004 : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit sur les travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien portant sur des locaux à usage d'habitation (...) 3. Le taux réduit prévu au 1 est applicable aux travaux facturés au propriétaire ou, le cas échéant, (...) à leur représentant à condition que le preneur atteste que ces travaux se rapportent à des locaux d'habitation (...). Le prestataire est tenu de conserver cette attestation à l'appui de sa comptabilité. ". Ces dispositions ne trouvent à s'appliquer en principe qu'en cas de facturation directe des travaux au propriétaire.

6. Il résulte de l'instruction que, par convention en date du 29 décembre 2009, la SCI Maseri a confié à la SARL Monovar SP la rénovation d'un immeuble d'habitation dont elle était propriétaire. Cette convention avait pour objet, conformément à son préambule, de définir les conditions dans lesquelles la SARL Monovar SP " réalisera ces travaux pour le compte du maître de l'ouvrage " en tant que " prestataire de service, d'aide et d'accompagnement aux travaux ". Selon l'article 6 de la convention, dans tous les actes et contrats passés par la SARL Monovar SP, celle-ci devra systématiquement indiquer qu'elle agit au nom et pour le compte du maître d'ouvrage. En vertu de l'article 7-1 de cette convention, dans la limite du programme, de l'enveloppe financière prévisionnelle et du délai préalablement définis, la SCI Maseri donne mandat à la SARL Monovar SP pour exercer notamment, en son nom et pour son compte, un certain nombre d'attributions telles que la préparation du choix, la signature, après approbation de la SCI Maseri, et le suivi des marchés d'études, de prestations intellectuelles et de travaux, le paiement au nom et pour le compte du maitre d'ouvrage des intervenants, la gestion financière et administrative du projet, la réception des travaux. L'article 9-1 prévoit que la SARL Monovar assure, pour le compte de la SCI Maseri, le paiement de toutes les dépenses destinées à être incluses dans le bilan définitif du projet, la SCI Maseri mettant à disposition de la SARL Monovar SP l'ensemble des fonds nécessaires au règlement des dépenses antérieurement à leur règlement. Enfin, l'article 13 détermine une rémunération forfaitaire de la SARL Monovar SP de 8 000 euros TTC, avec un taux de taxe sur la valeur ajoutée réduit à 5,5 %, versée au fur et à mesure de l'avancée de l'opération.

7. Il résulte de ces stipulations que la SARL Monovar SP devait agir, dans ses relations avec ses cocontractants, au nom et pour le compte de la SCI Maseri et non en son nom propre. Les attestations qu'elle a fournies aux entreprises pour l'application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée indiquent d'ailleurs qu'elle agit en application de la convention de prestations signée avec la SCI Maseri le 29 décembre 2009. Si les factures adressées à la SARL Monovar SP par les différentes entreprises ont été libellées au nom de cette dernière, conformément aux stipulations de la convention qui prévoyait qu'elle règlerait les factures pour le compte de la SCI, elles portent toutes soit la mention " opération SCI Maseri ", soit la mention " maîtrise d'ouvrage : SCI Maseri " ou encore la mention " restauration immeuble de 3 logements pour le compte de la SCI Maseri ". Dans ces conditions, la société requérante ne peut être regardée comme ayant agi comme un intermédiaire opaque. Elle ne peut, en conséquence, être réputée avoir personnellement reçu et fourni les prestations de travaux en litige. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que les factures qu'elle adressait à la SCI Maseri devaient s'analyser comme la facturation directe au propriétaire de travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien portant sur des locaux à usage d'habitation et devant, de ce fait, être soumis, dans leur ensemble, au taux réduit prévu à l'article 279-0 bis.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 266 du code général des impôts : " 1. La base d'imposition est constituée : / a. Pour (...) les prestations de services (...), par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de ces opérations, de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ; ". Aux termes de l'article 267 du code général des impôts : " II- Ne sont pas à comprendre dans la base d'imposition : (...) 2° Les sommes remboursées aux intermédiaires (...) qui effectuent des dépenses au nom et pour le compte de leurs commettants dans la mesure où ces intermédiaires rendent compte à leurs commettants, portent ces dépenses dans leur comptabilité dans des comptes de passage, et justifient auprès de l'administration des impôts de la nature ou du montant exact de ces débours. ".

9. Si ces dispositions permettent à un intermédiaire transparent de réclamer à son cocontractant le montant des sommes qu'il a engagées pour lui, correspondant au montant TTC des travaux réglés, sans que ces sommes ne soient prises en compte dans ses bases d'imposition, c'est à la condition qu'il respecte les règles prévues au 2° du II de l'article 267 du code général des impôts. Il résulte de l'instruction qu'ainsi que l'a indiqué la SARL Monovar SP dans ses dernières écritures, elle n'a pas comptabilisé les refacturations de travaux dans des comptes de passage.

10. En quatrième lieu, les dispositions de l'article 279-0 bis du code ne prévoient un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée que pour les travaux facturés au propriétaire ou à son représentant, et non pour la facturation de ses services d'entremise ou la refacturation des travaux par son représentant au propriétaire. Par suite, et dès lors qu'elle n'a pas respecté les règles prévues au 2° du II de l'article 267 du code général des impôts qui lui auraient permis d'exclure ces sommes de sa base imposable, la SARL Monovar SP n'est pas fondée à soutenir que dans l'hypothèse où elle serait qualifiée d'intermédiaire transparent, les montants qu'elle devait réclamer à la société Maseri, correspondant au montant TTC des travaux réglés aux diverses entreprises de bâtiment, n'avaient pas à être soumis au taux normal de taxe sur la valeur ajoutée.

11. En cinquième lieu, la circonstance, au demeurant non établie, que le Trésor n'aurait subi aucune perte du fait du traitement qui a été fait de la taxe sur la valeur ajoutée par les entreprises de travaux, par elle-même et par la SCI Maseri, est, en tout état de cause, sans influence sur le présent litige qui porte sur la détermination de la taxe sur la valeur ajoutée que devait légalement collecter la SCI Maseri.

12. En sixième lieu, la SARL Monovar SP n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 184 de l'instruction référencée 3 C-7-06 en date du 8 décembre 2006 selon laquelle " Il est rappelé que le taux réduit s'applique, toutes autres conditions étant remplies, quelle que soit la qualité du preneur des travaux et qu'il soit une personne physique ou une personne morale, pour autant que les prestations rendues correspondent à des travaux éligibles " qui ne donne pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il a été fait application.

13. En dernier lieu, la SARL Monovar reprend en appel le moyen tiré, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'invocation de la réponse ministérielle à M. B..., député (AN, 22 novembre 2005, page 10816 n° 74979), moyen auquel le tribunal a suffisamment répondu. Il y a lieu, par adoption des motifs des premiers juges, de l'écarter.

14. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Monovar SP n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Monovar SP est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Monovar SP et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2019 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

M. Souteyrand, président-assesseur,

MmeC..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 28 février 2019

2

N° 17LY01424


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre a - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY01424
Date de la décision : 28/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-06-02-09-01 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Calcul de la taxe. Taux.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : CAUDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-02-28;17ly01424 ?
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