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21/02/2019 | FRANCE | N°17LY01537

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre b - formation à 3, 21 février 2019, 17LY01537


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

I/ M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense sur son recours contre le titre de perception émis le 14 mars 2014 à son encontre pour un montant de 1 616 euros, ensemble ledit titre de perception et, d'autre part, de prononcer la décharge de la créance litigieuse.

Par un jugement n° 1408904 du 15 mars 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

II/ M. A...

a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 1er septembre 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

I/ M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense sur son recours contre le titre de perception émis le 14 mars 2014 à son encontre pour un montant de 1 616 euros, ensemble ledit titre de perception et, d'autre part, de prononcer la décharge de la créance litigieuse.

Par un jugement n° 1408904 du 15 mars 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

II/ M. A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 1er septembre 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté son recours dirigé contre la décision du 7 novembre 2013 du commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde de Nancy lui réclamant le reversement d'un trop-perçu de rémunération d'un montant de 1 616 euros et, en tant que de besoin, la décision implicite de rejet du même recours préalable résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre, après réunion de la commission des recours des militaires, ainsi que la décision précitée du 7 novembre 2013.

Par un jugement n° 1504381 du 15 novembre 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

I/ Par une requête enregistrée le 6 avril 2017 sous le n° 17LY01537, M. A..., représenté par la SELAFA Cabinet Cassel, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon n° 1408904 du 15 mars 2017 ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense sur son recours contre le titre de perception émis le 14 mars 2014 à son encontre pour un montant de 1 616 euros, ensemble ledit titre de perception ;

3°) de prononcer la décharge de la somme de 1 616 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le titre exécutoire ne comporte pas les mentions exigées par l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;

- les dispositions de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, entrée en vigueur le 1er janvier 2012, ne lui sont pas opposables et le délai imposé à l'administration pour prendre une décision individuelle créatrice de droit était alors arrivé à expiration ;

- en procédant au recouvrement tardif de sa créance, l'État a fait preuve d'une carence fautive, faisant obstacle au reversement litigieux, en compensation du préjudice qu'il a subi.

Par un mémoire enregistré le 12 septembre 2018, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'en application des dispositions de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, le trop-versé de solde ayant donné lieu à l'émission du titre de perception du 14 mars 2014 était totalement prescrit au moment de la notification de la décision du 7 novembre 2013.

II/ Par une requête enregistrée le 22 novembre 2017 sous le n° 17LY03975, M. A..., représenté par la SELAFA Cabinet Cassel, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon n° 1504381 du 15 novembre 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 1er septembre 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté son recours préalable dirigé contre la décision du 7 novembre 2013 du commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde de Nancy lui réclamant le reversement d'un trop-perçu de rémunération d'un montant de 1 616 euros ;

3°) d'annuler la décision implicite de rejet du même recours préalable résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre, après réunion de la commission des recours des militaires ;

4°) d'annuler la décision susmentionnée du 7 novembre 2013 ;

5°) de prononcer la décharge de la somme de 1 616 euros ;

6°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les dispositions de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, entrée en vigueur le 1er janvier 2012, ne lui sont pas opposables et le délai imposé à l'administration pour prendre une décision individuelle créatrice de droit était alors arrivé à expiration ;

- en procédant au recouvrement tardif de la créance, l'État a fait preuve d'une carence fautive, faisant obstacle au reversement litigieux, en compensation du préjudice qu'il a subi.

Par un mémoire enregistré le 12 septembre 2018, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'en application des dispositions de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, le trop-versé de solde ayant donné lieu à l'émission du titre de perception du 14 mars 2014 était totalement prescrit au moment de la notification de la décision du 7 novembre 2013.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code civil ;

- le code de la défense ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laval, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes de M. A... tendent à l'annulation des mêmes décisions et à la décharge de la même créance. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. M. A..., titulaire du grade de caporal, a été placé, à compter du 1er mai 2011, en position de détachement auprès de la commune de Meximieux, pour exercer les fonctions de gardien de police municipale. Le 7 novembre 2013, le commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde (CERHS) de Nancy lui a réclamé un trop-perçu de rémunération d'un montant de 1 616,30 euros au titre du mois de mai 2011 et le 14 mars 2014 un titre de perception de ce montant a été émis à son encontre. Le 8 avril 2014, il a exercé un recours contre ce titre de perception. En l'absence de réponse, il a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation de ce titre de perception et du rejet implicite de son opposition ainsi que la décharge de la créance litigieuse. Par ailleurs, M. A..., qui avait saisi, le 19 novembre 2014, la commission des recours des militaires d'un recours contre la décision du 7 novembre 2013, lequel a été rejeté le 1er septembre 2016, a demandé au tribunal d'annuler cette décision du 1er septembre 2016, la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense pendant plus de quatre mois sur ce même recours et la décision du 7 novembre 2013. M. A... relève appel des deux jugements par lesquels le tribunal administratif a rejeté ses demandes.

3. Aux termes de l'article 2224 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription : " Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ".

4. Aux termes de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, dans sa rédaction issue de l'article 94 de la loi du 28 décembre 2011 portant loi de finances rectificative pour 2011 : " Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive. / Toutefois, la répétition des sommes versées n'est pas soumise à ce délai dans le cas de paiements indus résultant soit de l'absence d'information de l'administration par un agent de modifications de sa situation personnelle ou familiale susceptibles d'avoir une incidence sur le montant de sa rémunération, soit de la transmission par un agent d'informations inexactes sur sa situation personnelle ou familiale (...) ".

5. Aux termes du second alinéa de l'article 2222 du code civil : " En cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ".

6. Il résulte de ces dernières dispositions que, lorsqu'une loi nouvelle modifiant le délai de prescription d'un droit, abrège ce délai, le délai nouveau est immédiatement applicable, mais ne peut à peine de rétroactivité, commencer à courir à compter de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle. Par ailleurs, le délai ancien, s'il a commencé à courir avant l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, ne demeure applicable que dans l'hypothèse où sa date d'expiration surviendrait antérieurement à la date d'expiration du délai nouveau.

7. Il résulte des dispositions précitées qu'à la date à laquelle la somme réclamée à M. A... au titre du mois de mai 2011 est devenue exigible, la prescription quinquennale s'appliquait à toutes les actions relatives aux rémunérations des agents publics, qu'il s'agisse d'une action en paiement ou d'une action en restitution de ce paiement. En l'espèce, le délai de cette prescription n'était pas expiré lorsque les dispositions de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, issu de la loi du 28 décembre 2011, sont entrées en vigueur le 30 décembre 2011. Ces dispositions ont eu pour effet de réduire le délai de prescription à deux ans pour les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents. Ce nouveau délai a commencé à courir à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, soit le 30 décembre 2011 pour arriver à échéance, le 30 décembre 2013. S'il résulte de l'instruction que M. A... a été destinataire de la décision précitée du 7 novembre 2013 du commandant du CERHS, l'administration n'apporte aucun élément de nature à établir que cette décision lui aurait été notifiée avant l'expiration du délai de prescription. Ainsi, le moyen tiré de ce que la créance litigieuse est atteinte par la prescription doit être accueilli.

8. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des requêtes, M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes.

9. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'État le versement à M. A... d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés à l'occasion du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Les jugements du tribunal administratif de Lyon des 15 mars et 15 novembre 2017 sont annulés.

Article 2 : La décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense sur le recours formé par M. A... contre le titre de perception émis le 14 mars 2014, la décision du 7 novembre 2013 du commandant du centre expert des ressources humaines et de la solde de Nancy lui réclamant le reversement d'un trop-perçu de rémunération d'un montant de 1 616 euros, le titre de perception émis le 14 mars 2014, la décision du 1er septembre 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté le recours préalable de l'intéressé dirigé contre la décision du 7 novembre 2013 et la décision implicite de rejet du même recours préalable résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre après réunion de la commission des recours des militaires sont annulés.

Article 3 : M. A... est déchargé de la somme de 1 616 euros.

Article 4 : L'État versera à M. A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2019 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Dèche, premier conseiller,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 février 2019.

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Nos 17LY01537-17LY03975


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre b - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY01537
Date de la décision : 21/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

18-03-02-01-01 Comptabilité publique et budget. Créances des collectivités publiques. Recouvrement. Procédure. État exécutoire.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SELAFA CABINET CASSEL

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-02-21;17ly01537 ?
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