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12/02/2019 | FRANCE | N°18LY03043

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 12 février 2019, 18LY03043


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner le centre hospitalier de Clamecy à lui payer la somme de 23 879 euros à titre de dommages et intérêts, somme éventuellement à parfaire, outre intérêts de droit à compter du 20 février 2014, outre le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1401945 du 25 juin 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Par un arrê

t du 21 mars 2017 n° 15LY02942 la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de M....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner le centre hospitalier de Clamecy à lui payer la somme de 23 879 euros à titre de dommages et intérêts, somme éventuellement à parfaire, outre intérêts de droit à compter du 20 février 2014, outre le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1401945 du 25 juin 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Par un arrêt du 21 mars 2017 n° 15LY02942 la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de M.B..., condamné le centre hospitalier de Clamecy à verser à M. B... une somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral, a mis la charge du centre hospitalier la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de la requête.

Par une décision n° 410724 du 26 juillet 2018 le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 21 mars 2017 en tant qu'il a statué sur le préjudice financier de M. B...et a renvoyé, dans cette mesure, l'affaire à la cour administrative d'appel de Lyon au greffe de laquelle elle a été enregistrée sous le no 18LY03043 le 30 juillet 2018.

Par un mémoire enregistré le 26 octobre 2018 et un mémoire non communiqué enregistré le 14 décembre 2018, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Dijon du 25 juin 2015 ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Clamecy à lui payer la somme de 18 879 euros en réparation de son préjudice financier ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Clamecy la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'illégalité de la décision du directeur du centre hospitalier de Clamecy du 9 décembre 2011 prévoyant qu'il n'assumerait plus de garde lui a causé un préjudice financier de 755 euros par mois sur une période de vingt-cinq mois, soit 18 975 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 novembre 2018, le centre hospitalier de Clamecy représenté par Me D... conclut, à titre principal, au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros au titre des frais d'instance et, à titre subsidiaire, à la minoration de l'indemnité demandée par M. B....

Il fait valoir que :

* les conclusions tendant à la révision de la somme de 2 000 euros mise à sa charge en réparation du préjudice moral de M. B... sont irrecevables ;

* M. B... était exclu du point de vue réglementaire de la possibilité d'effectuer des gardes administratives et le directeur du centre hospitalier avait l'obligation de le retirer du dispositif ;

* du fait de la réorganisation des services, décidée à la fin de l'année 2011, il n'est pas établi que M. B... aurait assumé le même nombre de gardes qu'auparavant. Il en aurait effectué tout au plus 10 semaines par an du fait de l'arrivée en 2012 de deux nouveaux administrateurs de garde.

Par ordonnance du 26 novembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 14 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

* la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

* le décret n° 2010-30 du 8 janvier 2010 pris en application de l'article 77 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

* le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

* le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller,

* et les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 9 décembre 2011, le directeur du centre hospitalier de Clamecy a prévu que M. B...n'exercerait plus les gardes qu'il avait été autorisé à assumer depuis 2004 les soirs et week-ends en suppléance du directeur de l'hôpital. Par un jugement, du 26 décembre 2013, devenu définitif, le tribunal administratif de Dijon a annulé cette décision au motif qu'elle n'était justifiée par aucun motif réel se rapportant à l'intérêt du service. Par un second jugement du 25 juin 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté les conclusions formées par M. B... à fin de condamnation du centre hospitalier de Clamecy à lui verser une somme 23 879 euros en réparation du préjudice découlant de l'illégalité de la décision du 9 décembre 2011. Par un arrêt du 21 mars 2017, la cour administrative d'appel de Lyon, a condamné le centre hospitalier à verser à M. B... une indemnité de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral et a rejeté ses conclusions tendant à la réparation de son préjudice financier. Par une décision du 26 juillet 2018 le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt en tant qu'il statue sur le préjudice financier de M. B... et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant la cour administrative d'appel de Lyon.

Sur la recevabilité des conclusions :

2. La fin de non recevoir opposée par le centre hospitalier de Clamecy, tirée de ce que M. B... n'est pas recevable à demander la révision du montant de l'indemnité au titre de son préjudice moral qui lui a été allouée par l'arrêt de la cour du 21 mars 2017 doit être écartée dès lors que les conclusions présentées par l'intéressé dans la présente instance se rapportent exclusivement à son préjudice financier et non à son préjudice moral.

Sur le préjudice financier :

3. En premier lieu, le centre hospitalier de Clamecy ne saurait utilement, et en tout état de cause, invoquer les dispositions de l'article 77 de la loi 9 janvier 1986 et de l'article 2 du décret no 2010-30 du 8 janvier 2010 qui n'ont pas vocation à régir les astreintes, pour soutenir que M. B...devait être obligatoirement exclu du dispositif d'astreinte.

4. En second lieu, en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Pour l'évaluation du montant de l'indemnité qui lui est due, il y a lieu de prendre en compte, notamment, la perte des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions.

5. Aux termes de l'article 20 du décret du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l'organisation du travail dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 : " Une période d'astreinte s'entend comme une période pendant laquelle l'agent, qui n'est pas sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de son employeur, a l'obligation d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'établissement. La durée de chaque intervention, temps de trajet inclus, est considérée comme temps de travail effectif. (...) ". Aux termes de l'article 21 de ce décret : " Les astreintes sont organisées en faisant prioritairement appel à des agents volontaires ". Aux termes de l'article 23 de ce décret : " Un même agent ne peut participer au fonctionnement du service d'astreinte que dans la limite d'un samedi, d'un dimanche et d'un jour férié par mois. La durée de l'astreinte ne peut excéder 72 heures pour quinze jours. (...) ". Aux termes de l'article 25 de ce décret : " Le temps passé en astreinte donne lieu soit à compensation horaire, soit à indemnisation. Les conditions de compensation ou d'indemnisation des astreintes sont fixées par décret. (...) ". Aux termes, enfin, de l'article 1er du décret du 11 juin 2003 relatif à la compensation et à l'indemnisation du service d'astreinte dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le temps passé en astreinte dans les conditions prévues par le titre II du décret du 4 janvier 2002 susvisé donne droit soit à une compensation horaire, soit à une indemnisation./ La compensation horaire est fixée au quart de la durée totale de l'astreinte à domicile./ L'indemnisation horaire correspond au quart d'une somme déterminée en prenant pour base le traitement indiciaire brut annuel de l'agent concerné au moment de l'astreinte dans la limite de l'indice brut 638 augmenté le cas échéant de l'indemnité de résidence, le tout divisé par 1 820. (...) ". Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'il n'est pas compensé, le temps passé en astreinte donne lieu à une indemnisation qui ne peut être regardée comme destinée à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions.

6. Si l'exercice d'astreintes ne saurait constituer un droit, la décision du 9 décembre 2011 par laquelle le directeur a exclu M. B... du dispositif des astreintes a, eu égard au motif de son annulation, revêtu un caractère fautif de nature à lui ouvrir, le cas échéant, un droit à réparation en ce qu'elle l'a privé d'une chance sérieuse de bénéficier des indemnités qu'il aurait pu percevoir s'il avait été maintenu dans ce dispositif.

7. Il est constant que, au moins pour les deux années qui ont précédé son exclusion du dispositif des astreintes, M. B... percevait, en compensation de celles qu'il assumait à raison d'une vingtaine de semaines par an, une indemnité mensuelle de 750 euros. Le centre hospitalier de Clamecy expose toutefois que si, au cours de cette même période, les astreintes étaient réparties entre trois personnes, dont M.B..., elles ont, à partir du mois de juin 2012 et jusqu'à la fin de l'année 2013, été réparties entre quatre personnes. Eu égard à cette nouvelle organisation de la répartition des astreintes au sein de l'hôpital à compter du mois de juin 2012, qui n'est pas contestée, il ne peut être tenu pour suffisamment certain que M. B... aurait continué d'assumer une vingtaine de semaines d'astreinte par an au cours de la période litigieuse ni, par suite, qu'il a été privé d'une chance sérieuse de percevoir au même taux l'indemnité qui lui était servie à ce titre. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation du préjudice financier de M. B... en fixant l'indemnité due par le centre hospitalier de Clamecy, à l'équivalent de l'indemnisation qu'il aurait perçue pour vingt-cinq semaines d'astreintes sur l'ensemble de la période litigieuse, soit 11 250 euros.

8. M. B... a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité en capital prévue au point précédent à compter du 20 février 2014 date de réception de sa demande d'indemnisation préalable par le centre hospitalier de Clamecy.

Sur les frais du litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative faisant obstacle à ce que soit mise à charge de M. B..., qui n'est pas partie perdante, une somme à ce titre, les conclusions du centre hospitalier de Clamecy en ce sens doivent être rejetées. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier une somme de 1 500 euros sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Le centre hospitalier de Clamecy est condamné à verser à M. B... une indemnité de 11 250 euros. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 20 février 2014.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Le jugement n° 1401945 du 25 juin 2015 du tribunal administratif de Dijon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le centre hospitalier de Clamecy paiera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions du centre hospitalier de Clamecy relatives aux frais non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au centre hospitalier de Clamecy.

Délibéré après l'audience du 15 janvier 2019 à laquelle siégeaient :

M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

Mme Virginie Chevalier-Aubert, président assesseur,

M. Pierre Thierry premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 février 2019.

2

N° 18LY03043

mg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY03043
Date de la décision : 12/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Pierre THIERRY
Rapporteur public ?: Mme PEUVREL
Avocat(s) : BREY

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-02-12;18ly03043 ?
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