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07/02/2019 | FRANCE | N°18LY02156

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre a - formation à 3, 07 février 2019, 18LY02156


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI de la Zone Industrielle de Montplain a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 1er février 2016 par laquelle le président de la communauté de communes Issoire-Communauté a exercé le droit de préemption urbain sur la parcelle cadastrée section ZL 361 sur le territoire de la commune d'Issoire.

Par un jugement n° 160222 du 12 avril 2018, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une re

quête et un mémoire en réplique enregistrés respectivement le 12 juin et le 26 novembre 2018...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI de la Zone Industrielle de Montplain a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 1er février 2016 par laquelle le président de la communauté de communes Issoire-Communauté a exercé le droit de préemption urbain sur la parcelle cadastrée section ZL 361 sur le territoire de la commune d'Issoire.

Par un jugement n° 160222 du 12 avril 2018, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés respectivement le 12 juin et le 26 novembre 2018, la SCI de la Zone Industrielle de Montplain, représentée par Me Joly, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 avril 2018 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

2°) d'annuler la décision du 1er février 2016 du président de la communauté de communes Issoire-Communauté ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes Issoire-Communauté la somme de 3 000 euros en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la communauté de communes Issoire-Communauté ne justifie pas, à la date à de la décision, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement prévu à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme ;

- c'est à tort que le tribunal a considéré, au vu des seules pièces purement déclaratives et non probantes du dossier, et sans faire usage de son pouvoir d'instruction pour vérifier la véracité de leur contenu, que la décision de préemption répond à un objectif d'intérêt général, alors qu'elle est uniquement motivée pour répondre à des besoins impérieux non avérés de développement d'une entreprise privée ; en outre, cette décision va contrecarrer la pérennisation de sa propre activité existante liée à l'automobile ;

- la décision de préemption litigieuse est entachée d'un détournement de pouvoir et de procédure dès lors qu'elle n'a été mise en oeuvre que dans le but de favoriser une entreprise privée par rapport à une autre qui avait elle-même renoncé à acquérir ce bien à son prix.

Par un mémoire, enregistré le 18 septembre 2018, la communauté d'agglomération Agglo Pays d'Issoire venant aux droits de la communauté de communes Issoire-Communauté, représentée par Me Soulier-Bonnefois, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SCI de la ZI de Montplain au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'activité de location de voitures envisagée par la requérante sur la parcelle en litige consistant à développer une activité commerciale interdite dans la ZAC de Lavaur Labéchade, elle est dépourvue d'intérêt à agir et sa requête est irrecevable ;

- les moyens soulevés par la SCI de la ZI du Montplain ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Souteyrand, président-rapporteur,

- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public,

- et les observations de Me Soulier-Bonnefois, représentant la communauté d'agglomération Agglo Pays d'Issoire.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Sud Avenir Immobilier et la SCI de la Zone Industrielle de Montplain ont signé le 20 octobre 2015 un compromis pour la vente, au prix de 360 000 euros, de la parcelle de 2011 m², cadastrée section ZL n° 361, située au lieu-dit " Les Croizettes " sur le territoire de la commune d'Issoire, et sur laquelle est édifié un bâtiment à usage d'atelier de 410 m². Par une décision du 1er février 2016, le président de la communauté de communes Issoire-Communauté a décidé de préempter ce bien pour le même prix en vue de le rétrocéder à la société Vitrobio Naturveda pour permettre à celle-ci d'étendre et de pérenniser son activité sur le site. La SCI de la Zone Industrielle de Montplain, en sa qualité d'acquéreur évincé, relève appel du jugement du 27 septembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande à fin d'annulation de cette décision du 1er février 2016.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1 (...) ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. (...) Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. (...) ". Et aux termes de l'article L. 300-1 du même code : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité et l'habitat indigne ou dangereux, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. (...) ".

3. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme que, pour exercer légalement le droit de préemption urbain, les collectivités titulaires de ce droit doivent justifier, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date. En outre, la mise en oeuvre de ce droit doit, eu égard notamment aux caractéristiques du bien faisant l'objet de l'opération ou au coût prévisible de cette dernière, répondre à un intérêt général suffisant.

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la société Vitrobio Naturveda, qui depuis 1994 fabrique et distribue des produits pharmaceutiques, est implantée depuis 2001 sur les parcelles cadastrées section ZL n° 295 et 316, cette dernière jouxtant la parcelle n° 361, dont la préemption est en litige. Elle a vu son chiffre d'affaire fortement progresser depuis 2011 et emploie en 2015 au moins neuf salariés en contrat à durée indéterminée et, de façon occasionnelle, des salariés handicapés dépendants d'un centre d'aide par le travail. Par un courriel du 22 octobre 2015, le conseil de la société Vitrobio Naturveda a proposé au gérant de la SCI Sud Avenir Immobilier d'acquérir pour un prix de 250 000 euros, à parfaire après expertise immobilière, la parcelle en litige mise en vente au prix de 480 000 euros, pour lui permettre de disposer d'un bâtiment pour le stockage de sa production, offre repoussée le lendemain au motif de la signature du compromis de vente pour un montant de 360 000 euros avec la SCI de la Zone Industrielle de Montplain, qui est intervenu le 30 octobre 2015. En outre, les parcelles n° 295 et 316 susmentionnées, qui accueillent les installations de la société Vitrobio Naturveda, sont situées en totalité en zone inondable d'aléa fort au plan de prévention des risques d'inondation (PPRi) Couze-Pavin et Allier, et en majeure partie au plan en cours de révision, dans laquelle aucune extension des constructions existantes n'est autorisée. Par suite, à la date du 1er février 2016 de la décision en litige, la communauté de communes Issoire-Communauté justifiait d'un projet en vue d'organiser le maintien et l'extension d'une activité économique, au sens des dispositions précitées à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme.

5. En deuxième lieu, compte-tenu de ce qui vient d'être dit, le développement de l'activité de la société Vitrobio Naturveda étant conditionné par la disposition d'une capacité d'extension de ses locaux, notamment de stockage, sur la parcelle n° 361 préemptée qui est bâtie et jouxte ses installations, la décision en litige est justifiée par un intérêt général suffisant. Par suite, les circonstances qu'un permis de construire a toutefois pu été délivré le 8 août 2016 à la société Vitrobio Naturveda, pour l'extension de 61 m² du laboratoire existant, sur la parcelle cadastrée section ZL n° 316 et non sur la parcelle n° 361 en cause et que l'acquéreur évincé justifierait d'un projet pouvant concourir aux objectifs poursuivis par la collectivité titulaire du droit de préemption, sont sans incidence sur la légalité de la décision de préemption.

6. En dernier lieu, comme il vient d'être dit au point précédent, la décision de préemption litigieuse étant justifiée par des considérations d'intérêt général, il y a lieu d'écarter le moyen tiré du détournement de pouvoir.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la communauté de communes, que la SCI de la ZI du Montplain n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 1er février 2016 du président de la communauté de communes Issoire-Communauté.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté d'agglomération Agglo Pays d'Issoire, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la SCI de la ZI du Montplain. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI de la ZI du Montplain une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la communauté d'agglomération Agglo Pays d'Issoire.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI de la ZI du Montplain est rejetée.

Article 2 : La SCI de la ZI du Montplain versera à la communauté d'agglomération Agglo Pays d'Issoire la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la SCI de la ZI du Montplain et à la communauté d'agglomération Agglo Pays d'Issoire.

Délibéré après l'audience du 17 janvier 2019 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

M. Souteyrand, président-assesseur,

Mme A..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 7 février 2019.

N° 18LY02156 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre a - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY02156
Date de la décision : 07/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-02-01-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Procédures d'intervention foncière. Préemption et réserves foncières. Réserves foncières.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: M. Eric SOUTEYRAND
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : SOULIER

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-02-07;18ly02156 ?
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