Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Dijon :
1°) d'annuler l'arrêté du 27 mai 2015 par lequel le président du conseil départemental de la Nièvre l'a intégré, à compter du 1er janvier 2015, dans le grade de technicien principal de 2ème classe en tant qu'il module l'indemnité spécifique de service ;
2°) d'enjoindre au président du conseil départemental de la Nièvre de lui verser l'arriéré des primes non réglées ;
3°) de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1503166 du 23 décembre 2016, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 18 février 2017, M. A..., représenté par la SCP Bon de Saulce Latour, avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 23 décembre 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté mentionné ci-avant du président du conseil départemental de la Nièvre du 27 mai 2015 en ce qu'il module l'indemnité spécifique de service ;
3°) d'enjoindre au président du conseil départemental de la Nièvre de lui verser l'arriéré des primes non réglées ;
4°) de mettre à la charge du département de la Nièvre une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce que le mémoire qu'il a produit le 7 décembre 2016 n'a pas été pris en compte par les premiers juges, qui n'ont pas répondu aux moyens nouveaux développés dans ce mémoire ;
- le régime indemnitaire dont il bénéficie en application de la délibération du conseil départemental de la Nièvre du 2 février 2015 le place dans une situation d'inégalité avec les autres agents territoriaux de même grade et de même échelon ; il le place dans une situation d'inégalité avec d'autres agents intégrés au sein de la fonction publique territoriale en ce que d'autres ouvriers des parcs et ateliers intégrés au sein de la fonction publique territoriale au même grade et au même échelon bénéficient d'un régime plus favorable alors que les fonctions qu'ils exercent sont identiques aux siennes et que leur ancienneté est identique voire moindre ; l'intégration dans la fonction publique territoriale des ouvriers des parcs et ateliers des ponts et chaussées et des bases aériennes ne s'accompagnait d'aucun avantage, contrairement à ce qu'ont relevé les premiers juges ; l'indemnité spécifique de service est utilisée comme prime " compensatrice déguisée " ; il n'est pas établi que les agents dont l'indemnité est modulée exerceraient des fonctions différentes des autres membres de la fonction publique territoriale de grade et d'échelon équivalents ;
- les règles relatives à la modulation définies par la circulaire n° NOR : INTB0000062C du 22 mars 2000 n'ont pas été respectées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 novembre 2018, le département de la Nièvre, représenté par Me Jousselin, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 500 euros soit mise à la charge du requérant au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- la loi n° 2009-1291 du 26 octobre 2009 relative au transfert aux départements des parcs de l'équipement et à l'évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers ;
- le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 pris pour l'application du premier alinéa de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le décret n° 2003-799 du 25 août 2003 relatif à l'indemnité spécifique de service allouée aux ingénieurs des ponts et chaussées et aux fonctionnaires des corps techniques de l'équipement ;
- le décret n° 2010-329 du 22 mars 2010 portant dispositions statutaires communes à divers cadres d'emplois de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique territoriale ;
- le décret n° 2010-1357 du 9 novembre 2010 portant statut particulier du cadre d'emplois des techniciens territoriaux ;
- le décret n° 2014-456 du 6 mai 2014 fixant les conditions d'intégration dans les cadres d'emplois de la fonction publique territoriale des ouvriers des parcs et ateliers des ponts et chaussées et des bases aériennes ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère,
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me Jousselin représentant le département de la Nièvre ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ouvrier des parcs et ateliers au sein de l'agence " Nièvre Travaux et Matériels ", a demandé son intégration dans la fonction publique territoriale par application des dispositions de la loi du 26 octobre 2009 et du décret du 6 mai 2014 susvisés. Par un arrêté du président du conseil départemental de la Nièvre du 27 mai 2015, il a été intégré à compter du 1er janvier 2015 dans le cadre d'emplois des techniciens territoriaux, au huitième échelon du grade de technicien territorial principal de 1ère classe, avec une ancienneté conservée de un an et quatre mois. Par le même arrêté, lui est attribué un coefficient d'indemnité spécifique de service de 40,86 %, soit un montant mensuel de 221,80 euros. M. A... a formé un recours gracieux contre le régime indemnitaire ainsi défini. Le président du conseil départemental de la Nièvre a rejeté ce recours par une décision du 22 septembre 2015. M. A... relève appel du jugement du 23 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 27 mai 2015 en tant qu'il module le montant de l'indemnité spécifique de service.
Sur la régularité du jugement :
2. Il ressort des pièces du dossier de première instance que le requérant a produit, le 7 décembre 2016, peu après réception de l'avis d'audience prévue une semaine plus tard, un an et demi après production du mémoire en défense du département de la Nièvre, un mémoire par lequel il a développé un argumentaire plus détaillé que dans sa demande initiale et qu'il a assorti d'éléments de comparaison de sa situation avec celle de deux de ses collègues. Toutefois, ce mémoire ne comportait pas de conclusions nouvelles et ne soulevait pas de moyen nouveau, en dehors d'un moyen inopérant, tiré de ce que les règles de modulation fixées par la circulaire NOR INTB0000062C du 22 mars 2000 n'auraient pas été respectées. En outre, il est constant que les premiers juges, qui étaient saisis de plusieurs demandes similaires à celle de M. A..., disposaient des éléments de comparaison dont il se prévalait par ce mémoire complémentaire. Par suite, ils n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité en ne communiquant pas ce mémoire et n'ont pas omis de répondre à une conclusion ou un moyen nouveau.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. D'une part, aux termes de l'article 88 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 : " L'assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale ou le conseil d'administration d'un établissement public local fixe les régimes indemnitaires (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 6 septembre 1991 susvisé : " Le régime indemnitaire fixé par les assemblées délibérantes des collectivités territoriales et les conseils d'administration des établissements publics locaux pour les différentes catégories de fonctionnaires territoriaux ne doit pas être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat exerçant des fonctions équivalentes. (...) ". Selon l'article 2 du même texte : " L'assemblée délibérante de la collectivité ou le conseil d'administration de l'établissement fixe, dans les limites prévues à l'article 1er, la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités applicables aux fonctionnaires de ces collectivités ou établissements. (...) L'autorité investie du pouvoir de nomination détermine, dans cette limite, le taux individuel applicable à chaque fonctionnaire. ". Il résulte de ces dispositions qu'il revient à l'assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale de fixer elle-même la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités bénéficiant aux fonctionnaires de la collectivité, sans que le régime ainsi institué puisse être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat d'un grade et d'un corps équivalents au grade et au cadre d'emplois de ces fonctionnaires territoriaux et sans que la collectivité soit tenue de faire bénéficier ses fonctionnaires de régimes indemnitaires identiques à ceux des fonctionnaires de l'Etat. Par ailleurs, le respect du principe d'égalité entre les agents publics ne s'oppose pas à l'institution de différences dans le régime indemnitaire dont ils bénéficient, fondées sur des différences dans les conditions d'exercice de leurs fonctions ou sur les nécessités du bon fonctionnement du service auquel ils appartiennent.
4. Par délibération du 2 février 2015, le conseil départemental de la Nièvre a, dans le cadre de l'intégration des ouvriers des parcs et ateliers à la fonction publique territoriale, prévu que l'indemnité spécifique de service leur serait attribuée individuellement en fonction des missions exercées. M. A... soutient que la modulation ainsi instituée crée une rupture d'égalité entre, d'une part, les agents intégrés et les agents en place et, d'autre part, les agents intégrés eux-mêmes.
5. En premier lieu, il résulte des écritures en défense produites par le département de la Nièvre que la prise en compte, en application de l'article 2 du décret du 6 mai 2014 susvisé, de deux primes pour la détermination de l'échelon a abouti à intégrer les agents concernés à des échelons très élevés dans leur grade, ce qui a entrainé une amélioration de leur traitement de base. La modulation de l'indemnité spécifique de service allouée aux ouvriers des parcs et ateliers intégrés, qui conduit à attribuer cette indemnité individuellement en fonction non du grade et de l'ancienneté mais des missions exercées, a, selon le département, pour but de réduire le décalage, résultant de ces conditions d'intégration avantageuses, entre le grade des agents intégrés et leurs fonctions effectives afin de lisser les disparités entre ces derniers et les autres agents qui, à fonctions équivalentes, relèvent de grades moins élevés. Le département de la Nièvre a également fait valoir, sans être contredit, que M. A..., après son intégration dans le grade de technicien principal de 1ère classe, avait exercé les mêmes fonctions qu'auparavant. Il ressort de la fiche de poste détaillée de M. A... et il n'est pas contesté par ce dernier que ses fonctions de " Technicien d'atelier de maintenance technique sur matériels, véhicules et engins. Positionnement de chef d'équipe ", si elles comportent une mission d'encadrement, qu'ont vocation à exercer les techniciens principaux territoriaux de 1ère classe, conformément aux dispositions du II de l'article 2 du décret du 9 novembre 2010 portant statut particulier du cadre d'emplois des techniciens territoriaux, impliquent moins d'autonomie et de responsabilités. En outre, contrairement à ce qu'allègue M. A..., il ressort des pièces du dossier que son intégration s'est accompagnée d'une hausse de sa rémunération. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'il a été placé dans une situation d'inégalité avec les autres agents territoriaux de même grade et de même échelon déjà en poste.
6. En deuxième lieu, si M. A... soutient qu'un ancien ouvrier des parcs et ateliers, intégré dans le même cadre d'emplois que lui, au même grade et au même échelon, bénéficie d'un coefficient d'indemnité spécifique de service plus favorable alors que leur ancienneté est moindre, il n'établit pas, toutefois, que les fonctions exercées par ce collègue seraient identiques aux siennes. Par ailleurs, il ne produit aucune pièce au soutien de son allégation selon laquelle certains ouvriers des parcs et ateliers auraient été intégrés dans la fonction publique territoriale avec une indemnité spécifique de service à taux plein. En tout état de cause, en se bornant à contester le principe de la modulation de l'indemnité spécifique de service qui lui a été attribuée sans en contester le coefficient ni le montant, il ne peut utilement soutenir que l'arrêté du 27 mai 2015 du président du conseil départemental de la Nièvre serait, en tant qu'il module cette indemnité pour les ouvriers des parcs et ateliers intégrés dans la fonction publique territoriale, illégal au motif qu'il entraînerait une rupture d'égalité de traitement entre ces agents.
7. En troisième lieu, M. A... ne saurait, en tout état de cause, utilement se prévaloir de ce que la circulaire du 22 mars 2000 aurait été méconnue, le décret n° 2000-136 du 18 février 2000 relatif à l'indemnité spécifique de service allouée aux fonctionnaires des corps techniques de l'équipement, sur le fondement duquel elle a été prise, ayant été abrogé le 19 avril 2002.
8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté en litige du 27 mai 2015, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du département de la Nièvre, qui n'est pas partie perdante, le versement de la somme demandée par M. A... au titre des frais non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au département de la Nièvre.
Copie en sera adressée au préfet de la Nièvre.
Délibéré après l'audience du 18 décembre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
M. Pierre Thierry, premier conseiller,
Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère.
Lu en audience publique, le 22 janvier 2019.
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N° 17LY00716