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21/01/2019 | FRANCE | N°18LY03050

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre b - formation à 3, 21 janvier 2019, 18LY03050


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... M'A... a demandé au président du tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 23 mai 2018 par laquelle le préfet de l'Isère a décidé son transfert aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile ainsi que la décision du 8 juin 2018 par laquelle ce préfet l'a assigné à résidence

Par un jugement n° 1804712 du 27 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions.

Procédure devant la

cour

Par une requête enregistrée le 3 août 2018, le préfet de l'Isère demande à la cour :

1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... M'A... a demandé au président du tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 23 mai 2018 par laquelle le préfet de l'Isère a décidé son transfert aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile ainsi que la décision du 8 juin 2018 par laquelle ce préfet l'a assigné à résidence

Par un jugement n° 1804712 du 27 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 3 août 2018, le préfet de l'Isère demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble du 27 juillet 2018 ;

2°) de rejeter la demande de M. M'A... devant le président du tribunal administratif de Grenoble.

Il soutient que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a considéré qu'il avait commis une erreur de droit en n'indiquant pas, dans la décision de transfert contestée, si la demande d'asile de M. M'A... était en cours d'examen.

Par un mémoire enregistré le 27 décembre 2018, M. M'A..., représenté par Me Schürmann, avocate, conclut :

- au rejet de la requête ;

- à ce qu'il soit enjoint au préfet de procéder à l'enregistrement de sa demande d'asile selon la procédure normale, de lui remettre un dossier de demande à transmettre à l'Office français de protection des réfugiés apatrides de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en qualité de demandeur d'asile, dans un délai de quarante-huit heures, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans un délai de huit jours, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

- de mettre à la charge de l'État le paiement à son conseil d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le préfet a commis une erreur de droit en ne précisant pas les motifs pour lesquels la décision de transfert est fondée sur les dispositions de l'article 18.1.b du règlement du 26 juin 2013 ;

- cette décision est insuffisamment motivée.

M. M'A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 novembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 modifié par le règlement (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport M. Clot, président, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. M'A..., ressortissant guinéen né le 25 novembre 1986, déclare être entré irrégulièrement en France le 1er janvier 2018. Le 28 février 2018, il a demandé son admission au séjour au titre de l'asile auprès des services de la préfecture de l'Isère. Le 23 mai 2018, le préfet de l'Isère a décidé son transfert vers l'Italie pour l'examen de sa demande d'asile. Le 8 juin 2018, ledit préfet l'a assigné à résidence. Ce préfet fait appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions.

Sur la légalité de l'arrêté de transfert :

2. Aux termes de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. L'État membre responsable en vertu du présent règlement est tenu de : (...) b) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le demandeur dont la demande est en cours d'examen et qui a présenté une demande auprès d'un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre ; (...) d) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le ressortissant de pays tiers ou l'apatride dont la demande a été rejetée et qui a présenté une demande auprès d'un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre. (...) ".

3. Le préfet de l'Isère a saisi les autorités italiennes d'une demande de reprise en charge de M. M'A... sur le fondement du b) du 1 de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 et ces autorités ont implicitement donné leur accord. L'intéressé allègue, sans l'établir, que, sa demande d'asile ayant été rejetée en Italie, sa situation relevait, en réalité, du d) du même texte. Toutefois, dans ce cas, le préfet pouvait décider son transfert sur ce fondement, la substitution de cette base légale à celle du b) n'ayant pas pour effet de priver M. M'A... d'une garantie et l'administration disposant du même pouvoir d'appréciation. Par suite, la circonstance que la demande d'asile de l'intéressé aurait été rejetée en Italie reste sans incidence sur la légalité de la décision de transfert en litige. En conséquence, c'est à tort que, pour annuler cette décision de transfert et, par voie de conséquence, la décision portant assignation à résidence, le magistrat désigné par le président du tribunal s'est fondé sur le motif tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet en se fondant sur les dispositions du b) du 1 de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013, sans indiquer si cette demande était toujours en cours d'examen.

4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. M'A....

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la décision de transfert contestée a été signée par M. C... E..., sous-préfet de La Tour-du-Pin, qui a reçu du préfet de l'Isère, par arrêté du 7 mai 2018, publié au recueil des actes administratifs le 9 mai 2018, délégation à cet effet en cas d'absence ou d'empêchement de Mme Violaine Demaret, secrétaire générale de la préfecture de l'Isère. Il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme D... n'était pas alors absente ou empêchée. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la décision en litige doit être écarté.

6. En deuxième lieu, en application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre État membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.

7. Pour l'application de ces dispositions, est suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre État membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application.

8. S'agissant d'un étranger ayant, dans les conditions posées par le règlement, présenté une demande d'asile dans un autre État membre et devant, en conséquence, faire l'objet d'une reprise en charge par cet État, doit être regardée comme suffisamment motivée la décision de transfert qui, après avoir visé le règlement, relève que le demandeur a antérieurement présenté une demande dans l'État en cause, une telle motivation faisant apparaître qu'il est fait application du b), c) ou d) du paragraphe 1 de l'article 18 ou du paragraphe 5 de l'article 20 du règlement.

9. L'arrêté du 23 mai 2018 en litige, par lequel le préfet de l'Isère a décidé le transfert de M. M'A... vers l'Italie, responsable de l'examen de sa demande d'asile, vise les textes sur lesquels il se fonde et notamment l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 18 paragraphe 1 point b) du règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Il indique qu'il ressort de la comparaison des empreintes digitales de M. M'A... dans les bases de données européennes que ce dernier a sollicité l'asile auprès des autorités italiennes, qui ont donné leur accord implicite pour sa reprise en charge sur le fondement du b) du 1. de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 et qui doivent être considérées comme responsables de l'examen de sa demande d'asile. Ces énonciations font état des éléments permettant de déterminer la responsabilité des autorités italiennes, requises aux fins de reprise en charge de l'intéressé. Par suite, la décision de transfert contestée est suffisamment motivée.

10. En troisième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. (...) 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé. "

11. L'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne prévoit l'obligation de recourir à un interprète inscrit sur la liste des interprètes traducteurs dressée en application de l'article R. 111-1 du même code ou appartenant à un organisme d'interprétariat et de traduction agréé par l'administration qu'en cas d'interprète intervenant par l'intermédiaire de moyens de télécommunication.

12. En l'espèce, la circonstance que l'interprète qui a assisté M. M'A... lors de son entretien individuel en préfecture, en étant présent à ses côtés, n'aurait pas été agréé ou inscrit sur la liste prévue à l'article R. 111-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est sans incidence sur la régularité de la procédure, dès lors qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose cette exigence dans le cas où l'interprète est présent lors de cet entretien. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la personne ayant assisté l'intéressé en tant qu'interprète en langue soussou n'était pas capable d'assurer une bonne communication entre celui-ci et le fonctionnaire menant cet entretien.

13. En quatrième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604-2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement et notamment : / a) des objectifs du présent règlement (...) / b) des critères de détermination de l'État membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée (...) / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5 (...) ". Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et en tout état de cause en temps utile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend.

14. Il ressort des pièces, et notamment des copies des documents d'information remis à M. M'A... et signés par lui, qu'il s'est vu remettre, le 28 février 2018, le guide d'accueil du demandeur d'asile ainsi que les deux brochures d'information A " j'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' " et B " je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' ". Ces documents étaient rédigés en langue française. Selon le compte rendu et le résumé de l'entretien mentionné ci-dessus, l'intéressé a déclaré ne parler et ne comprendre que le soussou. Toutefois, avec l'assistance d'un interprète, il a également signé un document par lequel il a attesté avoir reçu les brochures A et B en langue française, langue officielle de la République de Guinée, qu'il a déclaré comprendre. Dès lors, M. M'A... a, en l'espèce, bénéficié de la garantie prévue par les dispositions précitées de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013.

15. En cinquième lieu, aux termes du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 dispose que : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable ".

16. L'Italie est un État membre de l'Union européenne, partie à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complété par le protocole de New York, et à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il doit alors être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d'asile dans cet État membre est conforme aux exigences de la convention de Genève ainsi qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En se bornant à critiquer de façon générale les difficultés des autorités italiennes face à l'afflux de migrants, constatées notamment par les organisations non gouvernementales, M. M'A... ne démontre pas qu'il existerait une défaillance systémique en Italie. Il ne démontre pas plus qu'il serait exposé dans ce pays à des traitements inhumains ou dégradants dans ce pays. Par suite, le préfet de l'Isère n'a pas méconnu les dispositions du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013 et n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ni d'un défaut d'examen.

17. En sixième lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. (...) 2. L'État membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'État membre responsable, ou l'État membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre État membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. Les personnes concernées doivent exprimer leur consentement par écrit ".

18. La faculté laissée à chaque État membre, par le 1. de l'article 17 du règlement n° 604/2013, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

19. La circonstance qu'une précédente demande d'asile présentée par M. M'A... aurait été rejetée par les autorités italiennes ne fait pas obstacle à sa reprise en charge par ces mêmes autorités, alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ne pourrait pas présenter une nouvelle demande d'asile en Italie. Dès lors, et pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 16, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage, en l'espèce, de la faculté que prévoit l'article 17 précité.

Sur la légalité de l'arrêté d'assignation à résidence :

20 En premier lieu, l'arrêté contesté a été signé par Mme Violaine Demaret, secrétaire générale de la préfecture de l'Isère, qui disposait d'une délégation de signature du préfet de l'Isère, par arrêté du 7 mai 2018, publié au recueil des actes administratifs le 9 mai 2018. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte en litige doit être écarté.

21. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision d'assignation à résidence est motivée. (...) ". La décision contestée, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée.

22. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit plus haut que M. M'A... n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision ordonnant son transfert aux autorités italiennes.

23. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.-L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : /1° Doit être remis aux autorités compétentes d'un État membre de l'Union européenne en application des articles L. 531-1 ou L. 531-2 ou fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 (...) ".

24. Il ne ressort pas des pièces que l'exécution de la décision de transfert ne demeurait pas une perspective raisonnable à la date de l'assignation à résidence. La circonstance que M. M'A... ne présente aucun risque de fuite ne peut pas être utilement invoquée pour contester une mesure d'assignation à résidence, laquelle est applicable aux étrangers présentant des garanties de représentation effectives propres à prévenir ce risque de fuite. Par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision assignant M. M'A... à résidence et l'obligeant à se présenter deux fois par semaine dans l'un des services de police de Grenoble, constitue une mesure injustifiée et disproportionnée au regard du but poursuivi. Par suite, la décision contestée n'est entachée ni d'une erreur manifeste d'appréciation ni d'une erreur de droit.

25. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions en litige.

26. Le présent arrêt n'appelant aucune mesure d'exécution, les conclusions de M. M'A... à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au profit du conseil de M. M'A..., au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble du 27 juillet 2018 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de M. M'A... sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... M'A.... Copie en sera adressée au préfet de l'Isère et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Grenoble.

Délibéré après l'audience du 14 janvier 2019 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 janvier 2019.

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N° 18LY03050


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre b - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY03050
Date de la décision : 21/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

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Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SCHURMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-01-21;18ly03050 ?
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