Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... E...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 24 octobre 2016 par lesquelles le préfet de Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1700992 du 21 juin 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 9 novembre 2017, M. E..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 21 juin 2017 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du 24 octobre 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande en lui délivrer dans l'attente une telle autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, à payer à son conseil, la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle.
M. E... soutient que :
- le refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivé ;
- cette motivation révèle un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur de fait quant à l'existence de liens familiaux en Arménie ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale compte tenu de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 janvier 2018, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.
Il s'en rapporte à ses écritures de première instance.
M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 septembre 2017.
Par une ordonnance du 19 décembre 2017 la clôture d'instruction a été fixée au 22 janvier 2018, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative. L'instruction a été rouverte par la communication, le 23 janvier 2018, du mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de MmeF..., première conseillère,
- et les observations de Me C..., représentant M. E... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., ressortissant arménien né le 26 septembre 1993, est entré en France à l'âge de 15 ans en compagnie de sa mère KarineD..., à la date déclarée du 26 novembre 2008. La demande d'asile présentée par sa mère a été rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 5 novembre 2009, confirmée par une ordonnance de la Cour nationale du droit d'asile du 29 octobre 2010. Sa mère a obtenu, en raison de son état de santé, des titres de séjour en qualité d'étrangère malade du 8 juillet 2010 au 5 avril 2012. Les décisions du 29 mars 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de faire droit à la demande de renouvellement de ce titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ont été annulées par un jugement du tribunal administratif de Lyon du 10 septembre 2013 au motif que le traitement dont elle avait besoin n'était pas disponible en Arménie. En exécution de ce jugement, le préfet du Rhône a délivré à Mme D... un titre de séjour valable du 9 septembre 2013 au 8 septembre 2014. Par un jugement du 10 décembre 2013, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 15 février 2012 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de délivrer à M. E... un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. E... s'est alors vu délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " valable du 9 septembre 2013 au 8 septembre 2014. Par décisions du 3 février 2015, le préfet a refusé de faire droit à sa demande de renouvellement de ce titre de séjour et a, le même jour, refusé de renouveler le titre de séjour de sa mère au motif que le traitement de Mme D... était désormais disponible en Arménie, et a assorti ses décisions d'obligations de quitter le territoire français et de décisions fixant le pays de destination. La légalité de ces décisions a été confirmée par deux jugements du tribunal administratif de Lyon du 29 septembre 2015, puis par deux arrêts de la cour administrative de Lyon du 30 août 2016. M. E... relève appel du jugement du 21 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 24 octobre 2016 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur le refus de séjour :
2. M. E... reprend en appel les moyens qu'il avait présentés devant le tribunal, tirés de ce que le refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivé et de ce que cette motivation révèle un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle, moyens auxquels le tribunal a suffisamment répondu. Il y a lieu, par adoption des motifs des premiers juges, de les écarter.
3. M. E... fait valoir que la décision attaquée, qui indique qu'il ne justifie pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, est entachée d'erreur de fait dès lors que, par un jugement du 10 décembre 2013 le tribunal a jugé qu'il est constant qu'il " est dépourvu de tout lien familial proche en Arménie ". Toutefois, ce jugement, qui a indiqué " qu'il est dépourvu de tout lien familial proche en Arménie dès lors qu'il est le seul enfant survivant de Mme D... et que son père biologique a quitté la cellule familiale peu de temps après sa naissance " ne se prononce pas sur l'ensemble des liens familiaux que M. E... est susceptible d'avoir conservé dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision litigieuse serait, pour ce motif, entachée d'erreur de fait, n'est pas fondé.
4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. Pour contester le refus de titre de séjour qui lui a été opposé, M. E..., qui déclare être célibataire, se prévaut de la durée de sa présence sur le territoire français, de son intégration et de celle de sa mère, de l'absence d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine et des difficultés qu'aurait sa mère, qui a besoin de son assistance, pour s'y faire soigner. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que si M. E..., qui est arrivé à l'âge de quinze ans en France, y résidait depuis presque huit ans à la date de la décision litigieuse, il a fait l'objet en février 2015 d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français, qu'il n'a pas exécutée. Les emplois que lui-même et sa mère ont occupés, démontrant leur volonté d'intégration, n'ont toujours concerné qu'un faible volume horaire. Comme lui, sa mère a fait l'objet d'un précédent refus de titre de séjour et d'une obligation de quitter le territoire français et s'est vue refuser la délivrance d'un titre de séjour en octobre 2016. Il n'établit pas, par les pièces qu'il produit, que sa mère ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en Arménie, alors que le refus de renouvellement, en février 2015, de son titre de séjour en qualité d'étrangère malade pris au motif que son traitement était disponible en Arménie a été confirmé par un jugement du tribunal administratif de Lyon et par la cour de céans. Ainsi, rien ne fait obstacle à ce que sa mère l'accompagne en Arménie. Dans ces conditions, la décision contestée n'a pas porté au droit de M. E... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Le préfet du Rhône n'a, ainsi, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
6. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) ". Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, M. E... ne peut être regardé comme justifiant de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires au sens de cet article. Il suit de là que le moyen tiré de ce que le préfet du Rhône aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en lui refusant une admission exceptionnelle au séjour doit être écarté.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
7. Il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé, que M. E... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français.
8. Pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, la décision obligeant M. E... à quitter le territoire français n'a pas été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressé.
Sur la décision fixant le pays de destination :
9. Il résulte de ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour et de celle l'obligeant à quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 20 décembre 2018, à laquelle siégeaient :
Mme Fischer-Hirtz, présidente de chambre,
M. Souteyrand, président-assesseur,
MmeF..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 17 janvier 2019.
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N° 17LY03840