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14/01/2019 | FRANCE | N°17LY02165

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre b - formation à 3, 14 janvier 2019, 17LY02165


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne et la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme à lui verser des indemnités en réparation des préjudices résultant de leur comportement fautif et de l'irrégularité de son transfert à l'association FBS.

Par un jugement n° 1600691 du 30 mars 2017, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour


Par une requête et un mémoire qui n'a pas été communiqué, enregistrés les 30 mai 2017 et 6...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne et la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme à lui verser des indemnités en réparation des préjudices résultant de leur comportement fautif et de l'irrégularité de son transfert à l'association FBS.

Par un jugement n° 1600691 du 30 mars 2017, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire qui n'a pas été communiqué, enregistrés les 30 mai 2017 et 6 décembre 2018, Mme B..., représentée par Me Gras, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 30 mars 2017 ;

2°) de condamner solidairement la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne et la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme :

- à procéder à la reconstitution de sa carrière, de ses droits sociaux et de ses droits à pension de retraite et à lui transmettre ses bulletins de paie rectifiés ;

- à lui verser, depuis le 1er janvier 2013, jusqu'au jour où elle fera valoir ses droits à la retraite, une somme correspondant à la différence entre son plein traitement et ses primes (ancienneté et retraite) calculée après avoir reconstitué sa carrière par comparaison avec la progression moyenne des autres agents titularisés dans le même grade, y compris les progressions d'indice et d'échelon auxquelles elle avait droit, et le montant des rémunérations qu'elle a perçues, par ailleurs, au cours de la même période ;

- à lui verser, à partir du 1er janvier 2013, jusqu'au jour où elle fera valoir ses droits à la retraite, soit sur une période de trente-quatre années, une somme annuelle brute équivalente, à tout le moins, à 18 387,85 euros (avec le treizième mois selon le bulletin de paie du mois de décembre 2012), soit jusqu'au jour de sa retraite, la somme brute de 625 186,90 euros, de laquelle il conviendra de déduire les revenus qu'elle a perçus par ailleurs ;

- à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

- à procéder à une régularisation de sa situation au regard des organismes de sécurité sociale et de retraite et à procéder au versement des cotisations nécessaires à la reconstitution de sa carrière ;

- à lui verser une somme correspondant au paiement des cotisations d'une mutuelle prévoyance jusqu'à l'âge de son départ en retraite ;

- à lui verser les sommes dues ainsi que les intérêts au taux légal et la capitalisation des intérêts ;

3°) d'enjoindre à la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne et à la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme de lui verser les sommes dues dans un délai de deux mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge solidaire de la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne et de la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a omis de répondre au moyen tiré de la légèreté blâmable de la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne et de celle du Puy-de-Dôme ;

- la chambre de commerce et d'industrie d'Auvergne étant devenue son employeur au 1er janvier 2013, elle ne doit pas être mise hors de cause ;

- son consentement lors de la signature de son contrat de travail avec l'association " France Business School " a été vicié en ce qu'elle n'a été, à aucun moment, informée des conséquences de la signature de ce contrat sur le déroulement de sa carrière et sur l'abandon du statut consulaire notamment en cas de licenciement ;

- elle a signé son contrat de travail avec l'association " France Business School " sous la contrainte ;

- la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme a méconnu ses obligations découlant du protocole d'accord du 14 décembre 2012 ;

- elle n'a jamais expressément démissionné de ses fonctions au sein de la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme, ni renoncé à son statut d'agent consulaire ;

- son transfert au sein de l'association " France Business School " est irrégulier en ce qu'il méconnaît les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ;

- l'attitude fautive des chambres de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme et de la région Auvergne-Rhône-Alpes engage leur responsabilité ;

- les décisions irrégulières prises par les chambres de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme et de la région Auvergne sont à l'origine d'un préjudice financier et moral certain ;

- elle justifie d'un préjudice réel, direct et certain en lien avec la perte de son statut d'agent consulaire ;

- elle est fondée à solliciter des chambres de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme et de la région Auvergne la reconstitution de sa carrière depuis le 1er janvier 2013 jusqu'au jour où elle fera valoir ses droits à la retraite, la reconstitution des droits sociaux et notamment des droits à pension de retraite ;

- elle est fondée à réclamer le versement des primes auxquelles elle aurait eu droit si son statut consulaire avait été maintenu, à compter du 1er janvier 2013 ;

- elle est fondée à réclamer la somme de 15 000 euros en réparation de son préjudice moral compte tenu de son ancienneté au sein de la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme, de l'importance de ses fonctions et des répercussions sur sa carrière des décisions et de l'attitude des chambres de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme et de la région Auvergne.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 août 2017, la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne-Rhône-Alpes, venant aux droits de la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne, et la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme, représentées par la Selas Jacques Barthélémy et associés, avocats, concluent à la mise hors de cause de la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne-Rhône-Alpes, au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne-Rhône-Alpes n'ayant jamais été l'employeur de Mme B..., elle doit être mise hors de cause ;

- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés ;

- dans l'hypothèse où la signature du contrat de travail de droit privé serait considérée comme matérialisant une mesure illégale d'éviction de Mme B..., les préjudices prétendument subis par cette dernière ne sont par directs, réels et certains.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;

- l'arrêté du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie, des chambres de commerce et d'industrie et des groupements interconsulaires ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, rapporteur,

- les conclusions de M. Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Gras, avocat, représentant Mme B...et de Me Lapalus, avocat, représentant la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne-Rhône-Alpes ;

Une note en délibéré, présentée pour MmeB..., a été enregistrée le 20 décembre 2018.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a été recrutée par la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme en 2001, puis est devenue chargée de mission en 2008. En 2012, la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme a adhéré à l'association " France Business School " (FBS), regroupant plusieurs écoles de management dont l'ESC Clermont, dont le personnel a été transféré à l'association FBS à compter du 1er janvier 2013. Le 20 décembre 2012, Mme B... a conclu un contrat de travail à durée indéterminée avec l'association FBS, en qualité de responsable métier à compter du 1er janvier 2013. L'association FBS, ayant connu des difficultés financières, a été dissoute et a fait l'objet d'une liquidation amiable par délibération du 8 juin 2015. Le 15 décembre 2015, Mme B... a été licenciée pour motif économique. Mme B... relève appel du jugement du 30 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne et de la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme à lui verser diverses sommes en réparation des préjudices résultant de leur comportement fautif et de l'irrégularité de son transfert à l'association FBS.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si Mme B... soutient que le tribunal administratif a omis de répondre au moyen tiré de la " légèreté blâmable " des deux chambres de commerce et d'industrie, il ne ressort pas des termes mêmes de sa demande et de ses mémoires de première instance qu'elle a soulevé ce moyen devant les premiers juges.

Au fond :

3. Il résulte de l'instruction qu'une organisation syndicale ayant contesté les délibérations relatives, en particulier, au transfert de personnel de la CCI du Puy-de-Dôme à l'association FBS, un " protocole portant accord et transaction pour mettre fin à un litige " a été conclu le 14 décembre 2012, notamment par cette chambre de commerce et d'industrie et cette association. L'article 2.1 de cet accord prévoyait que : " Les institutions s'obligent à placer leurs agents dans la position qu'ils auront choisie : Soit de mise à disposition, selon la convention ci-annexée (annexe 1), Soit de détachement, selon la convention ci-annexée (annexe 2). (...) Dans un souci d'organisation et pour permettre autant que possible l'établissement d'une situation administrative à effet au 1er janvier 2013, les agents titulaires, qui n'auront pas accepté de renoncer à leur statut d'agent public en signant le contrat de travail proposé par l'association FBS, devront faire connaître leur choix au plus tard le 30 janvier 2013. " Il était ainsi clairement envisagé que les agents titulaires de la chambre de commerce et d'industrie soit renoncent au bénéfice du statut en concluant un contrat de travail avec l'association FBS, soit conservent le bénéfice du statut et fassent l'objet d'une mise à disposition ou d'un détachement auprès de cette association. Ces différentes options ont été présentées à Mme B... par un courrier du directeur général de l'association FBS du 20 décembre 2012. Il résulte également de l'instruction, et notamment de plusieurs attestations d'agents de la CCI, que les personnels concernés ont bénéficié d'une information sur les modalités de transfert à l'occasion de réunions. Ainsi, c'est en connaissance de cause que Mme B... a signé, le 20 décembre 2012, un contrat de travail à durée indéterminée avec l'association FBS. Ses allégations selon lesquelles elle aurait souscrit cet engagement sous la contrainte, et en particulier sous la menace d'un licenciement, ne sont pas établies. Il ne résulte pas de l'instruction que la CCI du Puy-de-Dôme a méconnu les stipulations du protocole d'accord du 14 décembre 2012. Dès lors, les moyens tirés de l'existence d'un vice du consentement ou d'un comportement fautif de la CCI à l'occasion de l'engagement de Mme B... par l'association FBS doivent être écartés.

4. Aux termes de l'article L. 1224-1 du code du travail : " Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. " Mme B... n'étant pas liée par un contrat de travail à la CCI du Puy-de-Dôme, son transfert à l'association FBS n'était pas soumis à ces dispositions. Dès lors, le moyen tiré de ce que celles-ci auraient été méconnues est inopérant.

5. Aux termes de l'article 33 du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie : " La cessation de fonctions de tout agent titulaire ne peut intervenir que dans les conditions suivantes : 1°) par démission ; dans ce cas, l'agent "non cadre" devra respecter un délai de préavis d'un mois et l'agent "cadre", un délai de préavis de trois mois, ; 2°) par mise à la retraite ; 3°) par licenciement pour inaptitude physique (...) ; 4°) par licenciement pour insuffisance professionnelle (...) ; 5°) par suppression d'emploi (...) ; 6°) par mesure disciplinaire (...). ".

6. Les modalités de transfert d'agents de la CCI à l'association FBS décrites au point 3 et portées à la connaissance des intéressés, prévoyaient sans ambiguïté que, hors les cas de mise à disposition ou de détachement, la conclusion d'un contrat de travail avec cette association valait renonciation au statut d'agent public de la CCI. Dès lors, Mme B..., qui n'a choisi ni l'option de la mise à disposition, ni celle du détachement, ne peut qu'être regardée comme ayant manifesté sa volonté de quitter définitivement la CCI en signant un contrat de droit privé avec l'association FBS. Par suite, le moyen tiré de ce que l'intéressée n'aurait ni démissionné de la chambre de commerce et d'industrie ni renoncé à son statut d'agent public doit être écarté. Par suite, la CCI du Puy-de-Dôme n'étant plus alors l'employeur de Mme B... depuis le 1er janvier 2013, elle n'a pas commis de faute en ne lui proposant pas un reclassement avant son licenciement par l'association FBS en 2015.

7. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée en défense, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne ou de la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme, qui n'ont pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme B... à l'occasion du litige.

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne-Rhône-Alpes et de la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne-Rhône-Alpes et de la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., à la chambre de commerce et d'industrie du Puy-de-Dôme et à la chambre de commerce et d'industrie de la région Auvergne-Rhône-Alpes.

Délibéré après l'audience du 17 décembre 2018 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président,

M. Seillet, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 janvier 2019.

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N° 17LY02165


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre b - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY02165
Date de la décision : 14/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-02 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité pour faute.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : AGIS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-01-14;17ly02165 ?
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