Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme E...D...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 29 mars 2017 par lequel le préfet de l'Yonne a refusé de renouveler son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1701245 du 28 septembre 2017, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 27 janvier 2018, MmeD..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Dijon du 28 septembre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Yonne du 29 mars 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour sollicité ou un titre mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.
Elle soutient :
Sur le refus de titre de séjour :
- qu'il méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- qu'il méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- que la compétence de l'auteur de cette décision n'est pas rapportée ;
- qu'elle est entachée d'erreur de fait ;
- qu'elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 avril 2018, le préfet de l'Yonne, représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Par une décision du 19 décembre 2017, Mme D...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de MmeB..., première conseillère.
Considérant ce qui suit :
1. MmeD..., ressortissante camerounaise née en 1955, est entrée régulièrement en France le 5 avril 2013. Elle a été autorisée à séjourner en France, du 2 février 2014 au 2 août 2016, sous couvert d'une carte de séjour temporaire délivrée sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le 17 juin 2016, elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour. Après avoir recueilli l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, le préfet de l'Yonne a rejeté sa demande de renouvellement de son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi par un arrêté du 29 mars 2017. Mme D...relève appel du jugement du 28 septembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 mars 2017.
Sur le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'État (...) ".
3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
4. Dans un avis du 8 août 2016, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de Mme D...nécessitait une prise en charge dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'aucun traitement n'était disponible dans son pays d'origine. Il ressort toutefois des pièces produites par le préfet de l'Yonne que les maladies courantes sont à même d'être traitées au Cameroun. Le préfet de l'Yonne rapporte en outre la preuve que des traitements pour le VIH et l'hépatite B, dont est atteinte MmeD..., sont également disponibles au Cameroun. MmeD..., qui se borne à produire un certificat médical émanant d'un médecin généraliste et listant simplement les différentes pathologies dont souffre la requérante et les traitements qu'elle prend, ne contredit pas sérieusement les éléments apportés par le préfet quant à la disponibilité du traitement au Cameroun. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313 -11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
5. En second lieu, Mme D...se prévaut de la présence en France de ses trois enfants qui bénéficient de cartes de résidant, et de ses efforts d'intégration. Toutefois ces seules circonstances, à les supposer établies, ne sont pas de nature à lui ouvrir un droit au séjour en France au titre de sa vie privée et familiale, alors qu'elle a vécu jusqu'à l'âge de 58 ans au Cameroun, où elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, la décision en litige a été signée par Mme Françoise Fugier, secrétaire générale de la préfecture de l'Yonne qui dispose, par arrêté du 10 mai 2016, d'une délégation permanente de signature du préfet de l'Yonne, à effet de signer tous les actes relevant de la compétence du préfet, à l'exception d'une liste d'actes parmi lesquels ne figurent pas les obligations de quitter le territoire français. Cette délégation a été régulièrement publiée au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture n° 32 du 10 mai 2016. Ainsi, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision doit, dès lors, être écarté.
7. En deuxième lieu, le moyen tiré de l'erreur de fait entachant l'obligation de quitter le territoire français n'est pas assorti des précisions suffisantes pour en apprécier la portée et le bien-fondé.
8. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motif que ceux énoncés au point 5.
9. Il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions accessoires à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Fischer-Hirtz, présidente de chambre,
M. Souteyrand, président-assesseur,
MmeB..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 9 janvier 2019.
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N° 18LY00322