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18/12/2018 | FRANCE | N°18LY01342

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 18 décembre 2018, 18LY01342


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les arrêtés du préfet du Rhône du 12 mars 2018 et du 26 mars 2018 décidant, respectivement son transfert aux autorités belges et son assignation à résidence.

Par un jugement n° 1802040 du 29 mars 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 13 avril 2018, M. C..., représenté par Me A..., demande à la co

ur :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon du 29 mars 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les arrêtés du préfet du Rhône du 12 mars 2018 et du 26 mars 2018 décidant, respectivement son transfert aux autorités belges et son assignation à résidence.

Par un jugement n° 1802040 du 29 mars 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 13 avril 2018, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon du 29 mars 2018 ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- il n'a pu bénéficier de l'information préalable obligatoire prévue par l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, dit règlement Dublin III dès l'introduction de sa demande, le 27 décembre 2017 ;

- en application des dispositions du règlement Dublin III, l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile au jour du 23 janvier 2017 est l'Italie et non la Belgique ;

- la décision l'assignant à résidence est, par voie de conséquence, illégale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2018, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 8 octobre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 30 octobre 2018.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 avril 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement UE n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu le rapport de Mme Anne Menasseyre, présidente-assesseure, au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant guinéen, qui déclare être entré en France le 23 décembre 2017 a présenté une demande d'asile aux autorités françaises. La consultation du fichier " Eurodac " ayant permis d'établir que ses empreintes digitales avaient été relevées par les autorités italiennes à l'occasion d'un franchissement irrégulier de frontière le 22 octobre 2016 et par les autorités belges auprès desquelles il a sollicité l'asile le 23 janvier 2017, une demande de reprise en charge a été adressées aux autorités belges le 16 février 2018. Ces dernières ont accepté la reprise en charge de l'intéressé le 22 février 2018. Par décisions des 12 mars et 26 mars 2018, notifiées ce dernier jour, le préfet du Rhône a respectivement décidé le transfert de l'intéressé vers la Belgique, et prononcé son assignation à résidence dans le département du Rhône pour une durée maximale de quarante-cinq jours. Il relève appel du jugement du 29 mars 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur les conclusions en annulation de la décision de transfert :

2. Aux termes de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande et procède à la détermination de l'Etat responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d'engagements identiques à ceux prévus par le même règlement, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ".

3. En premier lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604-2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement et notamment : / a) des objectifs du présent règlement (...) / b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée (...) c) de l'entretien individuel en vertu de 1'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les États membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; e) du fait que les autorités compétentes des États membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; f) de 1'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées (...) / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5 (...) ".

4. La délivrance de documents d'information sur les droits et obligations des demandeurs d'asile doit, eu égard à l'objet et au contenu de ces documents, intervenir au début de la procédure d'examen des demandes d'asile pour permettre aux intéressés de présenter utilement leur demande aux autorités compétentes et, notamment, de mesurer les enjeux attachés au fait de porter à la connaissance de ces autorités des informations relatives à la présence de membres de la famille dans un Etat membre ou aux raisons humanitaires susceptible de justifier l'examen de la demande dans un Etat membre déterminé. Les intéressés doivent ainsi avoir été mis à même de présenter, de manière utile et effective, les éléments permettant de déterminer l'Etat qui devra se prononcer sur leur demande de protection internationale et les motifs qui légitimeraient que l'autorité déroge à l'application des critères de détermination de cet Etat. Un vice affectant la délivrance de ces documents n'est de nature à entacher d'illégalité la décision de transfert prise postérieurement que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé l'intéressé d'une garantie.

5. Les deux brochures d'information A " j'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' " et B " je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' ", n'ont pas été remises à M. C... dès le 27 décembre 2017, date à laquelle il s'est présenté auprès de l'association Forum Réfugiés et a manifesté son intention de demander l'asile, mais au moment de l'enregistrement de sa demande d'asile par les services de la préfecture du Rhône, au cours de l'entretien individuel qui s'est déroulé le 26 janvier 2018. Il ressort du compte-rendu de cet entretien, signé par l'intéressé, que celui-ci a alors été mis à même de présenter, de manière utile et effective, les éléments permettant à l'autorité compétente de déterminer l'Etat responsable de sa demande d'asile et de décider, le cas échéant, de confier aux autorités françaises le traitement de cette demande. Un délai de vint-et-un jours s'est écoulé entre la remise des brochures A et B contenant les informations requises et la demande de reprise en charge adressée aux autorités considérées comme responsables de l'examen de la demande d'asile, délai au cours duquel il était loisible à M. C..., dûment informé, de porter à la connaissance de l'administration toute observation complémentaire utile au regard de sa situation, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Il s'en est abstenu et n'a fait, par ailleurs, valoir depuis aucun élément nouveau par rapport à ceux qu'il a portés à la connaissance de l'administration au cours de l'entretien qui s'est déroulé le 26 janvier 2018. Il résulte de ces circonstances que la remise des brochures d'information au cours de l'entretien individuel n'a pas privé l'intéressé de la garantie consistant à être mis à même de présenter, de manière utile et effective, les éléments permettant de déterminer l'Etat responsable de l'examen de sa demande de protection. Le moyen tiré de ce que la procédure d'adoption de l'arrêté de transfert serait viciée par la remise des brochures d'information au cours de l'entretien du 26 janvier 2018, et non antérieurement, doit, par suite, être écarté.

6. En deuxième lieu, les dispositions du d) du 1. de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 font obligation à l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile de reprendre en charge le ressortissant d'un pays tiers dont la demande d'asile a été rejetée et qui a présenté une demande auprès d'un autre Etat membre.

7. M. C... a demandé l'asile pour la première fois en janvier 2017, en Belgique. Cet Etat s'est reconnu responsable de l'examen de sa demande de protection internationale, l'a instruite et rejetée. Par application du d) du 1. de l'article 18 du règlement n° 604/2013, la Belgique était tenue de le reprendre en charge. La circonstance que l'Italie aurait pu, lors de l'introduction de sa demande d'asile en Italie, être regardée comme responsable de l'examen de sa demande d'asile est sans influence sur l'obligation qui pesait sur l'Etat belge, en vertu de l'article 18 du règlement, de reprendre en charge l'intéressé. M. C... n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la décision de le transférer en Belgique plutôt qu'en Italie serait le fruit d'une erreur de fait ou de droit.

Sur les conclusions en annulation de la décision assignant M. C... à résidence :

8. M. C... se borne à soutenir que la décision l'assignant à résidence repose sur une décision illégale. Il résulte de ce qui a été indiqué aux points précédents que ce moyen n'est pas fondé.

9. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 27 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Menasseyre, présidente-assesseure,

Mme B..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 18 décembre 2018.

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N° 18LY01342

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY01342
Date de la décision : 18/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 25/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-12-18;18ly01342 ?
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