Vu la procédure suivante
Procédure contentieuse antérieure
Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2018 par lequel le préfet de la Loire a décidé sa remise aux autorités espagnoles en vue de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que l'arrêté du même jour, par lequel le même préfet l'a assignée à résidence.
Par un jugement n° 1800632 du 5 février 2018, le magistrat délégué du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 2 mars 2018, Mme A..., représentée par Me B... demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon du 5 février 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2018 par lequel le préfet de la Loire a décidé sa remise aux autorités espagnoles en vue de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que l'arrêté du même jour, par lequel le même préfet l'a assignée à résidence.
Mme A... soutient que :
- la décision de transfert est insuffisamment motivée au regard des stipulations de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision d'assignation est également insuffisamment motivée ;
- le préfet de la Loire ne démontre pas, par la production d'un document qui n'est pas rédigé en Français, qu'elle aurait déposé une demande d'asile en Espagne de sorte que ce pays serait responsable de l'examen de sa demande de protection internationale ;
- elle n'a pas personnellement rempli et ignorait la teneur des documents qu'on lui a demandé de signer en Espagne.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 novembre 2018, le préfet de la Loire conclut au rejet de la requête et renvoie à ses écritures de première instance.
Le bénéfice de l'aide juridictionnelle a été refusé à Mme A... par une décision du 27 mars 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- la Constitution ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme C..., première conseillère ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante guinéenne née le 26 avril 1993 à Conakry, est entrée en France le 24 août 2017 et y a sollicité l'asile. Elle a fait l'objet de deux arrêtés du 30 janvier 2018 par lesquels le préfet de la Loire a décidé son transfert aux autorités espagnoles et l'a assignée à résidence. Elle relève appel du jugement par lequel le magistrat délégué du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la décision de transfert :
2. Aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. (...) ".
3. Pour l'application de ces dispositions, est suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre Etat membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application.
4. En l'espèce, la décision litigieuse vise les différents textes applicables et mentionne en particulier les articles L. 741-1 et L. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les articles, 3 et 7 à 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et le b du 1 de l'article 18 du même règlement. La décision indique par ailleurs qu'il ressort des témoignages de l'intéressée et des prises d'empreinte Eurodac qu'elle a sollicité l'asile le 21 mai 2017 en Espagne, qu'elle ne relève pas des dérogations prévues par le 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et par l'article 17 du même règlement, et que la décision ne porte pas une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale. Ce faisant, le préfet de la Loire a suffisamment motivé la décision de transfert litigieuse au regard des obligations rappelées ci-dessus.
5. Aux termes de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " La décision visée au paragraphe 1 contient des informations sur les voies de recours disponibles, y compris sur le droit de demander un effet suspensif, le cas échéant, et sur les délais applicables à l'exercice de ces voies de recours et à la mise oeuvre du transfert et comporte, si nécessaire, des informations relatives au lieu et à la date auxquels la personne concernée doit se présenter si cette personne se rend par ses propres moyens dans l'État membre responsable. ".
6. La décision litigieuse, qui ne prévoit pas, au cas d'espèce, que l'intéressée se rende par ses propres moyens dans l'Etat membre responsable de sa demande d'asile, n'avait pas à comporter les informations prévues au paragraphe 2 de cet article qui ne sont communiquées à l'intéressée qu'en cas de nécessité. Le moyen doit, en tout état de cause, être écarté.
7. Pour considérer que l'Espagne était l'Etat membre responsable de l'examen de la demande de protection internationale de Mme A..., le préfet de la Loire s'est fondé sur le relevé d'empreintes Eurodac révélant qu'elle a sollicité l'asile le 21 mai 2017 en Espagne et sur le 2 de l'article 3 et le b) du 1 de l'article 18 du règlement(UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, dont il résulte que lorsque aucun Etat membre responsable ne peut être désigné sur la base des critères énumérés dans le règlement, le premier Etat membre auprès duquel a été introduite la demande de protection internationale est responsable de son examen.
8. Pour contester la mise en oeuvre de ce critère, Mme A... se borne à faire valoir que le préfet de la Loire n'établit pas qu'elle a formé une demande d'asile en Espagne par la seule production d'un document non rédigé en langue française. Toutefois, si les requêtes formées devant le juge administratif doivent être rédigées en langue française, les parties peuvent joindre à ces demandes des pièces annexes rédigées dans une autre langue, le juge ayant la faculté, mais non l'obligation d'en exiger la traduction et pouvant donc s'il s'en estime capable se fonder directement sur une telle pièce. En l'espèce, en tout état de cause, seul le document par lequel l'Espagne accepte la reprise en charge de la requérante est rédigé en langue anglaise, ce qui est sans incidence sur l'appréciation de l'existence d'une précédente demande d'asile introduite en Espagne. En se bornant à contester la force probante de ce document et à soutenir que les autorités espagnoles lui ont fait signer des documents dont elle ignorait la portée, faute de connaissance de la langue espagnole, elle ne conteste pas sérieusement les mentions contenues dans le document rédigé en français et produit en première instance par le préfet, dont il résulte que les recherches entreprises sur le fichier européen Eurodac à partir du relevé décadactylaire établi le 29 septembre 2017 ont donné un résultat positif.
Sur la décision d'assignation à résidence :
9. A l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision d'assignation à résidence, Mme A... soulève le même moyen que celui déjà soulevé en première instance et tiré de ce que cette décision serait insuffisamment motivée. Il ressort des pièces du dossier que ce moyen doit être écarté par les mêmes motifs que ceux retenus par le premier juge et qu'il y a lieu pour la cour d'adopter.
10. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Loire.
Délibéré après l'audience du 27 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Menasseyre, présidente-assesseure,
Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique le 18 décembre 2018.
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N° 18LY00859
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