La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/12/2018 | FRANCE | N°18LY00305

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 18 décembre 2018, 18LY00305


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

MmeB... A... épouse C...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 25 juillet 2017 par lequel le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'a obligée à quitter le territoire français dans les trente jours et a fixé le Maroc comme pays de destination d'une éventuelle mesure d'exécution forcée ; d'enjoindre à la préfecture de lui dé

livrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation sous astreinte ; de mettre à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

MmeB... A... épouse C...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 25 juillet 2017 par lequel le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'a obligée à quitter le territoire français dans les trente jours et a fixé le Maroc comme pays de destination d'une éventuelle mesure d'exécution forcée ; d'enjoindre à la préfecture de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation sous astreinte ; de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros titre des frais exposés et non compris dans les dépens à verser à son conseil.

Par un jugement n° 1702102 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de Mme A....

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2018, Mme B... A...épouseC..., représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 21 décembre 2017 et les décisions contenues dans l'arrêté du 25 juillet 2017 ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Saône-et-Loire de lui délivrer, sous astreinte, une autorisation provisoire de séjour, ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir et lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros qui sera versée à Me D... sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

* c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon a écarté le moyen tiré de ce que le préfet de la Saône-et-Loire s'est estimé en situation de compétence liée ;

* c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon a rejeté le moyen de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 dès lors qu'elle souffre d'une affection de longue durée et d'une altération générale de son état de santé qui nécessite un suivi médical dont l'absence peut avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;

* il est inexact d'affirmer qu'elle pourrait bénéficier d'un suivi médical dans son pays d'origine car elle n'a pas de couverture maladie au Maroc et ne bénéficie pas d'allocations de chômage, de sorte qu'elle ne sera pas en mesure de régler les frais liés à son traitement et à son suivi médical ;

* elle a besoin d'un tiers à ses côtés, ce dont elle ne pourra pas bénéficier au Maroc où elle ne disposera donc pas de soins adaptés à son état de santé ;

* c'est à tort que le tribunal a écarté le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 en considérant qu'elle n'entretient pas de lien suffisamment anciens et stables avec la France dès lors qu'elle y est présente depuis plus de trois ans, réside chez sa fille et sa famille et qu'elle est parfaitement bien insérée dans la société française ;

* c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon a écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet de la Saône-et-Loire devait se prononcer au regard d'un avis émis par un collège de médecin à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ce qui constitue un vice de procédure substantiel ;

* c'est à tort que le tribunal a écarté le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 dès lors que le préfet de la Saône-et-Loire n'a pas vérifié si, au Maroc, elle pouvait avoir un accès effectif aux soins et au suivi médical qui lui sont nécessaires ;

* c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon a écarté le moyen tiré de ce que les décisions par lesquelles le préfet de la Saône-et-Loire l'a obligée à quitter le territoire français, a fixé le pays de destination et le délai de départ à trente jours sont, par voie d'exception, entachées d'illégalité.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

* la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

* le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

* le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B...A..., ressortissante marocaine née en 1946, expose qu'elle est entrée en France le 17 juin 2015 munie d'un visa court séjour et qu'elle est depuis lors hébergée chez sa fille. En raison de divers problèmes de santé qui lui ont valu plusieurs hospitalisations et qui nécessitent un suivi médical, Mme A... a sollicité, le 5 mai 2016, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article 11° du L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par sa requête susvisée, elle relève appel du jugement du 21 décembre 2017 par lequel tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation dirigée contre l'arrêté du préfet de la Saône-et-Loire du 25 juillet 2017 rejetant sa demande de titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination du Maroc.

Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'ensemble des moyens de la requête :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable aux faits de l'espèce, " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. " Il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative compétente pour délivrer le titre de séjour prévu par ces dispositions n'est pas liée par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé et doit exercer son pouvoir d'appréciation au regard des éléments du dossier concernant le demandeur au nombre desquels figure cet avis.

3. Dans les motifs de son arrêté du 25 juillet 2017 relatif à la demande de titre de séjour de Mme A... en qualité d'étranger malade, le préfet de la Saône-et-Loire a repris les termes de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 14 décembre 2016 selon lequel, si l'état de santé de l'intéressée nécessite un prise en charge médicale dont le défaut peut entrainer de conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et a indiqué que " dès lors, (...) l'intéressée ne peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour temporaire mention "étranger malade" ". En motivant ainsi sans indiquer qu'il entendait s'approprier le contenu de cet avis et sans procéder lui-même à l'examen de la situation de l'intéressée au regard des textes applicables, le préfet de la Saône-et-Loire a méconnu sa propre compétence et a ainsi entaché sa décision d'illégalité.

4. Par suite, Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Dijon a écarté le moyen dirigé contre la décision de refus de titre de séjour tiré de ce que le préfet de la Saône-et-Loire s'est estimé en situation de compétence liée.

5. En raison des effets qui s'y attachent, l'annulation pour excès de pouvoir d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, emporte, lorsque le juge est saisi de conclusions recevables, l'annulation par voie de conséquence des décisions administratives consécutives qui n'auraient pu légalement être prises en l'absence de l'acte annulé ou qui sont en l'espèce intervenues en raison de l'acte annulé. Il en va ainsi, notamment, des décisions qui ont été prises en application de l'acte annulé et de celles dont l'acte annulé constitue la base légale. Il en résulte que doivent être annulées par voie de conséquence les décisions par lesquelles le préfet de la Saône-et-Loire a obligé Mme A... à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

6. Ainsi, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'ensemble des moyens de la requête, Mme A... est fondée à soutenir que l'arrêté du préfet de la Saône-et-Loire du 25 juillet 2017 est illégal et, par suite, que c'est à tort que, par son jugement attaqué du 21 décembre 2017 le tribunal administratif de Lyon, a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Eu égard aux motifs d'annulation de l'arrêté attaqué, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Saône-et-Loire examine à nouveau la demande de titre de séjour de Mme A.... Il y a lieu de prescrire au préfet de la Saône-et-Loire de procéder à ce nouvel examen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente, de délivrer à Mme A...une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours. Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce d'assortir ces injonctions d'une astreinte.

Sur les frais du litige :

8. Mme A... ne bénéficiant pas de l'aide juridictionnelle, son avocat ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique. Par suite, les conclusions par lesquelles il demande le bénéfice de ces dernières dispositions doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1702102 du tribunal administratif de Dijon du 21 décembre 2017 et l'arrêté du 25 juillet 2017 du préfet de la Saône-et-Loire sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Saône-et-Loire, dans les quinze jours qui suivront la notification du présent arrêt, de délivrer à Mme A... une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation qui devra intervenir dans les deux mois qui suivront la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A..., à Me D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Saône-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 4 décembre 2018 à laquelle siégeaient :

M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

Mme Virginie Chevalier-Aubert, président assesseur

M. Pierre Thierry, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 décembre 2018.

2

No 18LY00305

sh


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY00305
Date de la décision : 18/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Pierre THIERRY
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : DSC AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-12-18;18ly00305 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award