Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 7 juillet 2016 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit d'office.
Par un jugement n° 1700583 du 4 mai 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 28 novembre 2017, M. A..., représenté par Me Vray, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 4 mai 2017 ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations du 1° de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 10 octobre 2018, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'il s'en rapporte à ses écritures de première instance.
Par décision du 20 juin 2017, confirmée sur recours par ordonnance du 27 octobre 2017, le bureau d'aide juridictionnelle a rejeté la demande d'aide juridictionnelle formulée par M. A....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller,
- les observations de Me Vray, avocate de M.A... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant comorien né le 29 novembre 1989, est arrivé sur le territoire français métropolitain en provenance de Mayotte le 11 août 2015 et a sollicité, le 7 septembre 2015, la délivrance d'un titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par arrêté du 7 juillet 2016, le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance du titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français sous trente jours et a désigné le pays de renvoi. M. A... fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
3. M. A... est l'époux d'une ressortissante comorienne arrivée en France métropolitaine le 24 avril 2015 et titulaire, depuis le 1er juillet 2015, d'une carte de séjour temporaire renouvelée pour une nouvelle durée d'un an à compter du 28 juin 2016. Par suite, il entre dans une catégorie d'étrangers ouvrant droit au regroupement familial. En conséquence, le préfet du Rhône a pu légalement lui opposer un refus pour ce motif sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "
5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a épousé à Mayotte, le 11 septembre 2013, une compatriote qui réside régulièrement sur ce territoire depuis 2009 en tant que mère d'un enfant français mineur. Il s'est lui-même vu accorder un droit au séjour sur ce territoire le 30 décembre 2014, moins de quatre mois avant que son épouse ne quitte ce territoire pour la métropole. Le 11 août 2015, soit onze mois seulement avant l'arrêté contesté, il est lui-même entré sur le territoire français métropolitain, où il a rejoint son épouse arrivée le 24 avril 2015. Le couple est parent de deux enfants nés, respectivement, les 18 juin 2013 et 1er juin 2015 et l'épouse du requérant est également mère de deux enfants nés de précédentes relations, respectivement, les 29 mai 2005 et 25 avril 2007. Si le père français de l'enfant né en 2005 réside à Marseille, l'attestation qu'il a rédigée n'évoque ni une quelconque participation de sa part à l'entretien et l'éducation de son enfant ni l'existence de contacts réguliers avec ce dernier. En outre, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté en litige, l'enfant né en 2007 résidait toujours à Mayotte auprès de proches. Enfin, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté en litige, le requérant était hébergé dans un appartement géré par une association et vivait de l'assistance sociale, son épouse maîtrisant mal la langue française et ne justifiant d'aucune insertion professionnelle. Ainsi, compte tenu des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée de séjour en France métropolitaine de M. A... et de son épouse et de la possibilité pour le foyer de se reconstituer à l'étranger, en faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français, le préfet du Rhône n'a pas porté au droit de ce dernier au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis. Par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
6. Aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.
7. A la date de l'arrêté contesté, le 7 juillet 2016, l'année scolaire venait de s'achever et s'il est produit des inscriptions des enfants du foyer du requérant pour la rentrée de septembre 2016, il n'est pas justifié d'une scolarisation des enfants de M. A... au titre de l'année2015-2016. En tout état de cause, une telle scolarisation, susceptible de ne concerner que l'aîné des enfants compte tenu de l'âge des membres de la fratrie, aurait été récente en raison de leur arrivée en France métropolitaine au cours de l'année 2015. Il ressort également des pièces du dossier que l'un des enfants mineurs de l'épouse du requérant demeurait à Mayotte à la date de l'arrêté contesté et que rien ne faisait obstacle, en l'absence de contacts avérés entre l'aîné des enfants de l'épouse de M. A... et son père français, à ce que tous les membres du foyer du requérant quittent ensemble le territoire français. Par suite, en faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français, le préfet du Rhône n'a pas méconnu l'intérêt supérieur des enfants mineurs de son foyer au sens du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant.
8. Il résulte des circonstances précitées que la mesure d'éloignement prise à l'encontre de M. A... n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.
9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 5 novembre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Seillet, président-assesseur,
Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 novembre 2018.
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N° 17LY04008