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15/11/2018 | FRANCE | N°18LY01096

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre a - formation à 3, 15 novembre 2018, 18LY01096


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Auto eurolindi 01 a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010 à 2012 et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er octobre 2009 au 30 juin 2013 ainsi que les pénalités correspondantes .

Par un jugement n°1600096 du 23 j

anvier 2018, le tribunal administratif de Lyon a prononcé la réduction des cotisations supp...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Auto eurolindi 01 a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010 à 2012 et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er octobre 2009 au 30 juin 2013 ainsi que les pénalités correspondantes .

Par un jugement n°1600096 du 23 janvier 2018, le tribunal administratif de Lyon a prononcé la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés des années 2011 et 2012 et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er octobre 2009 au 30 juin 2013 et des pénalités correspondantes et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 23 mars 2018, l'EURL Auto eurolindi 01 demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 23 janvier 2018 en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

2°) de lui accorder la totalité de la décharge demandée.

L'EURL Auto eurolindi 01 soutient que :

- la garantie d'un débat oral et contradictoire en cours de vérification n'a pas été respectée ;

- le vérificateur a irrégulièrement emporté la comptabilité, en méconnaissance de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales ;

- la méthode de reconstitution est radicalement viciée ;

- une méthode alternative de reconstitution peut être proposée.

Par une ordonnance du 30 mars 2018, l'affaire a été dispensée d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Fischer-Hirtz, présidente, rapporteure

- et les conclusions de M. Savouré, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Auto eurolindi 01, qui exerce l'activité de négoce de véhicules automobiles, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière d'impôt sur les sociétés sur les exercices clos en 2010, 2011 et 2012 et, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 1er octobre 2009 au 30 juin 2013. A l'issue de ce contrôle, le vérificateur a rejeté comme non-probante la comptabilité de l'entreprise et reconstitué le chiffre d'affaires en estimant que les ventes de véhicules d'occasion avaient été minorées en moyenne de 13 %. L'administration l'a notamment assujettie, suivant la procédure contradictoire, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, assortis de majorations pour manquement délibéré. Par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a estimé que ce taux uniforme de 13 % devait être remplacé par trois taux distincts pour chacun des exercices vérifiés. Par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal a décidé que l'EURL Auto eurolindi 01 serait déchargée, le cas échéant, des impositions litigieuses, conformément à la correction de la reconstitution du chiffre d'affaires opérée. Par l'article 3 de ce jugement, il a rejeté le surplus des conclusions de la demande. L'EURL Auto eurolindi 01 relève appel de ce jugement, en tant qu'il n'a pas fait droit au surplus des conclusions de sa demande.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables. (...) ".

3. Dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, soit, comme il est de règle, dans ses propres locaux, soit, si son dirigeant ou représentant l'a expressément demandé, dans les locaux du comptable auprès duquel sont déposés les documents comptables, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites, sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat.

4. Il résulte de l'instruction et notamment d'un courrier du 25 septembre 2013, signé par le gérant de l'EURL Auto eurolindi 01, que ce dernier a demandé que les opérations de vérification de comptabilité se déroule dans les locaux de son expert comptable, auquel il a donné mandat pour le représenter. Ce courrier comporte le tampon et la signature de l'expert-comptable avec la mention manuscrite " bon pour acceptation du mandat ". Dans ces conditions, en se bornant à alléguer que son gérant n'a rencontré personnellement le vérificateur qu'à une seule reprise et, en contradiction avec ce courrier, qu'elle n'a mandaté aucun conseil pour la représenter, l'EURL Auto eurolindi 01 ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle a été privée d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur.

5. En second lieu, aux termes du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales : " En présence d'une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés et lorsqu'ils envisagent des traitements informatiques, les agents de l'administration fiscale indiquent par écrit au contribuable la nature des investigations souhaitées. Le contribuable formalise par écrit son choix parmi l'une des options suivantes : / a) Les agents de l'administration peuvent effectuer la vérification sur le matériel utilisé par le contribuable ; / b) Celui-ci peut effectuer lui-même tout ou partie des traitements informatiques nécessaires à la vérification. Dans ce cas, l'administration précise par écrit au contribuable, ou à un mandataire désigné à cet effet, les travaux à réaliser ainsi que le délai accordé pour les effectuer. Les résultats des traitements sont alors remis sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget ; / c) Le contribuable peut également demander que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l'entreprise. Il met alors à la disposition de l'administration les copies des documents, données et traitements soumis à contrôle. Ces copies sont produites sur tous supports informatiques, répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget. L'administration restitue au contribuable avant la mise en recouvrement les copies des fichiers et n'en conserve pas de double. (...) ".

6. Il résulte de l'instruction que l'administration, qui s'est bornée à recueillir la comptabilité de la requérante et à la contrôler conformément aux dispositions du I de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, n'a pas mis en oeuvre de traitement informatique en application du II du même article. Par suite, l'EURL Auto eurolindi 01 n'est pas fondée à soutenir que la procédure serait irrégulière, faute pour le vérificateur de l'avoir mise en mesure d'exercer l'option prévue par ces dispositions.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

7. Il résulte de l'instruction que l'EURL Auto eurolindi 01 n'a pas fait connaître, dans le délai de trente jours prévu par l'article R. 57-1 du livre des procédures fiscales, son désaccord sur les redressements envisagés par le vérificateur, mentionnés dans les propositions de rectification qui lui ont été notifiées. Par suite, elle ne peut obtenir la décharge des impositions qu'elle conteste qu'en apportant la preuve de l'exagération des bases retenues par l'administration.

8. En l'espèce, le vérificateur a exercé son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire et obtenu les procès-verbaux des déclarations faites durant sa garde à vue par le gérant de l'EURL Auto eurolindi 01, M. A...qui reconnaissait que l'entreprise avait perçu de ses clients des sommes qui n'avaient pas été déclarées. Dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès de l'établissement bancaire de M. et MmeA..., le vérificateur a également pu identifier d'autres encaissements non déclarés effectués par des clients de l'entreprise. Enfin, les demandes d'information adressées aux clients de l'EURL Auto eurolindi 01 ont permis de recueillir un très grand nombre de réponses faisant état de deux règlements distincts, alors que seul l'un des deux correspondait à la facture émise. Le vérificateur a ainsi constaté que les montants facturés inscrits dans le livre de police et comptabilisés étaient systématiquement sous-évalués. Par ailleurs, le livre de police comportait de nombreuses erreurs et deux ventes de véhicules n'y avaient pas été comptabilisées. Eu égard à ces erreurs et au nombre considérable de sous-facturations recensées, l'administration était fondée à rejeter la comptabilité comme dépourvue de caractère probant, ce qui n'est au demeurant pas contesté.

9. Pour reconstituer le chiffre d'affaires de l'EURL Auto eurolindi 01, le vérificateur a constaté que les véhicules dont il avait pu identifier le prix de vente réel, avaient fait l'objet en moyenne d'une minoration de 13 %. Il a alors majoré le chiffre d'affaires déclaré du montant de cette minoration, en extournant la valeur du véhicule repris lorsque la transaction réalisée incluait la reprise de l'ancien véhicule de l'acquéreur. Toutefois et ainsi qu'il a été dit au point 1, le tribunal administratif a estimé que les données recueillies permettaient une reconstitution plus précise et que ce taux uniforme de 13 % devait être remplacé par trois taux distincts correspondant, respectivement, à l'exercice clos en 2011, à l'exercice clos en 2012 et à la période courant du 1eroctobre 2012 au 30 juin 2013.

10. Dans ces conditions, la méthode de reconstitution retenue a consisté à calculer le taux moyen de minoration des ventes dont le vérificateur avait pu reconstituer le montant réel puis à majorer du taux obtenu les montants ainsi comptabilisés de la totalité des ventes, y compris celles pour lesquelles le vérificateur n'avait pu reconstituer le prix de vente réel. Eu égard au caractère systématique des omissions de recettes révélées par le très grand nombre de réponses apportées par les clients de l'entreprise à la demande d'information, aux sous-facturations constatées et au montant réel des transactions réalisées, le taux moyen de minoration retenu par le vérificateur doit être regardé comme fiable et correspondant aux recettes non déclarées. Ainsi, l'EURL Auto eurolindi 01 n'est pas fondée à soutenir que cette méthode serait radicalement viciée.

11. Pour contester cette méthode, la requérante propose d'y substituer une nouvelle méthode consistant à calculer un coefficient de marge à partir des montants d'acquisitions de véhicules relevés sur les livres de police. Toutefois ainsi qu'il a été dit au point 6, le livre de police était entaché de nombreuses erreurs qui s'opposent à une telle méthode de reconstitution.

12. Il résulte de ce qui précède que l'EURL Auto eurolindi 01, qui ne rapporte pas la preuve de l'exagération des impositions, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. En conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'EURL Auto eurolindi 01 est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL Auto eurolindi 01 et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Fischer-Hirtz, présidente de chambre,

M. Souteyrand, président assesseur,

MmeB..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 15 novembre 2018.

La présidente, rapporteure,

C. Fischer-HirtzLe président assesseur,

E. Souteyrand

La greffière,

C. Langlet

La République mande et ordonne au ministre de l'Action et des Comptes Publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 18LY01096


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre a - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY01096
Date de la décision : 15/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité - Procédure.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales - Détermination du bénéfice imposable.


Composition du Tribunal
Président : Mme FISCHER-HIRTZ
Rapporteur ?: Mme Catherine FISCHER-HIRTZ
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : DELAMBRE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-11-15;18ly01096 ?
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