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15/11/2018 | FRANCE | N°17LY03801

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre b - formation à 3, 15 novembre 2018, 17LY03801


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 31 juillet 2017 par laquelle le préfet du Rhône a décidé son transfert aux autorités allemandes en vue de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que la décision du même jour par laquelle ce préfet l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1705907 du 4 août 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requêt

e enregistrée le 6 novembre 2017, M. A..., représenté par la SCP Couderc, Zouine, avocats, demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 31 juillet 2017 par laquelle le préfet du Rhône a décidé son transfert aux autorités allemandes en vue de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que la décision du même jour par laquelle ce préfet l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1705907 du 4 août 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 6 novembre 2017, M. A..., représenté par la SCP Couderc, Zouine, avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon du 4 août 2017 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, d'enregistrer sa demande d'asile dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros, au profit de son conseil, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision de transfert aux autorités allemandes méconnaît les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 5 de ce même règlement ;

- elle contrevient aux dispositions de l'article 29 du règlement (UE) n° 603/2013 ;

- elle méconnaît les dispositions du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision l'assignant à résidence est illégale, en raison de l'illégalité de la décision de transfert sur laquelle elle se fonde ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en l'absence de perspective raisonnable d'éloignement.

Par un mémoire enregistré le 30 octobre 2018, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le requérant a bénéficié de la remise des brochures et d'un entretien individuel par la préfecture de police de Paris ;

- les dispositions du paragraphe 2 de l'article 3 et celles de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 n'ont pas été méconnues.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 septembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 modifié par le règlement (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Zouine, avocat de M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant afghan né le 2 janvier 1991, est entré irrégulièrement en France le 28 mars 2017, selon ses déclarations et a sollicité l'asile. Par deux arrêtés du 31 juillet 2017, le préfet du Rhône a décidé de transférer l'intéressé vers l'Allemagne, État membre de l'Union européenne responsable, selon lui, de l'examen de sa demande d'asile et a prononcé son assignation à résidence. M. A... a contesté ces décisions devant le tribunal administratif de Lyon, qui a rejeté sa demande par un jugement du magistrat désigné par le président de cette juridiction en date du 4 août 2017, dont M. A... fait appel.

2. Aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement et notamment : / a) des objectifs du présent règlement (...) / b) des critères de détermination de l'État membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée (...) / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5 (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et en tout état de cause en temps utile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend.

4. Il ressort des pièces du dossier et notamment des termes mêmes de la décision de transfert en litige que, le 26 avril 2017, M. A... avait déposé une demande d'asile à Paris. Dès lors, il devait, dès cette date, recevoir les informations prévues à l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Il ressort des pièces produites en appel par le préfet que M. A... s'est vu remettre le 26 avril 2017 la brochure d'information B " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' " et que la brochure d'information A " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' " ne lui a pas été remise. Dès lors que la brochure B ne contient pas des informations équivalentes à celles de la brochure A, il n'a pas bénéficié d'une information complète avant de présenter sa demande. Ainsi, le préfet du Rhône ne pouvait, sans méconnaître les dispositions de l'article 4 du règlement citées ci-dessus et le priver d'une garantie, décider de le remettre aux autorités allemandes en vue de l'examen de cette même demande. Par suite, la décision du préfet du Rhône du 31 juillet 2017 de le remettre aux autorités allemandes est illégale, de même que, par voie de conséquence, l'arrêté du même jour l'assignant à résidence.

5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

6. Aux termes de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si la décision de transfert est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au livre V. L'autorité administrative statue à nouveau sur le cas de l'intéressé. " Le présent arrêt implique seulement que le préfet du Rhône procède au réexamen de la situation de M. A... dans le délai d'un mois suivant sa notification.

7. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sous réserve que Me Zouine (C..., Zouine), avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État une somme de 800 euros au titre des frais exposés à l'occasion du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon du 4 août 2017 et les décisions du préfet du Rhône du 31 juillet 2017 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône de réexaminer la situation de M. A... dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à Me Zouine (C..., Zouine) la somme de 800 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Lyon.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2018 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 novembre 2018.

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N° 17LY03801


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre b - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY03801
Date de la décision : 15/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

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Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SCP COUDERC - ZOUINE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-11-15;17ly03801 ?
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