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13/11/2018 | FRANCE | N°17LY03302

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 13 novembre 2018, 17LY03302


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté du 5 mai 2017 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé un pays de destination ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter du jugement ou, à défaut, de ré

examiner sa situation dans le même délai ;

3°) de faire application des dispositions de l'arti...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté du 5 mai 2017 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé un pays de destination ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter du jugement ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai ;

3°) de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1703095-1703096 du 24 juillet 2017, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté du 5 mai 2017 et enjoint au préfet de l'Isère de délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à MmeB....

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 31 août 2017, le préfet de l'Isère demande à la cour d'annuler ce jugement du 24 juillet 2017 et de rejeter la demande de MmeB....

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le refus de titre de séjour portait atteinte au droit de Mme B...au respect de sa vie privée et familiale, au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- Mme B...entre dans les catégories d'étrangers pouvant bénéficier du regroupement familial.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 mai 2018, MmeB..., représentée par Me Abdoudahab avocat, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi signé à Rabat le 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère, au cours de l'audience publique ;

1. Considérant que MmeB..., ressortissante marocaine née le 20 novembre 1973, serait entrée en France en juin 2011, selon ses déclarations ; que, par arrêté du 5 mai 2017, le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour présentée le 19 mai 2016 et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout pays où elle serait légalement admissible ; que le préfet de l'Isère relève appel du jugement du 24 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté et lui a enjoint de délivrer à l'intéressée un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...a épousé le 5 décembre 2015 un compatriote titulaire d'une carte de résident avec lequel elle a eu un enfant né le 20 novembre 2015 ; que, si son époux est par ailleurs père de trois enfants français issus d'un précédent mariage, dont un était mineur à la date de l'arrêté en litige, il n'est pas établi qu'il contribue à l'entretien et à l'éducation de ses enfants ; qu'ainsi, il n'est pas démontré qu'il ne pourrait poursuivre dans des conditions normales avec la requérante et leur enfant sa vie privée et familiale au Maroc ; que MmeB..., dont le mariage est récent et dont la durée et le caractère continu du séjour en France ne sont pas établis, ne fait, en outre, état d'aucun projet professionnel sur le territoire français et n'expose pas pour quels motifs elle a quitté l'Espagne, où elle disposait depuis 2011 d'un titre de séjour valable jusqu'au 23 octobre 2015 ; que, dans ces conditions, et alors que l'article 8 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne saurait s'interpréter comme comportant pour un État l'obligation générale de respecter le choix, par les couples mariés, de leur pays de résidence, le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que son arrêté du 5 mai 2017 ne porte pas, eu égard aux objectifs en vue desquels il a été pris, une atteinte disproportionnée au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale, au sens de ces stipulations ; qu'il est, dès lors, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté et lui a enjoint de délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à MmeB... ;

4. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens soulevés par Mme B...devant le tribunal administratif de Grenoble et en appel ;

5. Considérant, en premier lieu, que la requérante se prévaut, au soutien du moyen tiré de ce que l'arrêté en litige procèderait d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle, des mêmes éléments que ceux précédemment exposés relatifs à sa situation personnelle et familiale ; que ce moyen doit, dès lors, être écarté ;

6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

7. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier que la requérante ne pourrait reconstituer sa cellule familiale avec son époux, de même nationalité qu'elle, et leur enfant, dans leur pays d'origine ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 1703095-1703096 du 24 juillet 2017 est annulé.

Article 2 : La demande de Mme B...est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au préfet de l'Isère et à Mme A...B....

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 16 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

Mme Virginie Aubert-Chevalier, président assesseur,

Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère.

Lu en audience publique, le 13 novembre 2018.

4

N° 17LY03302


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY03302
Date de la décision : 13/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : ABOUDAHAB

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-11-13;17ly03302 ?
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