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25/10/2018 | FRANCE | N°18LY01575

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre a - formation à 3, 25 octobre 2018, 18LY01575


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... F...E... A...'dri a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2017, par lequel le préfet du Rhône l'a remis aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 1707579 du 13 février 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

I/ Par une requête enregistrée le 2 mai 2018 sous le n° 18LY01575, M. A... 'dri, représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administrati

f de Lyon du 13 février 2018 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... F...E... A...'dri a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2017, par lequel le préfet du Rhône l'a remis aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 1707579 du 13 février 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

I/ Par une requête enregistrée le 2 mai 2018 sous le n° 18LY01575, M. A... 'dri, représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 13 février 2018 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de vérifier son état civil et de saisir les autorités italiennes à cette fin, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué méconnaît l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 5 de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République italienne relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière, signé le 3 octobre 1997 ;

- l'arrêté méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été notifiée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations.

M. A... 'dri a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 mars 2018.

II/ Par une requête enregistrée le 2 mai 2018 sous le n° 18LY01577, M. A... 'dri, représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) de surseoir à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Lyon du 13 février 2018 ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'exécution du jugement risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables, dès lors que la mesure d'éloignement contestée fait échec à sa prise en charge en qualité de mineur isolé ;

- l'arrêté attaqué méconnaît l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 5 de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République italienne relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière, signé le 3 octobre 1997 ;

- l'arrêté méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation .

La requête a été notifiée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations.

M. A... 'dri a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 mai 2018.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République italienne relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière, signé le 3 octobre 1997 ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bertrand Savouré, premier conseiller,

- les observations de MaîtreD..., représentant M. A... 'dri ;

Considérant ce qui suit :

1. M.B... A...'dri, ressortissant Ivoirien, déclare être entré en France le 23 janvier 2017 en provenance d'Italie. Le 19 octobre 2017, le préfet du Rhône a sollicité sa réadmission par les autorités italiennes. Par arrêté du même jour, il a décidé sa remise à ces autorités sous réserve de l'accord de ces dernières. Par les présentes requêtes, M. C...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et demande qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement. Il y a lieu de joindre ces requêtes.

2. Aux termes de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation aux articles L. 213-2 et L. 213-3, L. 511-1 à L. 511-3, L. 512-1, L. 512-3, L. 512-4, L. 513-1 et L. 531-3, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1 et L. 311-1 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne, en vigueur au 13 janvier 2009. (...) ".

3. Aux termes de l'article 5 de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République italienne relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière, signé le 3 octobre 1997 : " 1. Chaque Partie contractante réadmet sur son territoire, à la demande de l'autre Partie contractante et sans formalités, le ressortissant d'un Etat tiers qui ne remplit pas ou ne remplit plus les conditions d'entrée ou de séjour applicables sur le territoire de la Partie contractante requérante pour autant qu'il est établi que ce ressortissant est entré sur le territoire de cette Partie après avoir séjourné ou transité par le territoire de la Partie contractante requise. (...) / 3. La demande de réadmission doit être transmise dans un délai de trois mois à compter de la constatation par la Partie contractante requérante de la présence irrégulière sur son territoire du ressortissant d'un Etat tiers. ". Il ressort du premier alinéa de l'article L. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que seuls les étrangers âgés de plus de dix-huit ans doivent être titulaires d'un document de séjour.

4. L'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit, en son premier alinéa, que la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. L'article 47 du code civil dispose quant à lui que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".

5. Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

6. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée, par principe, à de tels documents.

7. Le préfet du Rhône fait valoir que, pour les besoins des prises d'empreintes digitales dans le cadre du règlement Eurodac, M. C...s'est présenté à deux reprises aux autorités italiennes, le 27 mai 2016 et le 12 août 2016, sous le nom de E...B..., né le 20 décembre 1997 et que l'analyse technique de l'acte d'état civil initialement produit par M. C...a conclu que cet acte était une contrefaçon. Toutefois, M.C..., qui se prévaut de documents d'identité ivoiriens authentiques mentionnant la date de naissance qu'il allègue, a été en mesure de produire, pour la première fois devant la cour, un acte d'état civil daté du 5 mars 2018, dont l'authenticité n'est pas contestée par le préfet du Rhône, mentionnant une date de naissance le 20 décembre 2000. Si ces documents sont postérieurs à l'arrêté attaqué du préfet du Puy-de-Dôme, ils révèlent des faits antérieurs à cette décision qui doivent être pris en compte pour en apprécier la légalité. Par suite, les seuls éléments sur lesquels s'était fondé le préfet du Rhône ne permettent pas de remettre en cause la date de naissance mentionnée sur son acte d'état civil régulièrement établi en Côte d'Ivoire. M. C...doit donc être regardé comme mineur à la date de l'arrêté litigieux. Ainsi, M. C...est fondé à soutenir qu'il disposait du droit de séjourner en France et que le préfet du Rhône a donc méconnu l'article 5 précité de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République italienne relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière, signé le 3 octobre 1997.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... 'dri est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux.

9. Le présent arrêt n'implique aucune mesure d'injonction. Les conclusions présentées à cette fin par M. C...doivent, dès lors, être rejetées.

10. Dès lors qu'il est statué par le présent arrêt sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué, il n'y a pas lieu de statuer sur celles tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution.

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Maître D...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : L'arrêté du 19 octobre 2017 et le jugement n° 1707579 du tribunal administratif de Lyon en date du 13 février 2018 sont annulés.

Article 2 : L'État versera à Maître D...la somme de 1 000 euros, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'État.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. C...est rejeté.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête présentée sous le n° 18LY01577 par M. A... 'dri.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M.B... F...E... A...'dri et au ministre de l'intérieur. Copie du présent arrêt en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 4 octobre 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Fisher-Hirtz, présidente de chambre,

M. Souteyrand, président assesseur,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 octobre 2018.

2

N° 18LY01575


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre a - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY01575
Date de la décision : 25/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme FISCHER-HIRTZ
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : VIBOUREL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-10-25;18ly01575 ?
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