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23/10/2018 | FRANCE | N°16LY01870

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 23 octobre 2018, 16LY01870


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

1°) à titre principal, d'annuler l'arrêté du 1er avril 2015 du président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Allier, qui réduit de 16 % à 13 % le taux de son indemnité de responsabilité à compter du 1er janvier 2015 pour l'établir au niveau des responsabilités correspondant aux fonctions de chef d'agrès une équipe ;

2°) de condamner le SDIS de l'Allier à lui vers

er la somme de 2 000 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral ;

3°) d'enjoin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

1°) à titre principal, d'annuler l'arrêté du 1er avril 2015 du président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Allier, qui réduit de 16 % à 13 % le taux de son indemnité de responsabilité à compter du 1er janvier 2015 pour l'établir au niveau des responsabilités correspondant aux fonctions de chef d'agrès une équipe ;

2°) de condamner le SDIS de l'Allier à lui verser la somme de 2 000 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral ;

3°) d'enjoindre au SDIS de l'Allier de le rétablir dans des droits identiques à sa situation antérieure au 1er janvier 2015 et de liquider ses droits au titre du rappel sur indemnité, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement ;

4°) à titre subsidiaire, de condamner le SDIS de l'Allier à le maintenir dans ses fonctions et indemnités antérieures au 1er janvier 2015 durant la période transitoire de sept ans, sous astreinte de 100 euros par jours de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement.

Par un jugement n° 1501195 du 31 mars 2016, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'arrêté du 1er avril 2015 du président du SDIS de l'Allier en tant qu'il présente un caractère rétroactif et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 1er juin 2016, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 31 mars 2016 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er avril 2015 dans toutes ses dispositions, de le rétablir dans des droits identiques à sa situation antérieure au 1er janvier 2015 et de le renvoyer vers le SDIS pour liquider ses droits au titre du rappel sur indemnité, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner le SDIS de l'Allier à le maintenir dans ses fonctions et indemnités antérieures au 1er janvier 2015 durant la période transitoire de sept ans, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner le SDIS de l'Allier à lui verser la somme de 2 000 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral ;

5°) de mettre à la charge du SDIS de l'Allier une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le mémoire en défense du SDIS de l'Allier sera déclaré irrecevable, dès lors qu'il n'est pas justifié de l'autorisation pour agir de son président ;

- les premiers juges devaient annuler intégralement l'arrêté attaqué dès lors qu'il n'est pas possible de déterminer la date d'application effective de l'arrêté litigieux ;

- la perception de janvier à mai 2015 de l'indemnité de responsabilité à un taux de 16 % doit être regardée comme une décision créatrice de droit devenue définitive qui ne pouvait pas faire l'objet d'un retrait ;

- l'acte attaqué méconnaît les dispositions de l'article 8 du décret du 20 avril 2012, dès lors qu'il est fondé à se prévaloir du maintien de son emploi tel qu'il était au 1er janvier 2015 ainsi que de l'indemnité de responsabilité correspondante, ce pendant une période transitoire de sept années ;

- l'acte attaqué présente le caractère d'une sanction déguisée et est discriminatoire, dès lors qu'il a subi une perte importante de responsabilité, que son emploi a été modifié et que sa rémunération a baissé ;

- l'acte attaqué méconnaît les dispositions de la circulaire n° DGSCGC 2013-n° 104 du 15 janvier 2013 et de la note du 23 décembre 2013 lesquelles présentent un caractère décisoire ;

- l'illégalité de l'acte attaqué lui a causé un préjudice matériel et un préjudice moral.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juillet 2017, le SDIS de l'Allier, représenté par Me D..., conclut :

- au rejet de la requête ;

- par la voie de l'appel incident à la réformation du jugement en tant qu'il a annulé l'arrêté du 1er avril 2015 en ce qu'il avait une portée rétroactive ;

- à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la demande de première instance ne lui ayant pas été communiquée, il ne peut vérifier si la requête d'appel ne constitue pas la reproduction intégrale des écritures de première instance ;

- les moyens présentés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2012-519 du 20 avril 2012 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Virginie Chevalier-Aubert, rapporteur,

- et les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B..., adjudant chef de sapeurs-pompiers affecté à la caserne de Montluçon, relève appel du jugement du 31 mars 2016 en tant que par celui-ci, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, d'une part, annulé l'arrêté du 1er avril 2015 par lequel le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Allier a réduit le taux de l'indemnité qui lui était servie non en totalité, mais seulement en ce qu'il présente un caractère rétroactif et, d'autre part, rejeté ses conclusions indemnitaires ; que, par la voie de l'appel incident, le SDIS de l'Allier sollicite la réformation de ce même jugement en ce qu'il a prononcé l'annulation de l'arrêté en litige en tant que cet arrêté présente un caractère rétroactif ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par M. B... :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par une délibération du 12 juillet 2016, le bureau du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours de l'Allier a autorisé son président à ester en justice dans la présente affaire ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par M. B..., tirée de ce qu'à défaut d'une telle autorisation, le mémoire présenté pour le SDIS, enregistré au greffe du 22 juillet 2016, serait irrecevable, ne peut être accueillie ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 6-4 du décret du 25 septembre 1990, portant dispositions communes à l'ensemble des sapeurs-pompiers professionnels, dans sa rédaction issue de l'article 2 du décret n° 2012-519 du 20 avril 2012: " I - Une indemnité de responsabilité, variable en fonction du grade et de l'emploi, peut être attribuée aux sapeurs pompiers professionnels. Lorsqu'ils occupent plusieurs emplois, un seul de ceux-ci peut être pris en compte pour le calcul de cette indemnité. /II - L'indemnité de responsabilité, non soumise à retenue pour pension, est calculée en pourcentage du traitement indiciaire brut moyen du grade. Un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et des ministres chargés du budget et de la fonction publique fixe, pour chaque grade, l'indice brut minimal et l'indice brut maximal applicables. III - Les conditions d'octroi, liées aux responsabilités particulières qui sont confiées aux sapeurs-pompiers professionnels, ainsi que les taux maxima de cette indemnité figurent dans le tableau I annexé au présent décret. / Les taux maxima de l'indemnité pour les emplois non cités dans ce tableau sont fixés par référence à l'emploi cité le plus proche de la responsabilité réellement exercée, sous réserve que l'intéressé détienne la qualification requise. " ; qu'aux termes de l' article 8 du même décret : " (...) A compter de la date d'entrée en vigueur du présent décret, les sapeurs-pompiers professionnels qui occupaient un emploi opérationnel et d'encadrement et qui bénéficiaient au titre des responsabilités particulières qu'ils exerçaient d'une indemnité de responsabilité ne correspondant pas à leur grade, par référence au tableau de concordance et au tableau I annexés au décret du 25 septembre 1990 susvisé dans leur rédaction issue du présent décret, peuvent continuer à occuper cet emploi et à percevoir cette indemnité à titre personnel, dans le service départemental d'incendie et de secours où ils servent, pendant une durée maximale de sept ans " ; que ces dispositions, si elles ouvrent la possibilité, à titre transitoire et pendant une durée maximale de sept ans, pour certains sapeurs-pompiers professionnels de continuer à occuper l'emploi opérationnel et d'encadrement qu'ils occupaient en bénéficiant de l'indemnité de responsabilité correspondante, ne confèrent pas, toutefois, un droit à leur bénéfice ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'une mesure revêt le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée lorsque, tout à la fois, il en résulte une dégradation de la situation professionnelle de l'agent concerné et que la nature des faits qui ont justifié la mesure et l'intention poursuivie par l'administration révèlent une volonté de sanctionner cet agent ;

5. Considérant que conformément au tableau de concordance annexé au décret susvisé du 20 avril 2012, l'arrêté du 1er avril 2015 du président du SDIS a fixé le taux d'indemnité, perçu par M. B..., titulaire du grade d'adjudant, à 13 % pour ses nouvelles fonctions de " chef d'agrès tout engin " au lieu des 16 % pour ses précédentes fonctions de " chef de garde adjoint " ; qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le président du SDIS de l'Allier aurait, en appliquant les dispositions réglementaires sus mentionnées à sa situation, entendu infliger une sanction à M. B... ;

6. Considérant que M. B... ne peut utilement se prévaloir de la circonstance, à la supposer établie, que seule la caserne de Montluçon aurait mis en oeuvre la réforme introduite par le décret précité du 20 avril 2012 pour soutenir qu'il a été victime d'une discrimination ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que M. B..., auquel aucune disposition du décret du 20 avril 2012 ne conférait le droit d'être maintenu dans ses précédentes fonctions de chef de garde adjoint et ses responsabilités opérationnelles de chef d'agrès tout engin avec un taux de prime de 16 %, ne peut utilement invoquer les dispositions de la circulaire DGSCGC/2013 n° 104 du 15 janvier 2013 et de la note d'information DGSCGC/DSP/SDRCDE n° 69 du 23 décembre 2013 du ministre de l'intérieur, qui sont dépourvues de caractère règlementaire et ne présentent que des orientations générales ou des lignes directrices ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'en admettant même que M. B..., qui a continué à percevoir un taux de prime de 16 % du 1er janvier 2015 au 3 juin 2015 puisse être regardé comme ayant bénéficié d'une décision créatrice de droit lui accordant un avantage financier, l'arrêté attaqué modifiant le taux de primes est intervenu dans le délai de retrait de quatre mois ;

9. Considérant, en quatrième lieu, que les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir ; que, s'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires ou des militaires, il peut toutefois être dérogé à ce principe par l'administration en leur conférant une portée rétroactive, dans la seule mesure où ces décisions permettent d'assurer la continuité de la carrière d'un agent ou de procéder à la régularisation de sa situation ; que l'arrêté du 1er avril 2015, par lequel le SDIS de l'Allier a décidé que M. B... percevrait, à compter du 5 janvier 2015, le taux d'indemnité pour ses nouvelles fonctions de " chef d'agrès tout engin " de 13 % au lieu des 16 % pour ses précédentes fonctions de " chef de garde adjoint " n'était pas nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de cet adjudant et ne présentait pas non plus le caractère d'une mesure de régularisation ; que les premiers juges pouvaient dès lors, sans méconnaître leur office, considérer que l'arrêté en litige, prévu pour prendre effet à une date antérieure à celle à laquelle il a été pris, était entaché de rétroactivité illégale ; que c'est donc à bon droit que, par leur jugement attaqué, ils en ont, dans cette mesure, prononcé l'annulation ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par le SDIS de l'Allier, qu'il y a lieu de rejeter les conclusions de M. B... tendant à l'annulation intégrale de l'arrêté du 1er avril 2015 et les conclusions incidentes par lesquelles le SDIS de l'Allier demande l'annulation du jugement en tant qu'il a partiellement annulé cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

11. Considérant que M. B... n'est fondé à invoquer, à l'appui de ses conclusions à fin d'indemnisation, que la seule illégalité fautive résultant de la portée rétroactive de l'arrêté du 1er avril 2015 sur la période du 5 janvier au 1er avril 2015 ; que toutefois, et dès lors, d'une part, qu'il est constant qu'il a perçu l'indemnité au taux ancien de 16 % au cours de cette période et, d'autre part, qu'il ne justifie pas de la réalité des préjudices moral et matériel qu'il invoque, ses conclusions à fins d'indemnisation doivent, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir qui leur a été opposée, être rejetées ;

Sur les conclusions de la requête à fin d'injonction et d'astreinte :

12. Considérant que le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions à fin d'injonction de M. B... doivent, dès lors, être rejetées ;

Sur les frais liés au litige :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du SDIS de l'Allier, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B...à l'occasion du litige ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce même titre par le SDIS de l'Allier ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel incident du président du SDIS de l'Allier et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au service départemental d'incendie et de secours de l'Allier.

Délibéré après l'audience du 2 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

Mme Virginie Chevalier-Aubert, président assesseur,

Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique le 23 octobre 2018.

6

N° 16LY01870

mg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY01870
Date de la décision : 23/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : DUPLESSIS et BARDIN-ROUSSEL et METIVIER

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-10-23;16ly01870 ?
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