Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
L'association AST74 a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 7 août 2015, en tant qu'elle a retiré la décision implicite d'acceptation née du silence gardé sur son recours contre la décision du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Rhône-Alpes du 10 décembre 2014 agréant le service de santé au travail interentreprises qu'elle gère.
Par un jugement n° 1506215 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 23 février 2018, présentée pour l'association AST74, représentée par son président en exercice, par Me Lauriac, avocat, il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 21 décembre 2017 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le retrait de la décision implicite d'acceptation née de son recours hiérarchique est insuffisamment motivé ;
- cet agrément implicite a été illégalement retiré.
La requête a été communiquée au ministre du travail qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Clot, président,
- les conclusions de M. Laval, rapporteur public,
- les observations de Me Laplanche, avocat, substituant Me Lauriac, avocat de l'association AST74 ;
Considérant ce qui suit :
1. L'association AST74 gère dans le département de la Haute-Savoie un service de santé au travail interentreprises bénéficiant d'un agrément, dont elle a demandé le renouvellement par courrier du 30 juillet 2014 reçu par l'administration le 11 août 2014. Le 10 décembre 2014, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Rhône-Alpes lui a accordé un agrément pour cinq ans et a fixé le seuil maximal de salariés pouvant être suivis. Saisi d'un recours hiérarchique, le ministre chargé du travail a, le 7 août 2015, retiré la décision implicite d'acceptation née du silence gardé sur ce recours pendant quatre mois, annulé la décision du directeur régional du 10 décembre 2014 et accordé à la requérante un agrément d'une durée de cinq ans en fixant les conditions de fonctionnement de son service de santé au travail. L'association AST74 fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du ministre, en tant qu'elle retire l'agrément dont elle s'est trouvée tacitement bénéficiaire.
2. Aux termes de l'article D. 4622-48 du code du travail : " Chaque service de santé au travail fait l'objet d'un agrément, pour une période de cinq ans, par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, après avis du médecin inspecteur du travail. (...). /L'agrément fixe l'effectif maximal de travailleurs suivis par le médecin du travail ou, pour les services de santé au travail interentreprises, par l'équipe pluridisciplinaire de santé au travail. "
3. Aux termes de l'article R. 4622-52 du même code : " Le silence gardé pendant plus de quatre mois sur une demande d'agrément ou de renouvellement d'agrément vaut décision d'agrément. /Le silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre chargé du travail saisi d'un recours hiérarchique sur une décision relative à l'agrément vaut décision d'agrément. "
4. L'article 23 de la loi du 12 avril 2000, alors en vigueur, dispose que : " Une décision implicite d'acceptation peut être retirée, pour illégalité, par l'autorité administrative : 1° Pendant le délai de recours contentieux, lorsque des mesures d'information des tiers ont été mises en oeuvre ; 2° Pendant le délai de deux mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision, lorsqu'aucune mesure d'information des tiers n'a été mise en oeuvre ; 3° Pendant la durée de l'instance au cas où un recours contentieux a été formé ".
5. Il ressort des pièces du dossier que le recours de l'association AST74 est parvenu au ministre chargé du travail le 12 février 2015. Il résulte des dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 4622-52 du code du travail qu'en l'absence de réponse, l'association pouvait, le 12 juin 2015, se prévaloir d'une décision implicite valant agrément. Il ne ressort pas des pièces du dossier que cette décision implicite était illégale. Dès lors, elle ne pouvait pas légalement être retirée.
6. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de sa requête, l'association AST74 est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le paiement à l'association AST74 d'une somme de 1 500 euros au titre des frais liés au litige.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 21 décembre 2017 et les articles 1er et 4 à 8 de la décision du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 7 août 2015 sont annulés.
Article 2 : L'État versera à l'association AST74 la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association AST74 et au ministre du travail.
Délibéré après l'audience du 1er octobre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Seillet, président assesseur,
Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 octobre 2018.
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N° 18LY00734