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11/10/2018 | FRANCE | N°17LY00731

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre a - formation à 3, 11 octobre 2018, 17LY00731


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C...D...et Mme B...A..., épouse D...ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 30 novembre 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1603011-1603012 du 15 novembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregist

rée le 16 février 2017, M. et Mme D..., représentés par la SCP Couderc-Zouine, avocats, demandent...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C...D...et Mme B...A..., épouse D...ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 30 novembre 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1603011-1603012 du 15 novembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 16 février 2017, M. et Mme D..., représentés par la SCP Couderc-Zouine, avocats, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 15 novembre 2016 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du 30 novembre 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de leur délivrer des titres de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de leur délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, et de les munir sans délai d'un récépissé les autorisant à travailler ou, à titre subsidiaire, de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour en qualité de parents d'enfant malade les autorisant à travailler, dans un délai d'un mois ;

4°) de mettre à la charge de l'État, à payer à leur conseil, la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'État à sa mission d'aide juridictionnelle.

M. et Mme D... soutiennent que :

- les refus de les admettre au séjour méconnaissent les dispositions combinées des articles L. 311-12 et L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les refus de titre de séjour méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- ils sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur leurs situations personnelles ;

- ils méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- les obligations de quitter le territoire français méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur leurs situations personnelles ;

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juin 2018, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme D... ne sont pas fondés et il s'en rapporte à ses écritures de première instance.

M. et Mme D... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 janvier 2017.

Par une ordonnance du 5 juillet 2011 la clôture d'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme E..., première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D..., ressortissants bosniaques, relèvent appel du jugement en date du 15 novembre 2016, par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du 30 novembre 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de les admettre au séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

En ce qui concerne les décisions portant refus de titre de séjour et refus d'admission au séjour :

2. Aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'autorisation provisoire de séjour mentionnée au premier alinéa, qui ne peut être d'une durée supérieure à six mois, est délivrée par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, (...) ".

3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé conforme à ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à faire obstacle à son éloignement. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment d'un certificat médical du 23 mars 2015 du service d'orthopédie traumatologie et plastie infantile de l'hôpital " Femme Mère Enfant " de Bron que la fille de M. et Mme D..., Adna, née en novembre 2005, souffrait d'une dysplasie spondylo-thoracique, ainsi que d'une agénésie rénale gauche, avec un rein droit à uretère ectopique. Elle était également prise en charge par le service de néphrologie pédiatrique de ce même établissement. A la date de la décision litigieuse, l'équipe d'orthopédie de l'hôpital " Femme Mère Enfant " de Lyon envisageait une intervention chirurgicale, qui a effectivement eu lieu postérieurement à la date de la décision attaquée, le 8 septembre 2016, dont le compte rendu opératoire fait état d'une arthrodèse et d'une ostéosynthèse sur scoliose malformative thoracique.

5. Les décisions du 16 novembre 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de délivrer à M. et Mme D... des autorisations provisoires de séjour sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 311-12 et du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été prises au vu d'un avis rendu le 16 février 2015 par le médecin de l'agence régionale de santé. Ce dernier a estimé que l'état de santé de leur fille nécessitait des soins médicaux dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité au vu de l'absence de traitement approprié dans son pays d'origine et que le traitement devait être poursuivi. Le préfet, qui n'était pas lié par l'avis consultatif du médecin de l'agence régionale de santé, a refusé de délivrer des autorisations provisoires de séjour à ses parents au motif que leur fille pouvait bénéficier d'un traitement approprié en Bosnie.

6. Pour justifier qu'il se soit écarté de l'appréciation portée par le médecin de l'agence régionale de santé, le préfet du Rhône a produit, outre les éléments fournis par l'ambassade de France en Bosnie en date du 5 août 2013 sur la capacité des institutions de santé bosniaques à traiter la majorité des maladies courantes, des éléments plus circonstanciés sur le traitement des pathologies dont la fille des requérants est atteinte. S'agissant de la dysplasie spondylo-thoracique, outre des fiches Medicoi qui font apparaître que la chirurgie orthopédique de l'enfant existe en Bosnie, le préfet a produit un document datant de 2010 émanant du ministère de la santé du Canton de Sarajevo faisant apparaître qu'il existe en Bosnie des structures hospitalières capables d'assurer la chirurgie du système ostéo-articulaire chez l'enfant, et plus particulièrement de prendre en charge la scoliose par " traitement chirurgical ", incluant " la thoracoplastie ", " l'arthrodèse postérieure " et " l'ostéotomie de rétablissement de la concavité costale ". Si les requérants contestent la traduction " libre " qui a été communiquée par la préfecture de certaines parties seulement de ce document, toutefois, ils ne font état d'aucun élément contenu dans ce document, dont l'original en bosnien a été entièrement produit par le préfet, qui serait contradictoire avec les parties traduites par les soins de la préfecture. Les requérants n'établissent pas que ces structures ne seraient pas adaptées à l'état de santé de leur enfant. S'agissant du traitement des problèmes néphrologiques, le préfet a produit divers documents établissant que le suivi néphrologique d'Adna peut être assuré en Bosnie et que des greffes de reins sont possibles. Par suite, le préfet n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de leur délivrer des autorisations provisoires de séjour.

7. M. et Mme D... reprennent en appel les moyens tirés de ce que les refus de titre de séjour litigieux méconnaîtraient l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, seraient entachés d'erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur leurs situations personnelles et méconnaîtraient les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, moyens auxquels le tribunal a déjà suffisamment répondu. Il y a lieu, par adoption des motifs des premiers juges, d'écarter ces moyens.

En ce qui concerne les obligations de quitter le territoire français :

8. M. et Mme D... reprennent en appel les moyens tirés de ce que les obligations de quitter le territoire français méconnaîtraient l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, seraient entachés d'erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur leurs situations personnelles et méconnaîtraient les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, moyens auxquels le tribunal a déjà suffisamment répondu. Il y a lieu, par adoption des motifs des premiers juges, d'écarter ces moyens.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles qu'ils présentent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... D... et au ministre d'État, de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2018, à laquelle siégeaient :

Mme Fisher-Hirtz, présidente de chambre,

M. Souteyrand, président assesseur,

Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 11 octobre 2018.

6

N° 17LY00731


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre a - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY00731
Date de la décision : 11/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme FISCHER-HIRTZ
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : SCP COUDERC - ZOUINE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-10-11;17ly00731 ?
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