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25/09/2018 | FRANCE | N°16LY03725

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 25 septembre 2018, 16LY03725


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) de Tras Le Bosc a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2015 par lequel le préfet du Cantal a autorisé M. A... C... à exploiter 28 hectares 67 ares de terres sises sur le territoire de la commune de Vernols et la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet sur son recours gracieux dirigé contre cet arrêté

Par un jugement n° 1501538 du 22 septembre 2016, le tribunal admin

istratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) de Tras Le Bosc a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2015 par lequel le préfet du Cantal a autorisé M. A... C... à exploiter 28 hectares 67 ares de terres sises sur le territoire de la commune de Vernols et la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet sur son recours gracieux dirigé contre cet arrêté

Par un jugement n° 1501538 du 22 septembre 2016, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 10 novembre 2016, l'EARL de Tras Le Bosc, représentée par la SCP Moins, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 septembre 2016 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2015 par lequel le préfet du Cantal a autorisé M. A... C... à exploiter 28 hectares 67 ares de terres sises sur le territoire de la commune de Vernols et la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet sur son recours gracieux dirigé contre cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de M. C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté en litige est entaché d'erreur de droit en ce qu'il est fondé à tort sur l'article L. 331-3 alinéas 1 et 3 du code rural et de la pêche maritime, alors que cet article, tel que modifié par l'article 32 de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014, ne comporte que deux alinéas ;

- il méconnaît l'article 2 du schéma directeur départemental des structures agricoles du Cantal, dès lors que le préfet a pris à tort en compte dans l'examen de la demande d'autorisation d'exploiter de M. C... 0,5 actif du fait du statut de conjoint collaborateur de son épouse alors qu'elle ne remplit plus les conditions pour revendiquer un tel statut car elle exerce une activité rémunérée à temps plein dans les cuisines d'un établissement scolaire ;

- il méconnaît l'article 2 du même schéma, dès lors que le préfet n'a pas tenu compte des deux salariés qu'elle emploie, l'un à temps complet, l'autre à mi-temps, pour déterminer le nombre d'actifs la concernant ;

- il méconnaît l'article 6 de ce schéma, dès lors que le préfet n'a pas tenu compte des revenus locatifs de M. C... dans l'examen de sa demande d'autorisation ;

- il méconnaît l'article 8 dudit schéma, dès lors qu'en application des critères de cet article, sa situation est plus prioritaire que celle de M. C... ;

- il méconnaît le 3° du premier alinéa de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime, dès lors que la perte des 28,67 ha de terres en litige remet en cause l'autonomie de son exploitation, ces terres étant nécessaires pour le maintien à son égard du label de production " boeuf fermier Aubrac ".

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juin 2017, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juin 2017, M. A... C..., représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que soient mis à la charge de l'EARL de Tras Le Bosc ou du GAEC de Tras Le Bosc les dépens ainsi que la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la demande de première instance de l'EARL de Tras Le Bosc, enregistrée le 10 août 2015, est tardive, dès lors que l'arrêté en litige lui a été notifié le 9 février 2015 et que son recours gracieux dirigé contre cet arrêté, parvenu le 10 avril 2015 à la préfecture du Cantal après l'expiration, le 9 février 2015, du délai de deux mois de recours contentieux n'a pu proroger ce délai ;

- l'EARL de Tras Le Bosc n'a pas qualité pour interjeter appel, dès lors qu'elle a été transformée en GAEC de Tras Le Bosc le 1er mai 2016 ;

- les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Virginie Chevalier-Aubert, président assesseur,

- et les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;

1. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du IX de l'article 93 de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt : " Les schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles mentionnés à l'article L. 312-1 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction résultant de la présente loi, sont arrêtés dans un délai d'un an à compter de sa publication. / Jusqu'à l'entrée en vigueur du schéma directeur régional des exploitations agricoles, le contrôle des structures s'applique selon les modalités, les seuils et les critères définis par le schéma directeur des structures agricoles de chaque département. / (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le législateur a subordonné l'application de l'ensemble des dispositions du code rural et de la pêche maritime relatives au contrôle des structures issues de la loi du 13 octobre 2014 à l'entrée en vigueur des schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles ;

2. Considérant qu'il est constant qu'au 28 janvier 2015, date d'édiction de l'arrêté en litige, le schéma directeur régional des exploitations agricoles concernant notamment le département du Cantal n'était pas entré en vigueur ; que, par suite, le préfet du Cantal n'a pas commis d'erreur de droit en fondant son arrêté contesté sur les dispositions de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'article 32 de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort de l'attestation en date du 24 septembre 2015 du directeur de la caisse de mutualité sociale d'Auvergne que Mme B... C..., épouse de M. A... C..., est inscrite auprès de cet organisme de sécurité sociale en qualité de conjoint collaborateur depuis le 20 novembre 2010 ; que l'EARL de Tras Le Bosc n'établit pas, comme elle le soutient, que Mme C... exercerait une activité rémunérée à temps plein dans les cuisines d'un établissement scolaire qui ne lui permettrait plus, à la date de l'arrêté contesté, de remplir les conditions pour revendiquer le statut de conjoint collaborateur ; que, dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait méconnu les dispositions du 1) de l'article 2 du schéma directeur départemental des structures agricoles du Cantal relatives à la prise en compte des actifs dans l'examen des demandes en tenant compte de la participation de l'épouse de M. C... à son exploitation agricole en qualité de conjoint collaborateur ;

4. Considérant, en troisième lieu, que l'EARL de Tras Le Bosc, qui est le preneur en place des 28 hectares 67 ares de terres que M. C... est autorisé à exploiter par l'arrêté en litige, n'a pas la qualité de demandeur d'une autorisation d'exploiter ces mêmes terres ; que, par suite, elle ne saurait utilement soutenir que le préfet n'aurait pas tenu compte des deux salariés qu'elle emploie pour déterminer le nombre d'actifs la concernant au titre du 1) de l'article 2 du schéma directeur départemental des structures agricoles qui ne vise que les demandeurs à l'autorisation d'exploiter ;

5. Considérant, en quatrième lieu, que si M. C... perçoit des revenus provenant de la location de ses propriétés immobilières, il ne ressort pas des pièces des dossiers de première instance et d'appel que cette location constitue pour l'intéressé une activité professionnelle ; que, dans ces conditions, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait méconnu les dispositions de l'article 6 du schéma directeur départemental des structures agricoles relatives à la pluriactivité en ne tenant pas tenu compte des revenus locatifs de M. C... dans l'examen de sa demande d'autorisation d'exploiter ;

6. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime dans sa rédaction antérieure à celle résultant de l'article 32 de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 : " L'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : / (...) / 3° Prendre en compte les biens corporels ou incorporels attachés au fonds dont disposent déjà le ou les demandeurs ainsi que ceux attachés aux biens objets de la demande en appréciant les conséquences économiques de la reprise envisagée ; / (...) " ;

7. Considérant qu'il ressort des termes de l'arrêté litigieux que le préfet du Cantal a délivré l'autorisation sollicitée par M. C... en se fondant, d'une part, sur l'absence de remise en cause de l'autonomie de l'exploitation de l'EARL de Tras Le Bosc, preneur en place, et d'autre part, sur la circonstance que la situation de M. C... relève d'un rang de priorité identique à celle de ladite EARL ;

8. Considérant, d'une part, qu'il est constant que l'EARL de Tras Le Bosc, preneur en place, exploitait avant la reprise litigieuse une superficie totale de 225 ha dont les 28 hectares 67 ares de terres en cause, situés à 120 km du siège de son exploitation, représentent 12,74 % de cette surface totale ; qu'après la reprise, cette EARL conservera une superficie d'exploitation de 196 h 33 a, proche de quatre unités de référence, cette unité étant fixée à 50 ha pour l'ensemble du département du Cantal ; qu'il ne ressort pas des pièces des dossiers de première instance et d'appel que la perte de l'exploitation des 28,67 ha de terres remettrait en cause, comme la requérante le soutient, le maintien pour sa production du label rouge " Viande et abats frais et surgelés de gros bovins fermiers de race Aubrac " ; que, dans ces conditions, le premier motif précité de l'arrêté contesté n'est pas entaché d'erreur d'appréciation au regard des dispositions susmentionnées du 3° du premier alinéa de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime ;

9. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que le préfet du Cantal aurait pris sur la demande de M. C... la même décision d'autorisation d'exploiter s'il s'était fondé seulement sur le motif tiré de l'absence de remise en cause de l'autonomie de l'exploitation de l'EARL de Tras Le Bosc ; que, par suite, la requérante ne saurait utilement soutenir que l'autre motif de l'arrêté en litige méconnaîtrait les dispositions de l'article 8 du schéma directeur départemental des structures agricoles relatives à la pluralité de demandes de même catégorie ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par M. C... à la demande de première instance et à la requête de l'EARL de Tras Le Bosc, que celle-ci n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. C... présentées sur le fondement du même article ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'EARL de Tras Le Bosc est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de M. C... présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'EARL de Tras Le Bosc, à M. A... C... et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Copie en sera adressée au préfet du Cantal.

Délibéré après l'audience du 4 septembre 2018, à laquelle siégeaient :

M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

Mme Virginie Chevalier-Aubert, président assesseur,

M. Pierre Thierry, premier conseiller.

Lu en audience publique le 25 septembre 2018.

4

N° 16LY03725

mg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY03725
Date de la décision : 25/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-03-01-03 Agriculture et forêts. Exploitations agricoles. Cumuls et contrôle des structures. Cumuls d'exploitations. Motifs de la décision.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : MOINS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-09-25;16ly03725 ?
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