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20/09/2018 | FRANCE | N°16LY03773

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 20 septembre 2018, 16LY03773


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 27 novembre 2013 par laquelle le directeur général de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Lyon Métropole n'a pas renouvelé son contrat à durée déterminée d'une durée d'un an, arrivant à échéance le 31 décembre 2013, et de mettre à la charge de la CCI la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par le jugement n° 1402447 du 28 septembre 2016, le tribunal adm

inistratif de Lyon a annulé la décision du 27 novembre 2013 et mis à la charge de la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 27 novembre 2013 par laquelle le directeur général de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Lyon Métropole n'a pas renouvelé son contrat à durée déterminée d'une durée d'un an, arrivant à échéance le 31 décembre 2013, et de mettre à la charge de la CCI la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par le jugement n° 1402447 du 28 septembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 27 novembre 2013 et mis à la charge de la CCI de Lyon Métropole la somme de 1 200 euros à verser à Mme B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement le 16 novembre 2016 et le 13 avril 2017, la CCI Lyon Métropole Saint-Étienne Roanne, représentée par la SCP Joseph Aguerra et Associés, avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 septembre 2016 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de rejeter l'ensemble des demandes de Mme B... ;

3°) de mettre à la charge de Mme B...la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La CCI soutient que :

- le jugement est irrégulier car insuffisamment motivé ;

- les visas du jugement, en se référant aux textes applicables à la fonction publique, sont inopérants ; le tribunal administratif a visé des textes qui n'étaient pas applicables et n'a pas visé ceux, dont le statut du personnel, applicables ;

- le tribunal ne s'est pas borné à exercer un contrôle restreint sur la décision de ne pas renouveler un contrat à durée déterminée ;

- contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, Mme B...était elle-même à l'origine de harcèlement moral à l'égard de certaines collègues et rien ne lui permettait de conclure que Mme B... était victime de harcèlement ;

- il n'est ni démontré, ni allégué que le financement des actions PPE se serait poursuivi en 2015 ;

- la décision de non-renouvellement du contrat, qui n'avait pas à être motivée, se réfère en tout état de cause à l'article 49-2 du statut ;

- l'intérêt du service n'est pas étranger à la décision contestée, il tient à l'arrêt du programme PPE et au tarissement de son financement par le Grand Lyon ;

- la décision n'est pas entachée de détournement de pouvoir, elle est sans lien avec le harcèlement moral allégué.

Par des mémoires en défense enregistrés le 23 décembre 2016 et le 4 mai 2017, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de la CCI Lyon Métropole Saint-Étienne Roanne ;

2°) de mettre à sa charge la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme B... fait valoir que :

- le jugement est suffisamment motivé ;

- les textes applicables à la fonction publique lui sont applicables, même si un statut particulier régit le personnel des CCI ;

- elle a subi un véritable harcèlement moral, ce que montrent toutes les pièces qu'elle produit ;

- l'intérêt du service à ne pas renouveler son contrat n'a pas été démontré ; le non-renouvellement de son contrat s'inscrit bien dans un contexte de harcèlement moral à son encontre.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;

- l'arrêté du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie et des groupements interconsulaires ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gondouin,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public ;

- les observations de Me Ceccaldi, avocat de la CCI Lyon Métropole Saint-Étienne Roanne ;

Considérant ce qui suit :

1. Par une lettre du 27 novembre 2013, le directeur général de la Chambre de commerce et d'industrie de Lyon a informé Mme B... que " conformément à l'article 49.2, alinéa 8 du statut du personnel des chambres de commerce et d'industrie " son engagement contractuel prendrait fin le 31 décembre 2013, au terme normalement prévu. Mme B... a saisi le tribunal administratif de Lyon d'une demande tendant à l'annulation de cette décision. Le tribunal administratif a fait droit à sa demande par un jugement du 28 septembre 2016 dont la CCI Lyon Métropole Saint-Étienne Roanne qui vient aux droits de la CCI de Lyon relève appel.

Sur la régularité du jugement :

2. Le deuxième alinéa de l'art. R. 741-2 du code de justice administrative prévoit que la décision juridictionnelle " contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application ". Le jugement attaqué se borne à viser, outre le code de justice administrative, la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'État pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État. Il omet de mentionner, tant dans les visas que dans les motifs, les textes particuliers relatifs au statut du personnel des chambres de commerce et d'industrie dont il fait application. Le jugement attaqué ne satisfait donc pas aux prescriptions ci-dessus rappelées de l'article R. 741-2.

3. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen d'irrégularité du jugement attaqué, celui-ci doit être annulé. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par Mme B... tendant à l'annulation de la décision du 27 novembre 2013.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 27 novembre 2013 :

4. Aux termes de l'article 1er de la loi du 10 décembre 1952, ci-dessus visée, relative à l'établissement obligatoire d'un statut du personnel administratif des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers : " La situation du personnel administratif des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers de France est déterminée par un statut établi par des commissions paritaires nommées, pour chacune de ces institutions, par le ministre de tutelle ". L'article 49-1 du statut du personnel de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie et des groupements inter-consulaires dispose, à propos des contrats à durée déterminée : " Ces contrats qui ne doivent avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement des emplois liés à l'activité normale et permanente de la Compagnie consulaire, ne peuvent être conclus que pour l'exercice de fonctions à caractère temporaire ou exceptionnel, à savoir : (...) 7°-Exécution d'une mission ponctuelle réalisée dans le cadre d'un dispositif contractuel ou conventionnel qui en prévoit le financement par subvention pour une durée limitée et dont la reconduction dépend de l'accord des tiers payeurs. Les contrats conclus à ce titre pour une durée maximale de trois ans peuvent être renouvelés une ou plusieurs fois sans que la durée totale puisse excéder six ans ". Et aux termes du 8° de l'article 49-2 du même statut : " Le contrat à durée déterminée cesse de plein droit à son terme. Les parties sont tenues de s'informer mutuellement de leur intention de poursuivre ou non le lien contractuel avant l'échéance du terme du contrat. Ce délai de prévenance est égal à une semaine par mois de présence avec un maximum d'un mois ".

5. Un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie ni d'un droit au renouvellement de son contrat ni, à plus forte raison, d'un droit au maintien de ses clauses, si l'administration envisage de procéder à son renouvellement. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler ou de proposer à l'agent, sans son accord, un nouveau contrat substantiellement différent du précédent, que pour un motif tiré de l'intérêt du service.

6. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... avait été employée par la CCI de Lyon " en qualité de Conseil Développement International " du 18 avril 2007 au 31 août 2010. Elle a ensuite été recrutée dans le cadre du programme "Lyon Ville de l'entrepreneuriat" (LVE) du 4 janvier au 31 décembre 2011. Son contrat a été renouvelé pour l'année 2012, ainsi que pour l'année 2013, toujours dans le cadre du programme LVE puis LVE-PPE/PE ("Partenaire pour entreprendre" et "Parrainage d'entrepreneurs"). Jusqu'alors ses compétences professionnelles ont toujours été reconnues mais, à l'issue de son congé maternité, en juin 2013, elle a rencontré diverses difficultés dans son service qui l'ont conduite à dénoncer la situation auprès de sa hiérarchie en faisant état d'un harcèlement moral.

7. Jusqu'en novembre 2013, ainsi qu'il ressort notamment d'un courriel du 8 novembre 2013 envoyé par une représentante du personnel qui résumait un entretien avec le directeur des ressources humaines, Mme B...pouvait penser que son contrat serait renouvelé compte tenu du " travail mené qui démontre " qu'elle a " les compétences pour piloter le programme et de la reconduction de son financement ". Le 27 novembre 2013, l'enquête diligentée par le directeur général de la CCI sans conclure à l'existence d'un harcèlement moral à son encontre, a fait état de vives tensions dans le service. Le même jour, comme il a été rappelé au point 1, le directeur général de la CCI a informé Mme B... que " conformément à l'article 49.2, alinéa 8 du statut du personnel des chambres de commerce et d'industrie " son engagement contractuel prendrait fin le 31 décembre 2013, au terme normalement prévu. Mme B... devait assurer le suivi de projets qui reposaient sur un financement extérieur du Grand Lyon, et devaient arriver à leur terme, non à la fin de l'année 2013, mais à la fin de l'année 2014. Le non-renouvellement du contrat de Mme B... ne pouvait donc être justifié par l'arrêt du financement des programmes pour le suivi desquels elle avait été recrutée.

8. Dans ces conditions, Mme B...est fondée à soutenir que la décision de ne pas renouveler son contrat a été prise pour des motifs étrangers à l'intérêt du service et à en demander l'annulation.

9. La CCI Lyon Métropole Saint-Étienne Roanne étant en l'espèce partie perdante, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Il y a lieu, sur le fondement des mêmes dispositions, de mettre à sa charge la somme de 1 200 euros à verser à Mme B... au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon n° 1402447 du 28 septembre 2016 est annulé.

Article 2 : La décision du 27 novembre 2013 par laquelle le directeur général de la chambre de commerce et d'industrie de Lyon métropole a refusé de renouveler le contrat à durée déterminée de MmeB..., arrivant à échéance le 31 décembre 2013, est annulée.

Article 3 : La Chambre de commerce et d'industrie Lyon Métropole Saint-Étienne Roanne versera la somme de 1 200 euros à Mme B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la Chambre de commerce et d'industrie Lyon Métropole Saint-Étienne Roanne et à Mme A...B....

Délibéré après l'audience du 30 août 2018 où siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Gondouin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 septembre 2018.

5

N° 16LY03773


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY03773
Date de la décision : 20/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12-03-02 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Genevieve GONDOUIN
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SCP J. AGUERA et ASSOCIES - LYON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-09-20;16ly03773 ?
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