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30/08/2018 | FRANCE | N°16LY02052

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 30 août 2018, 16LY02052


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... E...épouse F...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 4 mai 2015 du préfet de la Loire portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, fixation d'un délai de départ volontaire de trente jours et désignation du pays de destination.

Par un jugement n° 1506705 du 11 février 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 17 juin 2016, Mme F...,

représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... E...épouse F...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 4 mai 2015 du préfet de la Loire portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, fixation d'un délai de départ volontaire de trente jours et désignation du pays de destination.

Par un jugement n° 1506705 du 11 février 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 17 juin 2016, Mme F..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 11 février 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 mai 2015 ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer un titre de séjour comportant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, à titre subsidiaire, d'ordonner le réexamen de sa demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat ainsi qu'une somme de 1 500 euros à verser à Me B... en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- le préfet a méconnu l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du tribunal administratif de Lyon du 23 septembre 2014 ;

- le préfet ne pouvait légalement prendre sa décision sans l'avoir préalablement mise à même de faire valoir les éléments de fait nouveaux et lui avoir délivré une autorisation provisoire de séjour ;

- le préfet ne pouvait fonder son refus sur la décision prise à l'encontre de M. F... alors que l'arrêté le concernant est postérieur ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de l'état de santé de M. F... et de la possibilité d'une prise en charge médicale correcte en Arménie, et a, ce faisant, méconnu l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet ne s'étant fondé que sur l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, insuffisamment motivé, pour prendre sa décision, a entaché sa décision d'une insuffisance de motivation ;

- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 novembre 2017, le préfet de la Loire, conclut au rejet de la requête en s'en remettant aux écritures produites dans le cadre de l'instruction du dossier de première instance.

Par ordonnance du 8 novembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 7 décembre 2017.

Mme F... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 octobre 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79 587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Anne Menasseyre, présidente assesseure et les observations de MeD..., représentant Mme E...épouse F...;

Considérant ce qui suit :

1. Mme F..., de nationalité arménienne, née le 15 avril 1971, a sollicité le 10 juin 2013 auprès des services de la préfecture de la Loire la délivrance d'un premier titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La décision du 3 mars 2014 du préfet de la Loire opposant un refus à cette demande a été annulée par jugement du tribunal administratif de Lyon du 23 septembre 2014, devenu définitif. L'article 2 de ce jugement a enjoint au préfet de la Loire de délivrer à l'intéressée, dans les deux mois de sa notification, un titre de séjour valable pour la durée de validité du titre de séjour de son époux. Le titre de séjour précédemment délivré à M. F... est arrivé à expiration le 6 février 2015. Le préfet de la Loire, estimant, après avis du médecin de l'agence régionale de santé du 9 mars 2015 que l'état de santé de l'intéressé ne justifiait pas le renouvellement de ce titre a, par arrêté du 4 mai 2015, refusé de délivrer à Mme F... un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement. Mme F... relève appel du jugement du 11 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, l'exécution du jugement impliquait que le préfet de la Loire délivre, dans les deux mois de la notification de jugement du 23 septembre 2014, un titre de séjour dont la durée de validité ne pouvait excéder celle du titre de séjour de M. F.... Ce titre venait à expiration le 6 février 2015. Il en résulte que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que l'exécution du jugement du 23 septembre 2014 impliquait encore qu'à la date du 4 mai 2015, date de l'arrêté qu'elle conteste, elle soit mise en possession d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

3. Par ailleurs, les motifs qui sont le soutien nécessaire du dispositif du jugement du 23 septembre 2014 tiennent à la réalité et à l'intensité des liens unissant Mme F... à son époux. En considérant qu'en l'absence de droit de M. F... à se maintenir sur le sol français, les liens dont Mme F... pouvait faire état en France ne justifiaient pas la délivrance d'un titre de séjour, le préfet de la Loire n'a pas méconnu l'autorité de chose jugée attachée au jugement du 23 septembre 2014.

4. Enfin, si Mme F... aurait dû, en exécution du jugement, être munie d'un titre de séjour durant la période qui s'est écoulée entre l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement au préfet et le 6 février 2015, le défaut d'exécution du jugement sur ce point est sans influence sur la légalité d'une décision prise après l'expiration de la date au-delà de laquelle l'injonction prononcée n'impliquait plus une telle délivrance.

5. En deuxième lieu, si les dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile impliquaient qu'une autorisation provisoire de séjour soit délivrée à Mme F... après l'annulation de la mesure d'éloignement dont elle a fait l'objet, cette délivrance ne faisait pas partie du processus d'élaboration de la décision à prendre sur la demande de délivrance d'un titre de séjour dont le préfet s'est retrouvé saisi après annulation de sa première décision et expiration du titre de séjour de son époux. Il en résulte que le moyen tiré du défaut de délivrance de cette autorisation provisoire de séjour est inopérant.

6. En troisième lieu, si l'arrêté du 4 mai 2015 mentionne à tort que le titre de séjour de M. F... n'a pas été renouvelé et qu'il fait l'objet d'une mesure d'éloignement alors que l'arrêté concernant l'époux de Mme F... n'a été adopté que le 11 mai suivant, il ressort de la lecture de cet arrêté que le motif qui le fonde est tiré du défaut de droit de l'époux de l'intéressée, dont le titre de séjour est venu à expiration, à voir ce titre renouvelé et à se maintenir sur le sol français. Ainsi l'erreur qui l'affecte sur l'existence d'un arrêté non encore pris mais dont l'adoption était imminente est, au cas d'espèce, sans influence sur sa légalité.

7. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que, à l'instar de l'avis qu'il a rendu le 9 mars 2015, l'avis rendu le 8 juillet 2011 par le médecin de l'agence régionale de santé concluait à la disponibilité d'un traitement approprié à l'état de santé de M. F... en Arménie. Mme F... n'est par suite fondée à soutenir ni que cet avis serait insuffisamment motivé faute d'indiquer les raisons de l'évolution de la position de ce médecin, ni que la motivation du refus de titre qu'elle conteste serait insuffisante par voie de conséquence, ni que celle de l'obligation de quitter le territoire qui en procède serait également insuffisante par voie de conséquence.

8. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ".

9. Par un avis du 9 mars 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a indiqué au préfet de la Loire que l'état de santé de M. F... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'un traitement approprié pour sa prise en charge médicale existait dans son pays d'origine. Il a précisé qu'à la date de son avis, l'état de santé de l'intéressé ne lui permettait pas de voyager sans risque vers son pays d'origine par voie aérienne et qu'un avis médical préalable était requis. Il résulte de cet avis que, selon le médecin de l'agence régionale de santé, un retour de l'intéressé vers son pays d'origine par voie aérienne, qui comportait des risques, ne pouvait être envisagé que sur avis médical préalable.

10. S'agissant de l'existence, en Arménie, d'un traitement approprié à l'état de santé de l'intéressé, le préfet de la Loire justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé concluant à l'existence d'un tel traitement. Il appartient à Mme F... de produire tous éléments permettant de démontrer l'absence d'un traitement approprié dans ce pays. Elle invoque, à cette fin, l'existence d'avis favorables antérieurs, alors que, comme il a été dit ci-dessus, le seul avis précédemment rendu concluait déjà à la disponibilité d'un traitement approprié en Arménie. Le médecin de l'agence régionale de santé a, en outre, confirmé cet avis à la suite de la communication d'un certificat médical du 26 mai 2015 du docteur Nassiri, médecin pneumologue, mettant en doute la disponibilité de l'appareillage nécessaire à l'assistance respiratoire nocturne exigée par l'état de santé du patient. Si Mme F... produit des documents médicaux attestant de la réalité des affections de son époux, ces considérations ne sont pas de nature à remettre en cause l'existence d'un traitement approprié en Arménie. Si Mme F... soutient que les médicaments prescrits à son époux ne sont pas disponibles en Arménie, elle ne conteste sérieusement, par les certificats médicaux versés aux dossiers, ni la disponibilité de médicaments génériques ou équivalents ni l'efficacité de ceux-ci et n'apporte, ainsi, pas d'éléments pertinents de nature à remettre en cause la présomption induite par l'avis du médecin inspecteur de l'agence régionale de santé sur ce point. Par suite, et dès lors que l'état de santé de l'époux de l'intéressée ne justifiait pas que lui soit délivré un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'appelante n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant de régulariser sa situation, le préfet de la Loire a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du même code.

11. En dernier lieu, Mme F... reprend en appel les moyens qu'elle avait invoqués en première instance et tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Lyon, d'écarter ces moyens et de rejeter la requête de l'intéressée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles portant sur les frais liés au litige.

D É C I D E :

Article 1er : La requête Mme F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...E...épouse F... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 10 juillet 2018, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Menasseyre, présidente-assesseure,

Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 30 août 2018.

2

N° 16LY02052


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY02052
Date de la décision : 30/08/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 11/09/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-08-30;16ly02052 ?
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