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10/07/2018 | FRANCE | N°17LY01217

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 10 juillet 2018, 17LY01217


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon :

1°) d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2016 par lequel la préfète de la Côte d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné un pays de renvoi ;

2°) d'enjoindre à la préfète de la Côte d'Or, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astr

einte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon :

1°) d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2016 par lequel la préfète de la Côte d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné un pays de renvoi ;

2°) d'enjoindre à la préfète de la Côte d'Or, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de ce réexamen, dans le même délai et sous la même astreinte ;

3°) de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1603146 du 20 décembre 2016, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 20 mars 2017, M. A..., représenté par Me Nourani, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 20 décembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté susmentionné de la préfète de la Côte d'Or du 17 octobre 2016 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Côte d'Or, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridique, sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé ;

- la préfète de la Côte-d'Or a commis une erreur de droit en lui refusant la délivrance du titre de séjour demandé au motif qu'il ne produisait pas de visa de long séjour sans examiner la possibilité de lui accorder le bénéfice de la dérogation prévue à l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors qu'il justifie de " la nécessité liée au déroulement des études " ;

- elle a également commis une erreur de droit en n'appréciant pas, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, l'opportunité d'une mesure de régularisation à titre exceptionnel ;

- le refus de titre de séjour en litige procède d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- ce refus porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en l'absence de délégation de signature ;

- cette obligation est illégale en ce qu'elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en ce qu'elle est fondée sur un refus de titre de séjour illégal ;

- cette obligation procède d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la désignation du pays de renvoi est illégale en ce qu'elle est fondée sur un refus de titre de séjour et une obligation de quitter le territoire français illégaux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juin 2017, la préfète de la Côte d'Or conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que la requête de M. B...n'est pas fondée et doit en conséquence être rejetée en toutes ses fins et conclusions.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 21 février 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique ;

1. Considérant que M. A..., ressortissant tunisien né le 26 juillet 1997, entré en France sous couvert d'un visa de court séjour en août 2014, a sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la menton " étudiant " le 20 juillet 2016 ; qu'il relève appel du jugement du 20 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 17 octobre 2016 de la préfète de la Côte d'Or portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et renvoi vers la Tunisie ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que c'est à bon droit que, par des motifs qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter, les premiers juges ont considéré que le refus de titre de séjour était suffisamment motivé au regard des exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-10 du même code, dans sa rédaction applicable à la date du refus de titre de séjour en litige : " Peut être exempté, sur décision du préfet, de l'obligation de présentation du visa de long séjour prescrite au 3° de l'article R. 313-1 : 1° L'étranger qui suit en France un enseignement ou y fait des études, en cas de nécessité liée au déroulement des études. Sauf cas particulier, l'étranger doit justifier avoir accompli quatre années d'études supérieures et être titulaire d'un diplôme, titre ou certificat au moins équivalent à celui d'un deuxième cycle universitaire ou d'un titre d'ingénieur. Il est tenu compte des motifs pour lesquels le visa de long séjour ne peut être présenté à l'appui de la demande de titre de séjour, du niveau de formation de l'intéressé, ainsi que des conséquences que présenterait un refus de séjour pour la suite de ses études ; // 2° L'étranger qui a suivi une scolarité en France depuis au moins l'âge de seize ans et qui y poursuit des études supérieures. A l'appui de sa demande, l'étranger doit justifier du caractère réel et sérieux des études poursuivies. " ;

4. Considérant que M. A..., qui est entré régulièrement en France à l'âge de dix-sept ans et s'est inscrit pour l'année 2016/2017 en première année de " Licence sciences techniques santé " après avoir obtenu son baccalauréat scientifique en juin 2016, ne remplit aucune des deux conditions prévues par les dispositions précitées, et notamment pas " la nécessité liée au déroulement des études ", au sens de l'article R. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, permettant d'être exempté de l'obligation de présenter un visa de long séjour ;

5. Considérant, en troisième lieu, que la préfète de la Côte d'Or, qui n'était pas tenue de rechercher si M. A... était susceptible de bénéficier d'une mesure de régularisation à titre exceptionnel, n'a pas, eu égard aux circonstances de l'arrivée du requérant en France et aux conditions dans lesquelles il y est demeuré, énoncées au considérant 4 ci-dessus, commis d'erreur manifeste d'appréciation en lui refusant la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité d'étudiant au motif qu'il ne justifiait pas d'un visa d'une durée supérieure à trois mois, alors, au demeurant, qu'elle a également fondé son refus sur le motif non contesté de l'insuffisance de ses ressources ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A..., célibataire et sans enfant, résidait en France depuis deux ans à la date du refus litigieux, après avoir vécu dix-sept ans en Tunisie, où il n'est pas dépourvu d'attaches, en les personnes de ses parents et d'un frère ; que, s'il est hébergé en France par son demi-frère, il ne justifie pas y être inséré et n'allègue ni n'établit qu'il ne pourrait poursuivre ses études en Tunisie ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour en litige porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée, au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant, en premier lieu, que c'est à bon droit que, par des motifs qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter, les premiers juges ont considéré que le signataire de l'arrêté en litige bénéficiait d'une délégation de signature régulière ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...). La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...). " ;

10. Considérant que, comme il a été dit ci-dessus au point 2, le refus de titre de séjour est suffisamment motivé ; que, par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de motivation ;

11. Considérant, en troisième lieu, que M. A..., n'ayant pas démontré l'illégalité du refus de titre de séjour, n'est pas fondé à s'en prévaloir, par la voie de l'exception, à l'appui des conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français ;

12. Considérant, en quatrième lieu, qu'eu égard à ce qui a été dit précédemment, notamment aux points 4 et 7, et en l'absence d'autre élément, M. A... n'établit pas que la préfète de la Côte d'Or aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en prononçant à son encontre une obligation de quitter le territoire français ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

13. Considérant que le requérant, n'ayant pas démontré l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français, n'est pas fondé à s'en prévaloir, par la voie de l'exception, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté les conclusions de sa demande dirigées contre l'arrêté du préfète de la Côte d'Or du 17 octobre 2016 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

15. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. A..., n'appelle aucune mesure d'exécution ;

Sur les frais liés au litige :

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... A... et au ministre d'Etat ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de la Côte d'Or.

Délibéré après l'audience du 19 juin 2018, à laquelle siégeaient :

M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

M. Hervé Drouet, président assesseur,

Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère.

Lu en audience publique, le 10 juillet 2018.

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N° 17LY01217

mg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY01217
Date de la décision : 10/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : NOURANI

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-07-10;17ly01217 ?
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