La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/06/2018 | FRANCE | N°17LY02185

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 07 juin 2018, 17LY02185


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2016 par lequel le préfet de l'Isère a pris à son encontre une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et prononcé une interdiction de circuler sur le territoire français pour une durée d'un an à compter de la date d'expiration du délai de départ volontaire.

Par l'ordonnance n° 1701142 du 13 mars 2017,

le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procéd...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2016 par lequel le préfet de l'Isère a pris à son encontre une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et prononcé une interdiction de circuler sur le territoire français pour une durée d'un an à compter de la date d'expiration du délai de départ volontaire.

Par l'ordonnance n° 1701142 du 13 mars 2017, le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 1er juin 2017, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble du 13 mars 2017 ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de l'Isère du 5 novembre 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à Me A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ce conseil s'engageant à renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

M. B... soutient que :

- c'est à tort que l'ordonnance attaquée rejette sa requête comme tardive : le magistrat désigné s'est fondé sur le 6° du paragraphe I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que ces dispositions ne lui étaient pas applicables et qu'elles ne lui avaient pas été appliquées par le préfet de l'Isère.

Le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à M. B... l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 avril 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Gondouin ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant roumain, a déclaré être entré sur le territoire français le 15 septembre 2016 accompagné de son épouse et de leurs cinq enfants mineurs ; que, le 5 novembre 2016, le préfet de l'Isère a estimé que son comportement constituait une menace réelle, actuelle et suffisamment grave et pris à son encontre un arrêté portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, désignation du pays de renvoi en cas d'éloignement forcé et interdiction de circulation sur le territoire français pendant un an ; que M. B... a contesté cet arrêté préfectoral devant le tribunal administratif de Grenoble ; que, par une ordonnance du 13 mars 2017, le magistrat désigné par le président de ce tribunal a rejeté, comme tardive, la demande de M. B... ; que M. B... relève appel de cette ordonnance ;

2. Considérant que, contrairement à ce qu'a retenu le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble, le préfet de l'Isère a fondé l'arrêté du 5 novembre 2016 contesté, non sur les dispositions du 6° du paragraphe I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais sur celles de l'article L. 511-3-1 du même code aux termes desquelles : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ou un membre de sa famille à quitter le territoire français lorsqu'elle constate : 3° [Ou] que son comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société " ; qu'aux termes des trois derniers alinéas du même article : " L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à trente jours à compter de sa notification. À titre exceptionnel, l'autorité administrative peut accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. / L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel il est renvoyé en cas d'exécution d'office. / Les articles L. 512-1 à L. 512-4 sont applicables aux mesures prises en application du présent article " ;

3. Considérant qu'en vertu du paragraphe I de l'article L. 512-1 du même code, l'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement de l'article L. 511-3-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au sixième alinéa de ce même article " peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. / L'étranger peut demander le bénéfice de l'aide juridictionnelle au plus tard lors de l'introduction de sa requête en annulation. Le tribunal administratif statue dans un délai de trois mois à compter de sa saisine " ;

4. Considérant qu'en vertu du premier alinéa de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " Conformément aux dispositions du I de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification d'une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire, prise en application (...) de l'article L. 511-3-1 du même code, fait courir un délai de trente jours pour contester cette obligation ainsi que les décisions relatives au séjour, au délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour ou à l'interdiction de circulation notifiées simultanément " ; que le premier alinéa de l'article R. 776-5 du même code, s'il prévoit que le délai de recours contentieux de trente jours mentionné à cet article R. 776-2 n'est pas prorogé par l'exercice d'un recours administratif, n'exclut pas que le délai de recours puisse être prorogé par une demande d'aide juridictionnelle ;

5. Considérant qu'en vertu de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 ci-dessus visé portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, dans sa rédaction alors applicable : " Lorsqu'une action en justice doit être intentée avant l'expiration d'un délai devant la juridiction du premier degré (...), l'action est réputée avoir été intentée dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice est introduite dans un nouveau délai de même durée à compter : (...) c) De la date à laquelle la décision d'admission ou de rejet de la demande est devenue définitive ; / d) Ou, en cas d'admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné " ; qu'en vertu des articles 23 de la loi du 10 juillet 1991 ci-dessus visée et 56 du décret du 19 décembre 1991, le ministère public ou le bâtonnier peuvent former un recours contre une décision du bureau d'aide juridictionnelle dans un délai de deux mois à compter du jour de la décision ; que, lorsque le demandeur de première instance a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, seuls le ministère public ou le bâtonnier ont vocation à contester, le cas échéant, cette décision qui devient ainsi définitive, en l'absence de recours de leur part à l'issue d'un délai de deux mois ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B... avait présenté une demande d'aide juridictionnelle le 15 novembre 2016, dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêté contesté ; que le bureau d'aide juridictionnelle lui a accordé l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 novembre 2016 ; que cette décision n'est devenue définitive, au sens des dispositions rappelées au point 5, qu'à la fin du mois de janvier 2017 ; que M. B... a introduit sa requête devant le tribunal administratif de Grenoble le 22 février 2017 soit, en tout état de cause, dans le délai de trente jours que lui accordent les dispositions qui lui sont applicables ; que, dès lors, il est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande comme tardive ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance du 13 mars 2017 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer M. B... devant le tribunal administratif de Grenoble pour qu'il soit statué sur sa demande ; qu'il n'y a pas lieu pour la cour, dans les circonstances particulières de l'espèce, de lui accorder une somme au titre des frais liés au litige ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1701142 du 13 mars 2017 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble est annulée.

Article 2 : M. C...B...est renvoyé devant le tribunal administratif de Grenoble pour qu'il soit statué sur sa demande.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2018 où siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Gondouin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juin 2018.

4

N° 17LY02185


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY02185
Date de la décision : 07/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Genevieve GONDOUIN
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SELARL ALBAN COSTA

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-06-07;17ly02185 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award