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07/06/2018 | FRANCE | N°16LY02981

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 07 juin 2018, 16LY02981


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision implicite du 21 juillet 2015 par laquelle la directrice de l'administration pénitentiaire du ministère de la justice a refusé de lui accorder l'habilitation définitive d'exercer des fonctions au sein d'une équipe régionale d'intervention et de sécurité (ERIS) de l'administration pénitentiaire, d'enjoindre à la directrice de l'administration pénitentiaire du ministère de la justice de lui accorder cette habilitation définit

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision implicite du 21 juillet 2015 par laquelle la directrice de l'administration pénitentiaire du ministère de la justice a refusé de lui accorder l'habilitation définitive d'exercer des fonctions au sein d'une équipe régionale d'intervention et de sécurité (ERIS) de l'administration pénitentiaire, d'enjoindre à la directrice de l'administration pénitentiaire du ministère de la justice de lui accorder cette habilitation définitive dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de lui enjoindre selon les mêmes modalités de proroger sa période probatoire d'un an.

Par le jugement n° 1502375 du 23 juin 2016, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision du 21 juillet 2015 et enjoint à la directrice de l'administration pénitentiaire du ministère de la justice de procéder au réexamen de la situation de M. E...au regard de son droit à l'obtention de l'habilitation définitive d'exercer des fonctions au sein d'une ERIS de l'administration pénitentiaire dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par un recours enregistré le 26 août 2016, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Dijon du 23 juin 2016 et de rejeter la demande de M. E....

Le ministre soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que la décision contestée était entachée d'un vice de procédure au motif que les évaluations des quadrimestres de M. E... ne lui ont pas été notifiées en temps utile ;

- c'est à tort également que le tribunal administratif a enjoint à l'administration de procéder au réexamen de la situation de M. E...au regard de son droit à l'obtention de l'habilitation définitive d'exercer des fonctions au sein d'une ERIS de l'administration pénitentiaire alors qu'il n'y a pas de droit à obtenir cette habilitation définitive ;

- la signataire de la décision était bien compétente en application des dispositions du décret du 27 juillet 2005 ;

- la commission nationale d'habilitation des agents membres d'une ERIS était composée conformément à ce que prévoit l'article 11 de l'arrêté du 24 avril 2012 ;

- l'avis du directeur interrégional des services pénitentiaires de Dijon et la décision contestée ne sont en rien fondés sur de " fausses évaluations périodiques ".

Par un mémoire en défense enregistré le 3 janvier 2017, M. E..., représenté par Me D...A..., demande à la cour :

1°) de confirmer le jugement attaqué ;

2°) à titre principal, d'enjoindre à l'État de l'habiliter définitivement pour exercer dans une ERIS, sous astreinte de cent euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) à titre subsidiaire de lui enjoindre, selon les mêmes modalités, de proroger sa période probatoire d'un an ;

4°) à titre subsidiaire, avant dire droit, d'ordonner l'expertise graphologique des évaluations en cause aux frais de l'État puisque le ministre conteste les conclusions de l'expertise qu'il a produite ;

5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

M. E... fait valoir que :

- c'est à bon droit que le jugement attaqué a annulé la décision contestée pour vice de procédure et a prononcé une injonction de réexamen ;

- la décision est entachée d'incompétence car la sous-directrice des ressources humaines et des relations sociales ne pouvait, en vertu du seul décret du 27 juillet 2005, signer à la place de la directrice de l'administration pénitentiaire ;

- le refus d'habilitation définitive a été prononcé à la suite d'une procédure irrégulière : l'année probatoire ne s'est pas régulièrement déroulée, la commission était irrégulièrement composée, l'avis du directeur interrégional ne pouvait être rendu dans des conditions régulières ;

- la décision est au moins entachée d'erreur manifeste d'appréciation, d'erreur de fait et d'erreur de droit.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- l'arrêté du 24 avril 2012 portant règlement d'emploi des équipes régionales d'intervention et de sécurité de l'administration pénitentiaire ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gondouin,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré enregistrée le 22 mai 2018, présentée pour M.E... ;

1. Considérant que M. E...a été titularisé en qualité de surveillant pénitentiaire à compter du 30 janvier 2012 ; qu'il a réussi lors de la session 2013 les épreuves de sélection des personnels de surveillance appelés à exercer au sein des équipes régionales d'intervention et de sécurité (ERIS) de l'administration pénitentiaire ; que, par arrêté du 17 juin 2013, il a été affecté au sein de l'ERIS de Dijon à compter du 10 juin 2013 ; que la garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé de lui accorder l'habilitation définitive d'exercer des fonctions au sein d'une ERIS de l'administration pénitentiaire par une décision du 18 juin 2014 que le tribunal administratif de Dijon a annulée par un jugement du 23 juin 2015 ; que la directrice de l'administration pénitentiaire du ministère de la justice a ensuite refusé de lui accorder cette habilitation définitive par une décision du 21 juillet 2015 que M. E... a, à nouveau, attaquée devant le tribunal administratif de Dijon ; que, par un jugement du 23 juin 2016, ce tribunal a annulé la décision du 21 juillet 2015 et enjoint à la directrice de l'administration pénitentiaire de procéder au réexamen de sa situation au regard de son droit à l'obtention de l'habilitation définitive d'exercer des fonctions au sein d'une ERIS de l'administration pénitentiaire ; que le garde des sceaux, ministre de la justice relève appel de ce jugement ;

Sur le motif d'annulation retenu par le jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 11 de l'arrêté visé ci-dessus du 24 avril 2012 : " Le fonctionnaire qui bénéficie d'une habilitation provisoire est évalué tous les quatre mois par le chef de l'équipe régionale d'intervention et de sécurité au sein de laquelle il est affecté. Cette évaluation prend la forme d'un rapport écrit et doit être notifié à l'agent " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. E... a fait l'objet d'une évaluation pour chacun des quadrimestres de sa période probatoire ; que les évaluations datées du 12 novembre 2013, du 19 février et du 4 juin 2014 portent sa signature attestant qu'il en a pris connaissance dans les jours qui ont suivi ; que toutes ces évaluations, accompagnées d'une appréciation littérale du notateur au sein de l'ERIS, concluent au caractère moyen ou insuffisant des aptitudes de M. E... sur le plan professionnel ; qu'à supposer même, comme le soutient le requérant en produisant une expertise graphologique, qu'il ne soit pas l'auteur des observations et des commentaires portés sur la troisième évaluation et le bilan de la période probatoire, cette circonstance reste sans incidence sur la décision prise dès lors que ses aptitudes ont été jugées insuffisantes ; que, par suite, le ministre de la justice est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a fait droit au moyen de M. E... tiré de l'irrégularité de la procédure suivie ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M.E... ;

Sur les autres moyens :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier et du troisième alinéas de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 visé ci-dessus, relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement : " À compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'État et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : / 2° Les chefs de service, directeurs adjoints, sous-directeurs, les chefs des services à compétence nationale mentionnés au deuxième alinéa de l'article 2 du décret du 9 mai 1997 susvisé ainsi que les hauts fonctionnaires et les hauts fonctionnaires adjoints mentionnés aux articles R. 1143-1 et R. 1143-2 du code de la défense " ; que MmeC..., qui a signé la décision contestée, est sous-directrice des ressources humaines et des relations sociales de la direction de l'administration pénitentiaire ; qu'elle entre, par conséquent, dans le champ d'application des dispositions du 2° de l'article 1er du décret précité et avait délégation pour signer la décision du 21 juillet 2015 ; que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision manque donc en fait ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu de l'article 11 de l'arrêté du 24 avril 2012, les quatre membres de la commission nationale d'habilitation sont le sous-directeur de l'état-major de sécurité de la direction de l'administration pénitentiaire, président, le chef du bureau de la gestion du personnel et de l'encadrement de la sous-direction des ressources humaines et des relations sociales de la direction de l'administration pénitentiaire, le chef du bureau de la sécurité pénitentiaire de l'état-major de la sécurité, le directeur de l'École nationale d'administration pénitentiaire, ou leurs représentants ;

7. Considérant qu'il ressort du procès-verbal de la réunion de la commission d'habilitation du 11 juin 2014, que, comme le soutient M. E..., cette commission n'était ce jour-là, composée que de trois membres ; que l'arrêté du 24 avril 2012 ne définit aucune règle de quorum applicable aux réunions de cette commission ; que, dans ces conditions, la commission d'habilitation a pu valablement délibérer dès lors que la majorité de ses membres ou de leurs représentants étaient présents ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la composition de la commission d'habilitation doit être écarté ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que la décision du 21 juillet 2015 serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, compte tenu ce qui a été dit au point 3, d'une erreur de fait ou de droit ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de la justice est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 23 juin 2016, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision du 21 juillet 2015 ;

Sur les frais liés au litige :

10. Considérant que l'État n'étant pas en l'espèce partie perdante, il n'y a pas lieu de mettre à sa charge une somme à verser à M. E... au titre des frais liés au litige ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1502375 du 23 juin 2016 du tribunal administratif de Dijon est annulé.

Article 2 : La demande de M. E... devant le tribunal administratif de Dijon ainsi que ses conclusions présentées en appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la garde des sceaux, ministre de la justice, et à M. B... E....

Délibéré après l'audience du 17 mai 2018 où siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Gondouin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juin 2018.

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N° 16LY02981


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY02981
Date de la décision : 07/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-13-01 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'annulation.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Genevieve GONDOUIN
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SCP NGUYEN-PHUNG et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-06-07;16ly02981 ?
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