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24/04/2018 | FRANCE | N°16LY03283

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 24 avril 2018, 16LY03283


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de leur accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, des pénalités y afférentes et de la contribution sur les hauts revenus, auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1404507 du 9 juin 2016, après avoir constaté un non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé par l'administration fiscale, le tribunal administratif de Grenoble a, par son article 2, d

échargé M. et Mme B...des intérêts de retard et de la pénalité de 40 % dont étaient as...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de leur accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, des pénalités y afférentes et de la contribution sur les hauts revenus, auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1404507 du 9 juin 2016, après avoir constaté un non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé par l'administration fiscale, le tribunal administratif de Grenoble a, par son article 2, déchargé M. et Mme B...des intérêts de retard et de la pénalité de 40 % dont étaient assorties les impositions en litige et par son article 3, rejeté le surplus de leur demande.

Procédure devant la cour :

Par un recours enregistré le 29 septembre 2016, le ministre de l'économie et des finances demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du 9 juin 2016 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) de rétablir les impositions litigieuses et de réformer le jugement entrepris en ce sens.

Le ministre soutient que :

- les contribuables reconnaissent avoir eu connaissance en décembre 2011, soit avant le dépôt de leur déclaration de revenus de l'année 2011, du courrier du 20 septembre 2011 par lequel l'administration les informaient qu'ils ne pouvaient prétendre à l'exonération de plus-value de cession prévue à l'article 151 septies A du code général des impôts à l'occasion de la cession à titre onéreux de la pharmacie exploitée par MmeB... ; Mme B...ne pouvait donc ignorer que la plus-value de cession de son fonds de commerce n'était pas exonérée d'impôt sur le revenu ;

- le tribunal ne pouvait se fonder sur la mention expresse que Mme B... avait fait figurer dans sa déclaration de bénéfices industriels et commerciaux de 2011 pour considérer que l'intention délibérée d'éluder l'impôt n'était pas établie ;

- pour les mêmes motifs les intérêts de retard sont dus ;

- la bonne foi des contribuables ne peut être retenue.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2016, M. et Mme A...B...concluent au rejet de la requête et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Ils soutiennent que :

- ils n'ont pas eu connaissance du courrier litigieux, dont ils n'ont pas accusé réception ;

- informés de l'arrivée de ce courrier, il ne leur a jamais été remis et ils n'ont pu en prendre connaissance ;

- ils étaient confortés dans leur démarche par le silence du service, les conseils d'un expert-comptable et la validation d'un centre de gestion agréé ;

- dans le cadre d'un contrôle sur pièces, l'administration aurait dû corriger la déclaration 2031 ;

- le ministre n'apporte pas la preuve de ses allégations quant à la réception du courrier litigieux.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de MmeC..., première conseillère ;

- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Le ministre de l'économie et des finances relève appel du jugement du 9 juin 2016 en tant que le tribunal administratif de Grenoble a déchargé M. et Mme B... des intérêts de retard et de la pénalité de 40% pour manquement délibéré dont étaient assorties les cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu mises à leur charge au titre de l'année2011.

2. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration. " .

3. Aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : " II. - L'intérêt de retard n'est pas dû : (...) 2. Au titre des éléments d'imposition pour lesquels un contribuable fait connaître, par une indication expresse portée sur la déclaration ou l'acte, ou dans une note annexée, les motifs de droit ou de fait qui le conduisent à ne pas les mentionner en totalité ou en partie, ou à leur donner une qualification qui entraînerait, si elle était fondée, une taxation atténuée, ou fait état de déductions qui sont ultérieurement reconnues injustifiées ".

4. Le tribunal a estimé que l'intention délibérée de M. et Mme B...d'éluder l'impôt sur la plus-value de cession d'un montant de 454 347 euros de l'officine de pharmacie exploitée à titre individuel par Mme B...jusqu'en 2010 n'était pas établie.

5. Il résulte de l'instruction que le fonds de commerce a été cédé par acte du 31 mars 2011. Mme B... a souscrit, par anticipation, le 30 juin 2011 la déclaration de résultat de ses bénéfices industriels et commerciaux au titre de 2011, portant déclaration de cessation d'activité, et adressé au service des impôts des entreprises de Grenoble Chartreuse un courrier, reçu le 5 juillet 2011, par lequel elle indiquait les motifs pour lesquels elle estimait pouvoir bénéficier de l'exonération prévue par les dispositions de l'article 151 septies A du code général des impôts sur le montant de la plus-value réalisée à l'occasion de la cession de son officine de pharmacie. Il résulte de l'instruction que l'administration a répondu par un courrier en date du 20 septembre 2011, dont il a été accusé réception le 30 septembre 2011, informant la contribuable qu'elle ne pouvait prétendre au bénéfice de l'exonération prévue à l'article 151 septies A du code général des impôts au motif qu'elle ne remplissait pas les conditions prévues par le texte quant au délai de deux ans au cours duquel le cédant doit faire valoir ses droits à la retraite. Mme B..., qui soutient ne pas avoir eu connaissance de ce courrier adressé par l'administration à son ancienne adresse professionnelle, n'a pas déposé de déclaration de bénéfices industriels et commerciaux rectificative mais a reporté la plus-value de cession sur la déclaration complémentaire des revenus de l'année 2011 souscrite le 13 juin 2012 sous la rubrique " plus-values à long terme exonérées en cas de départ à la retraite ". La plus-value de cession a ainsi été exonérée d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2011.

6. Dans le cadre d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. et MmeB..., portant sur leurs revenus des années 2010 et 2011, l'administration a remis en cause le bénéfice de cette exonération au motif que la condition relative au départ à la retraite du cédant n'était pas satisfaite et a taxé la plus-value à l'impôt sur le revenu entre les mains de M. et Mme B.... Cette rectification a entrainé leur assujettissement à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus. Contestant ces impositions, les contribuables ont porté le litige devant le tribunal administratif de Grenoble qui, par jugement du 9 juin 2016, les a déchargés des intérêts de retard et de la pénalité de 40 % dont étaient assorties les impositions en litige et a rejeté le surplus de leur demande. Pour écarter l'application des pénalités pour manquement délibéré, le tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur le constat que le courrier du 20 septembre 2011 avait été adressé à l'adresse professionnelle de Mme B... alors que celle-ci avait cessé son activité depuis six mois et que l'administration n'était pas en mesure d'en établir la réception par l'intéressée. Si en appel, le ministre se prévaut de la mention figurant dans la proposition de rectification du 28 mai 2013 adressée aux époux B...à l'issue du contrôle faisant état d'un accusé réception le 30 septembre 2011 du courrier du 20 septembre 2011, il reconnait ne pouvoir produire cette pièce et ne démontre ainsi pas que ce courrier aurait été réceptionné par Mme B.... La circonstance que les époux B...indiquent dans leur mémoire en réplique du 6 mai 2015 devant le tribunal administratif de Grenoble que Mme B...a été, par hasard, en décembre 2011, " informée de ce courrier ", ne suffit pas à établir qu'elle en aurait pris connaissance avant de déposer sa déclaration de revenu pour l'année 2011. Dans ces conditions, le ministre n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'intention délibérée de M et Mme B... d'éluder l'impôt.

7. Pour les motifs précédemment énoncés, en l'absence de preuve de la réception par Mme B... du courrier de l'administration du 20 septembre 2011 l'excluant du bénéfice de l'exonération litigieuse, la déclaration de bénéfices industriels et commerciaux souscrite le 30 juin 2011 par Mme B... accompagnée d'une note précisant les motifs pour lesquels elle entendait bénéficier de l'exonération de plus-value de cession prévue à l'article 151 septies A du code général des impôts remplit la condition de mention expresse prévue par les dispositions du II de l'article 1727 du code général des impôts, quand bien même cette mention expresse n'a pas été reprise dans sa déclaration de revenus de l'année 2011 souscrite le 13 juin 2012 pour laquelle les contribuables se sont bornés à reprendre le montant de la plus-value sous la rubrique " plus value à long terme exonérées en cas de départ à la retraite ", ces éléments permettant de reconstituer la base d'imposition ou d'effectuer la liquidation des droits. Par suite, l'intérêt de retard n'est pas due et le tribunal administratif de Grenoble était fondé à en prononcer la décharge.

8. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a déchargé M. et Mme B...des pénalités pour manquement délibéré et des intérêts de retard mis à leur charge au titre de l'année 2011.

9. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au profit de M. et Mme B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés et non compris dans les dépens et de rejeter leurs conclusions tendant au versement d'une somme en remboursement d'entiers dépens qui n'ont pas été exposés dans la présente instance.

D E C I D E :

Article 1er : Le recours du ministre de l'action et des comptes publics est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros au profit de M. et Mme B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article3 : Le surplus des conclusions de M et Mme B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 27 mars 2018, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président,

Mme Menasseyre, présidente assesseure,

Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique le 24 avril 2018.

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N° 16LY03283

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY03283
Date de la décision : 24/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations.

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations - Pénalités pour manquement délibéré (ou mauvaise foi).


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TERRADE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : DEBROSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-04-24;16ly03283 ?
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