La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/03/2018 | FRANCE | N°16LY03515

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 13 mars 2018, 16LY03515


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 21 octobre 2016 et un mémoire enregistré le 7 juillet 2017 la SAS Chalondis, représentée par la SCP Bouyssou et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 23 septembre 2016 par lequel le maire de la commune de Gergy a délivré à la SAS Gergydis un permis de construire un supermarché à l'enseigne Super U d'une surface de vente de 1712,90 m² et un "drive", en tant que ce permis tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale ;

2°) d'enjoindre à la commission nationale d'aménagemen

t commercial (CNAC) et au maire de Gergy de statuer à nouveau ;

3°) de mettre une som...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 21 octobre 2016 et un mémoire enregistré le 7 juillet 2017 la SAS Chalondis, représentée par la SCP Bouyssou et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 23 septembre 2016 par lequel le maire de la commune de Gergy a délivré à la SAS Gergydis un permis de construire un supermarché à l'enseigne Super U d'une surface de vente de 1712,90 m² et un "drive", en tant que ce permis tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale ;

2°) d'enjoindre à la commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) et au maire de Gergy de statuer à nouveau ;

3°) de mettre une somme de 5 000 euros à la charge de l'Etat et de la SAS Chalondis au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que la CNAC a considéré la zone de chalandise régulière et déclaré irrecevable son recours, dès lors que la localisation du projet sur la carte relative à la zone de chalandise dans le dossier de demande était erronée et a faussé l'appréciation de l'attractivité du projet au sud de la zone de chalandise, qui ne comprend d'ailleurs pas de supermarché ; la détermination de la zone de chalandise s'est faite sans référence à un temps de déplacement, en méconnaissance de l'article R. 752-3 du code de commerce ; ont été exclues du périmètre de la zone de chalandise toutes les communes dans lesquelles se trouvent un supermarché alimentaire, ce qui a eu pour conséquence d'empêcher tout recours de concurrents ; les communes situées à quinze minutes de trajet auraient du y être incluses et en particulier la zone industrielle nord de Chalon-sur-Saône reliée à Gergy par la RD5 ;

- elle justifie d'un intérêt à agir dès lors que le projet autorisé aura un impact significatif sur l'activité du supermarché à l'enseigne Leclerc qu'elle exploite dans cette zone, situé à moins de 10 km du projet ; la commune de Gergy se situe dans le secteur 2 de la zone de chalandise du centre Leclerc correspondant à un temps de transport de cinq à dix minutes ;

- la délimitation de la zone de chalandise en trois sous-zones s'est faite arbitrairement et sans cohérence ;

- la CNAC s'est prononcée sans instruire le dossier ni recueillir l'avis des ministres intéressés ; n'ayant été ni informée de la date de la réunion ni convoquée, elle n'a pas été en mesure de solliciter son audition et a été privée de la possibilité de faire valoir ses observations ;

- l'appréciation de la CNAC au regard des critères énoncés à l'article L. 752-6 du code de commerce est erronée ainsi que le démontrent les développements de son recours devant cette instance ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'illégalité en ce qu'il ne comporte pas l'ensemble des mentions prévues par l'article A. 424-2 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire enregistré le 1er juin 2017 et un mémoire enregistré le 9 novembre 2017 qui n'a pas été communiqué, la SAS Gergydis, représentée par la SCP Aléo, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge de la SAS Chalondis au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable, faute pour la SAS Chalondis de justifier d'un intérêt pour agir ; en effet, seuls les commerçants concurrents qui disposent d'un point de vente situé dans la zone de chalandise du projet sont recevables à contester l'avis favorable émis par la CDAC sur le projet ; la seule circonstance que la zone de chalandise du projet et celle du magasin de la requérante se recoupent ne lui confère pas un intérêt à agir ; la zone de chalandise a été délimitée dans le respect des critères énoncés par l'article R. 752-3 du code de commerce ; c'est à juste titre que l'hypermarché Lerclerc de la requérante, d'une surface de vente de 6150 m², compte tenu de l'attractivité de la zone commerciale dans laquelle il s'implante et de son éloignement du projet, n'a pas été inclus dans la zone de chalandise ; les prétendues erreurs concernant le positionnement du projet ne sont pas établies ;

- l'absence de convocation et d'audition de la SAS Chalondis à la séance de la CNAC ne l'a privée d'aucune garantie, alors qu'elle n'a ni dans son recours ni dans son mémoire complémentaire à la CNAC du 25 mai 2016, contesté la délimitation de la zone de chalandise ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article A. 424-2 du code de l'urbanisme est irrecevable par application de l'article L. 600-1-4 du code de l'urbanisme ; il est en tout état de cause infondé et dépourvu de précision.

Par un mémoire enregistré le 13 octobre 2017, la commune de Gergy, représentée par la SELARL cabinet d'avocats Philippe Petit et associés, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la SAS Chalondis au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle s'associe aux écritures en défense de la SAS Gergydis pour ce qui concerne le volet commercial de l'acte attaqué ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article A. 424-2 du code de l'urbanisme est inopérant par application de l'article L. 600-1-4 du code de l'urbanisme et, en tout état de cause, infondé.

La clôture de l'instruction a été fixée au 13 novembre 2017 par ordonnance du 13 octobre 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de commerce ;

- la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 ;

- la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 ;

- le décret n° 2015-165 du 12 février 2015 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public,

- et les observations de Me B... pour la SAS Chalondis, celles de Me C... pour la SAS Gergydis, ainsi que celles de Me A... pour la commune de Gergy ;

1. Considérant que, par un arrêté du 23 septembre 2016, le maire de la commune de Gergy a délivré à la SAS Gergydis un permis de construire un supermarché à l'enseigne Super U, d'une surface de vente de 1712,90 m² et un point de retrait "drive" ; que la SAS Chalondis demande l'annulation de ce permis de construire en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 600-10 du code de l'urbanisme : " Les cours administratives d'appel sont compétentes pour connaître en premier et dernier ressort des litiges relatifs au permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale prévu à l'article L. 425-4. " ; qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 425-4 de ce code, dans sa rédaction issue de l'article 39 de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial. / A peine d'irrecevabilité, la saisine de la commission nationale par les personnes mentionnées à l'article L. 752-17 du même code est un préalable obligatoire au recours contentieux dirigé contre la décision de l'autorité administrative compétente pour délivrer le permis de construire. " ; qu'aux termes de l'article L. 752-17 du code de commerce : " I. Conformément à l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme, (...), tout professionnel dont l'activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour chaque projet, est susceptible d'être affectée par le projet ou toute association les représentant peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours devant la Commission nationale d'aménagement commercial contre l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial. (...) " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'en vertu du 2° de l'article R. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction issue du décret n° 2015-165 du 12 février 2015 relatif à l'aménagement commercial, le dossier de demande comporte les informations relatives à la zone de chalandise et à l'environnement proche du projet, en particulier une carte ou un plan indiquant les limites de la zone de chalandise ; qu'aux termes l'article R. 752-3 du code de commerce, dans sa rédaction applicable : " Pour l'application du présent titre, constitue la zone de chalandise d'un équipement faisant l'objet d'une demande d'autorisation d'exploitation commerciale l'aire géographique au sein de laquelle cet équipement exerce une attraction sur la clientèle. Elle est délimitée en tenant compte notamment de la nature et de la taille de l'équipement envisagé, des temps de déplacement nécessaires pour y accéder, de la présence d'éventuelles barrières géographiques ou psychologiques et de la localisation et du pouvoir d'attraction des équipements commerciaux existants. " ;

4. Considérant qu'alors que, comme le relève d'ailleurs la requérante, le projet est correctement localisé sur l'essentiel des cartes du dossier, l'indication, sur la carte où figurent les limites de la zone de chalandise, situant le projet au nord de la commune de Gergy alors qu'il est implanté au sud, qui résulte d'une erreur purement matérielle, n'a pu fausser l'appréciation de la CNAC ; que la SAS Gergydis a défini une zone de chalandise regroupant des communes du seul département de la Saône-et-Loire, situées à un temps de trajet compris entre six et vingt-quatre minutes ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient la SAS Chalondis, la détermination de la zone de chalandise ne s'est pas faite sans référence à un temps de déplacement ; que cette zone a été délimitée en tenant compte de la nature et de la taille de l'équipement envisagé, d'une surface de vente de 1712,90 m², des barrières géographiques ou psychologiques que constituent, au nord, les limites administratives avec le département de la Côte-d'Or, à l'ouest, l'autoroute A6, à l'est, la Saône et les limites administratives du Jura, au sud, l'agglomération chalonnaise et enfin, du pouvoir d'attraction des équipements commerciaux existants, notamment, au sud-ouest, ceux de Chalon-sur-Saône, commune située à 13 km du projet ; que la SAS Chalondis critique en particulier l'exclusion de la zone industrielle nord de Chalon-sur-Saône reliée à Gergy par la RD 5 du périmètre de la zone de chalandise ; que, toutefois, compte tenu de l'attractivité des équipements commerciaux situés dans l'agglomération chalonnaise comprenant cinq hypermarchés dont l'hypermarché à l'enseigne Leclerc d'une surface de vente de 6150 m² exploité par la SAS Chalondis qui est doté d'une galerie commerciale et de la dimension du projet envisagé d'une surface de vente de 1712,90 m², il ne ressort pas des pièces du dossier, contrairement à ce que soutient la société requérante, que la délimitation de la zone de chalandise, dont la validité n'a pas été remise en cause par les services instructeurs, aurait été opérée irrégulièrement ou de manière restrictive, à seule fin d'exclure les magasins concurrents ; qu'ainsi, la SAS Chalondis, dont l'hypermarché ne se trouve pas situé dans la zone d'attraction de l'équipement commercial en litige, ne justifie pas, alors même que la commune de Gergy serait située dans la zone de chalandise de l'hypermarché qu'elle exploite à Chalon-sur-Saône, d'un intérêt lui donnant qualité pour agir en vertu de l'article L. 752-17 du code de commerce cité au point 2 ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de la SAS Chalondis est irrecevable faute d'intérêt pour agir et qu'elle doit être rejetée, de même, par voie de conséquence, que ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la SAS Chalondis le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Gergy et d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SAS Gergydis ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Chalondis est rejetée.

Article 2 : La SAS Chalondis versera une somme de 1 500 euros à la commune de Gergy et une somme de 2 000 euros à la SAS Gergydis au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Chalondis et à la SAS Gergydis.

Copie en sera adressée à la Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 6 février 2018 à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre ;

M. Antoine Gille, président-assesseur ;

Mme Bénédicte Lordonné, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 mars 2018.

2

N° 16LY03515

fg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY03515
Date de la décision : 13/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-05 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. Réglementation des activités économiques. Activités soumises à réglementation. Aménagement commercial.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : SCP BOUYSSOU ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-03-13;16ly03515 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award