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22/02/2018 | FRANCE | N°16LY00795

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 22 février 2018, 16LY00795


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 3 février 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné un pays de renvoi.

Par un jugement n° 1504021 du 1er décembre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 3 mars 2016, M. C..., repr

ésentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de L...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 3 février 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné un pays de renvoi.

Par un jugement n° 1504021 du 1er décembre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 3 mars 2016, M. C..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 1er décembre 2015 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer, à titre principal, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire et sans délai, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant le réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 300 euros au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- il suit des traitements pour une hépatite B et pour une dépendance aux opiacés qui ne sont pas disponibles en Géorgie ; le refus de titre de séjour méconnaît donc le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- eu égard à son état de santé et à ses efforts d'intégration dans la société française, le refus de titre de séjour a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation sur ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- cette décision méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire enregistré le 18 janvier 2018, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'en l'absence de production sérieuse, il s'en rapporte à ses écritures de première instance.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 février 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Dèche, premier conseiller ;

1. Considérant que M. C..., ressortissant géorgien, né le 4 novembre 1974, déclare être entré en France le 22 janvier 2013 ; que l'asile lui a été refusé par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 9 décembre 2013 ; que ce refus a été confirmé par la Cour nationale du droit d'asile le 27 juin 2014 ; que, le 2 septembre 2014, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au regard de son état de santé ; que, par décisions du 3 février 2015, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer ce titre, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ; que M. C... relève appel du jugement du 1er décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions du 3 février 2015 ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : /(...)/ 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par avis du 15 octobre 2014, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de M. C... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas de traitement approprié en Géorgie ; que si le préfet n'est pas lié par l'appréciation du médecin de l'agence régionale de santé, dont l'avis n'est que consultatif, il lui appartient néanmoins, lorsque ce médecin a estimé que l'état de santé de l'étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existe pas de traitement approprié dans le pays dont il est originaire, de justifier des éléments qui l'ont conduit à considérer, nonobstant cet avis médical, que les conditions de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'étaient pas remplies ;

4. Considérant que le préfet du Rhône a produit devant les premiers juges un courrier du médecin conseil de l'ambassade de France en Géorgie du 5 août 2013, affirmant que les soins pour les affections des hépatites A, B et C existent en Géorgie et " qu'ils répondent aux standards internationaux tels qu'ils sont définis par l'OMS " et mentionnant les établissements spécialisés dans le traitement de ces affections ; qu'en outre, le préfet produit une liste des médicaments enregistrés en Géorgie dont le caractère non probant n'est pas établi et dont il ressort que le Ténofovir, principe actif de la spécialité Viread est disponible dans ce pays ; qu'il ressort également de ce document que les médicaments nécessaires au traitement de la dépendance aux opiacées sont disponibles en Géorgie et qu'une telle dépendance est prise en charge au sein d'établissements spécialisés ; qu'ainsi, l'intéressé peut trouver en Géorgie le traitement et le suivi que requiert son état de santé ; que, dès lors, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui." ;

6. Considérant que M. C..., qui ne séjournait sur le territoire français que depuis un peu plus de deux années à la date de la décision en litige, n'apporte aucun élément tendant à démontrer son insertion dans la société française ; qu'il peut bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en Géorgie ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il a de la famille en France, alors que sa mère vit en Géorgie ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de la durée de son séjour en France, le refus de titre de séjour contesté n'a pas porté, eu égard aux buts poursuivis, une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, ce refus n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'il est susceptible de comporter pour la situation personnelle du requérant ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) " ;

8. Considérant que M. C..., de nationalité géorgienne, s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par décision du 3 février 2015 ; qu'ainsi, à la même date, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ; que compte tenu de ce qui a été dit précédemment, il n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de ce refus ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ; que comme il a été dit ci-dessus, M. C... peut recevoir en Géorgie les soins nécessités par son état de santé ; que, dès lors, les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne font pas légalement obstacle à son éloignement ;

10. Considérant, en dernier lieu, que, pour les motifs mentionnés dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour en litige, la mesure d'éloignement contestée n'a pas porté au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle est susceptible de comporter pour la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité de la décision désignant le pays de renvoi :

11. Considérant que compte tenu de ce qui a été dit plus haut, M. C... ne saurait se prévaloir, contre la décision désignant le pays de renvoi, de l'illégalité de la mesure d'éloignement prise à son encontre ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 1er février 2018 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

Mme Dèche, premier conseiller,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 février 2018.

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N° 16LY00795


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY00795
Date de la décision : 22/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : DRAHY

Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-02-22;16ly00795 ?
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