Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 21 janvier 2016 par lequel le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans, d'enjoindre au préfet, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale", à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.
Par un jugement n° 1600841 du 19 mai 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 20 juin 2016, M. B... A..., représenté par Me Djeffal, avocat, demande à la cour :
1°) de l'admettre à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2°) d'annuler ce jugement n° 1600841 du 19 mai 2016 du tribunal administratif de Grenoble ;
3°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 21 janvier 2016 par lequel le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans ;
4°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'issue d'un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
5°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de l'Isère de réexaminer sa situation ;
6°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros à son profit en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ou au profit de son conseil en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique en cas d'obtention de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
S'agissant du refus de titre de séjour :
- il est entaché d'incompétence de son auteur ;
- il est entaché d'erreur d'appréciation au regard de l'article L. 313-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public, ayant seulement été interpellé deux fois pour violences alors qu'il séjourne depuis plus de dix ans en France ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'entré en France le 22 mai 2005, il réside dans ce pays depuis plus de dix ans, qu'il vit chez ses parents, âgés de quatre-vingt ans pour son père et de soixante et onze ans pour sa mère et qui sont dépendants de lui eu égard à leur âge et à leurs problèmes de santé, qu'il assiste sa mère dans les actes de la vie quotidienne, que son frère réside régulièrement en France et qu'il entretient depuis plusieurs années une relation amoureuse avec une ressortissante française ;
- la commission du titre de séjour n'a pas été saisie préalablement ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :
- elles sont entachées d'incompétence de leur auteur ;
- elles sont illégales du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire méconnaît le d) du 3 du deuxième alinéa du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il n'est pas établi que les précédentes mesures d'éloignement le concernant lui aient été notifiées ni qu'elles soient, par conséquent, entrées en vigueur ;
- elles méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est entachée d'incompétence de son auteur ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour, de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire ;
S'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français :
- elle est entachée d'incompétence de son auteur ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour, de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire ;
- sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Hervé Drouet, président assesseur ;
Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
1. Considérant qu'aux termes de l'article 20 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence, (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président. / (...) " ;
2. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'admettre, à titre provisoire, M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
Sur le refus de titre de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que, par arrêté du 27 août 2015, publié le 31 août 2015 au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Isère, le préfet de l'Isère a donné à M. Patrick Lapouze, secrétaire général de la préfecture de l'Isère et signataire de la décision contestée, délégation à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions, documents et correspondances administratives diverses relevant des attributions de l'État dans le département, à l'exception des mesures concernant la défense nationale et celles concernant le maintien de l'ordre, des mesures de réquisition prises en application de la loi du 11 juillet 1938, des déclinatoires de compétences et arrêtés de conflit et des mesures de réquisition prises en application de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige doit être écarté, celle-ci n'étant pas au nombre des exceptions mentionnées ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision en litige : " La carte de séjour temporaire peut être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public. " ;
5. Considérant qu'il est constant que, par arrêt du 26 avril 2012, la cour d'appel de Grenoble a confirmé le jugement du 15 novembre 2011 par lequel le tribunal correctionnel de Vienne a condamné M. A... à trois ans d'emprisonnement pour violences aggravées et à un an d'emprisonnement pour usurpation d'identité ; que l'intéressé a été interpellé le 13 octobre 2014 pour des faits de dégradation de bien privé et de vol et violences avec armes entraînant une interruption temporaire totale supérieure ou égale à huit jours ; que, dans ces conditions, eu égard à la nature et au caractère répété de ces infractions, le préfet de l'Isère n'a pas fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce en estimant que le séjour en France de M. A... constituait une menace pour l'ordre public ;
6. Considérant, en troisième lieu, que M. A..., né le 24 mars 1979 et de nationalité tunisienne, soutient qu'entré en France le 22 mai 2005, il réside dans ce pays depuis plus de dix ans, qu'il vit chez ses parents, âgés de quatre-vingt ans pour son père et de soixante et onze ans pour sa mère et qui sont dépendants de lui eu égard à leur âge et à leurs problèmes de santé, qu'il assiste sa mère dans les actes de la vie quotidienne, que son frère réside régulièrement en France et qu'il entretient depuis plusieurs années une relation amoureuse avec une ressortissante française ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit au point précédent, l'intéressé, sans charge de famille, a été condamné en novembre 2011 à trois ans d'emprisonnement pour violences aggravées et à un an d'emprisonnement pour usurpation d'identité et a été interpellé le 13 octobre 2014 pour des faits de dégradation de bien privé et de vol et violences avec armes entraînant une interruption temporaire totale supérieure ou égale à huit jours ; que la dépendance de ses parents à son égard n'est pas établie par les pièces des dossiers de première instance et d'appel ; qu'il est constant qu'il n'a pas exécuté deux précédentes mesures d'éloignement prises à son encontre ; qu'il a déclaré lors de son interpellation le 13 octobre 2014 la présence de deux de ses frères en Tunisie, où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de vingt-six ans au moins ; que, par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision contestée de refus de titre de séjour n'a pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport à ses motifs et n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant, en dernier lieu, que le requérant ne remplissant pas les conditions pour obtenir un titre de séjour, ainsi qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 6, le préfet n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour avant d'opposer un refus à sa demande de carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français et la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :
8. Considérant, en premier lieu, que les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur des décisions en litige doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3 ;
9. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 7 que M. A... n'est pas fondé à exciper, à l'encontre des décisions en litige, de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
10. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision contestée de refus d'accorder un délai de départ volontaire : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) / d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; / (...) " ;
11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance, et notamment de celles produites par le préfet de l'Isère le 1er avril 2016, que M. A... s'est soustrait à l'exécution d'une précédente obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 14 octobre 2014 et qui lui a été notifiée en mains propres le même jour à 15 h 45 ; que, dans ces conditions, le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées du d) du 3° du deuxième alinéa du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant d'accorder à l'intéressé un délai de départ volontaire ;
12. Considérant, en dernier lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 6, les décisions contestées ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
13. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision en litige doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3 ;
14. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 12 que M. A... n'est pas fondé à exciper, à l'encontre de la décision en litige, de l'illégalité du refus de titre de séjour, de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire ;
Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :
15. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision en litige doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3 ;
16. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 12 que M. A... n'est pas fondé à exciper, à l'encontre de la décision en litige, de l'illégalité du refus de titre de séjour, de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire ;
17. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision en litige : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / (...) / Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification. / (...) / L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / (...) " ;
18. Considérant, ainsi qu'il a été dit au point 11, que M. A... n'a pas exécuté la précédente mesure d'éloignement dont il a fait l'objet le 14 octobre 2014 et qui lui a été notifiée le même jour ; que, dans ces conditions et compte tenu de ce qu'il a été dit aux points 5 et 6, le préfet de l'Isère, en prononçant à son encontre une interdiction de retour pour une durée de trois ans, n'a pas méconnu les dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
19. Considérant, en dernier lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 6, la décision contestée ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et de mise à mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens dans les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
DÉCIDE :
Article 1er : M. A... n'est pas admis, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : La requête de M. A... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Djeffal et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 30 janvier 2018, à laquelle siégeaient :
M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
M. Hervé Drouet, président assesseur,
M. Marc Clément, premier conseiller.
Lu en audience publique le 20 février 2018.
7
N° 16LY02071
mg