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11/01/2018 | FRANCE | N°15LY01996

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 11 janvier 2018, 15LY01996


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de Chenôve a demandé au tribunal administratif de Dijon, sur le fondement de la garantie décennale, d'une part, de condamner solidairement les entreprises Aeria, Eurovia Bourgogne, Soprema et Bureau Veritas à lui verser la somme de 677 335, 51 euros toutes taxes comprises (TTC), assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts, en indemnisation des désordres affectant le parking sud du centre commercial Saint-Exupéry, d'autre part, de condamner l'entreprise Soprema à

lui verser une somme de 189 796, 56 euros TTC, assortie des intérêts au ta...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de Chenôve a demandé au tribunal administratif de Dijon, sur le fondement de la garantie décennale, d'une part, de condamner solidairement les entreprises Aeria, Eurovia Bourgogne, Soprema et Bureau Veritas à lui verser la somme de 677 335, 51 euros toutes taxes comprises (TTC), assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts, en indemnisation des désordres affectant le parking sud du centre commercial Saint-Exupéry, d'autre part, de condamner l'entreprise Soprema à lui verser une somme de 189 796, 56 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts, en indemnisation des désordres affectant le parking nord de ce centre commercial, et enfin, de condamner solidairement les entreprises Aeria, Calles et Bureau Veritas à lui verser une somme de 151 168, 22 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts, en indemnisation des désordres affectant les carrelages de la zone commerciale ;

Par un jugement n° 1302368 du 26 mars 2015, rectifié pour erreur matérielle par une ordonnance du président du tribunal administratif de Dijon du 18 mai 2015, ce même tribunal administratif a :

- condamné la société Soprema à verser à la commune de Chenôve une somme de 112 166, 48 euros au titre des désordres affectant le parking nord du centre Saint-Exupéry, assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2013 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 16 septembre 2014 puis à chaque échéance annuelle ;

- condamné in solidum, la société Soprema et la société Eurovia, la société Aeria et Bureau Veritas à verser à cette commune une somme de 669 359, 14 euros au titre des désordres affectant le parking sud du centre Saint-Exupéry, assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2013 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 16 septembre 2014 puis à chaque échéance annuelle ;

- condamné in solidum la société Calles et la société Aeria à verser à la même commune la somme de 151 168, 22 euros au titre des désordres affectant les carrelages de la zone commerciale ;

- condamné la société Aeria à garantir les sociétés Soprema et Eurovia ainsi que Bureau Veritas à hauteur de 30 % de la somme de 669 359, 14 euros mise à leur charge solidaire ;

- condamné le bureau Veritas à garantir les sociétés Soprema et Eurovia et la société Aeria à hauteur de 10% de la somme de 669 359, 14 euros mise à leur charge solidaire

- condamné les sociétés Soprema et Eurovia à garantir la société Aeria et Bureau Veritas à hauteur de 60 % de la même somme ;

- condamné la société Soprema à garantir intégralement la société Eurovia, son cotraitant, des sommes mise à leur charge solidaire ;

- condamné la société Calles à garantir la société Aeria à hauteur de 70% de la somme de 151 168, 22 euros mise à leur charge solidaire ;

- mis à la charge des sociétés Soprema, Aeria, Calles et Bureau Veritas, chacune, une part des frais d'expertise et 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour

I°) Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 16 juin 2015, 9 décembre 2015 et 11 avril 2016, sous le n° 15LY01996, la société Aeria, représentée par la SCP Dorey - Portalis - Pernelle - Fouchard -Bernard, demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement du 26 mars 2015, tel que rectifié par l'ordonnance du 18 mai 2015, en tant qu'il la condamne au versement d'indemnisation à la commune de Chenôve et de rejeter les conclusions de première instance de cette dernière ;

2°) à titre subsidiaire, d'une part, de condamner in solidum les sociétés Eurovia Bourgogne, Soprema et Bureau Veritas à la garantir de toutes les condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre en ce qui concerne l'étanchéité du parking du centre commercial intégrant le coût de la réparation du caniveau et d'autre part, de condamner la société Calles à la garantir de toutes les condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre en ce qui concerne le carrelage du centre commercial ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Chenôve la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

- l'expertise, qui n'est pas fondée sur des constatations objectives des désordres, est entachée de contradictions quant à la nature, l'ampleur et le coût des travaux de réfection tant en ce qui concerne l'étanchéité que le caniveau et le carrelage ;

- il n'y a aucune altération de l'étanchéité en partie courante, la solution de reprise totale n'est donc pas justifiée dès lors que la société Amiex, intervenant en qualité de sapiteur, a démontré que la cause majeure des infiltrations provient principalement du caniveau et des jardinières, poteaux et murets ;

- la société J2C, intervenant en qualité de sapiteur de l'expert judiciaire, a chiffré le montant total de la reprise à 417 167, 43 euros toutes taxes comprises, et non à 687 248, 39 euros toutes taxes comprises comme l'expert l'a estimé, de manière injustifiée ;

- des travaux de reprise du caniveau ont été effectués, en cours d'expertise, par la société J2C, sapiteur de l'expert judiciaire, selon une conception très différente de la conception initiale ; l'intégralité du coût de ces travaux n'est donc pas due ; la société Soprema avait remis un devis pour un montant de 58 121, 25 euros hors taxe ;

- les malfaçons affectant le carrelage résultent exclusivement de la mise en oeuvre par la société Calles dès lors que le primaire nécessaire entre le support et la colle n'a pas été correctement posé ;

- elle n'a commis aucune erreur de conception et n'a pas manqué à ses obligations dans la mission de direction des travaux ; elle est, par conséquent, fondée à être garantie entièrement des sommes mises à sa charge solidaire en réparation des désordres affectant le parking sud et le carrelage du centre commercial ;

- en tout état de cause, la commune de Chenôve ne peut plus prétendre à la réparation d'un quelconque préjudice dans la mesure le centre commercial Saint-Exupéry a vocation à être démoli.

Par quatre mémoires, enregistrés les 23 septembre 2015, 1er et 29 mars et 7 juillet 2016, Soprema Entreprises, représentée par la SELARL Alerion, conclut au rejet de la requête et demande à la cour :

1°) à titre principal, sa mise hors de cause s'agissant des désordres affectant tant le parking nord que le parking sud, ainsi que le caniveau ;

2°) à titre subsidiaire, la limitation de sa part de responsabilité à hauteur de 10% ;

3°) à être garantie intégralement par la commune de Chenôve, les sociétés Aeria et Bureau Veritas de toutes condamnations ;

4°) de mettre à la charge de la société Aeria la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir, dans le dernier état de ses écritures, que :

- ni l'expert, ni les premiers juges n'ont tenu compte du rapport de la société Amiex, désigné sapiteur de l'expert judiciaire alors que celui-ci concluait, d'une part, que l'étanchéité en partie courante n'est pas à l'origine des désordres affectant les parkings nord et sud puisque seuls des points particuliers génèrent des infiltrations et, d'autre part, que s'agissant du caniveau et des grilles d'évacuation des eaux pluviales, ils sont mal entretenus, sinon bouchés, et leur conception même est en cause ;

- les conclusions du sapiteur montrent qu'elle n'a commis aucune faute dans l'exécution des travaux de pose du revêtement d'étanchéité ; en conséquence, la commune de Chenôve n'est pas fondée à rechercher sa responsabilité et la société Aeria n'est pas fondée à l'appeler en garantie ;

- les désordres affectant le caniveau proviennent d'un défaut de conception et en aucun cas d'un défaut d'exécution ; ainsi c'est à tort que les premiers juges ont retenu, à son égard, une part de responsabilité à hauteur de 60% des désordres ;

- la société Aeria n'a jamais appelé en garantie la société Soprema s'agissant des désordres affectant le caniveau ; à supposer qu'elle l'ait régulièrement fait, sa part de responsabilité doit être limitée à 10% ;

- à supposer que sa responsabilité soit retenue s'agissant des désordres affectant les parkings, elle sera limitée à la part de 10% dès lors qu'une partie des infiltrations trouve sa cause dans l'utilisation du parking par les usagers de l'ouvrage et qu'un défaut d'entretien est caractérisé ;

- le Bureau Veritas, qui avait une mission " L " relative à la solidité des ouvrages, n'a émis aucun avis réservé ou défavorable sur le mode constructif du caniveau ; sa responsabilité a été retenue à hauteur de 10% par l'expert judiciaire s'agissant du parking sud ;

- la commune de Chenôve n'a entrepris aucun travaux alors même que les sociétés condamnées en première instance ont mis à exécution le jugement du tribunal administratif de Dijon en versant à la commune les sommes dues ; la démolition du centre commercial est annoncée de sorte que la commune ne justifie plus d'aucun préjudice ; compte tenu de la réponse évasive de la commune sur ce point et alors qu'il existe des indices concordants, il conviendrait de faire application de l'article R. 623-1 et suivants du code de justice administrative et de diligenter une procédure d'enquête ;

- la société Eurovia Bourgogne n'est pas fondée à diriger ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative contre elle.

Par trois mémoires, enregistrés les 26 octobre 2015, 26 février et 14 avril 2016, la société Calles, représentée par la SELARL Tacoma, conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, demande à la cour de réformer le jugement de première instance en limitant sa part de responsabilité dans les désordres affectant le carrelage de la zone commerciale à 50%, voire à 60% , d'en tirer les conséquences sur la répartition des frais d'expertise et de mettre à la charge de la société Aeria une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir, dans le dernier état de ses écritures, que :

- le jugement est insuffisamment motivé s'agissant de la ventilation des parts de responsabilité ;

- en présence d'une mission complète de maîtrise d'oeuvre, la société Aeria avait une obligation de vérification des conditions de pose ;

- l'expert a retenu une part de responsabilité à hauteur de 10% pour le bureau Veritas.

Par un mémoire, enregistré le 28 décembre 2015, le Bureau Veritas, représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en tant qu'il met à sa charge une condamnation solidaire au titre des désordres affectant le parking sud ;

2°) de condamner les sociétés Aeria, Eurovia Bourgogne, Soprema et Calles à le garantir de toutes condamnations prononcées contre lui, y compris les dépens ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Chenôve et tous succombants une somme de 5 000 euros chacun sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il fait valoir que :

- aucune mission de contrôle technique ne lui a été confiée au titre des travaux réalisés sur le parking nord ;

- la commune de Chenôve ne démontre pas que les désordres allégués affectant le parking sud seraient de nature décennale ;

- les points d'infiltration ponctuels ne génèrent pas d'atteinte à la solidité de l'ouvrage et ne le rend pas impropre à sa destination ; les parkings continuent à être exploités normalement ;

- la commune ne serait plus fondée à invoquer sa responsabilité contractuelle dans la mesure où les travaux ont fait l'objet d'une réception sans réserve ;

- le bureau de contrôle ne figure pas au rang des intervenants à l'acte de construire visé par les principes dont s'inspire l'article 1792 du code civil ;

- la commune de Chenôve ne démontre pas que les désordres ont pour origine un manquement à telle ou telle mission confiée au contrôleur technique ; les infiltrations dans un parking souterrain n'appartenant pas à la commune mais à une copropriété voisine ne constituent pas un aléa à la prévention duquel il aurait dû apporter une contribution au titre de l'une de ses missions ;

- la mission du contrôleur technique ne doit pas être confondue avec celle d'un maître d'oeuvre ; il n'a aucun pouvoir coercitif à l'encontre des locateurs d'ouvrages et n'a pas à surveiller le chantier ;

- la responsabilité de la commune est engagée s'agissant des désordres affectant le parking nord en sa qualité de maître d'oeuvre de l'opération ; elle est engagée également s'agissant des désordres affectant le parking sud et le caniveau pour défaut d'entretien ;

- chacun des autres intervenants à l'opération de construction a commis des négligences ; il est en conséquence bien fondé à être garanti intégralement de toutes condamnations prononcées à son encontre ;

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 1er mars et 4 mai 2016, la commune de Chenôve, représentée par la SELAS Adamas, conclut au rejet des conclusions des parties et à ce qu'une somme 5 000 euros soit mise à la charge solidaire des sociétés Aeria, Soprema et Bureau Veritas sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- le rapport d'expertise judiciaire et le rapport de la société Amiex, sapiteur, mettent en évidence de l'humidité au droit de points singuliers mais également dans les parties courantes, entraînant une importante présence d'eau sous l'étanchéité ;

- ces désordres sont de nature à affecter la solidité de l'ouvrage et à le rendre impropre à sa destination et engagent la responsabilité des constructeurs, dont fait partie le contrôleur technique, au titre de la garantie décennale ;

- elle ne peut être déclarée responsable des désordres dans la mesure où les problèmes d'étanchéité, apparus dès la fin du chantier, sont sans lien avec un quelconque défaut d'entretien ;

- le caniveau fait fonction de joint de dilatation et est traversé par au moins deux joints de dilatation parcourant l'entier parking sud ; il présente de très nombreux décollements et déchirures dans la continuité de son étanchéité ;

- les désordres affectant le carrelage sont bien imputables également au maître d'oeuvre qui a manqué à son devoir de surveillance dans les conditions de pose du carrelage ;

- les désordres doivent être réparés intégralement, indépendamment des réflexions en cours sur le devenir du centre commercial Saint-Exupéry ; la réfection complète est indispensable étant donné que le revêtement bitumeux est solidarisé avec l'étanchéité ;

- la société Amiex, sapiteur de l'expert judiciaire, est spécialisée dans le domaine de la détection des fuites mais pas dans celui de la réalisation des travaux d'étanchéité ;

- le montant du préjudice a été justement apprécié par les juges de première instance ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juin 2016, la société Eurovia Bourgogne, représentée par la SCP Camille Beziz-Cleon et Fabrice Charlemagne, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des sociétés Aeria et Soprema sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- ainsi que l'ont jugé les premiers juges seule la société Soprema a réalisé les travaux d'étanchéité ; le jugement doit être confirmé en ce qu'il a condamné cette dernière à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre et les conclusions d'appel en garantie de la société appelante à son encontre ne peuvent qu'être rejetées ;

- elle fait sienne l'argumentation des sociétés Soprema et Aeria et considère que la commune ne peut plus se prévaloir d'aucun préjudice.

Par ordonnance du 11 juillet 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 31 août 2016 ;

II°) Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 juin 2015, 17 novembre 2015, 1er et 29 mars et 7 juillet 2016, sous le n° 15LY02044, la société Soprema Entreprises, représentée par la SELARL Alerion, demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler les articles 1er, 2, 4 6 et 7 du jugement du tribunal administratif de Dijon du 26 mars 2015, tel que rectifié pour erreur matérielle par l'ordonnance du 18 mai 2015 du président de ce même tribunal, en tant qu'ils prononcent des condamnations à son encontre et de rejeter les conclusions de première instance de la commune de Chenôve ;

2°) à titre subsidiaire, de limiter sa part de responsabilité dans les désordres affectant les parkings nord et sud, ainsi que le caniveau, à hauteur de 10% et de fixer le quantum du préjudice subi par la commune en tenant compte du projet de démolition du centre commercial ;

3°) de condamner in solidum la commune de Chenôve, les sociétés Aeria et Bureau Veritas à la garantir intégralement de toutes condamnations prononcées à son encontre ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Chenôve la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

- sa responsabilité dans la survenance des désordres d'étanchéité dans les parkings nord et sud n'est pas établie par le rapport de l'expert judiciaire qui a écarté, sans fondement, les conclusions de la société Amiex, désignée sapiteur ;

- aucun défaut de mise en oeuvre du complexe d'étanchéité des parkings nord et sud ne lui est imputable, ainsi que le relève le sapiteur ;

- les désordres affectant le caniveau proviennent d'un défaut de conception et non d'un défaut d'exécution ; c'est donc à tort que les premiers juges ont retenu une part de responsabilité lui incombant à hauteur de 60%, laquelle doit être limitée à 10% eu égard aux fautes commises par la maîtrise d'oeuvre et au défaut d'entretien imputable à la commune ;

- sa part de responsabilité dans les désordres affectant l'étanchéité des parkings doit être limitée à 10 % également dès lors qu'une partie des infiltrations provient de l'utilisation des parkings par les usagers et qu'un défaut d'entretien de l'ouvrage par la commune est caractérisé ; la part de responsabilité des sociétés Aeria et Bureau Véritas doit être maintenue à hauteur de 30 et 10% ;

- le quantum des travaux de reprise doit être ramené à de plus justes proportions dans la mesure où ce chiffrage doit intégrer le projet de destruction du centre commercial ; par ailleurs, le chiffrage des travaux de reprise du caniveau n'a pas été fixé de manière contradictoire dès lors que les premiers juges ont retenu un montant des travaux réalisés par la société J2C, également sapiteur de l'expert judiciaire, selon un procédé qui n'a pas reçu l'aval de l'expert ; que seul le montant validé par l'expert de 114 246, 90 euros TTC pourra être retenu ; le tribunal ne s'est pas prononcé sur la pertinence de la solution alternative proposée pour un montant de 58 121, 25 euros hors taxe ;

- la société J2C a été déclarée attributaire du marché visant à la réfection de l'étanchéité du caniveau pour un montant de 141 054, 92 euros toutes taxes comprises en méconnaissance du principe d'égalité d'accès à la commande publique ;

- la société Amiex avait préconisé la reprise de la couche d'étanchéité, à l'exclusion de la couche de revêtement qui n'est affectée d'aucun désordre et qu'il est donc inutile de reprendre ;

- les sociétés Calles et Eurovia Bourgogne ne sont pas fondées à se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à son encontre ;

- le Bureau Veritas, qui avait une mission " L " relative à la solidité des ouvrages, n'a émis aucun avis réservé ou défavorable sur le mode constructif du caniveau ; sa part de responsabilité a été retenue, à juste titre, à hauteur de 10% par l'expert judiciaire ;

- la commune de Chenôve n'a entrepris aucun travaux alors même que les sociétés condamnées en première instance ont versé à la commune les sommes dues en application du jugement du tribunal administratif de Dijon ; la démolition du centre commercial est annoncée de sorte que la commune ne justifie plus d'aucun préjudice ; compte tenu de la réponse évasive de la commune sur ce point et alors qu'il existe des indices concordants, il conviendrait de faire application de l'article R. 623-1 et suivants du code de justice administrative et de diligenter une procédure d'enquête ;

Par un mémoire, enregistré le 28 octobre 2015 et un mémoire non communiqué, enregistré le 28 février 2016, la société Calles, représentée par la SELARL Tacoma, conclut à sa mise hors de cause et à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de la société Soprema Entreprises sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que la société Soprema ne dirige aucune conclusion à son encontre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 décembre 2015, la société Aeria, représentée par la SCP Dorey - Portalis - Pernelle - Fouchard -Bernard, conclut au rejet de la requête ;

Elle fait valoir que :

- si l'on retient les causes admises par l'expert judiciaire, les infiltrations proviennent de décollements intempestifs des relevés d'étanchéité et de négligences dans la mise en oeuvre ayant provoqué une dégradation de l'étanchéité sous la protection lourde ce qui engage la seule et unique responsabilité des entreprises ayant réalisé les travaux ; en conséquence, la société Soprema Entreprises n'est pas fondée à être garantie par elle des condamnations prononcées à son encontre au titre de la réfection de l'étanchéité du parking sud ;

- s'agissant du caniveau, la société appelante n'est pas exempte de responsabilité car en sa qualité de spécialiste de l'étanchéité, compte tenu de la configuration du caniveau, il lui appartenait de signaler à la maîtrise d'oeuvre que le système d'étanchéité préconisé était insuffisant pour résister à tout mouvement de dilatation ;

- elle fait sienne l'argumentation de la société appelante s'agissant de la prise en compte pour le calcul du préjudice subi du projet de démolition du centre commercial ;

Par un mémoire, enregistré le 28 décembre 2015, le Bureau Veritas, représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Dijon du 26 mars 2015 en tant qu'il met à sa charge une condamnation solidaire au titre des désordres affectant le parking sud ;

2°) de condamner les sociétés Aeria, Eurovia Bourgogne, Soprema et Calles à le garantir de toutes condamnations prononcées contre lui, y compris au titre des dépens de l'instance ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Chenôve et tous succombants une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il fait valoir que :

- aucune mission de contrôle technique ne lui a été confiée au titre des travaux réalisés sur le parking nord ;

- la commune de Chenôve ne démontre pas que les désordres allégués affectant le parking sud seraient de nature décennale ;

- les points d'infiltration ponctuels ne génèrent pas d'atteinte à la solidité de l'ouvrage et ne le rend pas impropre à sa destination ; les parkings continuent à être exploités normalement ;

- la commune ne serait plus fondée à invoquer sa responsabilité contractuelle dans la mesure où les travaux ont fait l'objet d'une réception sans réserve ;

- le bureau de contrôle ne figure pas au rang des intervenants à l'acte de construire visé par les principes dont s'inspire l'article 1792 du code civil ;

- la commune de Chenôve ne démontre pas que les désordres ont pour origine un manquement à telle ou telle mission confiée au contrôleur technique ; les infiltrations dans un parking souterrain n'appartenant pas à la commune mais à une copropriété voisine ne constituent pas un aléa à la prévention duquel il aurait dû apporter une contribution au titre de l'une de ses missions ;

- la mission du contrôleur technique ne doit pas être confondue avec celle d'un maître d'oeuvre ; il n'a aucun pouvoir coercitif à l'encontre des locateurs d'ouvrages et n'a pas à surveiller le chantier ;

- la responsabilité de la commune est engagée s'agissant des désordres affectant le parking nord en sa qualité de maître d'oeuvre de l'opération ; elle est engagée également s'agissant des désordres affectant le parking sud et le caniveau pour défaut d'entretien ;

- chacun des autres intervenants à l'opération de construction a commis des négligences ; il est en conséquence bien fondé à être garanti intégralement de toutes condamnations prononcées à son encontre ;

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 1er mars et 4 mai 2016, la commune de Chenôve, représentée par la SELAS Adamas, conclut au rejet des conclusions des parties et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge solidaire des société Aeria, Soprema et Bureau Véritas sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- le rapport d'expertise judiciaire et le rapport de la société Amiex, sapiteur, mettent en évidence de l'humidité au droit de points singuliers mais également dans les parties courantes, entraînant une importante présence d'eau sous l'étanchéité ;

- ces désordres sont de nature à affecter la solidité de l'ouvrage et à le rendre impropre à sa destination et engagent la responsabilité des constructeurs, dont fait partie le contrôleur technique, au titre de la garantie décennale ;

- elle ne peut être déclarée responsable des désordres dans la mesure où les problèmes d'étanchéité, apparus dès la fin du chantier, sont sans lien avec un quelconque défaut d'entretien ;

- le caniveau fait fonction de joint de dilatation et est traversé par au moins deux joints de dilatation parcourant l'entier parking sud ; il présente de très nombreux décollements et déchirures dans la continuité de son étanchéité ;

- les désordres affectant le carrelage sont bien imputables également au maître d'oeuvre qui a manqué à son devoir de surveillance dans les conditions de pose du carrelage ;

- les désordres doivent être réparés intégralement, indépendamment des réflexions en cours sur le devenir du centre commercial Saint-Exupéry ; la réfection complète est indispensable étant donné que le revêtement bitumeux est solidarisé avec l'étanchéité ;

- la société Amiex, sapiteur de l'expert judiciaire, est spécialisée dans le domaine de la détection des fuites mais pas dans celui de la réalisation des travaux d'étanchéité ;

- le montant du préjudice a été justement apprécié par les juges de première instance.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juin 2016, la société Eurovia Bourgogne, représentée par la SCP Camille Beziz-Cleon et Fabrice Charlemagne, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des sociétés Aeria et Soprema sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- ainsi que l'ont jugé les premiers juges, seule la société Soprema a réalisé les travaux d'étanchéité ; le jugement doit être confirmé en ce qu'il a condamné cette dernière à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;

- elle fait sienne l'argumentation des sociétés Soprema et Aeria et considère que la commune ne peut plus se prévaloir d'aucun préjudice.

Par ordonnance du 11 juillet 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 31 août 2016 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code des marchés publics alors en vigueur ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lesieux,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant la commune de Chenôve et de Me A..., substituant MeC..., représentant la société Calles ;

1. Considérant que les requêtes enregistrées sous les n°s 15LY01996 et 15LY02044, présentées respectivement par la société Aeria et la société Soprema Entreprises, présentent à juger des questions identiques et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une même décision ;

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'un projet de réhabilitation sous maîtrise d'ouvrage de l'établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA) a été mis en oeuvre pour le centre commercial Saint-Exupéry, implanté à Chenôve ; que simultanément, la commune de Chenôve a entrepris, en 2003, au niveau du parking sud, des travaux de réaménagement des espaces publics dans le cadre de la réhabilitation de ce centre commercial, de démolition d'un immeuble d'habitation et de remaniement d'un ensemble de garages souterrains privés ; qu'elle a confié la maîtrise d'oeuvre de ces travaux à un groupement, représenté par son mandataire, la société Aeria, et le contrôle technique au Bureau Veritas ; qu'un groupement solidaire composé des sociétés Eurovia Bourgogne et Soprema s'est vu confier le lot n° 6 " étanchéité, protection lourde béton désactivé " et que la société Calles s'est vue confier le lot n°7 " carrelages " ; qu'en 2007, la commune de Chenôve a entrepris la réfection de l'étanchéité du parking nord en assurant elle-même la maîtrise d'oeuvre des travaux, confiés à la société Soprema ; que les travaux ont été réceptionnés sans réserve le 15 novembre 2006 s'agissant du lot n° 7 , le 5 mars 2007 s'agissant du lot n° 6 et le 8 octobre 2007 s'agissant des travaux d'étanchéité du parking nord ; que postérieurement à ces réceptions, des désordres sont apparus, affectant l'étanchéité de la dalle de couverture tant du parking nord que du parking sud occasionnant des infiltrations d'eau dans les garages privés situés sous cette dalle, ainsi que des décollements du carrelage dans la galerie commerciale ; que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a retenu que ces désordres relevaient de la garantie décennale et a condamné in solidum, d'une part, les sociétés Aeria, Eurovia Bourgogne et Soprema ainsi que le Bureau Veritas à verser à la commune de Chenôve une somme de 669 359, 14 euros au titre des désordres affectant le parking sud, d'autre part, les sociétés Aeria et Calles ainsi que le Bureau Veritas à lui verser une somme de 151 168, 22 euros au titre des désordres affectant le carrelage et enfin, retenant une part de responsabilité de la commune de Chenôve, à hauteur de 40% en sa qualité de maître d'oeuvre, la société Soprema à verser à cette dernière une somme de 112 166,48 euros au titre des désordres affectant le parking nord ; que statuant sur les conclusions d'appel en garantie des parties, le tribunal administratif de Dijon a laissé à la charge de la société Aeria 30% des sommes auxquelles elle a été condamnée solidairement et à la charge de la société Soprema, 60% des sommes auxquelles elle a été condamnée solidairement ; que ces sociétés relèvent appel de ce jugement ;

Sur l'imputabilité des désordres et la réparation des préjudices :

En ce qui concerne les désordres affectant l'étanchéité des parkings nord et sud :

3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'expert judiciaire, désigné par le président du tribunal administratif de Dijon, par une ordonnance du 26 janvier 2010, a fait appel à un sapiteur, la société Amiex, afin d'identifier les zones d'infiltrations d'eau provenant de la dalle concernée par les travaux d'étanchéité ; qu'il résulte des termes de son rapport, repris par l'expert, que les infiltrations d'eau proviennent de décollements du dispositif d'étanchéité en de nombreux points distincts, notamment les jardinières implantées dans la zone de parking, les dispositifs d'éclairage intégrés, les grilles d'évacuation d'eaux pluviales, un muret séparant le parking de l'allée centrale du centre commercial, des poteaux ainsi que du caniveau, situé sur le parking sud, affecté de nombreux décollements et déchirures ; qu'en outre, les repérages cartographiés par le sapiteur ont mis en évidence des tâches d'humidité isolées et plus ou moins denses affectant l'ensemble des surfaces ; que ces infiltrations s'expliquent par l'absence de pose du solin de finition, prévue par les documents contractuels, et s'agissant du caniveau, par une inadaptation de sa conception initiale et le non-respect des prescriptions du document technique unique (DTU) et des règles de l'art ; qu'ainsi, et sans qu'il ait été besoin pour l'expert de procéder à des recherches complémentaires, et notamment à des sondages destructifs, dont la réalisation s'avérait difficile, sinon impossible compte tenu de ce que le dispositif d'étanchéité et le revêtement bitumeux s'étaient solidarisés, les désordres affectant l'étanchéité des parkings sont de nature à engager la responsabilité, sur le fondement de la garantie décennale, tant du groupement de maîtrise d'oeuvre au titre de sa mission de conception du caniveau et au titre de sa mission de direction des travaux, s'agissant du parking sud, que de la société Soprema à qui était confiée l'exécution de ces travaux pour les deux parkings, nord et sud ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que les constructeurs ne peuvent être exonérés de la responsabilité qui leur incombe au titre de la garantie décennale qu'en cas de force majeure ou de faute du maître d'ouvrage ; que, d'une part, si la société Soprema soutient que quelques infiltrations proviennent de dégradations imputables aux usagers du parking, il résulte de l'instruction que ces dégradations sont mineures et ne sont pas à l'origine des désordres constatés ; que d'autre part, s'il est constant que la commune de Chenôve n'a pas correctement entretenu les parkings et le caniveau situé sur le parking sud, il ne résulte pas de l'instruction que ce défaut d'entretien serait à l'origine des désordres constatés et il n'est pas davantage établi qu'il serait la cause d'une aggravation de ces désordres ;

5. Considérant, en troisième lieu, que les sociétés appelantes soutiennent qu'aucune indemnisation n'est désormais due dès lors, d'une part, que la commune de Chenôve, en la personne de son maire, a fait connaître publiquement son intention de démolir, à terme, le centre commercial Saint-Exupéry et qu'elle n'a, d'autre part, engagé aucune démarche tendant à la reprise des travaux d'étanchéité des parkings malgré la mise à exécution, par ces sociétés, du jugement attaqué ; que toutefois, et sans qu'il soit besoin de diligenter une enquête sur le fondement de l'article R. 623-1 du code de justice administrative, les sociétés Aeria et Soprema ne sont pas fondées à soutenir que les désordres affectant l'étanchéité de la dalle n'auraient entraîné aucun préjudice pécuniaire pour la commune, dans la mesure où le projet de démolition du centre commercial n'affecterait, en tout état de cause, pas la dalle sur laquelle sont aménagés les parkings nord et sud et qui abrite les garages souterrains privatifs ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise judiciaire ainsi que des photographies jointes à l'étude de la société Amiex, désignée sapiteur, qu'un nombre important de points singuliers non étanches et des taches d'humidité plus ou moins denses ont été identifiés en différents endroits des deux parkings ce qui traduit une présence d'eau sous l'étanchéité de l'ensemble de la surface traitée ; que par ailleurs, il n'est pas contesté que le revêtement bitumeux, du fait de sa pose à chaud, s'est solidarisé avec le dispositif d'étanchéité et que les deux matériaux se sont amalgamés ; qu'il en résulte, ainsi que l'ont estimé les premiers juges, que la reprise partielle proposée par la société Soprema pour un montant de 58 121, 25 euros hors taxe n'est ni pertinente ni adaptée à l'étendue et la nature des désordres ; que les sociétés appelantes ne sont donc pas fondées à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont validé la solution de reprise totale de l'étanchéité des parkings ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que si la société Aeria soutient que la somme retenue par les premiers juges n'est pas justifiée au regard des conclusions de l'expert, il n'est pas contesté que le parking nord couvre une surface de 1 500 m² et le parking sud, une surface de 4 238 m² ; que le devis proposé par la société J2C, à hauteur de 417 167, 43 euros toutes taxes comprises (TTC) ne correspondait qu'à la seule réfection du parking sud selon un métrage non conforme à celui relevé par le géomètre diligenté par la commune de Chenôve ; qu'il s'ensuit que c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu la somme de 687 248, 39 euros (TTC) correspondant à la réfection de la totalité de la surface des deux parkings à laquelle ont été ajoutées, à juste titre, le coût de la maîtrise d'oeuvre pour un montant non contesté de 20 000 euros et le coût du contrôle final pour un montant non contesté de 8 000 euros, et qu'ils l'ont répartie au prorata de la surface de chacun des deux parkings ;

8. Considérant, en dernier lieu, que les travaux de reprise du caniveau, situé sur le parking sud, ont été réalisés, en cours d'expertise, par la société J2C pour un montant de 141 054, 92 euros toutes taxes comprises ; que, d'une part, la circonstance que la commune de Chenôve aurait confié l'exécution de ces travaux à la société J2C, par ailleurs sapiteur auprès de l'expert judiciaire désigné dans le cadre du présent litige, sans respecter les règles de passation des marchés publics, est sans incidence sur les conditions de détermination du préjudice indemnisable de la commune ; que, d'autre part, si l'expert avait initialement estimé le coût des travaux de reprise à 117 221, 15 euros toutes taxes comprises, il résulte de l'instruction que le prix unitaire des tôles inox utilisées pour la réfection du caniveau a connu une hausse justifiant l'augmentation du coût des travaux, ainsi que les sociétés appelantes en avaient été informées tant dans le cadre de l'expertise que de l'instruction en première instance ; qu'enfin, si la conception de la reprise du caniveau est, ainsi que le relèvent les sociétés Aeria et Soprema, très différente de la conception d'origine, il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport d'expertise judiciaire, et ainsi qu'il l'a déjà était dit au point 3, que le système constructif initial n'était pas adapté et occasionnait d'importants problèmes d'étanchéité lors de la mise en charge normale du caniveau ; qu'il apparaissait dès lors indispensable de modifier la conception de ce caniveau et que ces dépenses étaient utiles à la réparation intégrale des désordres affectant l'étanchéité de la dalle ;

En ce qui concerne les désordres affectant le carrelage :

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport d'expertise judiciaire, que les désordres affectant le carrelage de la zone commerciale trouvent leur origine dans l'exécution des travaux par la société Calles ; que ces désordres sont toutefois également imputables à la maîtrise d'oeuvre, la société Aeria, au titre de sa mission de direction des travaux ; qu'ainsi cette dernière n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges l'ont condamnée solidairement à verser à la commune de Chenôve la somme non contestée de 151 168, 22 euros toutes taxes comprises ;

Sur les appels en garantie :

En ce qui concerne le parking sud :

10. Considérant que, contrairement à ce que soutient la société Soprema Entreprises, la société Aeria demande la condamnation des sociétés Eurovia Bourgogne, Soprema et Bureau Veritas à la garantir de la condamnation solidaire mise à sa charge au titre des désordres affectant le parking sud, intégrant le coût de la réparation du caniveau ; que la société Soprema forme, quant à elle, des conclusions d'appel en garantie à ce même titre, à l'encontre des sociétés Aeria et Bureau Véritas ;

11. Considérant qu'ainsi qu'il l'a été dit au point 3, les désordres affectant l'étanchéité sont imputables, d'une part, à la maîtrise d'oeuvre au titre de sa mission de conception s'agissant du caniveau et de sa mission de direction des travaux et d'autre part, à l'entreprise qui a exécuté les travaux d'étanchéité du parking sud, y compris la réalisation du caniveau ;

12. Considérant que la société Bureau Véritas, contrôleur technique, était quant à elle liée par contrat à la commune de Chenôve aux termes duquel lui incombait une mission "L" relative à la solidité des ouvrages et des éléments d'équipements liés et une mission "SEI" relative à la sécurité des personnes contre les risques de panique et d'incendie dans les constructions achevées ; qu'il résulte de l'instruction et ainsi que l'ont relevé les premiers juges, que la responsabilité du Bureau Veritas doit être engagée du fait d'un défaut de contrôle lors de l'exécution des travaux, concernant tant l'étanchéité que la sécurité des personnes en ce qui concerne le risque d'effondrement des grilles du caniveau ;

13. Considérant qu'eu égard à l'ensemble de ces considérations, le tribunal a fait une juste appréciation de la part de responsabilité incombant à chacun des constructeurs en retenant une part de responsabilité à 60% pour le groupement Soprema / Eurovia Bourgogne, 30% pour la société Aeria et 10% pour le Bureau Véritas pour les dommages affectant le parking sud, dont ceux liés au caniveau ;

14. Considérant toutefois qu'il y a lieu de faire droit aux conclusions de la société Eurovia Bourgogne tendant à la condamnation de la société Soprema, son cotraitant, à la garantir entièrement de toute condamnation prononcée à son encontre dès lors qu'il résulte de l'instruction qu'elle n'a pas pris part aux travaux de mise en place de la couche d'étanchéité ;

En ce qui concerne le carrelage :

15. Considérant que la société Aeria demande à la cour de condamner la société Calles à la garantir intégralement de la condamnation prononcée à son encontre au titre des désordres affectant le carrelage et que la société Calles, par la voie de l'appel incident, demande à la cour de condamner la société Aeria à la garantir de cette même condamnation à hauteur de 40% , sinon de 50% ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise judiciaire, que des surfaces importantes du carrelage de la galerie commerciale ne sont plus solidaires de leur support ; que ces désordres, par ailleurs évolutifs, trouvent leur origine dans l'exécution des travaux par la société Calles qui n'a, notamment, pas mis correctement en oeuvre le primaire nécessaire entre le support et la colle ; que la responsabilité du maître d'oeuvre est engagée au titre de la direction des travaux ; qu'eu égard à ces considérations, le tribunal, dont le jugement est suffisamment motivé, a fait une juste appréciation de la part de responsabilité incombant à chacun en retenant une part de responsabilité à hauteur de 70% pour la société Calles et de 30% pour la société Aeria ;

Sur les conclusions d'appel provoqué du bureau Véritas et de la société Calles :

16. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la situation du Bureau Veritas et de la société Calles, qui ne se sont pas pourvus dans le délai d'appel contre le jugement attaqué du tribunal administratif de Dijon, n'est pas modifiée par le présent arrêt ; que leurs conclusions d'appel provoqué doivent donc être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des sociétés Aeria et Soprema la somme de 1 000 euros chacune à verser à la commune de Chenôve sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Chenôve, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés par les sociétés Aeria et Soprema ; qu'il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par les autres parties sur ce même fondement ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes n°S 15LY01996 et 15LY02044 des sociétés Aeria et Soprema sont rejetées.

Article 2 : Les sociétés Aeria et Soprema verseront à la commune de Chenôve la somme de 1 000 euros chacune sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Aeria, la société Soprema Entreprises, la commune de Chenôve, la société Calles, le Bureau Véritas et la société Eurovia Bourgogne.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2017 où siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Lesieux, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 janvier 2018.

15

N°S 15LY01996 et 15LY02044


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY01996
Date de la décision : 11/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04-01 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité décennale. Qualité pour la mettre en jeu.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : DRAGHI-ALONSO - MELLA

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-01-11;15ly01996 ?
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