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19/12/2017 | FRANCE | N°16LY02498

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 19 décembre 2017, 16LY02498


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Laturne et l'association de défense et de protection de l'environnement des pays de Savoie ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2013 par lequel le maire de la commune de la Côte-d'Arbroz a accordé à M. A... un permis de construire pour l'édification d'une maison individuelle.

Par un jugement n° 1306853 du 19 mai 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande et a condamné les requérantes à payer une amende d'un montant d

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Laturne et l'association de défense et de protection de l'environnement des pays de Savoie ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2013 par lequel le maire de la commune de la Côte-d'Arbroz a accordé à M. A... un permis de construire pour l'édification d'une maison individuelle.

Par un jugement n° 1306853 du 19 mai 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande et a condamné les requérantes à payer une amende d'un montant de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 19 juillet 2016, l'association de défense et de protection de l'environnement des pays de Savoie demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 19 mai 2016 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir le permis de construire du 2 juillet 2013 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de la Côte-d'Arbroz une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué, qui n'analyse pas les moyens invoqués dans son mémoire en réplique et sa note en délibéré, méconnaît, dès lors, l'article R. 741-2 du code de justice administrative ;

- en déclarant sa requête irrecevable, les juges de première instance ont méconnu l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'alinéa 1er de l'article L. 142-1 du code de l'environnement, ainsi que la directive 85/337 du 27 juin 1985 telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union Européenne (CJUE, quatrième chambre, 12 mai 2011, affaire C-115/09) s'agissant des recours formés par les associations de protection de l'environnement devant les juridictions nationales ;

- elle dispose d'un intérêt à agir à l'encontre du permis de construire qui a autorisé le projet de construction d'une maison individuelle au lieu dit Le Couard dès lors qu'elle est une association indépendante et autonome et que son objet statutaire vise la protection des "espaces, ressources, milieux et habitats naturels montagnards" dans le domaine "de l'aménagement harmonieux et équilibré du territoire, de l'urbanisme et de l'environnement" ;

- le permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-30 du code de l'urbanisme en ce que la capacité d'accueil fait relever le projet de la réglementation des établissements recevant du public ;

- le permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions de l'article L. 342-2 du code du tourisme en ce qu'il ne vise aucune convention entre la commune et M. A... ;

- le projet ne respecte pas les dispositions de l'alinéa 2 de l'article UA 3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de la Côte-d'Arbroz en ce que le terrain d'assiette des constructions n'est desservi que par un simple chemin de terre, dépourvu de tout aménagement et dont la largeur serait inférieure à 4 mètres ;

- le projet méconnaît les dispositions de l'article UA 13 du même règlement qui imposent d'aménager les espaces libres ;

- le projet méconnaît les dispositions de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme en ce qu'il ne comporte aucune prescription de nature à préserver les espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard.

L'affaire a été dispensée d'instruction en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- la directive 85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985 ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

L'association requérante ayant été régulièrement avertie du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christine Psilakis, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public,

- et les observations de Me C... pour l'association de défense et de protection de l'environnement des pays de Savoie ;

1. Considérant que la société Laturne et l'association de défense et de protection de l'environnement des pays de Savoie ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2013 par lequel le maire de la commune de la Côte-d'Arbroz a accordé à M. A... un permis de construire pour l'édification d'une maison individuelle ; que, par un jugement du 19 mai 2016, le tribunal a rejeté cette demande comme irrecevable pour défaut d'intérêt pour agir ; que l'association de défense et de protection de l'environnement des pays de Savoie relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que, devant les juridictions administratives et dans l'intérêt d'une bonne justice, le juge a toujours la faculté de rouvrir l'instruction, qu'il dirige, lorsqu'il est saisi d'une production postérieure à la clôture de celle-ci ; qu'il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de cette production avant de rendre sa décision et de la viser ; que, s'il décide d'en tenir compte, il rouvre l'instruction et soumet au débat contradictoire les éléments contenus dans cette production qu'il doit, en outre, analyser ; que, dans le cas particulier où cette production contient l'exposé d'une circonstance de fait ou d'un élément de droit dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et qui est susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire, le juge doit alors en tenir compte, à peine d'irrégularité de sa décision ;

3. Considérant, d'une part, qu'il ressort de l'examen de la minute du jugement attaqué que celui-ci vise et analyse le mémoire en réplique de la société Laturne et de l'association de défense et de protection de l'environnement des pays de Savoie enregistré le 10 mai 2015 au greffe du tribunal ; qu'il vise également la note en délibéré qui a été produite par les demandeurs de première instance le 11 mai 2016 ; que cette note, produite après clôture de l'instruction et qui n'a pas été communiquée, n'avait pas à être analysée ;

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 142-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction en vigueur à la date de saisine du tribunal : " Toute association ayant pour objet la protection de la nature et de l'environnement peut engager des instances devant les juridictions administratives pour tout grief se rapportant à celle-ci. " ; que si cette disposition permet aux associations non agréées de protection de l'environnement d'engager des instances devant les juridictions administratives, de telles associations doivent, comme tout requérant, justifier d'un intérêt suffisamment direct leur donnant qualité pour agir ; que, dès lors, les premiers juges n'ont pas méconnu ces dispositions en recherchant si l'objet statutaire de l'association requérante était de nature à lui conférer un intérêt lui donnant qualité pour agir en l'espèce ; que si l'intérêt pour agir d'une association doit être apprécié dans les conditions qui viennent d'être rappelées, la requérante ne saurait soutenir qu'il en résulte une atteinte au droit à un procès équitable garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ; qu'enfin, la requérante ne peut, en tout état de cause, se prévaloir utilement de la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 dans le champ de laquelle l'autorisation d'urbanisme en litige n'entre pas et qui a d'ailleurs été abrogée par l'article 14 de la directive 2011/92 UE du 13 décembre 2011 et n'était donc plus en vigueur à la date à laquelle le recours a été formé ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que l'association de défense et de protection de l'environnement des pays de Savoie, qui n'est pas une association agréée de protection de l'environnement au sens de l'article L. 141-1 du code de l'environnement, a, selon l'article 1er de ses statuts, pour objet statutaire " de conserver et de restaurer les espaces, ressources, milieux et habitats naturels montagnards, les sites, les paysages et le cadre de vie, et d'une manière générale, d'agir pour la sauvegarde de ses intérêts dans le domaine de l'aménagement harmonieux et équilibré du territoire, de l'urbanisme et de l'environnement, ainsi que d'agir et/ou de défendre en justice les intérêts de l'association et de ses membres. Elle exerce son action sur l'ensemble du territoire de la France. " ; qu'eu égard, d'une part, à la généralité de son objet et, d'autre part, au caractère expressément national de son champ d'action, l'association requérante ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de l'arrêté du maire de la commune de la Côte-d'Arbroz du 2 juillet 2013 accordant un permis de construire à M. A... pour un projet de maison individuelle ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association de défense et de protection de l'environnement des pays de Savoie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les frais d'instance :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que l'association requérante demande au titre des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soit mise à la charge de la commune de la Côte-d'Arbroz, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'association de défense et de protection de l'environnement des pays de Savoie est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association de défense et de protection de l'environnement des pays de Savoie.

Copie en sera adressée :

- à la commune de la Côte-d'Arbroz,

- et à M. B... A....

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Yves Boucher, président de chambre,

M. Antoine Gille, président-assesseur,

Mme Christine Psilakis, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 décembre 2017.

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N° 16LY02498

mg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY02498
Date de la décision : 19/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-01-04-02-02 Procédure. Introduction de l'instance. Intérêt pour agir. Existence d'un intérêt. Syndicats, groupements et associations.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: Mme VACCARO-PLANCHET
Avocat(s) : FRECHE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-12-19;16ly02498 ?
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