Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'enjoindre au maire de la commune de Royat de reconstituer sa carrière, de procéder à la liquidation de ses droits et de lui proposer un contrat à durée indéterminée, sous astreinte, de condamner ladite commune à lui verser une indemnité de 40 000 euros avec intérêts et capitalisation, et de faire application des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1401219 du 9 avril 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 9 juin 2015, et des mémoires complémentaires, enregistrés le 16 décembre 2016 et le 30 avril 2017, M. A... B..., représenté par la SCP d'avocats Beaugy Duplessis, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 9 avril 2015 ;
2°) d'enjoindre au maire de la commune de Royat de reconstituer sa carrière et de liquider ses droits, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune de Royat de lui proposer un contrat d'engagement à durée indéterminée, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou de réexaminer sa demande de transformation de son contrat en contrat à durée indéterminée ;
4°) de condamner la commune de Royat à lui verser une indemnité totale de 119 036,20 euros avec intérêts au taux légal à compter de sa demande du 9 janvier 2014 et capitalisation des intérêts ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Royat les entiers dépens ainsi qu'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient :
- au titre de ses conclusions à fin d'injonction, que son poste devrait être requalifié et, compte-tenu de son ancienneté, qu'il devait être rémunéré conformément à la grille indiciaire du cadre d'emploi d'assistant d'enseignement artistique principal de 2ème classe, au 8ème échelon du grade ; que, dès lors que son contrat est aligné sur le décret n° 2012-437 du 29 mars 2012, les dispositions de ce texte s'appliquent à sa situation ; qu'il a pu légitimement refuser la signature d'un contrat moins favorable sur le plan financier et irrégulier en ce qu'il prévoyait l'annualisation de son temps de travail et ne répondait pas aux exigences légales de la circulaire du 12 décembre 2012 ; qu'il justifiait des conditions permettant la transformation de son contrat en contrat à durée indéterminée ; qu'il ne peut lui être reproché de n'avoir pas su, dans le cadre du dispositif de titularisation, démontrer ses compétences alors que son contrat à durée déterminée a été continuellement renouvelé ;
- au titre de ses conclusions indemnitaires, que, même s'il a refusé un contrat à durée indéterminée en 2012, la commune de Royat a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en le maintenant, en méconnaissance de l'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, pendant dix-sept années en situation précaire ; qu'elle a commis une faute en prenant l'engagement illégal, le 30 avril 2014, de lui proposer un poste d'assistant d'enseignement artistique de deuxième classe ; qu'elle a également commis une faute en ne transformant pas la relation de travail en contrat à durée indéterminée aux mêmes conditions que précédemment, exception faite de l'échéance du contrat ; qu'elle a méconnu l'article 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et l'article 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 en ne lui versant pas les primes et indemnités auxquelles il avait droit, en ne prenant pas en compte, dans sa rémunération, le temps de préparation de ses cours et en ne lui fournissant pas le matériel nécessaire à son enseignement ; qu'il a subi à raison de ces fautes un préjudice financier et un préjudice moral.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 septembre 2015, et un mémoire complémentaire, enregistré le 21 avril 2017, la commune de Royat, agissant par son maire en exercice, représentée par Me Marion, avocate (SCP Teillot et Associés), conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. B... le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- à titre principal :
sont irrecevables, la requête, qui ne critique pas le jugement ; les conclusions aux fins d'injonction présentées sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ; les prétentions indemnitaires, en ce qu'elles tendent à la réparation d'un préjudice financier, nouvelles au regard de la demande préalable ;
- à titre subsidiaire :
il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de requalification du poste en assistant d'enseignement artistique principal de 2ème classe, dès lors qu'elle a proposé à M. B... de mentionner sur son contrat qu'il enseignait la guitare ;
- le requérant, agent non titulaire, ne peut revendiquer ni le bénéfice d'une évolution de sa rémunération selon les grilles indiciaires applicables aux fonctionnaires, ni le volume horaire hebdomadaire prévu par le décret du 29 mars 2012, qui concerne les fonctionnaires territoriaux ;
- le décret du 15 février 1988, qui lui est applicable comme agent non titulaire, ne détermine aucune modalité de rémunération ; celle qui lui est proposée n'est donc pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la commune a rempli ses obligations à l'égard du requérant au titre de la résorption de l'emploi précaire ;
- la proposition de contrat à durée indéterminée faite à l'intéressé au cours de l'été 2012, en ce qu'elle prévoyait une durée de service de treize heures, était justifiée par la diminution du nombre d'élèves inscrits dans la classe de guitare ;
- l'intéressé ne bénéficiait d'aucun droit au renouvellement de son contrat ; il est seul responsable du fait qu'aucune solution pérenne n'a pu être définie ;
- elle n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ;
- le requérant, qui indique être au chômage, ne justifie pas du préjudice financier allégué ;
- le requérant est à l'origine des préjudices qu'il allègue.
L'instruction a été close le 19 mai 2017 par ordonnance du 24 avril 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée, portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 modifié, pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale ;
- le décret n° 2012-437 du 29 mars 2012 portant statut particulier du cadre d'emplois des assistants territoriaux d'enseignement artistique ;
- le décret n° 2012-1293 du 22 novembre 2012 pris pour l'application du chapitre II du titre Ier de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Marc Clément, rapporteur public ;
1. Considérant que M. B..., qui a été recruté le 11 octobre 1996 par contrat à durée déterminée comme assistant territorial d'enseignement artistique pour enseigner la guitare à l'école de musique de la commune de Royat pour l'année scolaire 1996-1997 et dont le contrat a ensuite été renouvelé chaque année, a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'enjoindre au maire de cette commune, sous astreinte, de reconstituer sa carrière à compter de l'entrée en vigueur du décret du 29 mars 2012 portant statut particulier du cadre d'emplois des assistants territoriaux d'enseignement artistique, de procéder à la liquidation de ses droits et de lui proposer un contrat à durée indéterminée, de condamner ladite commune à lui verser une indemnité de 40 000 euros avec intérêts et capitalisation, et de faire application des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il relève appel du jugement du 9 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande et porte ses conclusions indemnitaires à la somme totale de 119 036,20 euros ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
2. Considérant qu'en dehors des cas prévus par les articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, dont les conditions d'application ne sont pas remplies en l'espèce, il n'appartient pas aux juridictions administratives d'adresser des injonctions à une autorité administrative ; que, par suite, les conclusions par lesquelles M. B... demande à la cour, à titre principal, qu'il soit enjoint à la commune de Royat de reconstituer sa carrière, de liquider ses droits et de lui proposer un contrat d'engagement à durée indéterminée, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, sont irrecevables et doivent, dès lors, être rejetées ;
Sur les conclusions à fin d'indemnisation :
3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, le 3 janvier 2006, M. B... a demandé la transformation de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, ce que la commune a refusé par un courrier du 10 mars 2006 qui n'a pas été contesté par l'intéressé, au motif qu'il ne remplissait pas les conditions prévues par l'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; que M. B... n'allègue ni n'établit qu'il remplissait les conditions pour se voir proposer un contrat à durée indéterminée sur le fondement de ces dispositions ; que, dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que la commune de Royat aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité en l'ayant recruté à chaque rentrée scolaire, de 1996 à 2012, par un contrat à durée déterminée ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 21 de la loi du 12 mars 2012 susvisée : " A la date de publication de la présente loi, la transformation de son contrat en contrat à durée indéterminée est obligatoirement proposée à l'agent contractuel, employé par une collectivité territoriale ou un des établissements publics mentionnés à l'article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée conformément à l'article 3 de la même loi, dans sa rédaction antérieure à celle résultant de la présente loi, qui se trouve en fonction ou bénéficie d'un congé prévu par le décret pris en application de l'article 136 de ladite loi. (...) " ; qu'aux termes de l'article 22 de la même loi : " Le contrat proposé en application de l'article 21 de la présente loi à un agent employé sur le fondement des deux premiers alinéas de l'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, dans sa rédaction antérieure à celle résultant de la présente loi, peut prévoir la modification des fonctions de l'agent, sous réserve qu'il s'agisse de fonctions du même niveau de responsabilités. L'agent qui refuse cette modification de fonctions reste régi par les stipulations du contrat en cours à la date de publication de la présente loi. " ;
5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que la commune a pu légalement décider que la transformation du contrat de M. B... à durée déterminée en contrat à durée indéterminée serait accompagnée d'une modification de ses fonctions ; que M. B... n'allègue ni n'établit que celles qui lui ont été proposées dans le cadre de la proposition de contrat à durée indéterminée qui lui a été faite le 13 septembre 2012 ne correspondaient pas à des fonctions du même niveau de responsabilité, au sens des dispositions précitées de l'article 22 de la loi du 12 mars 2012, que celles qu'il exerçait antérieurement ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la commune de Royat aurait commis une faute en ne transformant pas la relation de travail en contrat à durée indéterminée aux mêmes conditions que précédemment, exception faite de l'échéance du contrat ;
6. Considérant, en troisième lieu, que M. B... a, le 23 septembre 2013, refusé de signer le contrat à durée déterminée qui lui était proposé pour l'année scolaire 2013-2014 au motif que ses fonctions y étaient toujours décrites comme "assistant d'enseignement artistique", alors que ce contrat aurait dû, selon lui, mentionner les fonctions d'assistant d'enseignement principal de 2ème classe, qui correspondent mieux à l'activité d'enseignement qu'il exerce ; que, dans sa demande préalable adressée à la commune le 9 janvier 2014, il demandait notamment de "fixer sa qualification au grade d'assistant d'enseignement artistique principal de 2ème classe" ; que M. B..., auquel il n'a pas été proposé de nouveau contrat au mois de septembre 2014, n'est pas fondé à soutenir que le maire de Royat aurait, par son courrier du 30 avril 2014 l'informant qu'il était en mesure de lui proposer un poste d'assistant d'enseignement de 2ème classe à la prochaine rentrée scolaire, commis une faute susceptible d'engager la responsabilité de la commune, dès lors que, par un tel courrier, le maire s'est borné à préciser que la modification, conforme aux voeux de l'intéressé, du descriptif de ses fonctions porté sur son contrat de travail était possible et ne peut être regardé comme ayant formulé une promesse non tenue, pris l'engagement de lui proposer un poste à la rentrée scolaire, ou donné une assurance qui ne pouvait être légalement respectée ;
7. Considérant, en quatrième et dernier lieu, que M. B... ne précise pas la nature et le fondement juridique des indemnités et primes dont il prétend avoir été illégalement privé et n'établit pas que la commune de Royat l'aurait privé du matériel nécessaire à son enseignement ; qu'en outre, il ne résulte pas de ses contrats, qui prévoyaient à ce titre un forfait de dix heures, que la commune n'aurait pas rémunéré le temps de préparation de ses activités ; que le requérant n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la commune aurait méconnu les articles 136 et 20 des lois susvisées du 26 janvier 1984 et du 13 juillet 1983 ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions indemnitaires présentées par M. B... au titre des préjudices moral et financier qui auraient résulté des fautes commises par la commune de Royat à son égard doivent être rejetées ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Royat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. B... de la somme demandée au titre des frais non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme que demande la commune de Royat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Royat tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Royat.
Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 5 décembre 2017 à laquelle siégeaient :
M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller,
M. Samuel Deliancourt, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 décembre 2017.
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N° 15LY01927