La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/12/2017 | FRANCE | N°16LY01382

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 05 décembre 2017, 16LY01382


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M.A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2009, 2010 et 2011, ainsi que des intérêts de retard et majorations y afférents.

Par un jugement n° 1402891 du 3 mars 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Pr

océdure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 avril et 18 ao...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M.A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2009, 2010 et 2011, ainsi que des intérêts de retard et majorations y afférents.

Par un jugement n° 1402891 du 3 mars 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 avril et 18 août 2016, M. B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 mars 2016 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et intérêts de retard et majorations y afférents ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. B... soutient que :

- l'administration n'apporte pas la preuve qu'il aurait été astreint à la production de déclarations de taxe sur la valeur ajoutée et de bénéfices industriels et commerciaux et pouvait, à défaut, être taxé d'office ;

- la plupart des versements constatés sur son compte en banque sont relatifs à des remboursements d'emprunts et il n'a jamais reconnu avoir exercé l'activité d'achat et revente de pièces ;

- le jugement est entaché d'omission à statuer faute d'avoir répondu au moyen tiré de ce que l'administration n'a pas donné d'indication sur sa méthode extracomptable de reconstitution du résultat et du chiffre d'affaire ;

- l'administration est tenue d'informer le contribuable taxé d'office de sa méthode de reconstitution du résultat ;

- le taux de charges retenu est insuffisant.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 4 juillet 2016 et le 19 septembre 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- il résulte des pièces produites que le requérant a bien reconnu avoir eu une activité d'achat et revente de pièces en or et le caractère habituel de cette activité a été démontré eu égard à la fréquence des opérations et à leur montant ;

- le contribuable a été informé de la méthode de reconstitution de son chiffre d'affaire et de son résultat imposable ;

- le requérant n'apporte aucun élément permettant de considérer les sommes reçues sur son compte comme relatives au remboursement d'emprunts.

Par ordonnance du 22 septembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 22 novembre 2016.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vinet, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public.

1. Considérant que M. B...a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, à l'issue duquel l'administration fiscale a estimé que l'intéressé s'était livré à une activité occulte de revente de pièces d'or au titre des années 2009, 2010 et 2011 ; que des rappels en matière de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ont été mis en recouvrement le 31 octobre 2013 ; que sa réclamation préalable ayant été rejetée, M. B...a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011, ainsi qu'à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009 ; qu'il relève appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté sa demande ;

2. Considérant que M. B...ne conteste pas l'irrecevabilité que le tribunal administratif a opposé à ses conclusions relatives aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu des années 2010 et 2011 et de contributions sociales des années 2009, 2010 et 2011 qui n'ont fait l'objet d'aucune mise en recouvrement ; qu'ainsi, ses conclusions tendant à la décharge de ces impositions doivent être rejetées ;

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 34 du code général des impôts : " Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale. " ; que l'accomplissement à titre professionnel d'actes réputés de commerce par la loi commerciale est une activité commerciale au sens de l'article 34 du code général des impôts ; que l'article L. 110-1 du code de commerce répute actes de commerce tout achat de biens meubles pour les revendre, soit en nature, soit après les avoir travaillés et mis en oeuvre ;

4. Considérant, d'autre part, que selon l'article 256 A du code général des impôts : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au cinquième alinéa(...) / Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est notamment considérée comme activité économique une opération comportant l'exploitation d'un bien meuble corporel ou incorporel en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence. " ; qu'enfin en vertu de l'article 256 de ce code : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel... " ;

5. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales : " Lorsque, au cours d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, sont découvertes des activités occultes ou mises en évidence des conditions d'exercice non déclarées de l'activité d'un contribuable, l'administration n'est pas tenue d'engager une vérification de comptabilité pour régulariser la situation fiscale du contribuable au regard de cette activité. " ; que les dispositions de l'article L. 73 du même livre précisent que : " Peuvent être évalués d'office : 1° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales (...) " ; que les dispositions de l'article L. 66 du même livre précisent que : " Sont taxés d'office : 1° à l'impôt sur le revenu, les contribuables qui n'ont pas déposé dans le délai légal la déclaration d'ensemble de leurs revenus ou qui n'ont pas déclaré, en application des articles 150-0 E et 150 VG du code général des impôts, les gains nets et les plus-values imposables qu'ils ont réalisés, sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 67 ; (...) 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes ; " ; que les dispositions de l'article L. 67 du même livre précisent que : " La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. Toutefois, le délai de régularisation est fixé à quatre-vingt-dix jours pour la présentation à l'enregistrement de la déclaration mentionnée à l'article 641 du code général des impôts. " ;

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 169 du même livre précisent que : " L'activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite. " ;

7. Considérant que la charge de la preuve d'établir l'existence d'une activité commerciale occulte pèse sur l'administration ; qu'afin d'établir l'existence d'actes de commerce réalisés à titre professionnel, par opposition à ceux qui relèvent de la gestion du patrimoine, il convient de se fonder sur le nombre, l'importance et la fréquence des opérations effectuées durant les années en litige ainsi que sur la brièveté des délais séparant certains achats de leur revente ;

8. Considérant que, pour estimer que M. B...s'est livré à une activité commerciale occulte au cours des années 2009, 2010 et 2011, l'administration s'est fondée sur la circonstance que ses relevés bancaires faisaient apparaitre des encaissements non expliqués à hauteur de 49 397,48 euros pour l'année 2009, correspondant à 19 opérations, 7 125 euros pour l'année 2010, correspondant à 8 opérations, et 18 115 euros pour l'année 2011, correspondant à 21 opérations, et sur le fait que le requérant a indiqué avoir acquis en 2009 des pièces d'or auprès de la société Icar dont il aurait revendu certaines ; que, toutefois, s'agissant de l'année 2011, les opérations sélectionnées par l'administration pour reconstituer le résultat et le chiffre d'affaires réalisé concernent, pour cinq d'entre elles, des montants très faibles, compris entre 0,33 euros et 11 euros, qui ne peuvent être regardées comme correspondant à la revente de pièces d'or ; que, pour l'ensemble des années, l'administration se borne à alléguer que le contribuable a lui-même identifié, dans ses relevés bancaires, les opérations correspondant à la vente de pièces d'or, ce que ce dernier conteste et qui ne résulte pas de l'instruction ; que l'administration n'apporte aucun autre élément pour justifier le choix des encaissements qu'elle a retenus comme correspondant à des actes de commerce ; que l'administration n'a, par ailleurs, pas été en mesure d'identifier précisément l'année d'acquisition des pièces qui auraient été revendues, à l'exception d'une acquisition de pièces d'or en 2009 pour un montant de 12 200 euros admise par le contribuable lui-même ; qu'ainsi, il n'est pas possible de connaitre la durée de détention des pièces revendues au titre des trois années en litige ; qu'en supposant même qu'elles aient été toutes acquises au début de l'année 2009, la durée de détention ne saurait être regardée comme brève pour les pièces revendues courant 2010 et en 2011 ; que s'agissant de l'année 2010, un nombre de 8 opérations pour un montant de 7 125 euros ne peut être regardé comme important ; que si les explications du requérant relatives à la provenance des fonds présents sur ses comptes bancaires en 2009 sont dépourvues de justificatifs, de précisions suffisantes et même de vraisemblance, l'administration ne peut être regardée comme apportant la preuve, en l'espèce, de l'exercice par M. B...d'une activité occulte de commerce de pièces d'or exercée à titre professionnel ;

9. Considérant, par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens soulevés par M.B..., que ce dernier est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a refusé de faire droit à sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2009, ainsi que des majorations et intérêts de retard y afférents ;

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. B...dans l'instance et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : M. B...est déchargé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2009, ainsi que des majorations et intérêts de retard y afférents.

Article 2 : Le jugement n° 1402891 du 3 mars 2016 du tribunal administratif de Grenoble est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros à M. B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. B...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Menasseyre, président assesseur,

Mme Vinet, premier conseiller,

Lu en audience publique le 5 décembre 2017.

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Le greffier,

2

N° 16LY01382


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY01382
Date de la décision : 05/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Camille VINET
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : ARBOR TOURNOUD PIGNIER WOLF

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-12-05;16ly01382 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award