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02/11/2017 | FRANCE | N°16LY00420

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 02 novembre 2017, 16LY00420


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Le cercle de la base de défense de Valence a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la société Foresta à lui verser la somme de 27 084,45 euros en réparation des désordres affectant les six auvents installés par cette société et à ce que la somme de 5 000 euros, comprenant les frais d'huissier et d'expertise, soit mise à sa charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1301516 du 30 novembre 2015, le tribunal administratif de Greno

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Le cercle de la base de défense de Valence a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la société Foresta à lui verser la somme de 27 084,45 euros en réparation des désordres affectant les six auvents installés par cette société et à ce que la somme de 5 000 euros, comprenant les frais d'huissier et d'expertise, soit mise à sa charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1301516 du 30 novembre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a condamné la société Foresta à verser au cercle de la base de défense de Valence la somme de 26 060 euros en réparation des désordres affectant les six auvents et de son préjudice consistant en des frais d'expertise amiable et un constat d'huissier.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 2 février, 27 juillet et 4 octobre 2016, la société Foresta, représentée par MeB..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 30 novembre 2015 ;

2°) de rejeter la demande du cercle de la base de défense de Valence ;

3°) à titre subsidiaire, de limiter sa responsabilité eu égard à l'exception de force majeure ;

4°) de mettre à la charge du cercle de la base de défense de Valence la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a retenu la compétence de la juridiction administrative en considérant que le contrat passé avec le cercle de la base de défense de Valence constituait un marché public ; par ailleurs, les auvents affectés par les désordres ne constituent pas des ouvrages publics ;

- elle est fondée à invoquer la force majeure pour s'exonérer de sa responsabilité ;

- aucune faute ne peut lui être reprochée, en l'absence de cahier des charges mentionnant des sujétions spéciales en cas de vent violent ;

- une atteinte à la solidité de l'ouvrage n'a pas été retenue par l'expert ;

- elle a exécuté l'ordre du cercle de procéder à l'enlèvement de tous les auvents, alors même que seuls 4 d'entre eux avaient été endommagés ;

- le préjudice du cercle de la base de défense de Valence ne peut excéder la somme de 22 500 euros qui correspond au montant estimé par l'expert de la perte des auvents et à celui de la demande préalable indemnitaire.

Par une mémoire en défense, enregistré le 1er juin 2016, le cercle de la base de défense de Valence, représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête, à la réformation du jugement attaqué en ce qu'il a évalué ses préjudices à la somme de 26 060 euros et rejeté ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à ce que la somme de 3 600 euros soit mise à la charge de la société Foresta au titre de ces dispositions.

Il fait valoir que :

- la juridiction administrative est compétente pour connaître du litige né de l'exécution d'un contrat administratif, d'autant que les auvents constituent des ouvrages publics ;

- la cause exclusive des désordres réside dans un défaut de respect des règles de l'art et du choix des vis non adaptées au dimensionnement des ouvrages ;

- l'atteinte à la solidité de l'ouvrage n'est pas sérieusement contestée par la société Foresta ;

- les désordres n'étaient pas visibles lors de la réception de l'ouvrage ;

- la force majeure ne peut être retenue ;

- c'est à tort que le tribunal a réduit le quantum du coût des ouvrages en raison d'une vétusté.

Par ordonnance du 10 octobre 2016, l'instruction a été close au 27 octobre 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics, alors applicable ;

- le code civil ;

- le code de la défense ;

- la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Michel, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public ;

1. Considérant que le cercle mess de la base de défense de Valence a acquis auprès de la société Foresta six auvents en bois pour un prix de 25 974 euros TTC ; que ces auvents ont été livrés et mis en place par la société Foresta le 5 juillet 2010 ; que lors d'une période de forts vents fin avril 2012, quatre des auvents ont été entièrement détruits et la solidité des deux autres altérée ; que le cercle de la base de défense de Valence, venu aux droits du cercle mess, a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande pour faire reconnaître la responsabilité de la société Foresta sur le fondement de la garantie décennale ; que, par un jugement du 30 novembre 2015, ce tribunal a fait droit pour partie aux conclusions du cercle de la base de défense de Valence, en condamnant la société Foresta à lui verser la somme de 26 060 euros en réparation des désordres affectant les six auvents et de son préjudice consistant en des frais d'expertise amiable et un constat d'huissier ; que la société Foresta relève appel de ce jugement ; que le cercle de la base de défense de Valence par la voie de l'appel incident demande la réformation du jugement attaqué en ce qu'il a limité la condamnation de la société Foresta à lui verser la somme de 26 060 euros en réparation de ses préjudices ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du code des marchés publics, alors applicable : " Les marchés publics sont les contrats conclus à titre onéreux entre les pouvoirs adjudicateurs définis à l'article 2 et des opérateurs économiques publics ou privés, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services (...) " ; qu'aux termes de l'article 2 du même code : " Les pouvoirs adjudicateurs soumis au présent code sont : 1° L'Etat et ses établissements publics autres que ceux ayant un caractère industriel et commercial (...) " ; qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes à caractère économique et financier, dans sa rédaction applicable au litige : " Les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 3412-1 du code de la défense : " Les cercles et les foyers dans les armées, établissements publics à caractère administratif à vocation sociale et culturelle, procurent aux militaires membres de droit et aux membres adhérents des possibilités de relations, d'entraide, d'information et de loisirs (...). Ces établissements publics sont placés sous la tutelle du ministre de la défense " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions, d'une part, que les marchés entrant dans le champ d'application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs et, d'autre part, que le cercle mess de la base de défense de Valence est au nombre des pouvoirs adjudicateurs visés à l'article 2 du code des marchés publics et soumis à ce code ; que, dès lors, le contrat conclu entre ce cercle mess et la société Foresta pour la fourniture et l'installation de six auvents est au nombre des marchés publics définis à l'article premier de ce code ; qu'en conséquence, et quelles que soient les modalités selon lesquelles il a été effectivement conclu, le litige relatif à l'exécution de ce contrat administratif relève de la compétence de la juridiction administrative ;

Sur la responsabilité décennale :

4. Considérant qu'il résulte des principes qui régissent la responsabilité décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans ; que le constructeur dont la responsabilité est recherchée sur ce fondement ne peut en être exonéré, outre les cas de force majeure et de faute du maître d'ouvrage, que lorsque, eu égard aux missions qui lui étaient confiées, il n'apparaît pas que les désordres lui soient en quelque manière imputables ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces produites en 1ère instance que la réception des auvents litigieux est intervenue le 21 janvier 2011 et était assortie de deux réserves qui ne portaient pas sur la solidité des ouvrages ; que les désordres sont apparus à la fin du mois d'avril 2012 ; que si la société Foresta soutient que ces auvents ne constituent pas des ouvrages mais des structures légères et démontables, il résulte cependant de l'instruction que la société Foresta qui a fourni au cercle de la base de défense de Valence les six auvents en bois litigieux les a ancrés au moyen de platines vissées dans des plates-formes en béton armé, réalisées trois mois auparavant par une autre entreprise et spécialement pour la mise en place de ces auvents ; que les ouvrages ainsi réalisés sont soumis à la garantie décennale ; qu'il résulte de l'expertise amiable réalisée contradictoirement par l'expert du cercle de la base de défense de Valence que quatre des six ouvrages ont été entièrement détruits et que la solidité des deux autres, encore sur pieds, est compromise ; qu'il résulte également de cette expertise que les désordres affectant ces auvents trouvent leur origine dans plusieurs éléments constructifs ; que l'imputabilité de ces désordres à la prestation de fourniture et d'installation confiée à la société Foresta est ainsi établie ; qu'il ne ressort pas des pièces produites par celle-ci que la tempête qui a balayé toute la France les 28 et 29 avril 2012 ait présenté un caractère exceptionnel ; qu'elle n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif n'a pas retenu la survenance de ces " vents violents ", qui n'ont pas présenté le caractère d'un évènement de force majeure, pour l'exonérer de sa responsabilité ;

Sur le préjudice :

6. Considérant que le tribunal administratif, en tenant compte de la vétusté des auvents qui n'est pas contestée par le cercle de la base de défense de Valence et de leurs équipements électriques, a justement fixé le montant du préjudice résultant des désordres en l'évaluant à la somme de 23 700 euros ; que la société Foresta a également été condamnée à indemniser le cercle des frais d'expertise amiable et d'huissier exposés, qui n'ont pas été inclus dans les frais d'instance, à hauteur de 2 360 euros ; que ce montant n'est pas contesté ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

En ce qui concerne les frais exposés par le cercle devant le tribunal administratif de Grenoble :

7. Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a jugé qu'il n'y avait pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée par le cercle de la base de défense de Valence tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de la société Foresta en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le tribunal administratif ait fait une inexacte appréciation de la demande présentée par le cercle de la base de défense de Valence qui n'est dès lors pas fondé à contester le jugement attaqué sur ce point ;

En ce qui concerne les frais exposés devant la cour :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre de la base de défense de Valence, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Foresta demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société Foresta une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le centre de la base de défense de Valence et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Foresta est rejetée.

Article 2 : La société Foresta versera au cercle de la base de défense de Valence une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions du cercle de la base de défense de Valence est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Foresta et au cercle de la base de défense de Valence.

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2017, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président assesseur,

Mme Lesieux, premier conseiller.

Lu en audience publique le 2 novembre 2017.

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N° 16LY00420


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY00420
Date de la décision : 02/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-03 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité biennale.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : GERIGNY et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 07/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-11-02;16ly00420 ?
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