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19/10/2017 | FRANCE | N°16LY03429

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 19 octobre 2017, 16LY03429


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 13 avril 2016 par lesquelles le préfet de la Nièvre a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1601434 du 11 juillet 2016, le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 14 octobre 2016, M.B..., représenté par la SCP Bon de Saulce Latour, demande à la Cour :
r>1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Dijon du 11 juillet 2016 ;

2°) d'annuler les d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 13 avril 2016 par lesquelles le préfet de la Nièvre a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1601434 du 11 juillet 2016, le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 14 octobre 2016, M.B..., représenté par la SCP Bon de Saulce Latour, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Dijon du 11 juillet 2016 ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de la Nièvre du 13 avril 2016 lui refusant un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision lui refusant un titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et que les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision du même jour rejetant sa demande de renouvellement de son titre de séjour ;

- cette décision méconnaît l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 novembre 2016, le préfet de la Nièvre conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la requête, qui se borne à reproduire intégralement le mémoire de première instance et à se référer aux mêmes productions que devant le tribunal administratif, est irrecevable ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par décision du 5 octobre 2016, M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Côte d'Ivoire relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Abidjan le 21 septembre 1992 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Lesieux.

1. Considérant que M.B..., ressortissant ivoirien né en 1976, est entré régulièrement en France le 31 octobre 2011 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa "Schengen" de court séjour portant la mention " missions ", délivré par les autorités italiennes, valable 30 jours du 10 octobre au 11 novembre 2011 ; que le 18 janvier 2016, il a sollicité notamment le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par décisions du 13 avril 2016, le préfet de la Nièvre a refusé de faire droit à sa demande et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. B...relève appel du jugement du 11 juillet 2016 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande dirigée contre ces décisions ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le refus de séjour :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 10 de convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Côte d'Ivoire relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Abidjan le 21 septembre 1992 : " Pour tout séjour sur le territoire français devant excéder trois mois, les ressortissants ivoiriens doivent posséder un titre de séjour. (...) Ces titres de séjour sont délivrés conformément à la législation de l'Etat d'accueil. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ;

3. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, dans son avis du 25 mars 2016, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, que l'intéressé ne peut avoir accès, dans son pays d'origine, à un traitement approprié et que les soins nécessités par son état de santé présentent un caractère de longue durée ; que le préfet de la Nièvre, qui n'est pas lié par cet avis, a refusé la délivrance du titre sollicité en se fondant sur la liste de médecins généralistes et spécialistes établie par le Consul général de France à Abidjan le 11 mai 2015 et un courriel du 20 novembre 2015 émanant d'un centre médico-chirurgical d'Abidjan ; qu'il ressort de ces documents que les institutions sanitaires de ce pays sont en mesure de traiter la majorité des maladies courantes ainsi que des pathologies ophtalmiques ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. B... souffre d'un glaucome bilatéral, qu'il a perdu la fonction de son oeil droit et que le champ visuel de son oeil gauche est limité à un petit îlot central ; que selon les certificats médicaux qu'il produit, il a subi deux opérations chirurgicales de l'oeil gauche, plusieurs thérapies locales à base d'antiglocomateux et deux séances de laser SLT ; que sa pathologie nécessite un suivi médical régulier ; que toutefois, M. B...n'apporte pas plus en appel qu'en première instance, d'éléments permettant d'établir qu'il ne pourrait pas bénéficier, en Côte d'Ivoire, de soins appropriés à son état de santé, alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'une prise en charge et des traitements existent et sont accessibles dans ce pays s'agissant des pathologies ophtalmiques ; que s'il produit un document établi par l'Organisation mondiale de la santé faisant état de la situation sanitaire et sociopolitique de ce pays ainsi que du développement du commerce illicite de médicaments, ces considérations, présentées en des termes généraux, ne sont pas de nature à établir que le requérant, eu égard à sa pathologie et au traitement que son état de santé nécessite, ne pourrait pas bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées lui a reconnu un taux d'incapacité compris entre 50 et 79 % et la qualité de travailleur handicapé du 1er juin 2015 au 31 mai 2020, qu'il bénéficie de l'allocation aux adultes handicapés, que malgré cette situation, il a suivi plusieurs formations et qu'il bénéficierait d'une promesse d'embauche, au demeurant non datée, ne suffisent pas à établir que le préfet de la Nièvre aurait entaché sa décision de refus de séjour d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant qu'en l'absence de démonstration de l'illégalité de la décision du 13 avril 2016 portant refus de séjour, M. B...n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de cette décision pour en déduire par voie de conséquence l'illégalité de son éloignement ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant qu'en se bornant à soutenir qu'il a noué de nombreux liens avec la France, sans apporter la moindre pièce justificative, M. B...n'établit pas que le préfet de la Nièvre aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en l'obligeant à quitter le territoire français et ce, dès lors, qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, l'intéressé est entrée en France en 2011, qu'il n'y dispose d'aucune famille et qu'il a vécu en Côte d'Ivoire jusqu'à l'âge de 36 ans où il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; qu'il s'ensuit que ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Nièvre.

Délibéré après l'audience du 28 septembre 2017, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Lesieux, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 octobre 2017.

5

N° 16LY03429


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY03429
Date de la décision : 19/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SCP BON - DE SAULCE LATOUR

Origine de la décision
Date de l'import : 31/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-10-19;16ly03429 ?
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