Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par trois demandes, l'EURL Hydrologic a demandé au tribunal administratif de Grenoble de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 novembre 2008 et 2009, le remboursement des crédits d'impôt recherche dégagés au titre des années 2010 et 2011.
Par un jugement nos 1300211, 1303634 et 1306397 du 28 mai 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 août 2015, l'EURL Hydrologic demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 28 mai 2015 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge, ainsi que le remboursement des crédits d'impôts dégagés au titre des années 2010 et 2011 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
L'EURL Hydrologic soutient que :
- les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ont été méconnues faute pour l'administration d'avoir indiqué dans la proposition de rectification la nature de la procédure retenue pour faire sa demande auprès de la délégation régionale à la recherche et à la technologie de Rhône-Alpes et d'avoir fourni les précisions requises sur la nature des documents ayant servi à fonder l'avis de la délégation régionale ;
- la condition de nouveauté exigée par l'article 244 B quater du code général des impôts est bien remplie, à la fois par la centrale d'acquisition Hydro 500 et l'appareil de mesure Hydro 1000, les recherches y afférentes relevant de la catégorie du développement expérimental ;
- l'avis de la délégation régionale à la recherche et à la technologie de Rhône-Alpes n'ayant pas de valeur probante et ne portant que sur la centrale d'acquisition Hydro 500, il ne peut lui être opposé ;
- les deux projets sont tout à fait distincts et l'administration aurait dû lui demander des précisions sur tous les points où elle s'estimait insuffisamment renseignée ;
- le tribunal n'ayant pas motivé sa décision de ne pas ordonner l'expertise judiciaire qui était sollicitée, il est insuffisamment motivé ce qui le rend irrégulier ;
Par un mémoire en défense enregistré le 10 février 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition n'est opérant que pour les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des années 2008 et 2009, pour lesquelles il n'est pas fondé ;
- les éléments apportés par la requérante ne sont pas de nature à démontrer que ses activités remplissent la condition de nouveauté les rendant éligibles au crédit d'impôt recherche ;
- la requérante ne peut se prévaloir de l'interprétation administrative du 12 septembre 2012, postérieure aux années en litige, laquelle en tout état de cause ne donne pas de la loi une interprétation différente de celle dont il a été fait application ;
- le tribunal administratif n'avait pas à ordonner une expertise qui aurait été frustratoire compte tenu des éléments fournis.
Par des mémoires en réplique enregistrés les 16 mars, 16 août et 7 octobre 2016, l'EURL Hydrologic conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens. Elle soutient en outre que :
- le nom de l'agent ayant rédigé le rapport rendu par la délégation régionale à la recherche et à la technologie n'ayant pas été porté à sa connaissance, elle a été privée de la possibilité de vérifier son impartialité ce qui rend la procédure irrégulière ;
- le rapport qu'elle produit en appel contient de nombreux graphes, schémas, exemples et formules, qui étayent les travaux menés par son bureau d'étude et démontrent que les travaux litigieux ne sont pas des travaux d'amélioration de l'ergonomie mais des travaux de mise au point d'ergonomie de l'interface de programmation locale client Web, laquelle interface n'existait pas au préalable ;
- l'expert qui a analysé son rapport a manqué lui-même de précision et une expertise judiciaire est nécessaire, ce que confirme l'introduction d'une nouvelle garantie pour les contribuables en matière de crédit d'impôt recherche consistant en la possibilité de saisir le comité consultatif du crédit d'impôt pour dépense de recherche.
Par un mémoire enregistré le 2 décembre 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements accordés à l'EURL Hydrologic et au rejet du surplus de ses conclusions.
Il soutient que :
- il n'existait aucun expert dont l'identité et le rapport auraient été susceptibles d'être communiqués à la société requérante, laquelle n'a d'ailleurs jamais formé de demande en ce sens ;
- après dégrèvements accordés, la fraction désormais non remboursée du crédit d'impôt recherche des années 2008 et 2009 ne résulte pas de la remise en cause de l'éligibilité des dépenses engagées mais uniquement de la correction portant sur le taux forfaitaire des dépenses de fonctionnement, ainsi le moyen tiré de l'impossibilité de vérifier l'impartialité de l'auteur de l'avis critiqué est inopérant.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 28 décembre 2016, l'EURL Hydrologic conclut aux mêmes fins que précédemment.
Elle soutient que les dépenses de fonctionnements à retenir pour servir de base au calcul du droit à crédit d'impôt recherche correspondent à 75 % des dépenses de personnel et non 50 %, auxquelles s'ajoutent 75 % des amortissements.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 17 janvier 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens.
Par ordonnance du 18 janvier 2017, la clôture d'instruction a été reportée au 10 février 2017 à 16h30.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vinet,
- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public.
1. Considérant que l'EURL Hydrologic exerce une activité de conception, de fabrication et de commercialisation d'appareils pour la mesure des niveaux et des débits d'eau dans les écoulements naturels en surface libre ; qu'au titre de son exercice clos le 30 novembre 2009, elle obtenu le remboursement d'une créance de crédit d'impôt recherche d'un montant de 90 568 euros au titre des dépenses engagées au cours de l'année civile 2008 ; qu'au titre de l'exercice suivant, elle a obtenu, au même titre, et pour l'année civile 2009, le remboursement d'une somme de 13 344 euros ; qu'au début de l'année 2012, elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période allant du 1er décembre 2008 au 30 novembre 2010, le contrôle ayant été étendu jusqu'au 31 octobre 2011 en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'au cours de la vérification, l'administration a invité la société à remplir un questionnaire en vue d'apprécier si le projet pour lequel elle avait obtenu le bénéfice du crédit d'impôt recherche y était bien éligible ; que ce questionnaire et ses pièces jointes ont été transmis à la délégation régionale à la recherche et à la technologie (DRRT) de Rhône-Alpes afin de recueillir son avis ; que l'avis rendu le 24 mai 2014 considérait que les dépenses engagées par l'EURL Hydrologic n'étaient pas éligibles au crédit d'impôt recherche ; que l'administration a alors remis en cause le remboursement des créances opéré au titre des années 2008 et 2009, ce qui a généré des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés assortis de majorations ; que ces impositions supplémentaires ont été contestées par la société et sa réclamation préalable a été transmise d'office par l'administration au tribunal administratif de Grenoble ; que, par ailleurs, l'EURL Hydrologic a sollicité, en mars 2012, la restitution d'une somme de 93 216 euros au titre d'un crédit d'impôt recherche pour l'année 2010, et en avril 2013, la restitution d'une somme de 72 733 euros au titre d'un crédit d'impôt recherche pour l'année 2011 ; que, suite au rejet de ces demandes, la société a saisi le tribunal administratif de Grenoble de deux demandes tendant à la restitution immédiate de ces sommes ; que le tribunal administratif de Grenoble a joint les trois demandes et les a rejetées par un unique jugement dont la requérante relève appel ;
2. Considérant qu'aux termes du II de l'article 244 quater B du code général des impôts dans sa version applicable au litige : " I. Les entreprises industrielles et commerciales (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. (...) II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : a) Les dotations aux amortissements des immobilisations, créées ou acquises à l'état neuf et affectées directement à la réalisation d'opérations de recherche scientifique et technique, y compris la réalisation de prototypes ou d'installations pilotes.(...) b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations (...) ; c) les autres dépenses de fonctionnement exposées dans les mêmes opérations (...) " et qu'aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III du même code : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : (...) c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté. " ;
3. Considérant que, par un mémoire produit le 2 décembre 2016, l'administration a indiqué reconnaitre désormais l'éligibilité d'une partie des dépenses dont l'EURL Hydrologic demandait la prise en compte au titre du crédit d'impôt recherche ; que, s'agissant des années 2008 et 2009, elle a prononcé des dégrèvements s'élevant, respectivement, à 88 346 euros et 10 938 euros et, s'agissant des années 2010 et 2011, elle a accepté de rembourser des sommes s'élevant, respectivement, à 85 785 euros et 72 733 euros ; que les sommes restant en litige à l'issue de ces dégrèvements s'élevaient, respectivement pour les années 2008, 2009 et 2010, à 13 780 euros, 1 323 euros et 7 431 euros, soit au total 22 534 euros, aucune somme ne restant en litige pour l'année 2011 ; que, par un mémoire enregistré le 28 décembre 2016, l'EURL Hydrologic a fait valoir que les dépenses de fonctionnement à retenir pour servir de base au calcul du droit à crédit d'impôt recherche correspondaient, pour les trois années restant en litige, à 75 % des dépenses de personnel et non 50 %, auxquelles s'ajoutent 75 % des amortissements ; que le ministre de l'économie et des finances admettant le raisonnement de la requérante, a prononcé des dégrèvements complémentaires pour les années 2008 et 2009, à hauteur de 12 003 euros et 3 100 euros, plus aucune cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés ne restant à la charge de la société pour ces deux années ; qu'il a admis le remboursement d'une somme supplémentaire de 5 136 euros pour l'année 2010, soit 2 295 euros de moins que ce que l'EURL Hydrologic sollicite au titre de cette année ;
4. Considérant que la requête de l'EURL Hydrologic est devenue sans objet à concurrence de l'ensemble des dégrèvements et des restitutions admis par l'administration et décrits au point 3 ci-dessus ;
5. Considérant que la somme de 2 295 euros qui reste en litige au titre de l'année 2010 correspond à une différence d'appréciation entre l'EURL Hydrologic et l'administration s'agissant du montant de dépenses de personnel à retenir comme assiette du crédit d'impôt recherche ; que l'EURL Hydrologic n'expliquant pas en quoi l'administration aurait commis une erreur de calcul en retenant un montant de dépenses de personnel inférieur à celui qu'elle a retenu, le surplus de ses conclusions doit être rejeté ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'EURL Hydrologie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus de sa demande portant sur la somme de 2 295 euros au titre de l'année 2010 ;
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de l'EURL Hydrologie à hauteur de la somme de 278 041 euros.
Article 2 : L'Etat versera à l'EURL Hydrologie la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL Hydrologic et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2017, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Terrade, premier conseiller,
Mme Vinet, premier conseiller.
Lu en audience publique le 3 octobre 2017.
5
N° 15LY02741