Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'ordonner une expertise avant-dire droit aux fins d'évaluation de ses préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux, de condamner l'État à lui verser une provision de 20 000 euros en réparation de ses préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux, la somme de 20 000 euros en réparation de son préjudice moral et la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par le jugement n° 1401736 du 4 novembre 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement le 14 décembre 2015 et le 1er mars 2017, Mme A..., représentée par la SELARL d'avocats Juri Dôme, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 4 novembre 2015 ;
2°) d'ordonner une expertise avant-dire droit aux fins d'évaluation de ses préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux ;
3°) de condamner l'État à lui verser une provision de 20 000 euros en réparation de ses préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux ;
4°) de condamner l'État à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation de son préjudice moral ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme A...soutient que :
- dès lors que les faits de harcèlement moral sont établis, il appartient à l'administration de prendre les mesures nécessaires pour y mettre fin et l'agent reconnu coupable doit faire l'objet de mesures disciplinaires appropriées ; en l'espèce, les agents n'ont été sanctionnés qu'en janvier 2012, alors que les premiers agissements sont intervenus dès la rentrée 2003-2004 et le proviseur de l'établissement a été effectivement alerté en 2009 ;
- le retard pris par l'administration dans le règlement du problème est constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'État ; cette faute est en lien direct avec les préjudices qu'elle a subis ; une expertise est nécessaire pour chiffrer ces préjudices, le tribunal ne s'est pas prononcé à proprement parler sur cette demande ; le maintien de son plein traitement ne couvre pas l'intégralité des préjudices soufferts et ne prend pas en compte son préjudice moral, le principe de l'octroi d'une provision dont le montant est suggéré, n'est pas contestable.
Par un mémoire en défense enregistré le 15 décembre 2016, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête de Mme A....
Le ministre fait valoir que :
- le tribunal administratif n'a pas omis de statuer sur la demande d'expertise ;
- Mme A...ne démontre pas davantage que devant le tribunal administratif que l'administration a commis une faute ; le chef d'établissement, dès qu'il a eu connaissance des faits en 2009, est intervenu auprès des deux professeurs en cause ; aucun élément ne permet d'établir qu'il avait eu connaissance des faits avant qu'elle n'en fasse état devant lui ; le recteur a engagé la procédure disciplinaire dès qu'il a été alerté en 2011 ;
- l'administration n'ayant commis aucune faute, une expertise serait inutile ; Mme A... ne peut se prévaloir de l'existence d'une créance non sérieusement contestable à l'égard de l'État, sa demande de provision sera rejetée tout comme sa demande d'indemnisation.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gondouin,
- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public ;
1. Considérant que Mme A...était, à l'époque des faits, professeur d'économie et de gestion au lycée public Ambroise Brugière à Clermont-Ferrand ; qu'en 2003 / 2004, affectée dans un poste pour donner des enseignements dans les classes de Brevet de technicien supérieur (BTS) en assurance dans ce même lycée, elle a commencé à rencontrer des difficultés avec deux autres enseignantes ; qu'en mars 2009, son état de santé s'étant dégradé, elle en a informé sa hiérarchie qui a diligenté, à l'égard des professeurs concernés, des procédures qui ont abouti à leur mutation d'office ; que, par un courrier du 26 septembre 2014, Mme A... a demandé au recteur de lui accorder une indemnité de 20 000 euros en réparation du préjudice moral subi ; qu'elle a ensuite saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand qui a rejeté sa demande par un jugement du 4 novembre 2015 dont elle relève appel ;
2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 6 quinquiès de la loi ci-dessus visée du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel " ;
3. Considérant que Mme A...rappelle que, dès son affectation dans la filière BTS Assurance en 2003 / 2004, elle a été victime, de la part de deux collègues enseignant dans la même filière, de pressions, critiques, dénigrements auprès des enseignants ou des élèves, tous agissements constitutifs de harcèlement moral ; qu'elle soutient qu'en ne prenant qu'avec retard les mesures nécessaires pour mettre fin à cette situation, l'administration a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'État ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que ce n'est qu'à partir de mars 2009 que Mme A... a informé le chef d'établissement des agissements de ses deux collègues ; qu'elle ne soutient pas que le proviseur aurait eu connaissance de ces faits avant qu'elle ne l'en informe ; qu'une fois informé de l'ambiance délétère qui régnait dans la section de techniciens supérieurs préparatoire au BTS assurance, le proviseur alors en poste a reçu individuellement les deux enseignantes et leur a demandé de modifier leur comportement ; que le nouveau proviseur ayant pris contact avec l'inspection d'académie, les enseignantes ont été inspectées au cours de l'année 2009-2010 ; que, dès le mois de juin 2010, puis en juin de l'année suivante, des réunions sous l'égide du chef d'établissement ont tenté de mettre en place une organisation des équipes susceptibles d'éviter les conflits ; qu'une enquête administrative demandée par le recteur d'académie a rendu ses conclusions le 14 novembre 2011 et que la procédure disciplinaire engagée à l'égard des deux collègues de Mme A...a abouti à des sanctions disciplinaires de déplacement d'office en janvier 2012 ; qu'il résulte en outre de l'instruction que Mme A... a obtenu le bénéfice de la protection fonctionnelle ; qu'ainsi elle n'établit pas que l'administration a trop tardé et, ce faisant, commis une faute dans le règlement de la situation qu'elle subissait ; que la preuve d'une faute de l'administration n'étant pas rapportée, Mme A... n'est pas fondée à demander une indemnisation pour les préjudices qu'elle a subis et qu'elle impute à un retard de l'administration dans le traitement de son dossier ;
5. Considérant que, comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée, les conclusions à fin d'indemnisation présentées par Mme A... doivent être rejetées ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, les conclusions tendant à ce que lui soit octroyée une provision ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 4 novembre 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes ; que, par suite, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...et au ministre de l'éducation nationale.
Délibéré après l'audience du 29 juin 2017 où siégeaient :
Mme Michel, président,
Mme Gondouin, premier conseiller,
Mme Samson-Dye, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 juillet 2017.
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N° 15LY03949