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11/07/2017 | FRANCE | N°15LY03950

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 11 juillet 2017, 15LY03950


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté en date du 30 mars 2015 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours au terme duquel elle pourra être reconduite à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre pays dans lequel elle établirait être légalement admissible.

Par un jugement n° 1505049, en date du 10 novembre 2015, le tribun

al administratif de Grenoble a fait droit à sa demande et a annulé les décisions litigi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté en date du 30 mars 2015 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours au terme duquel elle pourra être reconduite à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre pays dans lequel elle établirait être légalement admissible.

Par un jugement n° 1505049, en date du 10 novembre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a fait droit à sa demande et a annulé les décisions litigieuses en enjoignant au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et en condamnant l'Etat au versement d'une somme de 800 euros au profit de son conseil au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 décembre 2015, le préfet de l'Isère demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 10 novembre 2015 ;

2°) de rejeter la demande de MmeB....

Le préfet de l'Isère soutient que :

En annulant son arrêté du 30 mars 2015 pour violation du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le tribunal administratif de Grenoble a commis, en se fondant sur des pièces établies postérieurement à l'arrêté attaqué, une erreur de droit ; la situation de Mme B...ne justifie ni l'annulation de l'arrêté litigieux, ni l'injonction de délivrance d'un titre de séjour prononcée par le tribunal administratif de Grenoble ; un traitement approprié à son état de santé existe en République de Guinée ; il ne ressort d'aucune pièce du dossier que les médicaments qui lui sont prescrits en France ne pourraient être substitués par des médicaments comportant les mêmes molécules et aux effets thérapeutiques similaires ; en cas de besoin, il est possible d'importer les médicaments de France.

Mme C...B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 février 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Terrade, premier conseiller ;

1. Considérant que, par la présente requête, le préfet de l'Isère relève appel du jugement du 10 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 30 mars 2015 par lequel le préfet a refusé de délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade à Mme B... et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination en cas de reconduite d'office à l'expiration de ce délai, et a enjoint au préfet de l'Isère de délivrer à l'intéressée un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification de sa décision et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et a condamné l'Etat à verser à MeA..., conseil de Mme B..., une somme de 800 euros au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ;

3. Considérant que sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;

4. Considérant, ainsi, que l'étranger qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé indiquant que son état de santé réclame des soins qui ne sont pas disponibles dans son pays d'origine et dont l'absence pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, doit être regardé comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autorité en charge de la délivrance du titre de séjour prévu par l'article L. 313-11, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier si, compte tenu de l'état de santé de l'étranger, un traitement approprié à celui-ci est disponible dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires et des éventuelles mesures d'instruction qu'il peut toujours ordonner ;

5. Considérant que pour annuler l'arrêté préfectoral du 30 mars 2015 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de délivrer le titre de séjour en qualité d'étranger malade sollicité par Mme B..., ressortissante guinéenne née en 1987, et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente en jours en fixant le pays de destination, le tribunal administratif de Grenoble a jugé que le préfet de l'Isère avait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif que la disponibilité d'un traitement approprié à sa pathologie en Guinée n'était pas établie ; qu'il ressort des pièces du dossier que sollicité par le préfet de l'Isère pour se prononcer sur l'état de santé de Mme B..., le médecin de l'agence régionale de santé a estimé dans son avis rendu le 12 février 2014, que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale pendant douze mois dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que le traitement approprié à son état de santé était absent dans son pays d'origine ; qu'après avoir relevé que les décisions attaquées avaient été prises par le préfet de l'Isère plus de douze mois après la notification de cet avis médical, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté litigieux du 30 mars 2015 en se fondant, d'une part, sur des certificats médicaux établis postérieurement et produits par l'intéressée confirmant la nécessité d'une poursuite de son traitement et les conséquences exceptionnelles sur son état de santé en cas d'interruption de ce traitement, et, d'autre part, sur la circonstance que les documents produits par le préfet ne permettaient pas de tenir pour établie la disponibilité d'un traitement approprié à son état de santé en Guinée ;

6. Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B... présente des troubles anxio-dépressifs donnant lieu à une psychothérapie à raison d'une visite médicale mensuelle et d'un traitement médicamenteux combinant des antidépresseurs (mirtazapine et hydroxyzine), un antipsychotique ou neuroleptique atypique (risperidone), des anxiolytiques (alprazolam et oxarépam), et des neuroleptiques (halopéridol et alimémazine) ; que si la requérante soutenait en première instance que les médicaments qui lui sont prescrits en France ne pouvaient être substitués, elle ne l'établit pas ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de la liste des médicaments essentiels de la République de Guinée, dans sa version 2012, élaborée notamment à destination de la pharmacie centrale de Guinée et outil de base pour " le système d'approvisionnement " des pharmacies de ce pays, qu'y sont disponibles des antipsychotiques (dont la risperidone, l'halopéridol et le chlorydrate de chlorpromazine), des antidépresseurs utilisés dans les troubles de l'humeur dont la mirtazapine, la sertraline et la fluoxetine, des anxiolytiques et des neuroleptiques dont l'alprazolam ; qu'en outre, pour refuser de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade, le préfet de l'Isère s'est fondé sur la circonstance qu'au regard des " éléments relatifs aux capacités locales en matière de soins médicaux et de médicaments disponibles en Guinée, des éléments fournis par le ministère français des affaires étrangères ainsi que des éléments fournis en date du 19 septembre 2013 par l'ambassade de France en Guinée qui indiquent que de nombreux centres hospitaliers, hôpitaux d'Etat ou cliniques privées existent en Guinée ; que les hôpitaux Donka et Ignace Deen disposent de tous les services y compris celui de santé psychiatrique (...) que dans toutes les communes il existe des centres de santé ; que de plus il n'y a aucune difficulté d'approvisionnement en médicaments car le pays dispose d'un grand nombre de pharmacies ; que l'ensemble de ces éléments démontre le sérieux et les capacités des institutions de santé en Guinée, qui sont capables de traiter la majorité des maladies courantes, en particulier psychiatriques (...) " ; que Mme B...se prévaut d'un rapport de l'organisation suisse d'aides aux réfugiés relevant l'absence de prise en charge financière des soins en matière de santé mentale dans ce pays, et estimant que " les soins dispensés dans les différentes structures disponibles [en République de Guinée] ne peuvent être comparés aux standards européens " ; que toutefois, cette circonstance à la supposer établie, n'est pas de nature à démontrer l'absence de disponibilité d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, le préfet de l'Isère a pu considérer que nonobstant l'avis du médecin de l'agence régionale de santé qui, au demeurant, ne le lie pas, un traitement approprié à la pathologie de Mme B... était disponible en République de Guinée ; qu'il ne ressort d'ailleurs d'aucune pièce du dossier que son retour en République de Guinée entraînerait une aggravation de son état de santé ; que, par suite, le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé son refus du 30 mars 2015 de délivrer un titre de séjour à Mme B... au motif que sa décision méconnaîtrait les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant qu'il a lieu, pour la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme B..., en première instance ;

Sur la décision de refus de délivrance de titre de séjour :

8. Considérant, en premier lieu, que la décision susmentionnée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est ainsi suffisamment motivée, alors même qu'elle ne précise pas la nature des soins nécessités par l'état de santé de Mme B..., en vertu du respect du secret médical, le préfet n'étant pas tenu de mentionner la pathologie dont souffre l'intéressée quand bien même celle-ci lui aurait été dévoilée par le demandeur ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que, pour refuser le 30 mars 2015 de délivrer le titre de séjour sollicité par Mme B... sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de l'Isère s'est notamment appuyé sur l'avis rendu le 12 février 2014 par le médecin de l'agence régionale de santé ; que ni les dispositions précitées, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire ne prévoient de délai maximal entre l'émission de l'avis émis par le médecin désigné à cet effet et l'intervention de la décision de refus de titre de séjour prise par l'autorité administrative, à peine de caducité de cet avis ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de Mme B... ou les conditions de traitement de sa pathologie auraient évolué entre la date à laquelle le médecin de l'agence régionale de santé s'est prononcé et la date de la décision de refus, d'une manière susceptible de remettre en cause l'analyse médicale du médecin de l'agence régionale de santé ; qu'il n'est pas davantage établi qu'un traitement approprié à son état de santé ne serait pas disponible dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que compte tenu de l'ancienneté de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, la décision attaquée serait entachée d'irrégularité ;

10. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " (...) dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. (...) " ; qu'il incombe au préfet de prendre en considération les modalités d'exécution d'une éventuelle mesure d'éloignement dès le stade de l'examen d'une demande de titre de séjour présentée sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile afin de disposer d'une information complète sur l'état de santé de l'étranger, y compris sur sa capacité à voyager sans risque à destination de son pays d'origine ; que si le médecin de l'agence régionale de santé, qui n'est pas tenu de le faire, ne s'est pas prononcé sur le point de savoir si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine, il appartient au préfet d'examiner cette question, dès lors qu'il estime qu'un traitement approprié existe dans ce pays et qu'il ressort des éléments du dossier qui lui a été soumis que l'état de santé de l'étranger malade suscite des interrogations sur sa capacité à supporter le voyage vers son pays d'origine ; que le juge lorsque l'état de santé de l'étranger est susceptible à faire obstacle à son éloignement vers son pays d'origine au regard des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, se détermine au vu des échanges contradictoires entre les parties ;

11. Considérant que le médecin de l'agence régionale de santé, dont le nom, le prénom et la qualité figure sur l'avis contrairement à ce que soutient Mme B..., ayant estimé qu'aucun traitement approprié n'était disponible dans son pays d'origine ne s'est pas prononcé sur sa capacité à voyager sans risque vers celui-ci ; que, toutefois, cette circonstance n'est pas de nature à entacher la décision attaquée d'illégalité dès lors qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que son état de santé suscitait des interrogations sur sa capacité à voyager sans risque vers son pays d'origine ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

12. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 (...) " ; que le préfet n'est cependant tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions de délivrance du titre de séjour sollicité ; qu'il résulte de ce qui précède que Mme B... ne pouvait prétendre de plein droit à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet n'a commis aucune irrégularité en s'abstenant de saisir la commission du titre de séjour ;

13. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

14. Considérant que Mme B... soutient avoir fui son pays à la suite des mauvais traitements infligés par son cousin à qui elle a été mariée de force ; qu'elle est entrée en France le 12 décembre 2011 sous couvert de son passeport revêtu d'un visa de court séjour valable trente jours ; qu'elle a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile le 3 avril 2012 ; que par décision du 11 décembre 2013, la Cour nationale du droit d'asile a confirmé le rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 14 juin 2013 ; qu'à la suite de ces décisions défavorables, elle a sollicité, par voie postale, la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade le 2 janvier 2014, demande qui a fait l'objet d'un refus le 10 février 2014 ; qu'elle s'est présentée en préfecture le 28 janvier 2014 pour solliciter la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade ; que cette demande a fait l'objet du refus attaqué du 30 mars 2015 après que le médecin de l'agence régionale de santé eût rendu son avis le 12 février 2014 ; que, toutefois, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, alors que Mme B... n'a pas d'attaches familiales en France, en décidant de refuser de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de l'Isère n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, ni méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ; que Mme B... s'étant vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, elle entrait dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

16. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé, que Mme B... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

17. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) " ;

18. Considérant qu'en l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de Mme B... ferait obstacle à son éloignement vers son pays d'origine, ni qu'elle n'était pas, à la date de la décision attaquée, en capacité de voyager sans risque vers son pays d'origine ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait méconnu les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni qu'il aurait entaché sa décision d'irrégularité en s'abstenant d'interroger le médecin de l'agence régionale de santé sur sa capacité à voyager sans risque vers la République de Guinée ;

19. Considérant, en troisième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, la décision obligeant Mme B... à quitter le territoire français n'a pas été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 30 mars 2015 refusant à Mme B... la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination, et lui a enjoint de délivrer à Mme B...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois et dans l'attente de la mettre en possession d'une autorisation provisoire au séjour, en condamnant l'Etat à verser une somme de 800 euros à Me A...son conseil en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1505049 du 10 novembre 2015 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : La demande de Mme B... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B...et au ministre de l'intérieur. Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2017, à laquelle siégeaient :

Mme Mear, président,

Mme Terrade, premier conseiller,

Mme Vinet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juillet 2017.

N°15LY03950 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03950
Date de la décision : 11/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEAR
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TERRADE
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : HUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-07-11;15ly03950 ?
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