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11/05/2017 | FRANCE | N°15LY02999

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 11 mai 2017, 15LY02999


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme J...I..., M. B...I..., M. H...I...et M. A...-O... I...ont demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner le centre hospitalier de Montceau-les-Mines à leur verser une somme totale de 134 000 euros en réparation de leur préjudice d'affection lié au décès de Mme F...I...dans cet établissement.

La caisse primaire d'assurance maladie de Saône-et-Loire a demandé au tribunal administratif de Dijon la condamnation du centre hospitalier de Montceau-les-Mines a lui rembourser la somme de 7 039,1

8 euros au titre de ses débours ainsi que le paiement de l'indemnité forfaitai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme J...I..., M. B...I..., M. H...I...et M. A...-O... I...ont demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner le centre hospitalier de Montceau-les-Mines à leur verser une somme totale de 134 000 euros en réparation de leur préjudice d'affection lié au décès de Mme F...I...dans cet établissement.

La caisse primaire d'assurance maladie de Saône-et-Loire a demandé au tribunal administratif de Dijon la condamnation du centre hospitalier de Montceau-les-Mines a lui rembourser la somme de 7 039,18 euros au titre de ses débours ainsi que le paiement de l'indemnité forfaitaire.

Par un jugement n° 1402595 du 25 juin 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande des consorts I...et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Saône-et-Loire.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 27 août 2015, Mme J...I..., M. B...I...et M. H...I..., représentés par MeK..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 25 juin 2015 ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Montceau-le-Mines à verser une indemnité totale de 134 000 euros en réparation de leurs préjudices ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Montceau-les-Mines une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent :

- que le centre hospitalier de Montceau-les-Mines a commis des négligences dans la prise en charge de leur mère qui ont conduit au décès de celle-ci et qu'il a également commis des négligences dans la communication avec la famille ;

- que le décès prématuré de Mme F...I...leur a causé un préjudice d'affection, qui doit être évalué à hauteur de 30 000 pour leur père, de 20 000 euros pour chacun des quatre enfants et de 24 000 pour les petits-enfants.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 novembre 2015, le centre hospitalier de Montceau-les-Mines, représenté par MeN..., conclut au rejet de la requête, au rejet de la demande de la caisse primaire d'assurance maladie et demande à la cour de mettre à la charge des consorts I...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir :

- qu'il n'a commis aucun manquement dans la prise en charge de MmeI... ;

- qu'à supposer qu'il ait commis des manquements dans sa communication avec la famille de la patiente, de tels manquements sont sans lien avec le décès de la patiente ;

- que les montants demandés sont nettement supérieurs à ceux habituellement alloués dans la jurisprudence.

Par une lettre du 4 décembre 2015, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de relever d'office l'irrégularité du jugement, à défaut de mise en cause de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales par le tribunal administratif de Dijon dès lors que le décès est susceptible d'avoir été causé par une infection nosocomiale.

Par un mémoire en défense enregistré le 8 février 2016, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représenté par MeL..., conclut :

1°) à titre principal, au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, à l'organisation d'une expertise contradictoire ;

3°) à titre infiniment subsidiaire, à la réduction des indemnités allouées à de plus justes proportions.

Il fait valoir :

- à titre principal, que la requête des consorts I...est irrecevable car ils se bornent à reproduire leurs écritures de première instance ;

- qu'ils ne démontrent pas l'existence d'un lien entre le décès de Mme F...I...et une éventuelle infection nosocomiale ;

- à titre subsidiaire, qu'il y a lieu d'organiser une nouvelle expertise, dès lors que l'expertise du Dr D...n'a pas été rendu à son contradictoire et que, par ailleurs, ce rapport, particulièrement succinct et lacunaire, ne se prononce pas sur l'existence d'une infection nosocomiale ;

- à titre infiniment subsidiaire, que l'époux de MmeI..., l'un de ses quatre enfants et ses petits-enfants ne sont pas partie à l'instance et ne peuvent dès lors prétendre à aucune indemnisation ;

- qu'en vertu de ses propres barèmes, l'époux de Mme I...peut prétendre à une somme de 25 000 euros, ses enfants à une somme de 6 500 euros et ses petits-enfants à une somme de 4 500 euros.

Par un nouveau mémoire enregistré le 21 décembre 2016, le centre hospitalier de Montceau-les-Mines conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens.

Il soutient en outre qu'une première expertise, réalisée au contradictoire des parties, a exclu sa responsabilité et qu'il n'y a donc pas lieu de l'attraire à une nouvelle opération d'expertise.

Par un mémoire en réplique enregistré le 30 janvier 2017, les consorts I...concluent aux mêmes fins par les mêmes moyens.

Par une lettre du 5 avril 2017, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de relever d'office l'irrecevabilité des conclusions présentées par Mme J...I..., M. B...I...et M. H... I...au nom de leur père, M. A...I..., et de leur frère, M. A...-O...I....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience du 20 avril 2017.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Beytout, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public.

1. Considérant que, le 3 novembre 2010, à 19 h 35, Mme F...I...a été admise en urgence au centre hospitalier de Montceau-les-Mines des suites d'une tentative d'autolyse médicamenteuse par prise de 30 comprimés de Valium ; qu'elle a été transférée dans le service de cardiologie ; que, les 7 et 8 novembre 2010, une fièvre à 38° a été notée ; que le 9 novembre 2010, vers 18 h 30, Mme F...I...a été admise en réanimation où elle est décédée à 22 h ; que, le 27 janvier 2011, dans le cadre de la commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge (CRUQ), Mme J...I...et MM. B...et H...I..., enfants de Mme F...I..., ont rencontré le DrE..., médiateur médical de la CRUQ et M.M..., médiateur non médical de la CRUQ ; que, le 9 novembre 2012, le centre hospitalier de Montceau-les-Mines a informé les consorts I...que la compagnie Axa entreprises, assureur du centre hospitalier, proposait une expertise amiable et contradictoire, avec nomination d'un médecin expert aux fins de permettre l'analyse des éventuels manquements allégués par les requérants ; que les consorts I...ont accepté cette proposition le 19 novembre 2012 ; que l'expert désigné, le Dr G...D..., a remis son rapport d'expertise le 11 mars 2014 ; que Mme J...I..., M. B...I..., M. H...I...et M. A...-O... I...ont demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner le centre hospitalier de Montceau-les-Mines à leur verser une somme totale de 134 000 euros en réparation de leur préjudice d'affection lié au décès de Mme F...I...dans cet établissement ; que par la présente requête, Mme J...I..., M. B...I...et M. H... I...relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Dijon du 25 juin 2015 rejetant leur demande ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête par l'ONIAM :

2. Considérant que les consorts I...ont présenté, dans le délai de recours, devant la cour, une requête d'appel qui ne constitue pas la seule reproduction littérale de leur mémoire de première instance mais contient l'exposé de faits et moyens, ainsi que l'énoncé de conclusions, conformément à l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; qu'une telle motivation répond aux conditions posées par l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée du défaut de motivation opposée par l'ONIAM ne peut être accueillie ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation présentées par les consortsI... :

3. Considérant que si, dans son rapport d'expertise, le Dr D...semble considérer que le décès de la patiente est dû à un choc septique, il ne donne aucune indication sur l'origine de cette infection, les hémocultures réalisées avant mise sous antibiotique étant demeurées stériles selon lui ; que les requérants soutiennent, quant à eux, sans être contredits, que les hémocultures étaient positives à la bactérie anaérobie fusobactérium nucleatum dite invasive, adhérente et inflammatoire ; qu'en outre, le rapport d'expertise du Dr D...ne permet pas de déterminer si le centre hospitalier de Montceau-les-Mines a mis en oeuvre les moyens adéquats pour diagnostiquer et traiter cette infection ; qu'ainsi, l'état du dossier ne permet pas à la cour de se prononcer sur l'existence d'une infection nosocomiale, d'un lien de causalité entre cette éventuelle infection et le décès de MmeI..., ni sur l'existence de manquements du centre hospitalier aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales ; que dès lors, il y a lieu d'ordonner, avant-dire droit, une expertise aux fins précisées ci-après ;

DECIDE :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur la requête des consortsI..., procédé à une expertise, par un seul expert en présence de l'ONIAM, du centre hospitalier de Montceau-les-Mines et de la caisse primaire d'assurance maladie de Saône-et-Loire. L'expert aura pour mission :

- après s'être fait communiquer le dossier médical de MmeI..., de décrire les conditions dans lesquelles elle a été prise en charge au centre hospitalier de Montceau-les-Mines, du 3 au 9 novembre 2011 ; de décrire les examens et analyses biologiques réalisés, les soins prodigués, les traitements prescrits au cours de son hospitalisation ;

- d'indiquer s'il existe un lien entre les conditions de la prise en charge de Mme I..., la survenue d'une infection et son décès, en indiquant la nature du germe pathogène, le moment où l'infection a pu se déclarer, et de déterminer, d'une part, si elle était présente ou en incubation au début de sa prise en charge par le centre hospitalier de Montceau-les-Mines ou si cette infection a pu être contractée au cours ou au décours de l'une ou l'autre de ces prises en charge, et d'autre part, si des manquements aux règles de l'art ont été commis par les différents intervenants, tant dans la prise en charge initiale de la patiente que dans la recherche d'une infection et dans la prise en charge de celle-ci, en particulier si des manquements du centre hospitalier aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales peuvent être relevés, en indiquant si ces éventuels manquements ont fait perdre une chance à MmeI..., compte tenu de son état initial, d'éviter un décès et dans quelle proportion.

Article 2 : L'expert sera désigné par le président de la cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il ne pourra recourir à un sapiteur sans l'autorisation préalable du président de la cour.

Article 3 : Préalablement à toute opération, l'expert prêtera serment dans les formes prévues à l'article R. 621-3 du code de justice administrative.

Article 4 : L'expert avertira les parties conformément aux dispositions de l'article R. 621-7 du code de justice administrative.

Article 5 : L'expert communiquera un pré-rapport aux parties, en vue d'éventuelles observations, avant l'établissement de son rapport définitif. Il déposera son rapport au greffe en deux exemplaires.

Article 6 : Des copies de son rapport seront notifiées par l'expert aux parties. Avec leur accord, cette notification pourra s'opérer sous forme électronique. L'expert justifiera auprès de la cour de la date de réception de son rapport par les parties.

Article 7 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à MmeJ... I..., à M.B... I..., à M. H... I..., au centre hospitalier de Montceau-les-Mines, à la caisse primaire d'assurance maladie de Côte d'Or et à l'Office national d'indemnisation des infections nosocomiales, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

Délibéré après l'audience du 20 avril 2017 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

Mme C...et Mme Beytout, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 11 mai 2017.

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N° 15LY02999


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