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06/04/2017 | FRANCE | N°16LY02356

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 06 avril 2017, 16LY02356


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 3 juillet 2015 par lesquelles le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office.

Par un jugement n° 1507386 du 26 avril 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête

enregistrée le 9 juillet 2016, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 3 juillet 2015 par lesquelles le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office.

Par un jugement n° 1507386 du 26 avril 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 juillet 2016, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 26 avril 2016 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du préfet du Rhône du 3 juillet 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil, à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a omis de censurer l'erreur de fait et le défaut d'examen particulier entachant le refus de séjour ;

- le refus de titre de séjour méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; les premiers juges n'ont pas répondu à l'argument tiré du défaut de justification du changement de position de l'administration ;

- le refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le refus de séjour opposé au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- la mesure d'éloignement méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire enregistré le 30 septembre 2016, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 15 juin 2016.

Les parties ont été averties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, par courrier du 17 février 2017, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions contestant l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi, compte tenu de la délivrance à M. B...d'un récépissé de demande de titre de séjour, qui a implicitement mais nécessairement abrogé la mesure d'éloignement dont il faisait l'objet.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Samson-Dye a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.B..., ressortissant de la République Démocratique du Congo, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 3 juillet 2015 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et désignation du pays de renvoi ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, postérieurement à l'enregistrement de sa requête, M. B...a obtenu un récépissé de demande de titre de séjour qui a implicitement mais nécessairement abrogé la mesure d'éloignement dont il faisait l'objet, et qui n'avait pas été exécutée ; que, par suite, il n'y a pas lieu pour la cour de statuer sur les conclusions relatives à ces décisions ;

Sur la régularité du jugement :

3. Considérant que, pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par le refus de titre de séjour, le tribunal a rappelé la teneur de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 14 novembre 2013, estimant qu'un défaut de prise en charge médicale de M. B... ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'un traitement approprié existait dans son pays d'origine, vers lequel il peut voyager sans risque, avant d'ajouter que les deux certificats médicaux du docteur Balais en date du 23 août 2011 et du 29 mai 2015, produits par l'intéressé pour contester cet avis, étaient peu circonstanciés et se limitaient à énumérer les traitements suivis par l'intéressé ; que les premiers juges, qui n'avaient pas à répondre à l'ensemble des arguments invoqués par N. B...au soutien de ce moyen, ont ainsi, ce faisant, suffisamment motivé leur jugement ; que, dans ces conditions, la circonstance que les premiers juges n'ont pas répondu à l'argument tiré de ce que la position du médecin de l'agence régionale de santé et du préfet a évolué quant à son droit au séjour au regard de son état de santé au fil du temps est sans incidence sur la régularité du jugement ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de la rédaction même du refus de titre de séjour litigieux que l'administration a procédé à un examen particulier des circonstances de l'espèce ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) " ;

6. Considérant que, par avis du 14 novembre 2013, le médecin inspecteur de l'agence régionale de santé a estimé que, si l'état de santé de M. B...nécessitait une prise en charge médicale, un défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'un traitement existait dans le pays dont il est originaire ; que le préfet du Rhône s'est expressément approprié ces deux motifs pour refuser de renouveler le titre de séjour dont bénéficiait l'intéressé en raison de son état de santé ;

7. Considérant que la circonstance que M. B...avait obtenu antérieurement un titre de séjour eu égard à son état de santé ne saurait suffire à contester le bien-fondé du dernier avis du médecin inspecteur ; que, pour tenter de renverser la présomption résultant de cet avis, le requérant s'est borné à produire, devant les premiers juges, une attestation d'un psychiatre datée de mai 2015, mentionnant la nécessité de poursuivre les soins, sans préciser la gravité des conséquences d'un défaut de soins, et indiquant que son auteur ignore si les soins sont disponibles dans le pays d'origine, ainsi qu'un certificat de ce même praticien daté de 2011, dont rien ne démontre qu'il correspondrait toujours à la situation de l'intéressé à la date des décisions litigieuses ; que ni ces documents, ni le certificat du 6 juin 2016 produit en appel, qui n'évoque pas les conséquences d'un défaut de soin et ne comporte pas d'argumentation détaillée quant à la disponibilité de traitements appropriés, ne sont suffisants pour remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, et le bien-fondé des motifs retenus par le préfet ; qu'il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que les troubles psychiatriques dont est atteint M. B... auraient effectivement et directement pour origine des évènements traumatisants vécus dans son pays d'origine ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

9. Considérant qu'il n'est pas contesté que M. B...réside en France depuis 2003 ; qu'il a bénéficié, à compter de décembre 2011, d'une carte de séjour temporaire en raison de son état de santé, renouvelée jusqu'à novembre 2013, puis de récépissés délivrés suite à sa demande de renouvellement de son titre de séjour ; qu'il exerce une activité professionnelle dans une fonderie, où il est salarié depuis mars 2012, et qu'il dispose d'un logement stable ; que, cependant, M. B...a passé la majeure partie de son existence dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 33 ans, et où il a nécessairement conservé des attaches, alors même que certains des membres de sa famille seraient décédés ou auraient quitté ce pays ; que, s'il évoque une relation avec une compatriote bénéficiaire du statut de réfugié et titulaire d'une carte de résident, avec laquelle il aurait entrepris des démarches de procréation médicalement assistée, les pièces du dossier sont insuffisantes pour tenir pour établie l'existence, à la date des décisions litigieuses du 3 juillet 2015, d'une relation stable et durable, alors qu'il n'apparaît pas que l'intéressé en aurait fait état devant la commission du titre de séjour qui l'avait entendu le 2 juin 2015 ; que, par ailleurs, ses allégations sur l'impossibilité de mener une vie familiale normale dans son pays d'origine en raison de risques de persécution ne sont pas étayés d'éléments suffisamment probants ; qu'ainsi qu'il a été dit, son état de santé ne fait pas obstacle à ce qu'il retourne dans son pays d'origine ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, cette décision n'est pas davantage entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; que, dans ces conditions, alors même que la rédaction du refus de séjour mentionnant l'absence de vie privée ancienne en France et l'absence d'insertion et de justification des conditions d'existence est erronée, cette erreur est sans incidence sur la légalité du refus de titre de séjour ;

10. Considérant, en quatrième lieu, qu'au regard de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'il n'existait pas de circonstances humanitaires ou exceptionnelles justifiant qu'il soit admis au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du refus de titre de séjour ; que ses conclusions aux fins de d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit accordée sur ce fondement au conseil de M.B..., ce dernier étant partie perdante ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. B...dirigées contre les décisions du préfet du Rhône du 3 juillet 2015 portant obligation de quitter le territoire français et désignation du pays de renvoi.

Article 2 : Le surplus des conclusions de M. B...est rejeté.

Article 3: Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2017 à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 avril 2017.

6

N° 16LY02356


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY02356
Date de la décision : 06/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : RODRIGUES

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-04-06;16ly02356 ?
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