Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 27 janvier 2014 par laquelle le président de la communauté de communes du Pays du Grésivaudan l'a licencié pour insuffisance professionnelle à compter du 23 mai 2014 et de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1401242 du 6 octobre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 27 janvier 2014 et mis à la charge de la communauté de communes du Pays du Grésivaudan le versement à M. A... de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 14 décembre 2015, et des mémoires complémentaires, enregistrés le 21 avril 2016 et le 9 septembre 2016, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la communauté de communes du Pays du Grésivaudan, représentée par la SCP Fessler Jorquera Cavailles, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 6 octobre 2015 ;
2°) de rejeter la demande de M. A... ;
3°) de mettre à la charge de M. A... le versement d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que l'insuffisance professionnelle de M. A...est établie au regard de ses écarts de comportement et des dysfonctionnements qui ont affecté le service dont il était responsable.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2016, et des mémoires complémentaires, enregistrés le 18 mai 2016 et le 30 juin 2016, M. C... A..., représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la communauté de communes du Pays du Grésivaudan sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- la requête est irrecevable sauf à ce que la communauté de communes établisse la date à laquelle lui a été notifié le jugement ;
- la décision en litige a été signée par une autorité incompétente ;
- l'insuffisance professionnelle n'est pas établie ;
- son licenciement n'a pas été motivé dans l'intérêt du service mais en considération de sa personne ;
- la décision de le licencier est entachée d'erreur d'appréciation ;
- la collectivité n'a pu légalement fonder sa décision de le licencier sur des faits ayant déjà donné lieu à sanction.
Un mémoire, enregistré le 7 mars 2017 et présenté pour la communauté de communes du Pays du Grésivaudan, n'a pas été communiqué en application de l'article R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- le décret n 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller,
- les conclusions de M. Marc Clément, rapporteur public,
- et les observations de Me B... pour la communauté de communes du Pays du Gresivaudan, ainsi que celles de Me D..., pour M.A... ;
1. Considérant que M. C... A..., recruté sous contrat à durée indéterminée le 1er janvier 2010 par la communauté de communes du Pays du Grésivaudan, exerçait en qualité de responsable de la gestion des ordures ménagères ; que le président de la communauté de communes, par décision du 27 janvier 2014, a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle ; que la communauté de communes du Pays du Grésivaudan relève appel du jugement du 6 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision et mis à sa charge une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Sur la légalité de la décision du 27 janvier 2014 :
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la direction de la gestion des déchets de la communauté de communes du Pays du Grésivaudan, qui comporte vingt-neuf communes regroupant soixante-sept mille habitants, gère cinq déchetteries et compte cinquante-cinq agents, résulte de la fusion du syndicat intercommunal de collecte et d'incinération des ordures ménagères du Grésivaudan (SIOMG), dont le siège se situait à Crolles, et du syndicat intercommunal pour le ramassage et le transport des ordures ménagères (SIRTOM), situé à Montbonnot, chargé de la collecte des déchets des treize mille habitants de trois communes et où M. A... a exercé ses fonctions de 2002 à 2009 ; que, pour prononcer son licenciement pour insuffisance professionnelle, le président de la communauté de communes a estimé qu'il avait encouragé un fonctionnement autarcique de son service, qu'il s'était montré incapable de collaborer avec les agents affectés à sa direction, qu'il n'avait pas rempli l'objectif d'harmonisation du fonctionnement des deux sites de Montbonnot et de Crolles, qu'il ne s'était pas impliqué dans le dossier "Points d'apport volontaires" et que la gestion de son service était défectueuse en raison de différentes carences de sa part ;
3. Considérant, en premier lieu, que M. A...fait valoir que le service administratif de la direction confiée à sa gestion a connu une situation de sous-effectif chronique de 2010 à 2014, 2,8 "équivalents temps plein" y étant affectés en moyenne, et que son employeur ne lui a pas donné les moyens humains nécessaires pour accomplir sa tâche ; que, s'il ressort des pièces produites par la communauté de communes du Pays du Grésivaudan qu'elle a affecté trois agents à ce service, il n'en ressort pas que cette direction aurait été, comme elle l'allègue, "normalement pourvue en personnel", alors qu'il n'est pas contesté que le même service comptait en 2015, un an après le départ de M. A..., 13,5 "équivalents temps plein" ; que, dans ces conditions, à supposer même que des difficultés relationnelles soient apparues entre M. A... et certains des agents qu'elle lui avait affectés, la communauté de communes, qui ne saurait justifier cette situation de sous-effectif par le fait que M. A... ne lui aurait pas fourni d'organigramme détaillé de sa direction, n'est pas fondée à soutenir que ce dernier serait à l'origine d'une gestion administrative défectueuse de son service ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que, si la communauté de communes du Pays du Grésivaudan relève que M. A... fonctionne en autarcie, sans coopérer avec les directions administratives transversales, et notamment celle des ressources humaines, qu'il procéderait à des changements de poste inexpliqués et assurerait une "gestion catastrophique des périodes de congés", elle ne produit pas la moindre pièce à l'appui de ces allégations ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'il appartenait à la communauté de communes, si elle estimait que la circonstance que l'épouse de M. A... soit son assistante de direction était de nature à nuire au bon fonctionnement du service, notamment en raison de leurs prises de congé concomitantes, de mettre un terme à cette situation ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que, s'il ressort des pièces du dossier qu'existent entre les sites de Montbonnot et de Crolles des manières de travailler différentes, la communauté de communes n'établit pas que, comme elle l'allègue, M. A... aurait refusé ou se serait révélé incapable de mettre en place un système de collecte unifié, ni que cette situation aurait généré "des disparités en termes de quantité de travail, de distances parcourues par les agents, de tonnages récoltés" ; qu'elle ne démontre pas qu'il aurait maintenu les tournées de ramassage en l'état alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a affecté une voire deux équipes initialement rattachées au site de Crolles à celui de Montbonnot ;
7. Considérant, en cinquième lieu, que la communauté de communes du Pays du Grésivaudan n'établit pas que M. A... aurait fait preuve d'inertie dans sa gestion du dossier des "Points d'apport volontaires" ou qu'il serait responsable du manque de développement de ce projet, alors qu'il ressort des pièces du dossier que ce mode de collecte, consistant, pour les usagers, à déposer eux-mêmes les matériaux qu'ils ont préalablement triés sur des sites aménagés par la collectivité, fait l'objet de fortes oppositions de la population voire de certains élus ;
8. Considérant, en sixième lieu, que le refus de M. A... d'établir un planning mensuel de travail des équipes de collecte, à le supposer établi, n'est pas de nature, en tant que tel, à caractériser une insuffisance professionnelle, alors, au demeurant, que la communauté de communes ne démontre pas qu'elle aurait en vain sollicité à plusieurs reprises la production par l'intéressé de tels plannings ;
9. Considérant, en septième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le retard pris dans le suivi et le renouvellement des contrats des prestataires de la direction des déchets incomberait exclusivement à M. A... ;
10. Considérant, en huitième lieu, que les allégations de la communauté de communes relatives à la gestion "souvent partiale" des ressources humaines par M. A... et à "certains événements récents" où "tel agent se voit réprimandé (...) alors que d'autres ne sont pas inquiétés", insuffisamment précises et non assorties d'éléments de preuve, ne permettent pas davantage de caractériser l'insuffisance dont aurait fait preuve dans l'exercice de ses fonctions M. A..., lequel produit de nombreuses attestations en sa faveur, émanant notamment d'agents de collecte ;
11. Considérant, en neuvième et dernier lieu, que le "comportement souvent inadapté" imputé à M. A... par la direction générale de la communauté de communes, n'est pas établi par cette collectivité qui ne fait état d'aucun exemple précis, et n'est pas corroboré par les nombreuses attestations établies en faveur de l'intéressé, notamment par des élus, qui soulignent son efficacité et sa compétence ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la communauté de communes du Pays du Grésivaudan, qui n'établit pas que M. A... serait à l'origine de dysfonctionnements répétés portant gravement atteinte à la bonne marche du service, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision de son président du 27 janvier 2014 prononçant le licenciement pour insuffisance professionnelle de M. A... ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la requérante de la somme qu'elle demande au titre des frais non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la communauté de communes du Pays du Grésivaudan le versement d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la communauté de communes du Pays du Grésivaudan est rejetée.
Article 2 : La communauté de communes du Pays du Grésivaudan versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes du Pays du Grésivaudan et à M. C...A....
Délibéré après l'audience du 14 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Hervé Drouet, président de la formation de jugement,
- Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller,
- M. Samuel Deliancourt, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 avril 2017.
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N° 15LY03937
mg